[605] (605a) Παντάπασι μὲν οὖν.
῾Ο δὴ μιμητικὸς ποιητὴς δῆλον ὅτι οὐ πρὸς τὸ τοιοῦτον τῆς ψυχῆς
πέφυκέ τε καὶ ἡ σοφία αὐτοῦ τούτῳ ἀρέσκειν πέπηγεν, εἰ μέλλει
εὐδοκιμήσειν ἐν τοῖς πολλοῖς, ἀλλὰ πρὸς τὸ ἀγανακτητικόν τε καὶ
ποικίλον ἦθος διὰ τὸ εὐμίμητον εἶναι.
Δῆλον.
Οὐκοῦν δικαίως ἂν αὐτοῦ ἤδη ἐπιλαμβανοίμεθα, καὶ τιθεῖμεν
ἀντίστροφον αὐτὸν τῷ ζωγράφῳ· καὶ γὰρ τῷ φαῦλα ποιεῖν πρὸς ἀλήθειαν
ἔοικεν αὐτῷ, καὶ τῷ πρὸς ἕτερον τοι(b.)οῦτον ὁμιλεῖν τῆς ψυχῆς ἀλλὰ μὴ
πρὸς τὸ βέλτιστον, καὶ ταύτῃ ὡμοίωται. καὶ οὕτως ἤδη ἂν ἐν δίκῃ οὐ
παραδεχοίμεθα εἰς μέλλουσαν εὐνομεῖσθαι πόλιν, ὅτι τοῦτο ἐγείρει τῆς
ψυχῆς καὶ τρέφει καὶ ἰσχυρὸν ποιῶν ἀπόλλυσι τὸ λογιστικόν, ὥσπερ ἐν
πόλει ὅταν τις μοχθηροὺς ἐγκρατεῖς ποιῶν παραδιδῷ τὴν πόλιν, τοὺς δὲ
χαριεστέρους φθείρῃ· ταὐτὸν καὶ τὸν μιμητικὸν ποιητὴν φήσομεν κακὴν
πολιτείαν ἰδίᾳ ἑκάστου τῇ ψυχῇ ἐμποιεῖν, τῷ ἀνοήτῳ αὐτῆς (c.)
χαριζόμενον καὶ οὔτε τὰ μείζω οὔτε τὰ ἐλάττω διαγιγνώσκοντι, ἀλλὰ τὰ
αὐτὰ τοτὲ μὲν μεγάλα ἡγουμένῳ, τοτὲ δὲ σμικρά, εἴδωλα εἰδωλοποιοῦντα,
τοῦ δὲ ἀληθοῦς πόρρω πάνυ ἀφεστῶτα.
Πάνυ μὲν οὖν.
Οὐ μέντοι πω τό γε μέγιστον κατηγορήκαμεν αὐτῆς. τὸ γὰρ καὶ τοὺς
ἐπιεικεῖς ἱκανὴν εἶναι λωβᾶσθαι, ἐκτὸς πάνυ τινῶν ὀλίγων, πάνδεινόν
που.
Τί δ’ οὐ μέλλει, εἴπερ γε δρᾷ αὐτό;
᾿Ακούων σκόπει. οἱ γάρ που βέλτιστοι ἡμῶν ἀκροώμενοι ῾Ομήρου ἢ
ἄλλου τινὸς τῶν τραγῳδοποιῶν μιμουμένου (d.) τινὰ τῶν ἡρώων ἐν
πένθει ὄντα καὶ μακρὰν ῥῆσιν ἀποτεί νοντα ἐν τοῖς ὀδυρμοῖς ἢ καὶ
ᾄδοντάς τε καὶ κοπτομένους, οἶσθ’ ὅτι χαίρομέν τε καὶ ἐνδόντες ἡμᾶς
αὐτοὺς ἑπόμεθα συμπάσχοντες καὶ σπουδάζοντες ἐπαινοῦμεν ὡς ἀγαθὸν
ποιητήν, ὃς ἂν ἡμᾶς ὅτι μάλιστα οὕτω διαθῇ.
