[1,9] Οὐκοῦν πρώτη μὲν ἡ τῆς στρατείας ὑπόθεσις
φιλόσοφον τὸν ἄνδρα συνίστησιν, οὐχ ἑαυτῷ τρυφὴν
καὶ πολυτέλειαν ἀλλὰ πᾶσιν ἀνθρώποις ὁμόνοιαν καὶ
εἰρήνην καὶ κοινωνίαν πρὸς ἀλλήλους παρασκευάσαι
διανοηθέντα. δεύτερον δ´ αὐτοῦ καὶ τὰς φωνὰς ἴδωμεν,
ἐπεὶ καὶ τὰ τῶν ἄλλων ἤθη βασιλέων καὶ δυναστῶν μάλιστα
ταῖς φωναῖς αἱ ψυχαὶ προβάλλουσιν. Ἀντίγονος ὁ
γέρων, σοφιστοῦ τινος αὐτῷ σύγγραμμα προσδόντος περὶ
δικαιοσύνης, "ἀβέλτερος εἶ‘ εἶπεν "ὃς ὁρῶν με τὰς ἀλλοτρίας
πόλεις τύπτοντα λέγεις περὶ δικαιοσύνης". Διονύσιος
δ´ ὁ τύραννος ἐκέλευε τοὺς μὲν παῖδας ἀστραγάλοις τοὺς
δ´ ἄνδρας ὅρκοις ἐξαπατᾶν. τοῖς δὲ Σαρδαναπάλου
μνημείοις ἐπιγέγραπται
"ταῦτ´ ἔχω ὅσς´ ἔφαγον καὶ ἐφύβρισα".
τίς οὐκ ἂν εἴποι τῶν ἀποφθεγμάτων τούτων τῷ μὲν
ἐμφαίνεσθαι φιληδονίαν, τῷ δ´ ἀθεότητα, τῷ δ´ ἀδικίαν
καὶ πλεονεξίαν; τῶν δ´ Ἀλεξάνδρου φωνῶν ἂν ἀφέλῃς τὸ
διάδημα καὶ τὸν Ἄμμωνα καὶ τὴν εὐγένειαν, Σωκράτους
ἢ Πλάτωνος ἢ Πυθαγόρου σοι φανοῦνται. μὴ γὰρ ἃς οἱ
ποιηταὶ ταῖς εἰκόσιν αὐτοῦ καὶ τοῖς ἀνδριᾶσι μεγαληγορίας
ἐπεχάραττον, οὐ τῆς μετριότητος ἀλλὰ τῆς δυνάμεως
τῆς Ἀλεξάνδρου στοχαζόμενοι, σκοπῶμεν·
"αὐδασοῦντι δ´ ἔοικεν ὁ χάλκεος εἰς Δία λεύσσων·
Γᾶν ὑπ´ ἐμοὶ τίθεμαι· Ζεῦ, σὺ δ´ Ὄλυμπον ἔχε".
καὶ "Ἀλέξανδρος ἐγὼ Διὸς μὲν υἱός". ταῦτα μὲν οὖν.
ὡς ἔφην, οἱ ποιηταὶ κολακεύοντες αὐτοῦ τὴν τύχην
προσεῖπον· τῶν δ´ ἀληθινῶν ἀποφθεγμάτων Ἀλεξάνδρου
πρῶτον ἄν τις τὰ παιδικὰ διέλθοι. ποδωκέστατος γὰρ
τῶν ἐφ´ ἡλικίας νέων γενόμενος καὶ τῶν ἑταίρων αὐτὸν
ἐπ´ Ὀλύμπια παρορμώντων, ἠρώτησεν εἰ βασιλεῖς
ἀγωνίζονται· τῶν δ´ "οὔ‘ φαμένων ἄδικον εἶπεν εἶναι τὴν
ἅμιλλαν, ἐν ᾗ νικήσει μὲν ἰδιώτας νικηθήσεται δὲ βασιλεύς.
τοῦ δὲ πατρὸς Φιλίππου λόγχῃ τὸν μηρὸν ἐν Τριβαλλοῖς
διαπαρέντος καὶ τὸν μὲν κίνδυνον διαφυγόντος
ἀχθομένου δὲ τῇ χωλότητι, "θάρρει πάτερ‘ ἔφη "καὶ
πρόιθι φαιδρῶς, ἵνα τῆς ἀρετῆς κατὰ βῆμα μνημονεύῃς".
