[28] (1) Τριάκοντα δ´ ἡμερῶν διαγενομένων ὁ Ἀλκιβιάδης
ἵππου ποθὲν εὐπορήσας καὶ ἀποδρὰς τοὺς φύλακας, εἰς
Κλαζομενὰς διέφυγε, (2) καὶ τὸν μὲν Τισσαφέρνην προσδιέβαλλεν
ὡς ὑπ´ ἐκείνου μεθειμένος, αὐτὸς δὲ πλεύσας εἰς
τὸ στρατόπεδον τῶν Ἀθηναίων, καὶ πυθόμενος Μίνδαρον
ὁμοῦ καὶ Φαρνάβαζον ἐν Κυζίκῳ γεγονέναι, τοὺς μὲν στρατιώτας
παρώρμησεν, ὡς ἀνάγκην οὖσαν αὐτοῖς καὶ ναυμαχεῖν
καὶ πεζομαχεῖν καὶ νὴ Δία τειχομαχεῖν πρὸς τοὺς πολεμίους·
χρήματα γὰρ οὐκ εἶναι μὴ πάντῃ κρατοῦσι· (3) πληρώσας
δὲ τὰς ναῦς καὶ κατάρας εἰς Προικόννησον, ἐκέλευσεν
ἐντὸς περιβάλλειν τὰ λεπτὰ πλοῖα καὶ παραφυλάσσειν,
ὅπως μηδεμία τοῖς πολεμίοις ἐπιπλέοντος αὐτοῦ γένοιτο
μηδαμόθεν προαίσθησις. (4) ἔτυχε δὲ καὶ πολὺν ὄμβρον ἐξαίφνης
ἐπιπεσόντα καὶ βροντὰς καὶ ζόφον συνεργῆσαι καὶ
συνεπικρύψαι τὴν παρασκευήν. οὐ γὰρ μόνον τοὺς πολεμίους
ἔλαθεν, ἀλλὰ καὶ τοὺς Ἀθηναίους ἀπεγνωκότας
ἤδη ἐμβῆναι κελεύσας ἀνήχθη. (5) καὶ μετὰ μικρὸν ὅ τε ζόφος
διελύθη, καὶ κατώφθησαν αἱ τῶν Πελοποννησίων νῆες
αἰωρούμεναι πρὸ τοῦ λιμένος τῶν Κυζικηνῶν. (6) δείσας οὖν
ὁ Ἀλκιβιάδης, μὴ διὰ τὸ πλῆθος αὐτῶν προϊδόντες εἰς τὴν
γῆν καταφύγωσι, τοὺς μὲν στρατηγοὺς ἐκέλευσεν ἡσυχῇ
πλεῖν ὑπολιπομένους, αὐτὸς δὲ τετταράκοντα ναῦς ἔχων
ἐφαίνετο καὶ προὐκαλεῖτο τοὺς πολεμίους. (7) ἐπεὶ δ´ ἐξηπάτηντο
καὶ καταφρονήσαντες ὡς ἐπὶ τοσαύτας ἀντεξήλασαν,
αὐτοὶ μὲν εὐθὺς ἐξήπτοντο καὶ συνεπλέκοντο, τῶν
δ´ ἄλλων ἤδη μαχομένοις ἐπιφερομένων, ἐκπλαγέντες
ἔφευγον. (8) ὁ δ´ Ἀλκιβιάδης εἴκοσι ταῖς ἀρίσταις διεκπλεύσας
καὶ προσβαλὼν τῇ γῇ καὶ ἀποβάς, ἐνέκειτο τοῖς φεύγουσιν
ἐκ τῶν νεῶν καὶ πολλοὺς ἔφθειρε· Μινδάρου δὲ καὶ
Φαρναβάζου προσβοηθούντων κρατήσας, τὸν μὲν Μίνδαρον
ἀνεῖλεν ἐρρωμένως ἀγωνιζόμενον, ὁ δὲ Φαρνάβαζος
ἔφυγε. (9) πολλῶν δὲ καὶ νεκρῶν καὶ ὅπλων κρατήσαντες,
τάς τε ναῦς ἁπάσας λαβόντες, χειρωσάμενοι δὲ καὶ Κύζικον,
ἐκλιπόντος τοῦ Φαρναβάζου καὶ τῶν Πελοποννησίων
διαφθαρέντων, οὐ μόνον τὸν Ἑλλήσποντον εἶχον βεβαίως,
ἀλλὰ καὶ τῆς ἄλλης θαλάττης ἐξήλασαν κατὰ κράτος τοὺς
Λακεδαιμονίους. (10) ἑάλω δὲ καὶ γράμματα Λακωνικὰ φράζοντα
τοῖς ἐφόροις τὴν γεγενημένην ἀτυχίαν· "ἔρρει τὰ
κᾶλα· Μίνδαρος ἀπεσσούα· πεινῶντι τὦνδρες· ἀπορίομες
τί χρὴ δρᾶν."
