HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales - Sur la manière de lire les poètes

Page 18

  Page 18

[18] ζῳγραφίαν μὲν εἶναι (18a) φθεγγομένην τὴν ποίησιν, ποίησιν δὲ σιγῶσαν τὴν ζῳγραφίαν, ἀλλὰ πρὸς τούτῳ διδάσκωμεν αὐτὸν ὅτι γεγραμμένην σαύραν πίθηκον Θερσίτου πρόσωπον ἰδόντες ἡδόμεθα καὶ θαυμάζομεν οὐχ ὡς καλὸν ἀλλ´ ὡς ὅμοιον. Οὐσίᾳ μὲν γὰρ οὐ δύναται καλὸν γενέσθαι τὸ αἰσχρόν· δὲ μίμησις, ἄν τε περὶ φαῦλον ἄν τε περὶ χρηστὸν ἐφίκηται τῆς ὁμοιότητος, ἐπαινεῖται. Καὶ τοὐναντίον ἂν αἰσχροῦ σώματος εἰκόνα καλὴν παράσχῃ, τὸ πρέπον καὶ τὸ εἰκὸς οὐκ ἀπέδωκεν. Γράφουσι δὲ καὶ πράξεις ἀτόπους ἔνιοι, καθάπερ Τιμόμαχος τὴν Μηδείας τεκνοκτονίαν καὶ Θέων τὴν Ὀρέστου μητροκτονίαν καὶ Παρράσιος τὴν Ὀδυσσέως προσποίητον μανίαν (18b) καὶ Χαιρεφάνης ἀκολάστους ὁμιλίας γυναικῶν πρὸς ἄνδρας. Ἐν οἷς μάλιστα δεῖ τὸν νέον ἐθίζεσθαι, διδασκόμενον ὅτι τὴν πρᾶξιν οὐκ ἐπαινοῦμεν ἧς γέγονεν μίμησις, ἀλλὰ τὴν τέχνην εἰ μεμίμηται προσηκόντως τὸ ὑποκείμενον. Ἐπεὶ τοίνυν καὶ ποιητικὴ πολλάκις ἔργα φαῦλα καὶ πάθη μοχθηρὰ καὶ ἤθη μιμητικῶς ἀπαγγέλλει, δεῖ τὸ θαυμαζόμενον ἐν τούτοις καὶ κατορθούμενον μήτ´ ἀποδέχεσθαι τὸν νέον ὡς ἀληθὲς μήτε δοκιμάζειν ὡς καλόν, ἀλλ´ ἐπαινεῖν μόνον ὡς ἐναρμόττον τῷ ὑποκειμένῳ προσώπῳ καὶ οἰκεῖον. Ὥσπερ γὰρ ὑὸς βοὴν καὶ ψόφον τροχιλίας καὶ πνευμάτων (18c) ῥοῖζον καὶ θαλάττης κτύπον ἀκούοντες ἐνοχλούμεθα καὶ δυσχεραίνομεν, ἂν δέ τις πιθανῶς ταῦτα μιμῆται, καθάπερ Παρμένων τὴν ὗν καὶ Θεόδωρος τὰς τροχιλίας, ἡδόμεθα· καὶ νοσώδη μὲν ἄνθρωπον καὶ ὕπουλον ὡς ἀτερπὲς θέαμα φεύγομεν, τὸν δ´ Ἀριστοφῶντος Φιλοκτήτην καὶ τὴν Σιλανίωνος Ἰοκάστην ὁμοίους φθίνουσι καὶ ἀποθνῄσκουσι πεποιημένους ὁρῶντες χαίρομεν· οὕτως νέος ἀναγιγνώσκων Θερσίτης γελωτοποιὸς Σίσυφος φθορεὺς Βάτραχος πορνοβοσκὸς λέγων (18d) πράττων πεποίηται, διδασκέσθω τὴν μιμουμένην ταῦτα δύναμιν καὶ τέχνην ἐπαινεῖν, ἃς δὲ διαθέσεις καὶ πράξεις μιμεῖται καὶ προβάλλεσθαι καὶ κακίζειν. Οὐ γάρ ἐστι ταὐτὸ τὸ καλὸν καὶ καλῶς τι μιμεῖσθαι. Καλῶς γάρ ἐστι τὸ πρεπόντως καὶ οἰκείως, οἰκεῖα δὲ καὶ πρέποντα τοῖς αἰσχροῖς τὰ αἰσχρά. Καὶ γὰρ αἱ Δαμωνίδα τοῦ χωλοῦ κρηπῖδες, ἃς ἀπολέσας εὔχετο τοῖς τοῦ κλέψαντος ἐναρμόσαι ποσί, φαῦλαι μὲν ἦσαν ἐκείνῳ δ´ ἥρμοττον. Καὶ τὸ Εἴπερ γὰρ ἀδικεῖν χρή, τυραννίδος πέρι κάλλιστον ἀδικεῖν (18e) καὶ τὸ Τοῦ μὲν δικαίου τὴν δόκησιν ἄρνυσο τὰ δ´ ἔργα τοῦ πᾶν δρῶντος· ἔνθα κερδανεῖς καὶ Τάλαντον προίξ. Μὴ λάβω; Ζῆν δ´ ἔστι μοι τάλαντον ὑπεριδόντι; Τεύξομαι δ´ ὕπνου προέμενος; Οὐ δώσω δὲ κἀν Ἅιδου δίκην ὡς ἠσεβηκὼς εἰς τάλαντον