HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

PLUTARQUE, Oeuvres morales, Sur la fortune d'Alexandre

Discours 2

  Chapitre 7

[2,7] οὕτω νικῶσιν ἀρετῇ. Πρόσγραψον, εἰ βούλει, τῇ Τύχῃ τὰ Ἄρβηλα καὶ τὴν Κιλικίαν, καὶ τἄλλα, γέγονε βίας ἔργα καὶ πολέμου· Τύχη τὴν Τύρον ἔσεισεν αὐτῷ, καὶ Τύχη τὴν Αἴγυπτον ἀνέῳξε· διὰ Τύχην Ἁλικαρνασσὸς ἔπεσε καὶ Μίλητος ἑάλω καὶ Μαζαῖος Εὐφράτην ἔρημον ἀπέλιπε καὶ νεκρῶν τὸ Βαβυλώνιον ἐπλήσθη πεδίον· ἀλλ´ οὔτι γε σώφρων ἀπὸ Τύχης οὔτ´ ἐγκρατὴς διὰ Τύχην, οὔτ´ ἀνάλωτον ὑφ´ ἡδονῆς Τύχη καὶ ἄτρωτον ἐπιθυμίαις κατακλείσασα τὴν ψυχὴν ἐφρούρει. καὶ μὴν ταῦτ´ ἦν, οἷς αὐτὸν ἐτρέψατο Δαρεῖον· τἄλλα δ´ ὅπλων ἦσαν ἧτται καὶ ἵππων καὶ μάχαι καὶ φόνοι καὶ φυγαὶ ἀνδρῶν. τὴν δὲ μεγάλην καὶ ἀναντίρρητον ἧτταν ἡττήθη Δαρεῖος καὶ ἐνέκλινεν ἀρετῇ καὶ μεγαλοφροσύνῃ καὶ ἀνδρείᾳ καὶ δικαιοσύνῃ, θαυμάσας τὸ ἐν ἡδονῇ καὶ πόνοις καὶ χάρισιν ἀνίκητον. ἐπεί γ´ ἐν πέλταις καὶ σαρίσσαις καὶ ἀλαλαγμοῖς καὶ συρράξεσιν ὅπλων ἀνίκητος ἦν καὶ Ἀταρρίας Δεινομένους καὶ Ἀντιγένης Πελληναῖος καὶ Φιλώτας Παρμενίωνος, ἀλλὰ πρὸς ἡδονὰς καὶ γύναια καὶ χρυσίον καὶ ἀργύριον οὐθέν τι βελτίους τῶν αἰχμαλώτων· ἀλλ´ Ἀταρρίας μὲν ὅτε τῶν χρεῶν ἠλευθέρου Μακεδόνας Ἀλέξανδρος καὶ διελύετο τοῖς δανείσασιν ὑπὲρ πάντων, ψευσάμενος ὀφείλειν καὶ δανειστήν τινα φάσκοντα εἶναι τῇ τραπέζῃ προσαγαγών, εἶτα φωραθεὶς ὀλίγου διέφθειρεν αὐτὸς ἑαυτόν· εἰ μὴ γνοὺς Ἀλέξανδρος ἀφῆκε τῆς αἰτίας αὐτὸν καὶ συνεχώρησεν ἔχειν τἀργύριον, ἀναμνησθεὶς ὅτι Φιλίππου προσμαχομένου Περίνθῳ βέλει πληγεὶς εἰς τὸν ὀφθαλμὸν οὐ παρέσχεν οὐδ´ ὑπέμεινεν ἐξαιρεθῆναι τὸ βέλος αὑτοῦ πρὶν τρέψασθαι τοὺς πολεμίους. Ἀντιγένης δὲ τοῖς ἀποπεμφθεῖσιν εἰς Μακεδονίαν διὰ νόσον καὶ πήρωσιν ἀναμίξας ἑαυτὸν καὶ ἀπογραψάμενος, ὡς ἐλήφθη μηδὲν κακὸν ἔχων, ἀλλὰ προσποιούμενος ἀρρωστίαν τινά, ἀνὴρ πολεμικὸς καὶ τραυμάτων τὸ σῶμα μεστὸς ὀφθεὶς ἠνίασε τὸν Ἀλέξανδρον· πυνθανομένου δὲ τὴν αἰτίαν ὡμολόγησε Τελεσίππας ἐρᾶν καὶ συνακολουθεῖν ἐπὶ θάλασσαν ἀπιούσῃ μὴ δυνάμενος ἀπολειφθῆναι. "καὶ τίνος" ἔφη "τὸ γύναιόν ἐστιν" Ἀλέξανδρος "καὶ πρὸς τίνα δεῖ διαλέγεσθαι;" τοῦ δ´ Ἀντιγένους εἰπόντος ὡς ἐλευθέρα ἐστίν, "οὐκοῦνεἶπε "πείθωμεν αὐτὴν καταμένειν, ἐπαγγελλόμενοι καὶ διδόντες". οὕτω παντὶ μᾶλλον ἐρῶντι συγγνώμην εἶχεν αὑτῷ. καὶ μὴν καὶ Φιλώτας Παρμενίωνος τροφόν τινα τῶν κακῶν ἔσχε τὴν ἀκρασίαν. Ἀντιγόνα γὰρ ἦν Πελλαῖον γύναιον ἐν τοῖς περὶ Δαμασκὸν αἰχμαλώτοις, ἡλώκει δ´ ὑπ´ Αὐτοφραδάτου πρότερον εἰς Σαμοθρᾴκην διαπλεύσασα, τὴν δ´ ὄψιν ἦν ἱκανή, καὶ τὸν Φιλώταν ἁψάμενον αὐτῆς εἶχε μάλα. καὶ δὴ σιδάρεος ἔκ τινος πεπαινόμενος οὐκ ἐκράτει τῶν λογισμῶν ἐν ταῖς ἡδοναῖς, ἀλλ´ ἀνοιγόμενος ἐξέφερε πολλὰ τῶν ἀπορρήτων πρὸς αὐτήν. "τί γὰρ ἦν ἐκεῖνος Φίλιππος, εἰ μὴ Παρμενίων; τί δ´ Ἀλέξανδρος οὗτος, εἰ μὴ Φιλώτας; ποῦ δ´ Ἄμμων, ποῦ δ´ οἱ δράκοντες, ἂν ἡμεῖς μὴ θέλωμεν;" τούτους τοὺς λόγους Ἀντιγόνα πρός τινα τῶν συνήθων ἐξήνεγκε