[614] ῝Α μὲν τοίνυν, ἦν δ’ ἐγώ, ζῶντι τῷ δικαίῳ παρὰ θεῶν τε (614a) καὶ
ἀνθρώπων ἆθλά τε καὶ μισθοὶ καὶ δῶρα γίγνεται πρὸς ἐκείνοις τοῖς
ἀγαθοῖς οἷς αὐτὴ παρείχετο ἡ δικαιοσύνη, τοιαῦτ’ ἂν εἴη.
Καὶ μάλ’, ἔφη, καλά τε καὶ βέβαια.
Ταῦτα τοίνυν, ἦν δ’ ἐγώ, οὐδέν ἐστι πλήθει οὐδὲ μεγέθει πρὸς ἐκεῖνα
ἃ τελευτήσαντα ἑκάτερον περιμένει· χρὴ δ’ αὐτὰ ἀκοῦσαι, ἵνα τελέως
ἑκάτερος αὐτῶν ἀπειλήφῃ τὰ ὑπὸ τοῦ λόγου ὀφειλόμενα ἀκοῦσαι.
(b.) Λέγοις ἄν, ἔφη, ὡς οὐ πολλὰ ἄλλ’ ἥδιον ἀκούοντι.
᾿Αλλ’ οὐ μέντοι σοι, ἦν δ’ ἐγώ, ᾿Αλκίνου γε ἀπόλογον ἐρῶ, ἀλλ’
ἀλκίμου μὲν ἀνδρός, ᾿Ηρὸς τοῦ ᾿Αρμενίου, τὸ γένος Παμφύλου· ὅς ποτε ἐν
πολέμῳ τελευτήσας, ἀναιρεθέντων δεκαταίων τῶν νεκρῶν ἤδη
διεφθαρμένων, ὑγιὴς μὲν ἀνῃρέθη, κομισθεὶς δ’ οἴκαδε μέλλων
θάπτεσθαι δωδεκαταῖος ἐπὶ τῇ πυρᾷ κείμενος ἀνεβίω, ἀναβιοὺς δ’ ἔλεγεν
ἃ ἐκεῖ ἴδοι. ἔφη δέ, ἐπειδὴ οὗ ἐκβῆναι, τὴν ψυχὴν πορεύεσθαι (c.) μετὰ
πολλῶν, καὶ ἀφικνεῖσθαι σφᾶς εἰς τόπον τινὰ δαιμόνιον, ἐν ᾧ τῆς τε γῆς
δύ’ εἶναι χάσματα ἐχομένω ἀλλήλοιν καὶ τοῦ οὐρανοῦ αὖ ἐν τῷ ἄνω ἄλλα
καταντικρύ. δικαστὰς δὲ μεταξὺ τούτων καθῆσθαι, οὕς, ἐπειδὴ
διαδικάσειαν, τοὺς μὲν δικαίους κελεύειν πορεύεσθαι τὴν εἰς δεξιάν τε καὶ
ἄνω διὰ τοῦ οὐρανοῦ, σημεῖα περιάψαντας τῶν δεδικασμένων ἐν τῷ
πρόσθεν, τοὺς δὲ ἀδίκους τὴν εἰς ἀριστεράν τε καὶ κάτω, ἔχοντας καὶ
τούτους ἐν τῷ ὄπισθεν σημεῖα πάντων ὧν (d.) ἔπραξαν. ἑαυτοῦ δὲ
προσελθόντος εἰπεῖν ὅτι δέοι αὐτὸν ἄγγελον ἀνθρώποις γενέσθαι τῶν
ἐκεῖ καὶ διακελεύοιντό οἱ ἀκούειν τε καὶ θεᾶσθαι πάντα τὰ ἐν τῷ τόπῳ.
