HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales, Qu'il ne faut pas emprunter à usure

Page 830

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[830] οὐκοῦν καὶ σὺ (830a) τῇ πενίᾳ, πολλῶν κακῶν προσόντων, μὴ ἐπισώρευε τὰς ἐκ τοῦ δανείζεσθαι καὶ ὀφείλειν ἀμηχανίας μηδ´ ἀφαιροῦ τῆς πενίας, μόνῳ τοῦ πλούτου διαφέρει, τὴν ἀμεριμνίαν. Ἐπεὶ τὸ τῆς παροιμίας ἔσται γελοῖον « Οὐ δύναμαι τὴν αἶγα φέρειν, ἐπί μοι θέτε τὸν βοῦν. » Πενίαν φέρειν μὴ δυνάμενος δανειστὴν ἐπιτίθης σεαυτῷ, φορτίον καὶ πλουτοῦντι δύσοιστον. Πῶς οὖν διατραφῶ; τοῦτ´ ἐρωτᾷς, ἔχων χεῖρας, ἔχων πόδας, ἔχων φωνήν, ἄνθρωπος ὤν, τὸ φιλεῖν ἔστι καὶ φιλεῖσθαι καὶ τὸ χαρίζεσθαι καὶ τὸ εὐχαριστεῖν; (830b) γράμματα διδάσκων, καὶ παιδαγωγῶν, καὶ θυρωρῶν, πλέων, παραπλέων· οὐδέν ἐστι τούτων αἴσχιον οὐδὲ δυσχερέστερον τοῦ ἀκοῦσαι « ἀπόδος Ῥουτίλιος ἐκεῖνος ἐν Ῥώμῃ τῷ Μουσωνίῳ προσελθὼν « Μουσώνιε, » εἶπεν, « Ζεὺς σωτήρ, ὃν σὺ μιμῇ καὶ ζηλοῖς, οὐ δανείζεται. » Καὶ Μουσώνιος μειδιάσας εἶπεν « Οὐδὲ δανείζει. » γὰρ Ῥουτίλιος, δανείζων αὐτὸς ὠνείδιζεν ἐκείνῳ δανειζομένῳ. Στωική τις αὕτη τυφομανία· τί γάρ σε δεῖ τὸν Δία τὸν σωτῆρα κινεῖν, αὐτόθεν ὑπομνῆσαι τοῖς φαινομένοις ἐνόν; οὐ δανείζονται χελιδόνες, οὐ δανείζονται μύρμηκες, οἷς φύσις οὐ (830c) χεῖρας, οὐ λόγον, οὐ τέχνην δέδωκεν· ἄνθρωποι δὲ περιουσίᾳ συνέσεως διὰ τὸ εὐμήχανον ἵππους παρατρέφουσι, κύνας, πέρδικας, λαγωούς, κολοιούς· τί οὖν γε σεαυτοῦ κατέγνωκας, ἀπιθανώτερος ὢν κολοιοῦ καὶ ἀφωνότερος πέρδικος καὶ κυνὸς ἀγεννέστερος, ὥστ´ ἀπ´ ἀνθρώπου μηδενὸς ὠφελεῖσθαι περιέπων, ψυχαγωγῶν, φυλάττων, προμαχόμενος; οὐχ ὁρᾷς, ὡς πολλὰ μὲν γῆ παρέχει πολλὰ δὲ θάλαττα; « Καὶ μὴν Μίκκυλον εἰσεῖδον » φησὶν Κράτης « τῶν ἐρίων ξαίνοντα, γυναῖκά τε συγξαίνουσαν, τὸν λιμὸν φεύγοντας ἐν αἰνῇ δηιοτῆτι. » Κλεάνθη δ´ βασιλεὺς Ἀντίγονος ἠρώτα διὰ χρόνου θεασάμενος ἐν ταῖς Ἀθήναις « Ἀεῖς ἔτι, Κλέανθες; » (830d) « Ἀλῶ, » φησίν, « βασιλεῦ· ποιῶ ἕνεκα τοῦ Ζήνωνος μὴ ἀποστῆναι μηδὲ φιλοσοφίαςὍσον τὸ φρόνημα τοῦ ἀνδρός, ἀπὸ τοῦ μύλου καὶ τῆς μάκτρας πεττούσῃ χειρὶ καὶ ἀλούσῃ γράφειν περὶ θεῶν καὶ σελήνης καὶ ἄστρων καὶ ἡλίου. Ἡμῖν δὲ δουλικὰ δοκεῖ ταῦτ´ ἔργα. Τοιγαροῦν ἵν´ ἐλεύθεροι ὦμεν δανεισάμενοι, κολακεύομεν οἰκοτριβέας ἀνθρώπους καὶ δορυφοροῦμεν καὶ δειπνίζομεν καὶ δῶρα καὶ φόρους ὑποτελοῦμεν, οὐ διὰ τὴν πενίαν (οὐδεὶς γὰρ δανείζει πένητι), ἀλλὰ διὰ τὴν πολυτέλειαν. Εἰ γὰρ ἠρκούμεθα τοῖς ἀναγκαίοις πρὸς τὸν βίον, οὐκ ἂν ἦν γένος δανειστῶν, ὥσπερ οὐδὲ Κενταύρων ἔστιν οὐδὲ Γοργόνων· (830e) ἀλλ´ τρυφὴ δανειστὰς ἐποίησεν οὐχ ἧττον χρυσοχόους καὶ ἀργυροκόπους καὶ μυρεψοὺς καὶ ἀνθοβάφους. Οὐ γὰρ ἄρτων οὐδ´ οἴνου τιμὴν ὀφείλομεν, ἀλλὰ χωρίων καὶ ἀνδραπόδων καὶ ἡμιόνων καὶ τρικλίνων καὶ τραπεζῶν, καὶ χορηγοῦντες ἐκλελυμένως πόλεσι, φιλοτιμούμενοι φιλοτιμίας ἀκάρπους καὶ ἀχαρίστους. δ´ ἅπαξ ἐνειληθεὶς μένει χρεώστης διὰ παντός, ἄλλον ἐξ ἄλλου μεταλαμβάνων ἀναβάτην, ὥσπερ ἵππος ἐγχαλινωθείς· ἀποφυγὴ δ´ οὐκ ἔστιν ἐπὶ τὰς νομὰς ἐκείνας καὶ τοὺς λειμῶνας, ἀλλὰ πλάζονται καθάπερ οἱ θεήλατοι καὶ οὐρανοπετεῖς ἐκεῖνοι τοῦ Ἐμπεδοκλέους δαίμονες· « Αἰθέριον μὲν γάρ σφε μένος πόντονδε διώκει, πόντος δ´ ἐς χθονὸς οὖδας ἀπέπτυσε· γαῖα δ´ ἐς αὐγὰς ἠελίου ἀκάμαντος· δ´ αἰθέρος ἔμβαλε δίναις· » [830] Je vous dirai de même : (830a) La pauvreté traîne à sa suite tant de maux, ne la surchargez pas encore des embarras qu'amènent les emprunts; ne lui ôtez pas le seul avantage qu'elle ait sur la richesse, celui d'être exempte de chagrins. Sans cela, vous vous exposerez au ridicule exprimé dans ce proverbe : "Je ne puis porter une chèvre, ajoutez-y encore un bœuf". Vous ne pouvez pas supporter la pauvreté , et vous voulez vous charger encore d'usures, fardeau insupportable aux riches eux-mêmes! Mais, dites-vous, comment ferai-je pour vivre? Vous me le demandez, tandis que vous avez des bras, des pieds, une langue, enfin que vous êtes homme, et qu'en cette qualité vous pouvez aimer et être aimé, recevoir des services et en rendre, (830b) enseigner la grammaire, élever des enfants, garder une porte, être commerçant ou facteur. Qu'y a-t-il en tout cela d'aussi pénible et d'aussi honteux que de s'entendre dire par un créancier : Payez-moi! Rutilius, ce Romain si riche, vint un jour trouver Musonius, et lui dit : "Musonius, ce Jupiter que vous faites profession d'imiter, n'emprunte point à usure. — Il ne prête pas non plus", lui répondit Musonius en souriant. C'est que Rutilius était un usurier qui reprochait au philosophe ses emprunts. Mais quelle arrogance stoïque dans Rutilius ! Quel besoin d'appeler en témoignage Jupiter Sauveur , tandis qu'il avait sous les yeux tant d'exemples? Les hirondelles et les fourmis n'empruntent pas, elles à qui la nature n'a donné ni (830c) mains, ni raison, ni industrie. Mais les hommes ont reçu une telle intelligence, qu'ils peuvent nourrir des chevaux, des chiens, des perdrix, des lièvres et des geais. Pourquoi donc vous accuser vous-même d'être moins persuasif qu'un geai, plus muet qu'une perdrix , moins généreux qu'un chien, et de ne pouvoir, par vos services, par vos instructions, par votre zèle à garder quelqu'un et à le défendre, obtenir de lui des secours ? Ne voyez-vous pas combien la terre et la mer vous offrent de ressources dans vos besoins ? Écoutez ce que dit Cratès: "Je voyais Micylus, dans des temps malheureux, Écarter de la faim le besoin rigoureux En cardant de la laine, et sa femme, tranquille, Partageait avec lui ce travail difficile". Le roi Antigonus, après avoir retrouvé à Athènes le philosophe Cléanthe, qu'il n'avait pas vu depuis longtemps, lui dit : "Eh quoi ! Cléanthe, vous tournez encore la meule ? — (830d) Oui, prince, lui répondit Cléanthe, je le fais pour fournir à ma subsistance, prêt à tout faire plutôt que d'abandonner la philosophie". Quelle grandeur d'âme dans ce philosophe qui, de la même main dont il venait de tourner la meule et de faire du pain, allait écrire sur les dieux, sur la lune, sur le soleil et sur les astres ! Et après cela, nous traiterons ces travaux de serviles ! Est-ce donc pour nous conserver libres que nous empruntons, que nous faisons bassement la cour à de vils esclaves, que nous les escortons, que nous leur donnons à manger, que nous leur faisons des présents, que nous leur payons des pensions? Et cela, non pour éviter la pauvreté, car personne ne prête à un homme pauvre, mais pour fournir à une prodigalité. Si nous savions nous contenter du nécessaire, il n'y aurait pas plus d'usuriers dans le monde que de centaures et de gorgones. (830e) C'est le luxe qui les a seul enfantés, comme il a produit les ouvriers en or et en argent, les parfumeurs et les teinturiers. Est-ce pour acheter du pain et du vin que nous empruntons à usure ? Non, c'est pour avoir des terres, des esclaves, des mulets, des meubles magnifiques, des tables richement servies ; c'est enfin pour fournir aux folles dépenses de ces spectacles que nous donnons au peuple, et pour satisfaire une ambition insensée dont nous ne recueillons d'autre fruit qu'une cruelle ingratitude. Celui qui s'est mis une fois dans les filets des usuriers y reste pour la vie ; il passe de la servitude de l'un dans celle d'un autre , comme un cheval qu'on a bridé reçoit tous les cavaliers qui veulent le monter, sans qu'il lui soit possible de s'échapper dans ces gras pâturages, dans ces prairies riantes d'où il a été tiré. De même les débiteurs tombent d'usure en usure, semblables à ces démons que Dieu punit, suivant Empédocle, en les exilant du ciel. « Au vaste sein des mers le ciel les précipite. L'onde qui les reçut les repousse à l'instant. Par la terre lancés dans le soleil brûlant, Dans le vague des airs cet astre les rejette ; Sans cesse ils sont poussés de retraite en retraite. »


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Dernière mise à jour : 25/10/2007