γυναικῶν, ἐκείνη δὲ πρὸς Κρατερόν· Κρατερὸς δὲ πρὸς Ἀλέξανδρον αὐτὴν εἰσήγαγε τὴν Ἀντιγόναν κρύφα, καὶ τοῦ μὲν σώματος οὐκ ἔθιγεν ἀλλ´ ἀπέσχετο· τὸν δὲ Φιλώταν ὑποικουρῶν δι´ αὐτῆς ὅλον ἐφώρασε, καὶ πλέον ἑπτὰ ἐτῶν διαγενομένων, οὐκ ἐν οἴνῳ ποτὲ τὴν ὑπόνοιαν ταύτην ἐξέφηνεν μεθύων, οὐ δι´ ὀργὴν θυμοειδής, οὐ πρὸς φίλον πάντα πιστεύων Ἡφαιστίωνι καὶ πάντων μεταδιδούς. λέγεται γὰρ ὅτι καὶ τῆς μητρὸς ἀπόρρητον ἐπιστολὴν λύσαντος αὐτοῦ καὶ σιωπῇ πρὸς ἑαυτὸν ἀναγινώσκοντος, Ἡφαιστίων ἀτρέμα παραβάλλων τὴν κεφαλὴν συνανεγίνωσκεν· δὲ κωλῦσαι μὲν οὐχ ὑπέμεινεν, ἐξελὼν δὲ τὸν δακτύλιον προσέθηκε τὴν σφραγῖδα τῷ στόματι τοῦ Ἡφαιστίωνος. [2,7] Voilà comme l'on triomphe par la Vertu. Attribuez, si vous voulez, à la Fortune la victoire d'Arbèles, la conquête de la Cilicie, et les autres succès qui furent l'ouvrage de la force et de la guerre. Ce fut la Fortune qui fit tomber de- vant lui les remparts de Tyr, la Fortune qui lui ouvrit l'Égypte; ce fut grâce à elle qu'Halicarnasse succomba, que Milet fut prise, que Mazée abandonna et évacua l'Euphrate, que les plaines de la Babylonie furent jonchées de morts. Mais certes il ne dut pas à la Fortune de se maintenir modéré et tempérant. Ce ne fut pas la Fortune qui le rendit inaccessible aux séductions de la volupté, invulnérable aux passions : son âme étant comme une citadelle solidement fermée où il se garantissait contre de tels ennemis. Or ce furent là les moyens par lesquels il vainquit Darius: le reste n'était qu'abatis d'armes et de chevaux, que combats, que carnages, que déroutes d'hommes. Mais dans la grande, dans l'incontestable victoire, Darius eut le dessous. Il plia quand il s'agit de vertu, de magnanimité, d'énergie, de justice; et il resta confondu d'admiration devant ce héros de qui ne triomphaient ni les voluptés, ni les fatigues, et qu'on ne pouvait vaincre en bienfaits. Au milieu des boucliers, des lances, des cris militaires, du conflit des armes, c'étaient des combattants invincibles que Tarrias fils de Dinomène, qu'Antigène le Pellénien, que Philotas, fils de Parménion ; mais devant les voluptés, devant les femmes, devant l'argent et l'or ils n'étaient en rien supérieurs à leurs prisonniers. Que fit par exemple Tarrias? Alexandre libérait de leurs dettes les Macédoniens et satisfaisait les créanciers de chacun d'eux. Tarrias déclara de fausses dettes, et devant le bureau où l'on payait il produisit un individu qui se donna pour son créancier. Le mensonge ayant été découvert, peu s'en fallut qu'il ne se donnât lui-même la mort. Mais Alexandre, qui en fut informé, le renvoya de l'accusation, et lui permit de garder l'argent. Il n'avait pas oublié que quand Philippe assiégeait Périnthe, ce Tarrias, ayant été blessé d'un coup de flèche dans l'oeil, ne s'était pas mis entre les mains des médecins et n'avait pas consenti