| [1123] « Ἀλλ´ ἀδύνατον τὸ μὴ συγκατατίθεσθαι τοῖς ἐναργέσι· (1123) τὸ γὰρ 
ἀρνεῖσθαι τὰ πεπιστευμένα τοῦ μήτ´ ἀρνεῖσθαι μήτε τιθέναι 
παραλογώτερον. » 
Τίς οὖν κινεῖ τὰ πεπιστευμένα καὶ μάχεται τοῖς ἐναργέσιν; οἱ μαντικὴν 
ἀναιροῦντες καὶ πρόνοιαν ὑπάρχειν θεῶν μὴ φάσκοντες μηδὲ τὸν ἥλιον 
ἔμψυχον εἶναι μηδὲ τὴν σελήνην, οἷς πάντες ἄνθρωποι θύουσι καὶ 
προσεύχονται καὶ σέβονται. Τὸ δὲ φύσει περιέχεσθαι τὰ τεκόντα τῶν 
γεννωμένων οὐχὶ πᾶσι φαινόμενον ἀναιρεῖτε; τὸ δὲ πόνου καὶ ἡδονῆς 
μηδὲν εἶναι μέσον οὐκ ἀποφαίνεσθε παρὰ τὴν πάντων αἴσθησιν, ἥδεσθαι 
τὸ μὴ ἀλγεῖν καὶ πάσχειν τὸ μὴ κινεῖσθαι λέγοντες; ἀλλ´ ἵνα τἄλλα ἐάσω, τί 
μᾶλλον ἐναργὲς οὕτως ἐστὶ καὶ πεπιστευμένον ὡς τὸ παρορᾶν καὶ 
παρακούειν ἐν πάθεσιν ἐκστατικοῖς καὶ μελαγχολικοῖς ὄντα, ὅταν ἡ διάνοια 
τοιαῦτα πάσχῃ καὶ ταράττηται·
« αἱ δέ με δᾳδοφόροι μελανείμονες ὄμμα πυροῦσι· »
καί
« --- Μητέρ´ ἀγκάλαις ἐμὴν ἔχουσα »;
Ταῦτα μέντοι καὶ πολλὰ τούτων ἕτερα τραγικώτερα, τοῖς 
Ἐμπεδοκλέους ἐοικότα « τεράσμασιν » ὧν καταγελῶσιν, « εἱλίποδ´ 
ἀκριτόχειρα » καί « βουγενῆ ἀνδρόπρωρα » καὶ τίνα γὰρ οὐκ ὄψιν ἢ φύσιν 
ἔκφυλον εἰς τὸ αὐτὸ συνενεγκόντες ἐκ τῶν ἐνυπνίων καὶ τῶν παρακοπῶν 
οὐδὲν εἶναί φασι παρόραμα τούτων οὐδὲ ψεῦδος οὐδ´ ἀσύστατον, ἀλλὰ 
φαντασίας ἀληθεῖς ἁπάσας καὶ σώματα καὶ μορφὰς ἐκ τοῦ περιέχοντος 
ἀφικνουμένας. Εἶτ´ ἔστι τι τῶν ὄντων ἀδύνατον ἐπισχεῖν, εἰ ταῦτα 
πιστεύεσθαι δυνατόν ἐστιν; ἃ γὰρ οὐδεὶς σκευοποιὸς ἢ πλάστης θαυμάτων 
ἢ γραφεὺς δεινὸς ἐτόλμησε μῖξαι πρὸς ἀπάτην εἰκάσματα καὶ παίγνια, 
ταῦθ´ ὑπάρχειν ἀπὸ σπουδῆς τιθέμενοι, μᾶλλον δ´ ὅλως, εἰ ταῦτα μὴ 
ὑπάρχοι, πίστιν οἴχεσθαι καὶ βεβαιότητα καὶ κρίσιν ἀληθείας φάσκοντες 
αὐτοὶ καταβάλλουσιν εἰς ἀφασίαν πάντα πράγματα· καὶ ταῖς κρίσεσι 
φόβους καὶ ταῖς πράξεσιν ὑποψίας ἐπάγουσιν, εἰ τὰ πραττόμενα καὶ 
νομιζόμενα καὶ συνήθη καὶ ἀνὰ χεῖρας ἡμῖν ἐπὶ τῆς αὐτῆς φαντασίας καὶ 
πίστεως ὀχεῖται τοῖς μανικοῖς καὶ ἀτόποις καὶ παρανόμοις ἐκείνοις 
φάσμασιν. Ἡ γὰρ ἰσότης, ἣν ὑποτίθενται πᾶσι, τῶν νενομισμένων ἀφίστησι 
μᾶλλον ἢ προστίθησι τοῖς παραλόγοις τὴν πίστιν. Ὅθεν ἴσμεν οὐκ ὀλίγους 
τῶν φιλοσόφων ἥδιον ἂν θεμένους τὸ μηδεμίαν ἢ τὸ πάσας ἀληθεῖς εἶναι 
τὰς φαντασίας, καὶ μᾶλλον ἂν οἷς ὕπαρ ἐντυγχάνουσι διαπιστήσαντας 
ἀνθρώποις καὶ πράγμασι καὶ λόγοις ἁπλῶς ἅπασιν ἢ μίαν ἐκείνων ἀληθῆ 
καὶ ὑπάρχουσαν εἶναι φαντασίαν πεισθέντας, ἃς λυττῶντες ἢ 
κορυβαντιῶντες ἢ κοιμώμενοι λαμβάνουσιν. Ἃ τοίνυν ἔστι μὲν ἀναιρεῖν, 
ἔστι δ´ ὡς --- οὐκ ἔστιν ἐπέχειν περὶ αὐτῶν, εἰ μηδὲν ἄλλο, τήν γε 
διαφωνίαν ταύτην λαβόντας αἰτίαν ἀποχρῶσαν ὑπονοίας πρὸς τὰ 
πράγματα καὶ οὐδὲ οὕτως ὑγιὲς οὐδέν, ἀσάφειαν δὲ καὶ ταραχὴν ἔχοντα 
πᾶσαν; ταῖς μέν γε περὶ κόσμων ἀπειρίας καὶ ἀτόμων φύσεως καὶ ἀμερῶν 
καὶ παρεγκλίσεων διαφοραῖς, εἰ καὶ πάνυ πολλοὺς διαταράττουσιν, ἔνεστιν 
ὅμως παραμυθία, τὸ μηδὲν ἐγγὺς εἶναι μᾶλλον δ´ ὅλως ἐπέκεινα τῆς 
αἰσθήσεως ἀπῳκίσθαι τῶν ζητουμένων ἕκαστον· ἡ δ´ ἐν ὀφθαλμοῖς αὕτη 
καὶ ἀκοαῖς καὶ χερσὶν ἀπιστία καὶ ἄγνοια καὶ ταραχὴ περὶ τὰ αἰσθητὰ καὶ 
τὰς φαντασίας, εἴτ´ ἀληθεῖς εἰσιν εἴτε ψευδεῖς, τίνα δόξαν οὐ σαλεύει; ποίαν 
δ´ οὐκ ἄνω καὶ κάτω ποιεῖ συγκατάθεσιν καὶ κρίσιν; εἰ γὰρ οὐ 
κραιπαλῶντες οὐδὲ φαρμακῶντες ἄνθρωποι καὶ παρακόπτοντες ἀλλὰ 
νήφοντες καὶ ὑγιαίνοντες καὶ γράφοντες περὶ ἀληθείας 
 | [1123] « Mais, diront les épicuriens, il est possible de ne pas consentir à 
l'évidence. (1123) Oui, mais il est plus absurde de nier ce que l'on croit 
certain que de ne rien nier ou affirmer. 
Quels sont donc ceux qui nient ce qu'ils croient, et qui combattent 
contre l'évidence ? Ce sont ces philosophes qui détruisent la divination, 
qui méconnaissent la providence des dieux, qui soutiennent que ni le 
soleil ni la lune ne sont animés, ces astres à qui tous les peuples 
sacrifient, qu'ils invoquent et qu'ils adorent. Ne niez-vous pas ce que tous 
les hommes avouent, que les enfants sont naturellement contenus dans 
leurs parents? N'assurez-vous pas, contre l'expérience universelle, qu'il 
n'y a point de milieu entre la douleur et la volupté ? qu'être exempt de 
douleur, c'est jouir de la volupté, et que n'être pas dans la joie, c'est 
souffrir? Et sans citer bien d'autres exemples, n'est-il pas de toute 
évidence, et tout le monde ne convient-il pas qu'un homme dont le 
cerveau est troublé ou qui est attaqué d'une humeur mélancolique, 
lorsqu'il est dans l'accès de son mal, croit voir et entendre des choses 
qu'il ne voit et n'entend réellement pas? Tel était celui qui disait :
"Quels monstres effrayants vêtus d'habits funèbres  
S'attachent à mes pas dans l'horreur des ténèbres,  
Et sur mon front brûlant agitent leurs flambeaux"?