| [28] (1) Trente jours se passent. Ayant pu se procurer
quelque part un cheval, Alcibiade fausse compagnie à ses
gardiens et se réfugie à Clazomènes. (2) De surcroît, il
calomniait Tissapherne en prétendant que c'est par celui-ci
qu'il venait d'être relâché! Quant à lui, il rejoignit par
mer le camp des Athéniens; ayant appris que Mindaros et
Pharnabaze étaient ensemble à Cyzique, il galvanisa ses
soldats en disant qu'il y avait nécessité pour eux de se
battre sur mer et sur terre et même, parbleu!, de s'attaquer
aux remparts des ennemis: pas d'argent si l'on n'est pas
entièrement vainqueur! (3) Ayant chargé ses navires, il
aborda à Proconnèse et ordonna d'y enfermer sous bonne
surveillance les vaisseaux légers afin que, de nulle part,
ne parvienne aux ennemis le moindre indice de sa propre
avancée. (4) Il se trouve qu'en plus une forte pluie se mit
à tomber, avec des coups de tonnerre et une obscurité qui
aidèrent Alcibiade à dissimuler sa manoeuvre. Non seulement
les ennemis n'y virent que du feu, mais les Athéniens mêmes
étaient au désespoir: alors, il leur ordonna d'embarquer et
il gagna la mer avec eux. (5) Peu après l'obscurité se
dissipa et l'on vit les vaisseaux péloponnésiens se
balançant devant le port de Cyzique. (6) Craignant qu'au vu
du grand nombre de ses vaisseaux, les Lacédémoniens ne se
réfugient à l'intérieur des terres, Alcibiade ordonna aux
stratèges, ses collègues, de naviguer tranquillement en
restant en arrière; et lui-même d'apparaître avec quarante
vaisseaux seulement, en provoquant les ennemis. (7)
Ceux-ci-ci s'y laissent prendre et, méprisants, se lancent
contre des forces qu'ils jugent piètres; mais tandis qu'il
s'engageaient directement et en venaient aux prises, le
reste des navires athéniens se porte derechef contre les
combattants ennemis, lesquels, frappés de terreur, prennent
la fuite. (8) Alcibiade, avec ses vingt meilleurs vaisseaux,
passe au travers de la flotte adverse, aborde le rivage,
débarque et, pourchassant ceux qui fuient les navires, il en
tue un grand nombre; vainqueur de Mindaros et de Pharnabaze
venus à la rescousse, il élimine Mindaros qui luttait de
toutes ses forces tandis que Pharnabaze s'enfuit. (9)
Quantité de cadavres et d'armes étaient aux mains des
Athéniens qui, s'étant emparés de tous les vaisseaux
ennemis, soumirent encore Cyzique, une fois Pharnabaze en
fuite et les Péloponnésiens, exterminés. Ainsi, non
seulement Athènes tenait-elle solidement l'Hellespont mais
encore expulsait-elle de force les Péloponnésiens du reste
de la mer. (10) On saisit même une dépêche laconique
rapportant aux éphores le malheur survenu: "Vaisseaux
perdus; Mindaros, éliminé; nos hommes ont faim; ne savons
que faire".
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