[36] (1) Τῶν δὲ μισούντων τὸν Ἀλκιβιάδην ἐν τῷ στρατοπέδῳ
Θρασύβουλος ὁ Θράσωνος ἐχθρὸς ὢν ἀπῆρεν
εἰς Ἀθήνας κατηγορήσων, (2) καὶ τοὺς ἐκεῖ παροξύνας ἔλεγε
πρὸς τὸν δῆμον, ὡς Ἀλκιβιάδης διέφθαρκε τὰ πράγματα
καὶ τὰς ναῦς ἀπολώλεκεν, ἐντρυφῶν τῇ ἀρχῇ καὶ παραδιδοὺς
τὴν στρατηγίαν ἀνθρώποις ἐκ πότων καὶ ναυτικῆς
σπερμολογίας δυναμένοις παρ´ αὐτῷ μέγιστον, ὅπως
αὐτὸς ἐπ´ ἀδείας χρηματίζηται περιπλέων, καὶ ἀκολασταίνῃ
μεθυσκόμενος καὶ συνὼν ἑταίραις Ἀβυδηναῖς καὶ
Ἰωνίσιν, ἐφορμούντων δι´ ὀλίγου τῶν πολεμίων. (3) ἐνεκάλουν
δ´ αὐτῷ καὶ τὴν τῶν τειχῶν κατασκευήν, ἃ κατεσκεύασεν
ἐν Θρᾴκῃ περὶ Βισάνθην ἑαυτῷ καταφυγήν, ὡς
ἐν τῇ πατρίδι μὴ δυνάμενος βιοῦν ἢ μὴ βουλόμενος. (4) οἱ
δ´ Ἀθηναῖοι πεισθέντες ἑτέρους εἵλοντο στρατηγούς, ἐνδεικνύμενοι
τὴν πρὸς ἐκεῖνον ὀργὴν καὶ κακόνοιαν. (5) ἃ
δὴ πυνθανόμενος ὁ Ἀλκιβιάδης καὶ δεδοικώς, ἀπῆλθεν
ἐκ τοῦ στρατοπέδου παντάπασι, καὶ συναγαγὼν ξένους
ἐπολέμει τοῖς ἀβασιλεύτοις Θρᾳξὶν ἰδίᾳ, καὶ πολλὰ χρήματα
συνῆγεν ἀπὸ τῶν ἁλισκομένων, καὶ τοῖς Ἕλλησιν
ἅμα τοῖς προσοικοῦσιν ἄδειαν ἀπὸ τῶν βαρβάρων παρεῖχεν.
(6) Ἐπεὶ δ´ οἱ περὶ Τυδέα καὶ Μένανδρον καὶ Ἀδείμαντον
στρατηγοί, πάσας ὁμοῦ τὰς ὑπαρχούσας τότε ναῦς
τοῖς Ἀθηναίοις ἔχοντες ἐν Αἰγὸς ποταμοῖς, εἰώθεσαν ἐπιπλεῖν
τῷ Λυσάνδρῳ ναυλοχοῦντι περὶ Λάμψακον ἅμ´
ἡμέρᾳ προκαλούμενοι, καὶ πάλιν ἀναστρέφειν ὀπίσω καὶ
διημερεύειν ἀτάκτως καὶ ἀμελῶς, ἅτε δὴ καταφρονοῦντες,
ἐγγὺς ὢν ὁ Ἀλκιβιάδης οὐ περιεῖδεν οὐδ´ ἠμέλησεν,
ἀλλ´ ἵππῳ προσελάσας ἐδίδασκε τοὺς στρατηγούς, ὅτι
κακῶς ὁρμοῦσιν ἐν χωρίοις ἀλιμένοις καὶ πόλιν οὐκ ἔχουσιν,
ἀλλὰ πόρρωθεν ἐκ Σηστοῦ τὰ ἐπιτήδεια λαμβάνοντες
καὶ περιορῶντες τὸ ναυτικόν, ὅταν ἐπὶ γῆς γένηται,
πλανώμενον ὅπῃ τις θέλοι καὶ διασπειρόμενον, ἀντεφορμοῦντος
αὐτοῖς στόλου μεγάλου, πρὸς ἐπίταγμα μοναρχικὸν
εἰθισμένου σιωπῇ πάντα ποιεῖν.
| [36] (1) Au nombre de ceux qui, dans le camp de Samos,
haïssaient Alcibiade, il y avait Thrasybule, fils de
Thrason, qui, dans des dispositions hostiles, partit pour
Athènes afin de l'y mettre en accusation. (2) Et là,
excitant les gens, il disait au peuple qu'Alcibiade avait
ruiné les affaires et perdu ses vaisseaux parce qu'il se
moquait bien de sa responsabilité de chef et livrait le
commandement militaire à des hommes qui, au sortir de
beuveries et de grossières farces de marins, prenaient sur
lui un immense pouvoir; son commandement, il s'en était
dessaisi afin de pouvoir, en toute sécurité, faire lui-même
de l'argent en bourlinguant et se livrer à la débauche, en
s'enivrant et en fréquentant des courtisanes d'Abydos et
d'Ionie: tout cela, tandis que l'ennemi mouillait à peu de
distance! (3) D'autre part, on lui reprochait aussi la
construction du château-fort qu'il s'était aménagé en Thrace
près de Bisanthè, en guise de refuge, comme s'il ne pouvait
ou ne voulait pas vivre dans sa patrie. (4) Les Athéniens,
édifiés, désignèrent d'autres stratèges, montrant par là
leur colère et leur ressentiment contre lui. (5) Ce
qu'apprenant, Alcibiade, saisi de crainte, quitta
définitivement le camp. Ayant rassemblé des mercenaires, il
faisait à titre personnel la guerre aux Thraces, qui étaient
sans roi; il amassait une fortune considérable grâce à ses
prises, en même temps qu'il assurait la sécurité vis-à-vis
des Barbares des Grecs installés à proximité. (6) Les
stratèges Tydée, Ménandre et Adimante avaient réuni à Aigos
Potamoi tous les vaisseaux appartenant alors aux Athéniens
et pris l'habitude de faire voile dès l'aube contre
Lysandre, qui mouillait près de Lampsaque; ils le
provoquaient, faisaient ensuite demi-tour et passaient leur
journée d'une manière désordonnée et négligente, parce
qu'ils étaient pleins de mépris pour l'adversaire.
Alcibiade, qui se trouvait dans les parages, ne put souffrir
cela dans l'indifférence et l'insouciance; arrivant à
cheval, il représentait aux stratèges qu'ils étaient mal
ancrés, à un emplacement dépourvu de port et de ville, qu'il
leur fallait aller prendre le nécessaire bien loin de là, à
Sestos, en tolérant que les équipages, chaque fois qu'on
était à terre, errent et se dispersent à leur guise, alors
même que mouillait en face d'eux une flotte importante,
accoutumée à tout faire en silence au commandement d'un seul chef.
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