HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

PLUTARQUE, Oeuvres morales, Sur les moyens de réprimer la colère

Chapitre 2

  Chapitre 2

[2] (ΦΟΥΝΔΑΝΟΣ) Καὶ μὴν ὧν γε μεμνήμεθα Μουσωνίου καλῶν ἕν ἐστιν, Σύλλα, τὸ δεῖν ἀεὶ θεραπευομένους βιοῦν τοὺς σῴζεσθαι μέλλοντας. οὐ γὰρ ὡς ἐλλέβορον, οἶμαι, δεῖ θεραπεύσαντα συνεκφέρεσθαι τῷ νοσήματι τὸν λόγον, ἀλλ´ ἐμμένοντα τῇ ψυχῇ συνέχειν τὰς κρίσεις καὶ φυλάσσειν. φαρμάκοις γὰρ οὐκ ἔοικεν ἀλλὰ σιτίοις ὑγιεινοῖς δύναμις αὐτοῦ, μετ´ εὐτονίας ἕξιν ἐμποιοῦσα χρηστὴν οἷς ἂν γένηται συνήθης· αἱ δὲ πρὸς ἀκμάζοντα τὰ πάθη καὶ οἰδοῦντα παραινέσεις καὶ νουθεσίαι σχολῇ μὲν ἀνύτουσι καὶ μόλις, οὐδενὶ δὲ τῶν ὀσφραντῶν διαφέρουσιν, τοὺς ἐπιληπτικοὺς ἐγείροντα πίπτοντας οὐκ ἀπαλλάττει τοῦ νοσήματος. ὅμως δὲ τὰ μὲν ἄλλα καὶ παρ´ ὃν ἀκμάζει καιρὸν ἁμωσγέπως ὑπείκει καὶ παρίησι βοηθοῦντα λόγον ἔξωθεν εἰς τὴν ψυχήν, δὲ θυμὸς οὐχ φησιν Μελάνθιος "τὰ δεινὰ πράσσει τὰς φρένας μετοικίσας," ἀλλ´ ἐξοικίσας τελείως καὶ ἀποκλείσας, ὥσπερ οἱ συνεμπιπράντες ἑαυτοὺς ταῖς οἰκίαις, πάντα ταραχῆς καὶ καπνοῦ καὶ ψόφου μεστὰ ποιεῖ τὰ ἐντός, ὥστε μήτ´ ἰδεῖν μήτ´ ἀκοῦσαι τῶν ὠφελούντων. διὸ μᾶλλον ἐν πελάγει καὶ χειμῶνι ναῦς ἔρημος ἀναλήψεται κυβερνήτην ἔξωθεν προσδέξεται λόγον ἀλλότριον ἄνθρωπος ἐν θυμῷ καὶ ὀργῇ σαλεύων, ἂν μὴ παρεσκευασμένον ἔχῃ τὸν οἰκεῖον λογισμόν. ἀλλ´ ὥσπερ οἱ πολιορκίαν προσδεχόμενοι συνάγουσι καὶ παρατίθενται τὰ χρήσιμα τὰς ἔξωθεν ἐλπίδας ἀπεγνωκότες, οὕτω μάλιστα δεῖ τὰ πρὸς τὸν θυμὸν βοηθήματα πόρρωθεν λαμβάνοντας ἐκ φιλοσοφίας κατακομίζειν εἰς τὴν ψυχήν, ὡς, ὅταν τῆς χρείας ἀφίκηται καιρός, μὴ ῥᾳδίως παρεισάγειν δυνησομένους. οὐδὲ γὰρ ἀκούει τῶν ἐκτὸς ψυχὴ διὰ τὸν θόρυβον, ἐὰν μὴ καθάπερ κελευστὴν ἔνδοθεν ἔχῃ τὸν αὑτῆς λόγον ὀξέως δεχόμενον καὶ συνιέντα τῶν παραγγελλομένων ἕκαστον· ἀκούσασα δὲ τῶν μὲν ἠρέμα καὶ πράως λεγομένων καταφρονεῖ, πρὸς δὲ τοὺς ἐνισταμένους τραχύτερον ἐρεθίζεται. καὶ γὰρ ὑπερήφανος καὶ αὐθάδης καὶ ὅλως ὑφ´ ἑτέρου δυσκίνητος θυμὸς ὢν ὥσπερ ὀχυρὰ τυραννὶς ἐξ ἑαυτῆς ἔχειν ὀφείλει σύνοικον καὶ συγγενὲς τὸ καταλῦον. [2] FUNDANUS. Eh bien, mon cher Sylla, une des plus belles maximes que nous ayons retenues de Musonius, est celle-ci : «qu'il faut soumettre sa conduite à un régime constant si l'on veut se sauver.» Il ne s'agit pas, selon moi, de voir dans la raison une sorte d'ellébore que l'on doive, après que l'on s'est soigné, rejeter au dehors comme on a rejeté son mal. Non : il faudra persister à la faire séjourner dans l'âme, dont elle contiendra, dont elle surveillera les décisions. Les puissants effets de la raison ressemblent non pas à ceux des drogues médicinales, mais à ceux d'une nourriture salutaire qui, avec la santé, garantit une bonne constitution à ceux qui en font un usage habituel. Mais les exhortations et les réprimandes que l'on oppose aux passions quand elles ont grandi et pris en quelque sorte leur développement, ne sont efficaces qu'avec peine et à la longue. Elles ne diffèrent en rien de ces odeurs fortes qui raniment les épileptiques à la suite d'un accès où ils sont tombés, mais qui ne font point disparaître le mal. Du reste les autres passions, lors même qu'elles sont le plus violentes, cèdent jusqu'à un certain point, et permettent que la raison vienne du dehors porter secours à l'âme. Mais il n'en est pas ainsi de la colère, qui, comme le dit Mélanthius, "Délogeant la raison, se livre à mille excès". Elle ne se contente pas de la déloger : elle la chasse, elle la bannit complétement. Comme ceux qui se brûlent avec leur propre maison, elle nous remplit à l'intérieur de trouble, de fumée, de bruit : en sorte que l'âme ne voit plus, n'entend plus rien de ce qui peut lui être profitable. C'est pour cela qu'un vaisseau abandonné au milieu de la tempête et en pleine mer recevrait plutôt un pilote du dehors, que n'acceptera une parole étrangère l'homme agité par les flots de la fureur et du courroux, si de longue main il n'a fait provision en soi-même des secours de la raison. De même que ceux qui s'attendent à être assiégés réunissent et disposent ce qui peut leur être utile, sans compter sur les ressources extérieures, de même c'est surtout contre la colère qu'il faut, longtemps d'avance, demander à la philosophie des secours dont on puisse fortifier son âme. Si l'on veut attendre le moment où l'on en aura besoin, il ne sera plus facile de pouvoir les y faire pénétrer. Le trouble intérieur de l'âme empêche qu'elle n'entende les voix du dehors, à moins qu'au dedans d'elle-même, en guise de commandant de manoeuvre, elle n'ait la raison, qui sache accueillir promptement chaque avis et le comprendre. Et même entendît-elle ces avis, elle méprise ceux qui lui sont adressés doucement et avec calme, comme elle s'irrite contre les réprimandes qui se dressent avec trop de liberté. C'est, en effet, une passion superbe et hautaine que la colère: elle ne se laisse pas facilement manier par autrui. Semblable à un tyran retranché dans une forteresse bien solide, il faut qu'elle emprunte d'elle-même, et que, par conséquent, elle ait naturellement en elle ce qui peut maîtriser sa violence.


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Dernière mise à jour : 23/05/2005