qu'on arrachât le fer de sa blessure avant que les ennemis eussent été mis en fuite. Pour Antigène, comme on renvoyait en Macédoine ceux qui étaient malades ou mutilés, il s'était glissé et fait inscrire parmi eux. On reconnut qu'il n'avait aucun mal et qu'il avait simulé une infirmité. Cette conduite d'un brave officier couvert de blessures fit de la peine à Alexandre, qui en demanda le motif. Antigène avoua qu'il était amoureux d'une femme nommée Télésippa, et qu'il avait voulu la suivre jusque sur mer à son départ, n'ayant pas la force de se séparer d'elle. «Mais à qui donc appartient cette femme», dit Alexandre, «et à qui faut-il s'adresser?" Antigène répondit qu'elle était de condition libre : «Eh bien,» dit le prince, «à force de libéralités et de promesses, déterminons-la donc à rester.» Tant il avait plus d'indulgence pour les faiblesses amoureuses des autres que pour les siennes propres ! Parlons enfin du fils de Parménion, de Philotas, chez lequel il y eut, en quelque sorte, intempérance de vices. Parmi les captifs pris à Damas se trouvait une jeune femme de Pella, nommée Antigone. Elle avait été prise une première fois par Autophradate lorsqu'elle avait débarqué en Samothrace. Elle était fort belle, et dès que Philotas l'eut connue, elle le posséda sans partage. Ce coeur de fer se trouvait amolli : l'ivresse amoureuse lui enlevait le libre usage de sa raison. Il n'avait rien de fermé pour elle, et il lui confiait une grande partie de ses pensées les plus secrètes : «Qu'aurait été Philippe sans Parménion," disait-il à cette femme, «que serait Alexandre à son tour sans Philotas? Que deviendraient ces histoires d'Ammon, de serpent mystérieux, si nous montrions de la mauvaise volonté ?» Tous ces propos, Antigone les confiait à une de ses amies, et la femme les reportait à Cratère. Ce dernier ménagea une entrevue secrète entre Antigone même et Alexandre. Le prince ne la toucha pas, et s'abstint de toute tentative auprès d'elle; mais par son entremise il sut son Philotas par coeur, et il le perça tout entier à jour. Néanmoins, durant un espace de plus de sept années il ne laissa deviner à personne sa méfiance, qu'il renfermait en lui-même. Il ne se révéla ni dans le vin quand il s'enivrait, ni dans la colère, sa passion habituelle , ni dans ses épanchements affectueux avec Héphestion à qui il confiait tout, avec qui il partageait tout. On rapporte, à ce dernier propos, qu'un jour il venait de décacheter une lettre où sa mère lui mandait des choses fort secrètes. Il la lisait tout bas et seul, lorsqu'Héphestion, la tête doucement avancée, se mit à lire avec lui. Il n'eut pas la force de le lui défendre; seulement il ôta son anneau, et le mit sur la bouche du jeune homme.


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Dernière mise à jour : 19/05/2005