[6,5,10] Μένει οὖν ἐν ἑαυτῷ σωφρονοῦν καὶ οὐκ ἂν ἐν ἄλλῳ γένοιτο· ἐκεῖνα δὲ τὰ ἄλλα ἀνήρτηται εἰς αὐτὸ ὥσπερ οὗ ἐστι πόθῳ ἐξευρόντα. Καὶ οὗτός ἐστιν ὁ θυραυλῶν Ἔρως παρὼν ἔξωθεν ἀεὶ καὶ ἐφιέμενος τοῦ καλοῦ καὶ ἀγαπῶν ἀεὶ οὕτως ὡς δύναιτο μετασχεῖν· ἐπεὶ καὶ ὁ ἐνταῦθα ἐραστὴς οὐ δεχόμενος τὸ κάλλος, ἀλλὰ παρακείμενος οὕτως ἔχει. Τὸ δὲ ἐφ´ ἑαυτοῦ μένει, καὶ οἱ ἑνὸς ἐρασταὶ πολλοὶ ὅλου ἐρῶντες ὅλον ἔχουσιν οὕτως, ὅταν ἔχωσι· τὸ γὰρ ὅλον ἦν τὸ ἐρώμενον. Πῶς ἂν οὖν ἐκεῖνο οὐκ ἂν πᾶσιν ἀρκοῖ μένον; Ἐπεὶ καὶ διὰ τοῦτο ἀρκεῖ, ὅτι μένει, καὶ καλόν, ὅτι πᾶσιν ὅλον.
Καὶ γὰρ καὶ τὸ φρονεῖν πᾶσιν ὅλον· διὸ καὶ ξυνὸν τὸ φρονεῖν, οὐ τὸ μὲν ὧδε, τὸ δὲ ὡδὶ ὄν· γελοῖον γάρ, καὶ τόπου δεόμενον τὸ φρονεῖν ἔσται. Καὶ οὐχ οὕτω τὸ φρονεῖν, ὡς τὸ λευκόν· οὐ γὰρ σώματος τὸ φρονεῖν· ἀλλ´ εἴπερ ὄντως μετέχομεν τοῦ φρονεῖν, ἓν δεῖ εἶναι τὸ αὐτὸ πᾶν ἑαυτῷ συνόν. Καὶ οὕτως ἐκεῖθεν, οὐ μοίρας αὐτοῦ λαβόντες, οὐδὲ ὅλον ἐγώ, ὅλον δὲ καὶ σύ, ἀποσπασθὲν ἑκάτερον ἑκατέρου. Μιμοῦνται δὲ καὶ ἐκκλησίαι καὶ πᾶσα σύνοδος ὡς εἰς ἓν τὸ φρονεῖν ἰόντων· καὶ χωρὶς ἕκαστος εἰς τὸ φρονεῖν ἀσθενής, συμβάλλων δὲ εἰς ἓν πᾶς ἐν τῇ συνόδῳ καὶ τῇ ὡς ἀληθῶς συνέσει τὸ φρονεῖν ἐγέννησε καὶ εὗρε· τί γὰρ δὴ καὶ διείρξει, ὡς μὴ ἐν τῷ αὐτῷ εἶναι νοῦν ἀπ´ ἄλλου; Ἀλλ´ ὁμοῦ ὄντες ἡμῖν οὐχ ὁμοῦ δοκοῦσιν εἶναι· οἷον εἴ τις πολλοῖς τοῖς δακτύλοις ἐφαπτόμενος τοῦ αὐτοῦ ἄλλου καὶ ἄλλου ἐφάπτεσθαι νομίζοι, ἢ τὴν αὐτὴν χορδὴν μὴ ὁρῶν κρούοι.
