[6] Βούλεσθε τοὺς ἄνδρας εἰσάγωμεν αὐτοὺς τὰ σύμβολα
καὶ τὰ παράσημα τῶν ἔργων κομίζοντας, ἰδίαν ἑκατέρῳ
πάροδον ἀποδόντες; ἔνθεν μὲν δὴ προσίτωσαν ὑπ´ αὐλοῖς
καὶ λύραις ποιηταὶ λέγοντες καὶ ᾄδοντες
’εὐφημεῖν χρὴ κἀξίστασθαι τοῖς ἡμετέροισι χοροῖσιν
ὅστις ἄπειρος τοιῶνδε λόγων ἢ γνώμῃ μὴ καθαρεύει,
ἢ γενναίων ὄργια Μουσῶν μήτ´ ᾖσεν μήτ´ ἐχόρευσε,
μηδὲ Κρατίνου τοῦ ταυροφάγου γλώσσης βακχεῖ´ ἐτελέσθη·‘
καὶ σκευὰς καὶ προσωπεῖα καὶ βωμοὺς καὶ μηχανὰς ἀπὸ
σκηνῆς περιάκτους καὶ τρίποδας ἐπινικίους κομίζοντες·
τραγικοὶ δ´ αὐτοῖς ὑποκριταὶ {καὶ} Νικόστρατοι καὶ
Καλλιππίδαι καὶ Μηνίσκοι καὶ Θεόδωροι καὶ Πῶλοι
συνίτωσαν, ὥσπερ γυναικὸς πολυτελοῦς τῆς τραγῳδίας
κομμωταὶ καὶ διφροφόροι, μᾶλλον δ´ ὡς ἀγαλμάτων
ἐγκαυσταὶ καὶ χρυσωταὶ καὶ βαφεῖς παρακολουθοῦντες·
σκευῶν δὲ καὶ προσώπων καὶ ξυστίδων ἁλουργῶν καὶ
μηχανῶν ἀπὸ σκηνῆς καὶ χοροποιῶν καὶ δορυφόρων
δυσπραγμάτευτος λαὸς καὶ χορηγία πολυτελὴς παρασκευαζέσθω.
πρὸς ἃ Λάκων ἀνὴρ ἀποβλέψας οὐ κακῶς
εἶπεν, ὡς ἁμαρτάνουσιν Ἀθηναῖοι μεγάλα τὴν σπουδὴν
εἰς τὴν παιδιὰν καταναλίσκοντες, τουτέστι μεγάλων ἀποστόλων
δαπάνας καὶ στρατευμάτων ἐφόδια καταχορηγοῦντες
εἰς τὸ θέατρον. ἂν γὰρ ἐκλογισθῇ | τῶν δραμάτων
ἕκαστον ὅσου κατέστη, πλέον ἀνηλωκὼς φανεῖται ὁ δῆμος
εἰς Βάκχας καὶ Φοινίσσας καὶ Οἰδίποδας καὶ Ἀντιγόνην
καὶ τὰ Μηδείας κακὰ καὶ Ἠλέκτρας, ὧν ὑπὲρ τῆς
ἡγεμονίας καὶ τῆς ἐλευθερίας πολεμῶν τοὺς βαρβάρους
ἀνάλωσεν. οἱ μὲν γὰρ στρατηγοὶ πολλάκις παραγγείλαντες
ἄπυρα σιτία κομίζειν ἐξῆγον ἐπὶ τὰς μάχας τοὺς ἄνδρας·
καὶ νὴ Δί´ οἱ τριήραρχοι τοῖς ἐλαύνουσιν ἄλφιτα παρασκευάσαντες,
ὄψον δὲ κρόμμυα καὶ τυρόν, ἐνεβίβαζον
εἰς τὰς τριήρεις· οἱ δὲ χορηγοὶ τοῖς χορευταῖς ἐγχέλεια
καὶ θριδάκια καὶ σκελίδας καὶ μυελὸν παρατιθέντες,
εὐώχουν ἐπὶ πολὺν χρόνον φωνασκουμένους καὶ τρυφῶντας.
