HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

PLUTARQUE, Oeuvres morales, Sur les moyens de réprimer la colère

Chapitre 5

  Chapitre 5

[5] Ἔστι γάρ τις, ἑταῖρε, πρώτη καθάπερ τυράννου κατάλυσις τοῦ θυμοῦ, μὴ πείθεσθαι μηδ´ ὑπακούειν προστάττοντος αὐτοῦ μέγα βοᾶν καὶ δεινὸν βλέπειν καὶ κόπτειν ἑαυτόν, ἀλλ´ ἡσυχάζειν καὶ μὴ συνεπιτείνειν ὥσπερ νόσημα ῥιπτασμῷ καὶ διαβοήσει τὸ πάθος. αἱ μὲν γὰρ ἐρωτικαὶ πράξεις, οἷον ἐπικωμάσαι καὶ ᾆσαι καὶ στεφανῶσαι θύραν, ἔχουσιν ἁμωσγέπως κουφισμὸν οὐκ ἄχαριν οὐδ´ ἄμουσον· "ἐλθὼν δ´ οὐκ ἐβόησα τίς τίνος, ἀλλ´ ἐφίλησα τὴν φλιήν. εἰ τοῦτ´ ἔστ´ ἀδίκημ´, ἀδικῶ". Αἵ τε τοῖς πενθοῦσιν ἐφέσεις τοῦ ἀποκλαῦσαι καὶ ἀποδύρασθαι πολύ τι τῆς λύπης ἅμα τῷ δακρύῳ συνεξάγουσιν· δὲ θυμὸς ἐκριπίζεται μᾶλλον οἷς πράττουσι καὶ λέγουσιν οἱ ἐν αὐτῷ καθεστῶτες. ἀτρεμεῖν οὖν κράτιστον φεύγειν καὶ ἀποκρύπτειν καὶ καθορμίζειν ἑαυτὸν εἰς ἡσυχίαν, ὥσπερ ἐπιληψίας ἀρχομένης συναισθανομένους, ἵνα μὴ πέσωμεν μᾶλλον δ´ ἐπιπέσωμεν· ἐπιπίπτομεν δὲ τοῖς φίλοις μάλιστά γε καὶ πλειστάκις, οὐ γὰρ πάντων ἐρῶμεν οὐδὲ πᾶσι φθονοῦμεν οὐδὲ πάντας φοβούμεθα, θυμῷ δ´ ἄθικτον οὐδὲν οὐδ´ ἀνεπιχείρητον, ἀλλ´ ὀργιζόμεθα καὶ πολεμίοις καὶ φίλοις καὶ τέκνοις καὶ γονεῦσι καὶ θεοῖς νὴ Δία καὶ θηρίοις καὶ ἀψύχοις σκεύεσιν, ὡς Θαμύρις "ῥηγνὺς χρυσόδετον κέρας, ῥηγνὺς ἁρμονίαν χορδοτόνου λύρας," καὶ Πάνδαρος αὑτῷ καταρώμενος, εἰ μὴ τὰ τόξα καταπρήσειε "χερσὶ διακλάσσας". δὲ Ξέρξης καὶ τῇ θαλάττῃ στίγματα καὶ πληγὰς ἐνέβαλλε καὶ πρὸς τὸ ὄρος ἐξέπεμπεν ἐπιστολάς "Ἄθω δαιμόνιε οὐρανόμηκες, μὴ ποιεῖν ἐν ἐμοῖς ἔργοις λίθους μεγάλους καὶ δυσκατεργάστους· εἰ δὲ μή, τεμὼν ῥίψω ς´ αὐτὸν εἰς θάλασσαν." πολλὰ γάρ ἐστι τοῦ θυμοῦ φοβερά, πολλὰ δὲ καὶ γελοῖα· διὸ καὶ μισεῖται καὶ καταφρονεῖται μάλιστα τῶν παθῶν. ἀμφότερα δ´ ἐσκέφθαι χρήσιμον. [5] Car il est, mon cher camarade, un premier moyen de s'affranchir de l'espèce de tyrannie qu'exerce une telle passion. C'est de lui résister, c'est de ne pas obéir quand elle veut nous contraindre à pousser de grands cris, à lancer des regards terribles, à nous frapper nous-mêmes. Loin de là, nous devons rester calmes et ne pas accroître, en gesticulant et en criant de toutes nos forces, l'intensite de la passion, ou plutôt de la maladie. Les distractions auxquelles se livrent les amoureux, à savoir les festins et les chants, leur empressement à couronner de guirlandes la porte d'une maîtresse, sont pour eux, jusqu'à un certain point, des allégements qui ne manquent ni de charme, ni d'élégance : "Arrivé, je n'ai pas crié : «Tel, fils d'un tel !» Mais j'ai baisé son seuil. Si ce crime est mortel, Je l'ai commis, c'est vrai ...". Les larmes et les sanglots dont on permet l'explosion chez ceux qui déplorent une perte, emportent avec eux une grande partie de la douleur. Mais le vertige de la colère s'augmente encore de ce que disent et ce que font ceux qu'elle possède. Le mieux est donc de ne pas bouger, ou bien de fuir, de se cacher, d'aller s'abriter dans une retraite paisible , comme en un port. C'est une épilepsie dont nous sentons les premières atteintes : gardons-nous d'y tomber, ou plutôt de tomber sur les autres. Car c'est sur nos amis de préférence et le plus souvent qu'il nous arrive de tomber. Tout le monde n'est pas indistinctement l'objet de notre amour, de notre envie, de notre crainte : mais il n'est personne que notre colère respecte et ménage. Nous nous irritons contre des ennemis, contre des amis, contre nos enfants, contre ceux à qui nous devons le jour. Les Dieux même, oui, les Dieux, les animaux, les objets inanimés, tout enfin excite notre colère. C'est ainsi que Thamyris "Brise son arc de ses doigts furieux, Brise sa lyre aux sons harmonieux". Pandarus jure, avec d'effroyables imprécations contre lui-même, qu'il anéantira ses flèches et les rompra de ses propres mains. Xerxès fait battre et fouetter la mer, et il envoie à une montagne une lettre ainsi conçue : "Superbe Athos, aussi élevé que le ciel, ne mets pas sous les mains de mes travailleurs des rochers trop énormes et trop difficiles à manoeuvrer; sinon, je t'abattrai et te précipiterai dans la mer." C'est qu'en effet, si la colère est souvent effrayante, souvent d'un autre côté elle est ridicule; et à cause de cela il n'y a point de passion qui soit plus haïe et plus méprisée. C'est une considération qu'il est utile de ne pas perdre de vue.


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Dernière mise à jour : 23/05/2005