[20] (20a) ὅτι μουσικὴ φαύλη καὶ ᾄσματα πονηρὰ καὶ λόγοι
μοχθηρὰς ὑποθέσεις λαμβάνοντες ἀκόλαστα ποιοῦσιν ἤθη καὶ βίους ἀνάνδρους
καὶ ἀνθρώπους τρυφὴν καὶ μαλακίαν καὶ γυναικοκρασίαν ἀγαπῶντας εἵματά τ´
ἐξημοιβὰ λοετρά τε θερμὰ καὶ εὐνάς.
Διὸ καὶ τὸν Ὀδυσσέα τῷ κιθαρῳδῷ προστάττοντα πεποίηκεν
Ἀλλ´ ἄγε δὴ μετάβηθι καὶ ἵππου κόσμον ἄεισον,
καλῶς ὑφηγούμενος τὸ παρὰ τῶν φρονίμων καὶ νοῦν ἐχόντων χρῆναι λαμβάνειν
τοὺς μουσικοὺς καὶ ποιητικοὺς τὰς ὑποθέσεις. Ἐν δὲ τοῖς περὶ τῆς (20b)
Ἥρας ἄριστα τὴν ἀπὸ φαρμάκων καὶ γοητείας καὶ μετὰ δόλου πρὸς τοὺς ἄνδρας
ὁμιλίαν καὶ χάριν ἔδειξεν οὐ μόνον ἐφήμερον καὶ ἁψίκορον καὶ ἀβέβαιον
οὖσαν, ἀλλὰ καὶ μεταβάλλουσαν εἰς ἔχθραν καὶ ὀργήν, ὅταν τὰ τῆς ἡδονῆς
ἀπομαρανθῇ. Τοιαῦτα γὰρ ὁ Ζεὺς ἀπειλεῖ καὶ λέγει πρὸς αὐτὴν
Ὄφρα ἴδῃς ἤν τοι χραίσμῃ φιλότης τε καὶ εὐνή,
ἣν ἐμίγης ἐλθοῦσα θεῶν ἄπο καί μ´ ἀπάτησας.
Ἡ γὰρ τῶν φαύλων διάθεσις ἔργων καὶ μίμησις ἂν προσαποδῷ τὴν συμβαίνουσαν
αἰσχύνην καὶ βλάβην τοῖς ἐργασαμένοις, ὠφέλησεν οὐκ ἔβλαψε τὸν ἀκροώμενον.
Οἱ γοῦν φιλόσοφοι παραδείγμασι χρῶνται, (20c) νουθετοῦντες καὶ παιδεύοντες
ἐξ ὑποκειμένων· οἱ δὲ ποιηταὶ ταὐτὰ ποιοῦσι πλάττοντες αὐτοὶ πράγματα καὶ
μυθολογοῦντες.
Ὁ μὲν οὖν Μελάνθιος εἴτε παίζων εἴτε σπουδάζων ἔλεγε διασῴζεσθαι τὴν
Ἀθηναίων πόλιν ὑπὸ τῆς τῶν ῥητόρων διχοστασίας καὶ ταραχῆς· οὐ γὰρ
ἀποκλίνειν ἅπαντας εἰς τὸν αὐτὸν τοῖχον, ἀλλὰ γίγνεσθαί τινα τοῦ
βλάπτοντος ἀνθολκὴν ἐν τῇ διαφορᾷ τῶν πολιτευομένων. Αἱ δὲ τῶν ποιητῶν
ὑπεναντιώσεις (20d) πρὸς αὑτοὺς ἀνταναφέρουσαι τὴν πίστιν οὐκ ἐῶσιν
ἰσχυρὰν ῥοπὴν γενέσθαι πρὸς τὸ βλάπτον. ὅπου μὲν οὖν αὐτοῖς τὸ τιθέναι
σύνεγγυς ἐκφανεῖς ποιεῖ τὰς ἀντιλογίας, δεῖ τῷ βελτίονι συνηγορεῖν ὥσπερ
ἐν τούτοις
Πόλλ´, ὦ τέκνον, σφάλλουσιν ἀνθρώπους θεοί.
Τὸ ῥᾷστον εἶπας, αἰτιάσασθαι θεούς.
Καὶ πάλιν
Χρυσοῦ σὲ πλήθει, τούσδε δ´ οὐ χαίρειν χρεών.
Σκαιὸν τὸ πλουτεῖν κἄλλο μηδὲν εἰδέναι
καί
Τί δῆτα θύειν δεῖ σε κατθανούμενον;
Ἄμεινον· οὐδεὶς κάματος εὐσεβεῖν θεούς.
Τὰ γὰρ τοιαῦτα τὰς λύσεις ἔχει προδήλους, ἄν, ὥσπερ εἴρηται, πρὸς τὰ
βελτίονα τῇ κρίσει τοὺς νέους κατευθύνωμεν. Ὅσα δ´ εἴρηται μὲν ἀτόπως
εὐθὺς δ´ οὐ λέλυται, ταῦτα δεῖ τοῖς ἀλλαχόθι πρὸς τοὐναντίον εἰρημένοις
ὑπ´ αὐτῶν ἀνταναιρεῖν, μὴ ἀχθομένους τῷ ποιητῇ μηδὲ χαλεπαίνοντας ἀλλ´ ἐν
ἤθει καὶ μετὰ παιδιᾶς λεγομένοις. (20e) Εὐθύς, εἰ βούλει, πρὸς τὰς
Ὁμηρικὰς τῶν θεῶν ῥίψεις ὑπ´ ἀλλήλων καὶ τρώσεις ὑπ´ ἀνθρώπων καὶ διαφορὰς
καὶ χαλεπότητας
Οἶσθα καὶ ἄλλον μῦθον ἀμείνονα τοῦδε νοῆσαι
καὶ νοεῖς νὴ Δία καὶ λέγεις κρεῖττον ἀλλαχόθι καὶ βέλτιον τὰ τοιαῦτα
Θεοὶ ῥεῖα ζώοντες
καὶ
Τῷ ἔνι τέρπονται μάκαρες θεοὶ ἤματα πάντα
καὶ
(20f) Ὣς γὰρ ἐπεκλώσαντο θεοὶ δειλοῖσι βροτοῖσι,
ζώειν ἀχνυμένοις· αὐτοὶ δέ τ´ ἀκηδέες εἰσίν.