ἀργυροῦν; μοχθηροὶ μέν εἰσι λόγοι καὶ ψευδεῖς, Ἐτεοκλεῖ δὲ καὶ Ἰξίονι καὶ τοκογλύφῳ πρεσβύτῃ πρέποντες. Ἂν οὖν ὑπομιμνῄσκωμεν τοὺς παῖδας ὅτι ταῦτ´ οὐκ (18f) ἐπαινοῦντες οὐδὲ δοκιμάζοντες ἀλλ´ ὡς ἄτοπα καὶ φαῦλα φαύλοις καὶ ἀτόποις ἤθεσι καὶ προσώποις περιτιθέντες γράφουσιν, οὐκ ἂν ὑπὸ τῆς δόξης βλάπτοιντο τῶν ποιητῶν. Ἀλλὰ τοὐναντίον πρὸς τὸ πρόσωπον ὑποψία διαβάλλει καὶ τὸ πρᾶγμα καὶ τὸν λόγον, ὡς φαῦλον ὑπὸ φαύλου καὶ λεγόμενον καὶ πραττόμενον. Οἷόν ἐστι καὶ τὸ τῆς συγκοιμήσεως τοῦ Πάριδος ἐκ τῆς μάχης ἀποδράντος. Οὐδένα γὰρ ἄλλον ἀνθρώπων ἡμέρας συγκοιμώμενον γυναικὶ ποιήσας τὸν ἀκόλαστον καὶ μοιχικὸν ἐν αἰσχύνῃ δῆλός ἐστι καὶ ψόγῳ τιθέμενος τὴν τοιαύτην ἀκρασίαν. [18] que la poésie est une (18a) peinture parlante, et la peinture une poésie muette. Il faut, outre cela, leur apprendre que lorsque nous voyons dans un tableau la figure d'un lézard et d'un singe, ou le visage d'un Thersite, le plaisir et même l'admiration que cette vue nous cause ne vient pas de la beauté des objets, mais de leur ressemblance. Ce qui n'est point beau naturellement ne peut jamais le devenir. Mais l'imitation vraie et naturelle d'un objet agréable ou affreux est toujours sûre de nous plaire. Si au contraire la peinture nous représentait un objet hideux sous des traits aimables, elle pécherait contre la convenance et cesserait d'être vraisemblable. Les peintres imitent quelquefois des actions criminelles. Timomachus, par exemple, a peint Médée égorgeant ses enfants ; Théon, Oreste qui poignarde sa mère; Parrhasius, Ulysse contrefaisant le fou, (18b) et Chéréphane, des images lascives. Faisons bien sentir aux jeunes gens que, dans tous ces tableaux, ce n'est point l'action imitée que nous louons, mais l'imitation heureuse que le peintre en a faite. Comme la poésie représente aussi des actions et des mœurs criminelles, il faut qu'ils sachent que dans ces peintures qu'ils admirent, ce n'est pas l'action même qui mérite leur approbation, mais le rapport et la convenance de l'imitation avec l'objet représenté. Par exemple, le cri du cochon, le bruit d'une poulie, le sifflement des vents (18c) et le mugissement des vagues, sont désagréables à entendre. Ils plaisent cependant quand ils sont bien imités, comme faisait Parménon pour le cri du porc, et Théodore pour celui de la poulie. Nous avons horreur d'un malade couvert d'ulcères ; mais nous voyons avec plaisir le Philoctète d' Aristophon, et la Jocaste expirante de Silanion. Un jeune homme donc, en