[6] τὸ δέ σε μὴ κατοικεῖν Σάρδεις οὐδέν ἐστιν· οὐδὲ γὰρ Ἀθηναῖοι πάντες
κατοικοῦσι Κολλυτὸν οὐδὲ Κορίνθιοι Κράνειον οὐδὲ Πιτάνην Λάκωνες.
ἆρ´ οὖν ξένοι καὶ ἀπόλιδές εἰσιν Ἀθηναίων οἱ μεταστάντες
ἐκ Μελίτης εἰς Διωμίδα, ὅπου καὶ μῆνα Μεταγειτνιῶνα
καὶ θυσίαν ἐπώνυμον ἄγουσι τοῦ μετοικισμοῦ τὰ Μεταγείτνια,
τὴν πρὸς ἑτέρους γειτνίασιν εὐκόλως καὶ ἱλαρῶς
ἐκδεχόμενοι καὶ στέργοντες; οὐκ ἂν εἴποις. τί οὖν τῆς οἰκουμένης
μέρος ἢ τῆς γῆς ἁπάσης ἕτερον ἑτέρου μακράν ἐστιν,
ἣν ἀποδεικνύουσιν οἱ μαθηματικοὶ σημείου λόγον ἔχουσαν
ἀδιαστάτου πρὸς τὸν οὐρανόν; ἀλλ´ ἡμεῖς ὥσπερ μύρμηκες
ἢ μέλιτται μυρμηκιᾶς μιᾶς ἢ κυψέλης ἐκπεσόντες
ἀδημονοῦμεν καὶ ξενοπαθοῦμεν, οὐκ εἰδότες οὐδὲ μεμαθηκότες
οἰκεῖα τὰ πάντα ποιεῖσθαι καὶ νομίζειν ὥσπερ
ἐστί. καίτοι γελῶμεν τὴν ἀβελτερίαν τοῦ φάσκοντος τὴν
ἐν Ἀθήναις βελτίονα σελήνην εἶναι τῆς ἐν Κορίνθῳ τρόπον
τινὰ τὸ αὐτὸ πάσχοντες, ὅταν ἀμφιγνοῶμεν ἐπὶ ξένης
γενόμενοι τὴν γῆν τὴν θάλατταν τὸν ἀέρα τὸν οὐρανὸν
ὡς ἕτερα καὶ διαφέροντα τῶν συνήθων. ἡ μὲν γὰρ φύσις
ἐλευθέρους ἡμᾶς καὶ λελυμένους ἀφίησιν, ἡμεῖς δ´ αὐτοὶ
συνδέομεν ἑαυτοὺς συστενοχωροῦμεν ἐγκατοικοδομοῦμεν
εἰς μικρὰ καὶ γλίσχρα συνελαύνομεν. εἶτα τῶν μὲν Περσῶν
βασιλέων καταγελῶμεν, εἴ γε δὴ ἀληθῶς τὸ τοῦ
Χοάσπου μόνον ὕδωρ πίνοντες ἄνυδρον αὑτοῖς τὴν ἄλλην
ποιοῦσιν οἰκουμένην· ὅταν δὲ μεταστῶμεν εἰς ἕτερα
χωρία, τοῦ Κηφισοῦ γλιχόμενοι καὶ τὸν Εὐρώταν ἢ τὸν
Ταΰγετον ἢ τὸν Παρνασὸν ἐπιποθοῦντες ἄπολιν καὶ
ἀοίκητον αὑτοῖς τὴν οἰκουμένην ποιοῦμεν.
| [6] Mais que vous n'habitiez pas Sardes, ce n'est rien. Car
tous les Athéniens non plus n'habitent pas le faubourg de
Colyttus, ni tous les Corinthiens, le Cranion, ni tous les
Laconiens, Pitane. Est-ce donc à dire que des Athéniens
deviennent étrangers, qu'ils soient expatriés, pour avoir passé
du bourg de Mélite à celui de Diomis? Non, sans doute.
Ils ont même un mois nommé le Métagitnion, et ils célèbrent
une fête des Métagitnies, ce qui veut dire "déplacement",
dans laquelle ils se plaisent à pratiquer joyeusement
et de grand coeur des émigrations sur le territoire voisin.
Vous ne sauriez appeler cela une expatriation.
Y a-t-il une partie de la terre habitée, ou même de tout
notre globe, qui soit loin d'une autre partie, lorsque les
mathématiciens démontrent que la terre n'est autre chose
qu'un point sans dimension par rapport au ciel? Et pourtant,
comme des fourmis ou des abeilles, quand nous
sommes jetés hors d'une fourmilière ou d'une ruche unique,
nous voilà désespérés, en proie aux maux de l'absence,
ne sachant pas prendre et regarder toutes choses
comme nous étant propres. Or, c'est cette dernière opinion
que nous devrions avoir, pour être dans la vérité. Nous
rions de la sottise de cet homme qui prétendait voir la
lune plus belle à Athènes qu'à Corinthe. Jusqu'à un certain
point nous agissons à son exemple, toutes les fois qu'en pays
étranger nous voulons constater une diversité dans le sol,
dans la mer, dans le ciel. Comme s'il y avait quelque
changement et quelque différence avec le sol, la mer et
le ciel auxquels nous sommes habitués! La nature nous
produit à la lumière, libres et dégagés de toute entrave.
C'est nous-mêmes qui nous enchaînons, qui nous resserrons
à l'étroit, qui nous confinons dans des demeures, qui
nous réduisons aux dimensions les plus étroites et les plus
mesquines. Et après cela, nous nous moquons des monarques
persans, si toutefois le propos est vrai, qui ne buvant
que de l'eau du Choaspe, déclarent ainsi qu'à leurs yeux le
reste de la terre est privé d'eau! Or nous-mêmes, lorsque
transportés en d'autres pays, nous soupirons après le Céphise,
nous regrettons l'Eurotas, le Taygète ou le Parnasse,
ne faisons-nous pas de la terre un séjour où il n'y a plus
pour nous ni ville ni habitation?
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