Αὗται γάρ εἰσιν ὑγιαίνουσαι περὶ θεῶν δόξαι καὶ ἀληθεῖς, ἐκεῖνα δὲ
πέπλασται πρὸς ἔκπληξιν ἀνθρώπων. Πάλιν Εὐριπίδου λέγοντος
| [20] (20a) qu'une musique efféminée, des chansons
libres, des entretiens lascifs, portent la corruption dans les mœurs,
énervent les esprits, inspirent aux hommes le goût des délices et des
voluptés, et font aimer, comme dit Homère lui-même :
"Les vêtements lascifs, les bains délicieux,
El le tendre duvet, siége de l'indolence"?
C'est pour cela qu'il fait dire par Ulysse au musicien Démodocus :
"Laisse de tes chansons les airs voluptueux,
Et chante d'Ilion les travaux belliqueux"?
Par là il insinue que les musiciens et les poètes doivent prendre de
personnes sages le sujet de leurs poésies et de leurs chansons. Dans la
fable de (20b) Junon, il nous fait sentir avec art que l'amour que les
femmes inspirent par le seul effet de leurs charmes et de leurs caresses
artificieuses, non seulement est une ardeur passagère bientôt suivie du
dégoût, mais qu'il se change en haine et en aversion lorsqu'une fois la
passion est satisfaite. C'est ce que montrent les menaces de Jupiter à Junon :
"Penses-tu que jamais de perfides délices
Me fassent oublier tes lâches artifices"?
C'est ainsi que la peinture et le récit des mauvaises actions, loin de nuire aux lecteurs, leur deviennent au contraire utiles,
quand on a soin de faire remarquer la honte et le dommage qu'elles
attirent. Les philosophes, pour nous instruire, tirent (20c) leurs
exemples des choses véritables : les poètes produisent le même effet par
des fictions et des exemples dont ils sont eux-mêmes créateurs.
Mélanthius disait, ou sérieusement ou en plaisantant, qu'Athènes devait
son salut aux divisions de ses orateurs : comme ils ne portaient pas tous
leurs efforts du même côté, il se faisait par leur discorde, un
contrepoids qui maintenait la république dans un juste équilibre. Il en
est de même des contradictions qui se trouvent dans les poètes ; (20d)
comme elles balancent la confiance qu'on peut avoir en eux, ils nous
entraînent moins facilement dans leurs fausses opinions. Lors donc qu'en
rapprochant leurs différents passages, on les trouve opposés entre eux, il
faut se ranger au sentiment le plus raisonnable. Par exemple :
"Ah ! trop souvent les dieux, provoquant nos malheurs,
Des nos fautes, mon fils, sont les premiers ailleurs".
A ce passage, opposons celui-ci :
"Souvent, pour s'excuser de leur scélératesse,
Les mortels des dieux même accusent la sagesse.
Dans d'immenses trésors mettez votre bonheur;
Laissez à qui voudra les vertus et l'honneur".
Voici un passage tout contraire :
"Qu'il est bas de n'avoir qu'une vile richesse,
Et de ne posséder ni talent ni sagesse!
Quoi! pour servir les dieux, faut-il se tourmenter? .
Penses-tu par ta mort devoir les honorer?
Je mourrai, s'il le faut; cette mort honorable
N'aura rien à ce prix que de doux et d'aimable".
Il sera facile aux jeunes gens de trouver eux-mêmes la
réponse à ces maximes déraisonnables, si, comme on l'a déjà dit, on forme
leur esprit à discerner ce qu'il y a de meilleur. Ne peut-on pas réfuter
sur-le-champ ces maximes par elles-mêmes? Il faut leur en opposer de
contraires que le poète aura établies en d'autres endroits de ses
ouvrages, sans néanmoins s'en prendre à lui et l'accuser d'inconséquence.
Car il faut toujours supposer que ces contrariétés ne sont de sa part que
des jeux ou des convenances de caractère dans ses personnages. (20e) Quand
Homère nous représente les dieux qui sont blessés par des hommes, ou qui
se renversent les uns les autres dans leurs querelles, nous pouvons lui
dire aussitôt, d'après lui-même :
"Tu pouvais nous tenir des discours plus sensés;
tu le fais même en plusieurs endroits de tes ouvrages, où, parlant des
dieux avec bien plus de décence, tu nous dis :
Jamais d'aucun souci les dieux ne sont troublé?
Des habitants du ciel l'assemblée immortelle
Goûte les fruits heureux d'une paix éternelle".
(20f) "Les malheureux mortels aux chagrins sont livrés;
Mais de plaisirs les dieux sont toujours enivrés".
Voilà les véritables opinions qu'on doit avoir des dieux; les autres ne
sont que des fictions imaginées par les poètes pour charmer ou étonner les
lecteurs. Par exemple, à ces vers d'Euripide .
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