Καίτοι καὶ ταῖς ψυχαῖς ὡς ἐφαπτόμεθα τοῦ ἀγαθοῦ ἐχρῆν ἐνθυμεῖσθαι. Οὐ γὰρ ἄλλου μὲν ἐγώ, ἄλλου δὲ σὺ ἐφάπτῃ, ἀλλὰ τοῦ αὐτοῦ, οὐδὲ τοῦ αὐτοῦ μέν, προσελθόντος δέ μοι ῥεύματος ἐκεῖθεν ἄλλου, σοὶ δὲ ἄλλου, ὥστε τὸ μὲν εἶναί που ἄνω, τὰ δὲ παρ´ αὐτοῦ ἐνταῦθα. Καὶ 〈δίδωσι〉 τὸ διδὸν τοῖς λαμβάνουσιν, ἵνα ὄντως λαμβάνωσι, {καὶ δίδωσι τὸ διδὸν} οὐ τοῖς ἀλλοτρίοις, ἀλλὰ τοῖς ἑαυτοῦ. Ἐπεὶ οὐ πόμπιος ἡ νοερὰ δόσις. Ἐπεὶ καὶ ἐν τοῖς διεστηκόσιν ἀπ´ ἀλλήλων τοῖς τόποις σώμασιν ἡ δόσις ἄλλου ἄλλου συγγενής, καὶ εἰς αὐτὸ ἡ δόσις καὶ ἡ ποίησις, καὶ τό γε σωματικὸν τοῦ παντὸς δρᾷ καὶ πάσχει ἐν αὐτῷ, καὶ οὐδὲν ἔξωθεν εἰς αὐτό. Εἰ δὴ ἐπὶ σώματος οὐδὲν ἔξωθεν τοῦ ἐκ φύσεως οἷον φεύγοντος ἑαυτό, ἐπὶ πράγματος ἀδιαστάτου πῶς τὸ ἔξωθεν; Ἐν τῷ αὐτῷ ἄρα ὄντες καὶ ὁρῶμεν τἀγαθὸν καὶ ἐφαπτόμεθα αὐτοῦ ὁμοῦ ὄντες τοῖς ἡμετέροις νοητοῖς.
Καὶ κόσμος εἷς πολὺ μᾶλλον ἐκεῖ· ἢ δύο κόσμοι αἰσθητοὶ ἔσονται ὅμοια μεμερισμένοι, καὶ ἡ σφαῖρα ἡ νοητή, εἰ οὕτως ἕν, ὡς αὕτη· ὥστε διοίσει ἢ γελοιοτέρα ἔσται, εἴπερ τῇ μὲν ἐξ ἀνάγκης ὄγκος καὶ εὔλογος, ἡ δὲ μηδὲν δεομένη ἐκτενεῖ ἑαυτὴν καὶ ἑαυτῆς ἐκστήσεται. Τί δὲ καὶ ἐμπόδιον τοῦ εἰς ἕν; Οὐ γὰρ δὴ τὸ ἕτερον ἀπωθεῖ θάτερον τόπον οὐ παρέχον — ὥσπερ οὐχ ὁρῶντες πᾶν μάθημα καὶ θεώρημα καὶ ὅλως ἐπιστήμας πάσας ἐπὶ ψυχῆς οὐ στενοχωρουμένας. Ἀλλ´ ἐπὶ οὐσιῶν φήσει τις οὐ δυνατόν. Ἀλλ´ οὐ δυνατὸν ἦν ἄν, εἴπερ ὄγκοι ἦσαν αἱ ἀληθιναὶ οὐσίαι.
| [6,5,10] X. Cet Être demeure donc sagement en lui-même, et il ne saurait devenir inhérent aux autres choses. Ce sont celles-ci au contraire qui viennent se suspendre à lui, cherchant comme avec passion où il se trouve. C'est là cet amour qui veille à la porte de ce qu'il aime, qui se tient toujours près du beau, agile du désir de le posséder et s'estimant heureux d'avoir part à ses dons. En effet, l'amant de la céleste beauté ne reçoit pas la beauté même, mais, comme il se trouve près d'elle, il a part à ses faveurs, tandis qu'elle demeure immuable en elle-même. Il y a ainsi beaucoup d'êtres qui aiment une seule et même chose, qui l'aiment tout entière, et qui, lorsqu'ils la possèdent, la possèdent tout entière dans la mesure où ils en sont capables : car c'est tout entière qu'ils souhaitent la posséder. Pourquoi donc cet Être ne suffirait-il pas seul à tous en demeurant en soi? Il suffit précisément parce qu'il demeure en soi : il est beau, parce qu'il est tout entier présent à tous.
