[7] Περὶ δὲ τῆς τύχης καὶ τοῦ αὐτομάτου καὶ εἴ τι παρὰ
ταῦτα θεωρεῖται, νῦν ἡμῖν λεκτέον. αἴτιον μὲν δή τι ἡ
τύχη. τῶν δ´ αἰτίων τὰ μὲν καθ´ αὑτά, τὰ δὲ κατὰ συμβεβηκός·
οἷον οἰκίας ἢ νεὼς καθ´ αὑτὸ μὲν αἴτιον τὸ
οἰκοδομικὸν καὶ τὸ ναυπηγικόν, κατὰ συμβεβηκὸς δὲ τὸ
μουσικὸν ἢ γεωμετρικόν, καὶ πᾶν ὅ τι ἂν τῷ οἰκοδομικῷ
ἢ ναυπηγικῷ εἴδει συμβεβήκῃ, εἴτε κατὰ σῶμα εἴτε
κατὰ ψυχὴν εἴτε κατὰ τὰ ἐκτός. ὅθεν καὶ δῆλον, ὡς
τὸ καθ´ αὑτὸ ὡρισμένον καὶ ἕν, τὸ δὲ κατὰ συμβεβηκὸς
οὐχ ἕν τε καὶ ἀόριστον· πολλὰ γὰρ καὶ ἄπειρα
τῷ ἑνὶ ὑπάρχει παντάπασιν ἀλλήλων διαφέροντα. τὸ
μέντοι κατὰ συμβεβηκός, ὅταν μὴ μόνον ἐν τοῖς ἕνεκά
του γίγνηται, ἀλλὰ καὶ ἐν οἷς ἡ προαίρεσις, τότε δὴ
καὶ τὸ ἀπὸ τύχης προσαγορεύεται· οἷον τὸ εὑρεῖν χρυσίον
σκάπτονθ´ ἵνα φυτεύσῃ, ἢ παθεῖν τι ἢ δρᾶσαι
τῶν παρὰ τὸ ἔθος φεύγοντ´ ἢ διώκοντ´ ἢ ἄλλως βαδίζοντ´
ἢ αὐτὸ μόνον ἐπιστραφέντ´ οὐ τούτου ἕνεκα, ὅπερ
συνέπεσεν, ἀλλ´ ἑτέρου τινὸς χάριν. διὸ καὶ ἀπρονόητον
αἰτίαν καὶ ἄδηλον ἀνθρωπίνῳ λογισμῷ τὴν τύχην ἀπέδοσαν
τῶν παλαιῶν ἔνιοι. κατὰ δὲ τοὺς ἀπὸ Πλάτωνος
ἔγγιον ἔτι προσιόντας αὐτῆς τῷ λόγῳ οὕτως ἀφώρισται
ἡ τύχη, αἰτία κατὰ συμβεβηκὸς τῶν ἕνεκά του ἐν τοῖς
κατὰ προαίρεσιν· ἔπειτ´ ἤδη καὶ τὸ ἀπρονόητον καὶ τὸ
ἄδηλον ἀνθρωπίνῳ λογισμῷ προστιθέασιν. καίτοι γε κατὰ
τὰ αὐτὰ καὶ τὸ σπάνιον καὶ παράλογον ἐμφαίνεται τῷ κατὰ
συμβεβηκός· οἷον δ´ ἐστὶ τοῦτο, εἰ καὶ μὴ ἐκ τῶν ἄρτι
ῥηθέντων, ἀλλ´ ἔκ γε τῶν ἐν τῷ Φαίδωνι γεγραμμένων
σαφέστατα προσπίπτει. γέγραπται δ´ ὧδε · ‘οὐδὲ
τὰ περὶ τῆς δίκης ἆρα ἐπύθοντο ὃν τρόπον ἐγένετο; Ναί·
ταῦτα μὲν ἡμῖν ἤγγειλέ τις· καὶ ἐθαυμάζομέν γε, ὅτι πάλαι
αὐτῆς γενομένης ὕστερον φαίνεται ἀποθανών· τί ἦν τοῦτο, ὦ
Φαίδων; Τύχη τις αὐτῷ, ὦ Ἐχέκρατες, συνέβη· ἔτυχε γὰρ
τῇ προτεραίᾳ τῆς δίκης ἡ πρύμνα ἐστεμμένη τοῦ πλοίου,
ὃ εἰς Δῆλον Ἀθηναῖοι πέμπουσιν.’ ἐν γὰρ τούτοις τό
‘συνέβη’ οὐκ ἀντὶ τοῦ ‘γέγονεν’ ἀκουστέον, ἀλλὰ πολὺ
μᾶλλον ἐκ συνδρομῆς τινος αἰτίων ἀπέβη ἄλλου πρὸς ἄλλο
γεγονότος. ὁ μὲν γὰρ ἱερεὺς ἔστεφε τὸ πλοῖον ἄλλου χάριν