lisant ce que les poètes font dire et faire à Thersite, ce personnage ridicule, au ravisseur Sisyphe, au corrupteur Batrachus, (18d) doit louer l'art du poète imitateur, et détester les actions imitées. Il y a, sans doute, une grande différence entre bien imiter et imiter une bonne action. La bonté de l'imitation consiste dans le rapport et dans la convenance de l'objet imité avec la peinture qu'on en fait. Des objets naturellement hideux doivent être peints sous des couleurs hideuses. Les pantoufles que Démonide avait perdues, et qu'il souhaitait qui fussent bonnes à celui qui les avait volées, étaient d'une forme désagréable ; mais elles allaient aux pieds de Démonide. Dans les passages suivants : "Si l'on peut quelquefois justifier le crime, C'est surtout pour régner qu'il devient légitime. (18e) D'une exacte justice affectez les dehors, Et par là du public gagnez la confiance. Cependant, en secret, faites tous vos efforts Pour voir régner chez vous une heureuse opulence. Pourrai-je d'un talent faire le sacrifice, Et ne pas vivre malheureux ? Cette perle à jamais deviendrait mon supplice; Le paisible sommeil fuirait loin de mes yeux. Et qui sait si Plutus, justement irrité Du mépris de sa bienfaisance, Jusque dans les enfers poursuivant sa vengeance, Ne m'y punirait pas de mon impiété"? toutes ces maximes sont visiblement fausses et pernicieuses, et c'est pour cela même qu'elles conviennent à Étéocle, à Ixion, à un vieux usurier. Prévenons donc les jeunes gens que les poètes eux-mêmes (18f) n'approuvent pas les discours qu'ils rapportent, et qu'ils les attribuent à dessein à des hommes pervers. Alors ils ne se laisseront pas tromper par l'estime qu'ils ont pour les poètes. Au contraire, l'opinion défavorable qu'ils concevront pour la personne qui parle ou qui agit, décréditera dans leur esprit ses paroles ou ses actions. Pâris, dans l'Iliade, après avoir abandonné le champ de bataille, va cacher sa honte dans les bras d'Hélène. Comme le poète ne rapporte d'aucun autre guerrier que de Pâris, homme lascif et adultère, une pareille infamie, il nous montre évidemment par là qu'il le blâme et le condamne.


Recherches | Texte | Lecture | Liste du vocabulaire | Index inverse | Menu | Site de Philippe Remacle |

 
UCL | FLTR | Hodoi Elektronikai | Itinera Electronica | Bibliotheca Classica Selecta (BCS) |
Ingénierie Technologies de l'Information : B. Maroutaeff - C. Ruell - J. Schumacher

Dernière mise à jour : 8/05/2008