Et ailleurs :
"dieux! entre ses bras je reconnais ma mère".
Ces sortes de personnes sont bien souvent le jouet d'illusions plus 
étranges encore, qu'on peut comparer à ces monstres que les épicuriens 
tournent en ridicule, et qui, selon Empédocle, ont des jambes tourtues, 
des pieds de bélier, un corps de taureau, une tête humaine, et toutes ces 
formes bizarres qu'enfante dans ses rêves une imagination en délire. Les 
épicuriens prétendent qu'il n'y a dans toutes ces extravagances ni erreur, 
ni mensonge, ni incohérence; que ce sont autant de perceptions vraies, 
autant de corps et de figures produites par l'air ambiant. De quoi donc 
pourra-t-on douter dans la nature, si de telles choses sont croyables? Ce 
que jamais aucun ouvrier en masque ou en figures bizarres, ni le peintre 
le plus hardi, n'oseraient hasarder pour surprendre ou amuser les 
spectateurs, ces philosophes en affirment sérieusement la réalité ; ils vont 
même jusqu'à dire que si cela n'existe point, il n'y a plus de confiance et 
de certitude, plus de discernement de la vérité. Par là ils mettent en tout 
de la perplexité, ils nous rendent timides dans nos jugements et incertains 
dans nos actions, parce que les choses que nous faisons ordinairement, 
que nous regardons comme certaines et que nous avons, pour ainsi dire, 
sous la main, ils les attribuent à la même imagination, et leur donnent la 
même confiance qu'à ces illusions maniaques aussi extravagantes 
qu'absurdes. Cette égalité qu'ils mettent entre les unes et les autres 
attire moins la confiance pour celles qui répugnent à la raison qu'elle ne 
l'ôte à celles qui passent pour certaines. Aussi connais-je bien des 
philosophes qui aimeraient mieux croire qu'il n'y a aucune perception de 
vraie, plutôt que d'admettre qu'elles le sont toutes. Ils se défieraient de 
l'existence de tous les hommes qu'ils voient, de tous les discours qu'ils 
entendent, de tous les corps qu'ils touchent, plutôt que de croire à la 
vérité et à l'existence d'une seule de ces illusions fantastiques enfantées 
dans un état de fureur ou dans les rêves extravagants d'une imagination 
délirante. 
« Puis donc qu'il y a des sensations qu'il faut rejeter et d'autres qu'on 
doit admettre, on peut toujours suspendre son jugement, quand on 
n'aurait d'autre motif que cette différence qui suffit pour jeter des 
soupçons sur la nature véritable des choses ; sans cela, nous n'aurions 
rien d'assuré, tout ne serait que confusion et qu'obscurité. Quant à 
l'infinité des mondes, à la nature des atomes, aux diversités des 
substances indivisibles et de leurs déclinaisons, quoiqu'elles jettent du 
trouble dans bien des esprits, on a du moins cette consolation que tous 
ces objets sont loin de nous, et que chacune de ces questions est hors de 
la portée de nos sens. Mais cette défiance, cette ignorance sur les objets 
qui affectent nos yeux, nos mains et nos oreilles, sur nos sensations et 
nos perceptions, cette incertitude sur leur vérité ou leur fausseté, quelle 
opinion n'ébranlent-t-elles pas? quel est le jugement qui n'en soit 
entièrement confondu, et qui puisse leur donner ou leur refuser son 
consentement ? Si des hommes qui ne sont ni ivres, ni fascinés, ni dans 
le délire, mais sobres et de sens rassis, qui donnent des règles pour bien 
juger de la vérité, 
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