[8] Οὐ ταῦτα δὲ μόνον ἐπιλογίζεσθαι δίδωσι τὸ προσέχειν
ἀεὶ τοῖς ἁλισκομένοις ὑπ´ ὀργῆς, ἀλλὰ καὶ τὴν ἄλλην
τοῦ θυμοῦ κατανοεῖν φύσιν, ὡς οὐκ εὐγενὴς οὐδ´ ἀνδρώδης
οὐδ´ ἔχουσα φρόνημα καὶ μέγεθός ἐστιν, ἀλλὰ δοκεῖ
τοῖς πολλοῖς τὸ ταρακτικὸν αὐτοῦ πρακτικὸν καὶ τὸ ἀπειλητικὸν
εὐθαρσὲς εἶναι καὶ τὸ ἀπειθὲς ἰσχυρόν. ἔνιοι δὲ
καὶ τὴν ὠμότητα μεγαλουργίαν καὶ τὸ δυσπαραίτητον
εὐτονίαν καὶ μισοπονηρίαν τὸ δύσκολον οὐκ ὀρθῶς τίθενται·
τὰ γὰρ ἔργα καὶ τὰ κινήματα καὶ τὰ σχήματα μικρότητα
πολλὴν καὶ ἀσθένειαν κατηγορεῖ, οὐ μόνον ἐν οἷς
παιδάρια σπαράττουσι καὶ πρὸς γύναια διαπικραίνονται
καὶ κύνας καὶ ἵππους καὶ ἡμιόνους οἴονται δεῖν κολάζειν,
ὡς Κτησιφῶν ὁ παγκρατιαστὴς ἀντιλακτίσαι τὴν ἡμίονον
ἀξιῶν, ἀλλὰ καὶ περὶ τὰς τυραννικὰς μιαιφονίας τῷ
πικρῷ τὸ μικρόψυχον αὐτῶν καὶ τῷ δρῶντι τὸ πεπονθὸς
ἐνορώμενον ἔοικε τοῖς δήγμασι τῶν ἑρπετῶν, ὅταν διακαῇ
καὶ περιώδυνα γένηται, τὴν φλεγμονὴν ἀπερειδομένων
σφοδρὰν τοῖς λελυπηκόσιν.
ὡς γὰρ οἴδημα μεγάλης ἐστὶν ἐν σαρκὶ πληγῆς πάθος,
οὕτως ἐν ταῖς μαλακωτάταις ψυχαῖς ἡ πρὸς τὸ λυπῆσαι
ἔνδοσις ἐκφέρει μείζονα θυμὸν ἀπὸ μείζονος ἀσθενείας.
διὸ καὶ γυναῖκες ἀνδρῶν ὀργιλώτεραι καὶ νοσοῦντες
ὑγιαινόντων καὶ γέροντες ἀκμαζόντων καὶ κακῶς
πράττοντες εὐτυχούντων. ὀργιλώτατος γὰρ ὁ φιλάργυρος
πρὸς τὸν οἰκονόμον, ὁ γαστρίμαργος πρὸς τὸν ὀψοποιόν,
ὁ ζηλότυπος πρὸς τὸ γύναιον, ὁ κενόδοξος κακῶς ἀκούσας·
χαλεπώτατοι δ´"ἄγαν φιλοτιμίαν μνώμενοι ἐν πόλεσιν
ἄνδρες· ἱστᾶσιν ἄλγος ἐμφανές" κατὰ Πίνδαρον. οὕτως ἐκ
τοῦ λυπουμένου μάλιστα τῆς ψυχῆς καὶ πάσχοντος
ἀνίσταται μάλιστα δι´ ἀσθένειαν ὁ θυμός, οὐχὶ νεύροις,
ὥς τις εἶπε, τῆς ψυχῆς ἐοικώς, ἀλλ´ ἐπιτάμασι καὶ
σπάσμασιν ἐν ταῖς ἀμυντικαῖς ὁρμαῖς σφοδρότερον ἐξανισταμένης.
| [8] Ces raisons ne sont pas les seules qui doivent nous déterminer
à faire attention à nous-mêmes quand nous sommes
en proie à la colère. Il faut encore étudier ce qu'est
d'ailleurs la nature de cette passion. Elle n'est ni noble,
ni courageuse, ni raisonnable, ni magnanime. Aux yeux
du vulgaire ses élans désordonnés passent pour de l'énergie,
ses menaces, pour une légitime assurance, son indocilité,
pour de la vigueur ; quelques-uns même veulent que
sa cruauté soit grandeur, son inflexibilité, constance, son
humeur chagrine, haine contre le vice. Mais c'est là une
opinion erronée. Tous les actes, tous les mouvements,
toutes les attitudes de la colère accusent, au rebours, une
impuissance et une faiblesse extrême. Je ne parle pas seulement
ici de ceux qui mutilent des petits enfants, qui s'emportent
contre de faibles femmes, qui se croient obligés de
châtier des chiens, des chevaux, des mulets : comme le
pancratiaste Ctésiphon se jugeait intéressé d'honneur à
rendre ruades pour ruades à sa mule. Je parle encore
de ces despotes dont la férocité aime à se souiller de sang.
La bassesse de leur âme se révèle dans la colère, et leurs actions
dévoilent d'affreux sentiments. Ils ressemblent à ces
reptiles, dont les morsures brûlantes et horriblement
douloureuses le deviennent encore davantage par la fureur des
animaux qui les ont faites.
De même qu'il survient une enflure dans les chairs à la suite
d'une forte contusion, de même les âmes les plus molles sont
celles en qui la propension à blesser provoque une colère d'autant
plus grande qu'il y a plus de faiblesse dans leur caractère. Aussi
les femmes sont-elles plus irascibles que les hommes; les malades,
que les gens bien portants; les vieillards, que les hommes dans la
force de l'âge; les malheureux, que les heureux.
Quelle violence dans la colère d'un avare contre son intendant,
d'un gourmand contre son cuisinier, d'un jaloux contre sa
maîtresse, d'un vaniteux contre un médisant!
Les plus intraitables, toutefois, sont ceux qui aspirent aux
honneurs du gouvernement, ou qui veulent devenir chefs de
partis, "Lutte pleine de trouble, et tourments glorieux!"
comme dit Pindare. C'est surtout à la suite d'un mécompte
éprouvé, que la colère éclate dans les esprits faibles. Et loin
que cette passion semble être, comme l'a dit quelqu'un, le
nerf de l'âme, ce sont bien plutôt des convulsions, des
spasmes excités par un désir immodéré de vengeance.
|