ὁρᾶν δὴ ταύτῃ μὲν καθ’ ἑκάτερον τὸ χάσμα τοῦ οὐρανοῦ τε καὶ τῆς γῆς
ἀπιούσας τὰς ψυχάς, ἐπειδὴ αὐταῖς δικασθείη, κατὰ δὲ τὼ ἑτέρω ἐκ μὲν
τοῦ ἀνιέναι ἐκ τῆς γῆς μεστὰς αὐχμοῦ τε καὶ κόνεως, ἐκ δὲ τοῦ ἑτέρου
καταβαίνειν ἑτέρας ἐκ τοῦ (e.) οὐρανοῦ καθαράς. καὶ τὰς ἀεὶ
ἀφικνουμένας ὥσπερ ἐκ πολλῆς πορείας φαίνεσθαι ἥκειν, καὶ ἁσμένας
εἰς τὸν λειμῶνα ἀπιούσας οἷον ἐν πανηγύρει κατασκηνᾶσθαι, καὶ
ἀσπάζεσθαί τε ἀλλήλας ὅσαι γνώριμαι, καὶ πυνθάνεσθαι τάς τε ἐκ τῆς
γῆς ἡκούσας παρὰ τῶν ἑτέρων τὰ ἐκεῖ καὶ τὰς ἐκ τοῦ οὐρανοῦ τὰ παρ’ ἐκείναις.
| [614] Tels sont donc les prix, les récompenses et les présents 614a que
le juste reçoit des dieux et des hommes pendant sa vie, outre ces
biens que lui procure la justice elle-même.
Ce sont assurément de belles et solides récompenses.
Pourtant, repris-je, elles ne sont rien, ni pour le nombre ni pour
la grandeur, en comparaison de ce qui attend, après la mort, le
juste et l'injuste. C'est là ce qu'il faut entendre, afin que l'un et
l'autre reçoivent jusqu'au bout ce qui leur est dû par la
discussion. 614b
Parle; il y a bien peu de choses que j'écouterais avec plus de
plaisir.
Ce n'est point, dis-je, le récit d'Alkinoos que je vais te faire, mais
celui d'un homme vaillant, Er, fils d'Arménios, originaire de
Pamphylie. Il était mort dans une bataille; dix jours après,
comme on enlevait les cadavres déjà putréfiés, le sien fut
retrouvé intact. On le porta chez lui pour l'ensevelir, mais le
douzième jour, alors qu'il était étendu sur le bûcher, il revint à la
vie; quand il eut repris ses sens il raconta ce qu'il avait vu là-bas.
Aussitôt, dit-il, que son âme était sortie de son corps, elle avait
cheminé avec beaucoup d'autres, et elles étaient arrivées en un
lieu divin où se voyaient 614c dans la terre deux
ouvertures situées côte à côte, et dans le ciel, en haut, deux
autres qui leur faisaient face. Au milieu étaient assis des juges
qui, après avoir rendu leur sentence, ordonnaient aux justes de
prendre à droite la route qui montait à travers le ciel, après leur
avoir attaché par devant un écriteau contenant leur jugement; et
aux méchants de prendre à gauche la route descendante, portant
eux aussi, mais par derrière, un écriteau où 614d étaient
marquées toutes leurs actions. Comme il s'approchait à son tour,
les juges lui dirent qu'il devait être pour les hommes le messager
de l'au-delà, et ils lui recommandèrent d'écouter et d'observer
tout ce qui se passait en ce lieu. Il y vit donc les âmes qui s'en
allaient, une fois jugées, par les deux ouvertures correspondantes
du ciel et de la terre; par les deux autres des âmes
entraient, qui d'un côté montaient des profondeurs de la terre,
couvertes d'ordure et de poussière, et de l'autre descendaient,
pures, du ciel; et toutes ces âmes qui sans cesse 614e arrivaient
semblaient avoir fait mi long voyage; elles gagnaient avec joie la
prairie et y campaient comme dans une assemblée de fête. Celles
qui se connaissaient se souhaitaient mutuellement la bienvenue
et s'enquéraient, les unes qui venaient du sein de la terre, de ce
qui se pas-sait au ciel, et les autres qui venaient du ciel, de ce
qui se passait sous terre. Celles-là racontaient leurs aventures en
gémissant et en pleurant,
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