καὶ τούτων τοῖς μὲν ἡττηθεῖσι περιῆν προσυβρίσθαι
καὶ γεγονέναι καταγελάστους· τοῖς δὲ νικήσασιν
ὁ τρίπους ὑπῆρχεν, οὐκ ἀνάθημα τῆς νίκης, ὡς Δημήτριός
φησιν, ἀλλ´ ἐπίσπεισμα τῶν ἐκκεχυμένων βίων καὶ τῶν
ἐκλελοιπότων κενοτάφιον οἴκων. τοιαῦτα γὰρ τὰ ποιητικῆς
τέλη καὶ λαμπρότερον οὐδὲν ἐξ αὐτῶν.
| [6] Voulez-vous que nous introduisions des deux parts les
personnages, apportant eux-mêmes des marques, des
échantillons de leur puissance respective, et que nous leur
ménagions successivement une entrée? De ce côté donc,
voyons s'avancer les poètes au son des flûtes et des lyres.
Ils chantent, et disent :
"Sur les lèvres n'ayons que mots de bon augure.
Qu'il s'éloigne des choeurs célébrés en ces lieux
Celui qui n'entend rien à nos discours pieux,
Le profane, à la bouche impure,
Qui, danseur ou chanteur, Muses, dans vos mystères
Ne figura jamais; que le mange-taureaux,
Bacchus, n'initia jamais, près de Paros,
A ses entretiens solitaires" {Aristophane, Les grenouilles}.
Ils apportent leur attirail, leurs masques, leurs autels,
leurs machines mobiles, leurs trépieds, prix de victoires.
Voici les acteurs tragiques qui leur servent d'interprètes,
les Nicostrate, les Callipide, les Menisque, les Théodore,
les Polus : qu'ils soient tous réunis. Entre leurs mains la
tragédie est comme une femme de condition riche ; ils la
couvrent de parures, ils la mettent sur un char. Ou plutôt,
c'est une statue, par eux travaillée à l'encaustique, dorée,
enluminée, et à la suite de laquelle ils s'avancent. Derrière
eux, c'est une quantité incroyable d'appareils, de masques, de
manteaux d'écarlate, de machines de théâtre ; c'est tout un
monde difficile à manoeuvrer, un peuple de choristes, de
gardes ; enfin un matériel des plus coûteux, qu'ils ont organisé.
C'est à la vue de ces dépenses qu'un Spartiate
disait non sans raison : «Les Athéniens ont grand tort
de se ruiner sérieusement pour des plaisanteries.» Il voulait
dire : «ont grand tort de consacrer à des jeux, à des
théâtres, l'argent qu'ils devraient employer à l'équipement
d'imposantes flottes et aux frais de route de leurs armées.»
En effet, si l'on calcule combien leur coûte chaque pièce
de théâtre, on verra que le peuple athénien a prodigué
plus d'argent pour les Bacchantes, les Phéniciennes, pour
les Oedipes, pour Antigone, pour les malheurs de Médée et
ceux d'Electre, qu'elle n'en a dépensé dans les guerres par
elle soutenues contre les Barbares pour l'empire de la
Grèce et pour la liberté. Les généraux souvent faisaient
prendre aux soldats des provisions qui n'avaient pas même
été présentées au feu, et ils les emmenaient ainsi au combat.
Que dis-je! Les capitaines de galères ne donnaient à leur
équipage que de la farine, et pour tous mets que des oignons
et du fromage, puis ils les embarquaient ainsi. Mais les
entrepreneurs des jeux servaient à leurs acteurs des anguilles,
des laitues, des jambons , de la moelle, leur donnant
ainsi la meilleure chère tant que ceux-ci s'exerçaient
la voix au milieu de ce régime tout sensuel. Si ces artistes
étaient vaincus, il leur arrivait en outre d'être hués et de
devenir un objet de moquerie. Si au contraire ils étaient
vainqueurs, ils n'avaient, comme dit Démétrius, ni trépieds
ni autres prix des victorieux, et ils donnaient le triste exemple
de gens qui ont follement dissipé leur vie et abandonné
leurs maisons comme des tombeaux vides.
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