ἀλλ´ οὐ Σωκράτους· οἱ δὲ δι´ ἕτερον κατεψηφίσαντ´ αὐτοῦ·
αὐτὸ δὲ τὸ ἀποβὰν παράλογον καὶ τοιοῦτο ἀπέβη, οἷον
κἂν ἐκ προνοίας ἐγεγόνει ἤτοι ἀνθρωπίνου τινὸς ἢ τῶν
ἔτι κρειττόνων. καὶ περὶ μὲν τῆς τύχης ταῦθ´ ἱκανά·
ὡς συνυφίστασθαι ἀνάγκη. τὸ μὲν ἀπ´ αὐτοῦ παρωνύμως
καὶ τοῦ ἐφ´ ἡμῖν προϋποκεῖσθαι ἐλέχθη,
τὸ δ´ αὐτόματον ἐπὶ πλεῖον τῆς τύχης· εἰ γὰρ
καὶ αὐτὴν περιλαβὸν ἔχει καὶ πολλὰ τῶν ἄλλοτ´ ἄλλως
συμπίπτειν πεφυκότων. ἔστι δὲ κατ´ ὄνομα, ὅπερ αὐτόματον
λέγεται, τὸ πεφυκὸς ἄλλου ἕνεκα, ὅταν μὴ ἐκεῖνο
παρ - - - ἐπεφύκει· οἷον δοκεῖ τὸ ὑπὸ κύνα ψῦχος. ποτὲ
γὰρ ψῦχος οὐ μάτην, οὐδὲ - - - τὸ δ´ ὅλον, ὡς τὸ ἐφ´
ἡμῖν μέρος τοῦ ἐνδεχομένου, οὕτως ἡ τύχη τοῦ αὐτομάτου.
ἔστι δ´ ἑκατέρου ἑκάτερον σύμπτωμα, τὸ μὲν
αὐτόματον τοῦ ἐνδεχομένου, ἡ δὲ τύχη τοῦ ἐφ´ ἡμῖν, καὶ
τούτου οὐχ ἅπαντος, ἀλλ´ ὅπερ ἂν καὶ κατὰ προαίρεσιν
ᾖ, ὡς προείρηται . διὸ καὶ τὸ μὲν αὐτόματον κοινὸν
ἐμψύχων τε καὶ ἀψύχων, ἡ δὲ τύχη ἀνθρώπου ἴδιον ἤδη
πράττειν δυναμένου. τεκμήριον δέ, ὅτι τὸ εὐτυχεῖν καὶ
εὐδαιμονεῖν ταὐτὰ εἶναι δοξάζεται· ἡ δὲ εὐδαιμονία
εὐπραξία τις ἡ δ´ εὐπραξία περὶ μόνον καὶ τέλειον ἄνθρωπον.
| [7] C'est maintenant de la Fortune, du Hasard, et des considérations
qui s'y rattachent, qu'il nous reste à parler. La
Fortune est une cause. Entre les causes il y en a qui le sont
par nature, et il y en a qui le sont par accident. Par exemple,
d'une maison, d'un navire, la cause par nature c'est la
science de l'architecte, c'est la science du constructeur maritime.
Au nombre des causes accidentelles, je place la musique,
la géométrie, et tout ce qui, tenant à l'âme, ou à
l'esprit, ou même aux choses extérieures, peut modifier la
science de l'architecte ou celle du constructeur maritime.
De là aussi il résulte évidemment que ce qui existe par
soi est un et déterminé. Ce qui existe par accident ne
saurait être un, et se présente comme indéterminé : car il
y a dans un même sujet une infinité d'accidents qui diffèrent
les uns des autres.