La Raison est aussi tout entière pour tous; elle est commune à tous, parce qu'elle n'est pas différente en différents lieux : il serait en effet ridicule qu'elle eût besoin d'être dans un lieu. La Raison d'ailleurs ne ressemble pas à la blancheur : car {la blancheur est la qualité d'un corps, tandis que} la Raison n'appartient en rien au corps. Si nous participons réellement à la Raison, nous aspirons nécessairement à une chose une et identique, qui existe en elle-même tout entière à la fois. Quand nous participons à cette Raison, nous ne la recevons pas par fragments, mais tout entière, et la Raison que tu possèdes tout entière n'est pas différente de celle que je possède moi-même. Nous trouvons une image de cette unité de la Raison dans les assemblées et dans les réunions, où tous les assistants paraissent concourir à former une Raison unique : il semble que chacun, isolé des autres, soit impuissant à trouver la Raison, mais que, dans une réunion où il y a concert entre les esprits, tous ensemble, en s'appliquant à un seul objet, engendrent ou plutôt découvrent la Raison. Qui empêche en effet que des esprits différents ne soient unis au sein d'une seule et même Intelligence? Quoique l'Intelligence nous soit ainsi commune avec les autres hommes, nous ne nous apercevons pas de cette communauté. C'est comme si, touchant un seul objet avec plusieurs doigts, on s'imaginait par suite qu'on touche plusieurs objets; ou bien encore c'est comme si l'on frappait une seule corde de la lyre sans la voir {et en croyant toucher des cordes différentes}.
Revenons à notre sujet. Nous avions à rechercher comment nous atteignons le Bien avec nos âmes. Le Bien que tu atteins n'est pas différent de celui que j'atteins moi-même ; il est le même. Et quand je dis qu'il est le même, je n'entends pas que du Bien découlent sur nous deux des choses différentes, de telle sorte qu'il soit, lui, quelque part là-haut, tandis que ses dons descendent ici-bas ; j'entends au contraire que Celui qui donne est présent à ceux qui reçoivent, afin que ceux-ci reçoivent véritablement ; j'entends de plus qu'il fait ses dons à des êtres qui lui sont intimement unis, et non à des êtres qui lui seraient étrangers : car les dons intellectuels ne se communiquent pas d'une manière locale. On voit même des corps différents, malgré la distance qui les sépare, recevoir les mêmes dons, parce que le don accordé et l'effet produit aboutissent à une même chose ; bien plus, toutes les actions et les passions qui se produisent dans le corps de l'univers sont contenues dans son sein, et rien ne lui vient du dehors. Or si un corps, qui par sa nature se fuit en quelque sorte lui-même {parce qu'il est dans un écoulement perpétuel}, ne reçoit cependant rien du dehors, comment une essence qui n'a point d'étendue tiendrait-elle quelque chose du dehors? Par conséquent, étant tous contenus dans un seul et même principe, nous voyons le Bien et nous le touchons tous ensemble par la partie intelligible de notre être.
D'ailleurs, le monde intelligible a bien plus d'unité que le monde sensible : autrement, il y aurait deux mondes sensibles, puisque la sphère intelligible ne différerait pas de la sphère sensible si elle n'avait pas plus d'unité que cette dernière. Elle l'emportera donc sous le rapport de l'unité. Il serait en effet ridicule d'admettre que l'une des deux sphères eût une étendue conforme à sa nature, tandis que l'autre, sans aucune nécessité, s'étendrait et s'écarterait de son centre. Pourquoi dans le monde intelligible toutes choses ne conspireraient-elles pas à l'unité? Là, en effet, aucune ne fait obstacle à l'autre par son impénétrabilité, pas plus que la conception que vous avez d'une notion ou d'une proposition ne fait obstacle à celle que j'en ai moi-même, pas plus que des notions diverses ne se font obstacle l'une à l'autre dans une seule âme. — Cette union, dira-t-on, ne saurait avoir lieu pour des essences. — Oui, répondrons-nous, mais seulement si l'on ose supposer que les essences véritables sont des masses corporelles.
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