ταῦτ´ οὐκ ἔστι διανοίας φιλοσόφου καὶ διὰ τὸν ἐπὶ τοῖς
καλοῖς ἐνθουσιασμὸν ἤδη τῶν τοῦ σώματος ἐλαττωμάτων
κατεξανισταμένης; πῶς γὰρ αὐτὸν οἴει τοῖς ἰδίοις ἀγάλλεσθαι
τραύμασι, καθ´ ἕκαστον μέρος ἔθνους μνημονεύοντα
καὶ νίκης καὶ πόλεων ἁλισκομένων καὶ βασιλέων
παραδιδόντων, οὐκ ἐγκαλυπτόμενον οὐδὲ κατακρύπτοντα
τὰς οὐλάς, ἀλλ´ ὥσπερ εἰκόνας ἐγκεχαραγμένας ἀρετῆς
καὶ ἀνδραγαθίας περιφέροντα;
| [1,9] La première pensée de son expédition le pose donc à
nos yeux comme un philosophe, qui songe non pas à satisfaire
sa mollesse et son luxe, mais à ménager entre tous
les hommes l'union, la paix et la communauté des biens.
En second lieu, voyons aussi ses paroles. C'est en effet par
les paroles surtout que se révèlent les moeurs et le caractère
des rois et des puissants. Antigone-le-Vieux, comme certain
sophiste lui chantait aux oreilles un traité sur la justice :
«Tu' es bien maladroit, lui dit-il, toi qui, me voyant
porter de grands coups à des cités étrangères, viens me parler
de justice.» Denys le tyran voulait «que l'on trompât les
enfants avec des osselets et les hommes avec des serments".
Sur le tombeau de Sardanapale on lit cette inscription :
"J'ai ce que j'ai mangé, ce que j'ai fait d'excès."
Qui ne conviendrait que ces paroles démontrent chez leurs
auteurs, la première, l'injustice et l'avidité, la deuxième,
le mépris des Dieux, la troisième, un amour démesuré du
plaisir? Qu'aux paroles d'Alexandre, au contraire, vous ôtiez
le diadème, la parenté avec Ammon, la noblesse d'origine,
elles resteront évidemment dignes d'un Socrate, d'un Platon,
d'un Pythagore. Car nous ne devons pas tenir compte
des exagérations que les poètes inscrivaient au bas de ses
portraits et de ses statues; elles avaient en vue sa puissance
et non pas sa modération :
Regardant Jupiter, ce bronze semble dire :
"A toi les cieux, — pour moi, la terre est mon empire."
Ou bien encore:
"Alexandre je suis, le fils de Jupiter."
Ce sont là, comme j'ai dit, des adulations inspirées aux
poètes par la fortune du monarque.
Mais passons en revue les véritables apophthegmes du
héros macédonien, et d'abord ceux de son enfance. Il était de
tous les jeunes gens de son âge le plus léger à la course, et
ses compagnons l'engageaient à en disputer le prix aux jeux
Olympiques. Il demanda si des rois y combattaient: "Non,"
lui fut-il répondu.—"Je verrais donc une inégalité", répliqua-t-il,
"dans un combat où il n'y aurait que des particuliers à
vaincre et où un roi pourrait être vaincu." Philippe, son père,
ayant eu chez les Triballes la cuisse traversée par une lance,
avait échappé au danger de cette blessure, mais il était resté
boiteux, et s'en affligeait : «Mon père », lui dit Alexandre,
«prenez courage, et avancez-vous au grand jour: chaque pas
que vous ferez vous rappellera votre valeur." Ne sont-ce
pas là les paroles d'un philosophe de qui l'âme, transportée
par la passion du beau, s'élève au-dessus des infirmités corporelles?
Avec quelle chaleur pensez-vous qu'ils se glorifiât
de ses propres blessures, quand à chacune d'elles se rattachait
le souvenir d'un peuple soumis, d'une victoire gagnée,
de villes prises, de rois reçus à soumission ! Loin de
cacher, de dissimuler ces cicatrices, il les étalait, comme des
images où étaient gravées sa vertu et sa bravoure.
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