Quand l'élément que je nomme accidentel se rencontre
non seulement dans les choses qui se font en vue d'une fin,
mais encore dans celles qui ont été précédées de notre
détermination, alors on l'appelle Fortune. C'est, par exemple
lorsqu'on trouve de l'or en creusant la terre pour faire une
plantation, ou bien lorsque en fuyant ou en poursuivant
quelqu'un, ou en marchant vers un autre but, ou seulement
en se retournant, on vient à éprouver ou à faire quelque
chose d'insolite qui n'ait pas de rapport avec le mouvement
qu'on s'était donné et que l'on faisait dans une intention
différente. Voilà pourquoi quelques anciens ont défini la
Fortune, «Une cause qui échappe à la prévision et au raisonnement
humains." Mais les Platoniciens, dont les méditations
ont pénétré plus avant jusqu'à elle, la définissent: "Cause
accidentelle de ce qui arrive dans les choses faites dans une
intention et avec libre arbitre." Après quoi, il est vrai, ils
ajoutent aussi que la Fortune échappe à la prévision et au
raisonnement humains. D'après ces considérations mêmes, il
est clair que les causes accidentelles se produisent rarement
et sont toujours inattendues. Quant à ce qui est de
la nature de ces causes, à défaut des lumières qui jailliraient
de l'examen d'opinions contradictoires, cette nature tombe
d'une manière très-claire sous l'entendement, quand on a lu
dans le Phédon certain passage que voici: "PHÉDON. Vous
n'avez donc rien su du procès de Socrate, ni comment les
choses se passèrent ? — ECHÉCRATE. Si fait : quelqu'un
nous l'a rapporté, et nous étions étonnés que la sentence
n'ait été exécutée que longtemps après avoir été rendue.
Quelle en fut la cause, Phédon? — PHÉDON. Une circon-
stance particulière. Il se trouva que la veille du jugement,
on avait couronné la poupe du vaisseau que les Athéniens
envoient chaque année à Délos.» Dans ce récit les mots :
"Il se trouva que ", ne doivent pas être entendus dans le
sens de : « Il arriva que ». Ils signifient que l'événement résulta
bien plutôt d'un certain concours de causes, ayant les
unes un but, les autres, un autre. Car si le prêtre couronna
le vaisseau, ce ne fut nullement en vue de Socrate; si les
juges condamnèrent Socrate, ce ne fut pas à cause de cette
circonstance. Mais le fait même se produisit ainsi d'une façon
extraordinaire, comme s'il eût été disposé par un calcul humain
ou par une Providence supérieure. Du reste, en voilà
suffisamment sur la Fortune; il reste établi qu'il doit exister
en même temps qu'elle quelque chose de contingent. Or
c'est là ce qui lui donne son nom; et il doit exister aussi
antérieurement à elle une matière, un sujet, sur quoi s'exerce
notre libre arbitre.
Le Hasard est plus étendu que la Fortune : car il renferme
et celle-ci et plusieurs choses qui peuvent arriver
tantôt d'une façon, tantôt d'une autre. Le nom sous lequel
on le désigne, "automaton" (venu de soi-même ), indique que
c'est ce qui survient au lieu d'un événement ordinaire que
l'on attendait et qui n'arrive pas. Tel est, par exemple, le
froid dans la canicule. Car quelquefois à ce moment de
l'année il fait froid, et ce n'est ni sans cause, ni pourtant à
la suite de prévisions antérieures. En général, comme ce
qui est en notre pouvoir fait partie du Contingent, de même
la Fortune fait partie du Hasard. Ce sont tous deux des événements
conjoints et dépendant l'un de l'autre. Ainsi donc
le Hasard dépend du Contingent, et la Fortune dépend de
ce qui est en notre pouvoir : non pas exclusivement, à la vérité,
mais en ce qui constitue notre libre arbitre, comme il a
déjà été dit. Voilà pourquoi le Hasard est commun aux êtres
animés et aux choses qui ne le sont pas, tandis que la Fortune
est propre à l'homme seul, parce que celui-ci est désormais
capable d'agir. Ce qui le prouve, c'est qu'on prête
le même sens à l'expression « être fortuné » et à l'expression
« être heureux ». Or le bonheur consiste à bien faire ses
affaires : ce qui n'appartient qu'à l'homme, et à l'homme
jouissant de ses facultés complètes.
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