Οἶδα· πῶς δ’ οὔ;
῞Οταν δὲ οἰκεῖόν τινι ἡμῶν κῆδος γένηται, ἐννοεῖς αὖ ὅτι ἐπὶ τῷ
ἐναντίῳ καλλωπιζόμεθα, ἂν δυνώμεθα ἡσυχίαν ἄγειν (e.) καὶ καρτερεῖν,
ὡς τοῦτο μὲν ἀνδρὸς ὄν, ἐκεῖνο δὲ γυναικός, ὃ τότε ἐπῃνοῦμεν.
᾿Εννοῶ, ἔφη.
῏Η καλῶς οὖν, ἦν δ’ ἐγώ, οὗτος ὁ ἔπαινος ἔχει, τὸ ὁρῶντα τοιοῦτον
ἄνδρα, οἷον ἑαυτόν τις μὴ ἀξιοῖ εἶναι ἀλλ’ αἰσχύνοιτο ἄν, μὴ βδελύττεσθαι
ἀλλὰ χαίρειν τε καὶ ἐπαινεῖν;
Οὐ μὰ τὸν Δί’, ἔφη, οὐκ εὐλόγῳ ἔοικεν.
| [605] 605a Certainement.
Dès lors, il est évident que le poète imitateur n'est point porté
par nature vers un pareil caractère de l'âme, et que son talent ne
s'attache point à lui plaire, puisqu'il veut s'illustrer parmi la
multitude; au contraire, il est porté vers le caractère
irritable et divers, parce que celui-ci est facile à imiter.
C'est évident.
Nous pouvons donc à bon droit le censurer et le regarder comme
le pendant du peintre; il lui ressemble en ce qu'il ne produit que
des ouvrages sans valeur, au point de vue de la vérité, et il lui
ressemble encore du fait qu'il a 605b commerce avec l'élément
inférieur de l'âme, et non avec le meilleur. Ainsi, nous voilà bien
fondés à ne pas le recevoir dans un État qui doit être régi par des
lois sages, puisqu'il réveille, nourrit et fortifie le mauvais élément
de l'âme, et ruine, de la sorte, l'élément raisonnable, comme cela
a lieu dans une cité qu'on livre aux méchants en les laissant
devenir forts, et en faisant périr les hommes les plus estimables;
de même, du poète imitateur, nous dirons qu'il introduit un
mauvais gouvernement dans l'âme de chaque individu, en
flattant ce qu'il y a en elle 605c de déraisonnable, ce qui est
incapable de distinguer le plus grand du plus petit, qui au
contraire regarde les mêmes objets tantôt comme grands, tantôt
comme petits, qui ne produit que des fantômes et se trouve à
une distance infinie du vrai.
Certainement.
Et cependant nous n'avons pas encore accusé la poésie du plus
grave de ses méfaits. Qu'elle soit en effet capable de corrompre
même les honnêtes gens, à l'exception d'un petit nombre, voilà
sans doute ce qui est tout à fait redoutable.
Assurément, si elle produit cet effet.
Écoute, et considère le cas des meilleurs d'entre nous. Quand
nous entendons Homère ou quelque autre poète tragique imiter
un héros dans la douleur, qui, au milieu 605d de ses
lamentations, s'étend en une longue tirade, ou chante, ou se
frappe la poitrine, nous ressentons, tu le sais, du plaisir, nous
nous laissons aller à l'accompagner de notre sympathie, et dans
notre enthousiasme nous louons comme un bon poète celui qui,
au plus haut degré possible, a provoqué en nous de telles
dispositions.
Je le sais; comment pourrais-je l'ignorer.
Mais lorsqu'un malheur domestique nous frappe, tu as pu
remarquer que nous mettons notre point d'honneur à garder
l'attitude contraire, à savoir rester calmes et courageux, parce
que c'est là le fait d'un homme, et que 605e la conduite que
nous applaudissions tout à l'heure ne convient qu'aux femmes.
Je l'ai remarqué.
Or, est-il beau d'applaudir quand on voit un homme auquel on ne
voudrait pas ressembler - on en rougirait même - et, au lieu
d'éprouver du dégoût, de prendre plaisir à ce spectacle et de le
louer?
Non, par Zeus ! cela ne me semble pas raisonnable.
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