[18] (18a) (Φίληβος)
Κἀμοὶ ταῦτά γε αὐτά· ἀλλὰ τί δή ποτε πρὸς ἡμᾶς ὁ λόγος οὗτος νῦν εἴρηται καὶ τί
ποτε βουλόμενος ;
(Σωκράτης)
Ὀρθῶς μέντοι τοῦθ’ ἡμᾶς, ὦ Πρώταρχε, ἠρώτηκε Φίληβος.
(Πρώταρχος)
Πάνυ μὲν οὖν, καὶ ἀποκρίνου γε αὐτῷ.
(Σωκράτης)
Δράσω ταῦτα διελθὼν σμικρὸν ἔτι περὶ αὐτῶν τούτων. Ὥσπερ γὰρ ἓν ὁτιοῦν εἴ
τίς ποτε λάβοι, τοῦτον, ὥς φαμεν, οὐκ ἐπ’ ἀπείρου φύσιν δεῖ βλέπειν εὐθὺς ἀλλ’
ἐπί τινα ἀριθμόν, οὕτω καὶ τὸ ἐναντίον ὅταν τις τὸ ἄπειρον (18b) ἀναγκασθῇ
πρῶτον λαμβάνειν, μὴ ἐπὶ τὸ ἓν εὐθύς, ἀλλ’ ἐπ’ ἀριθμὸν αὖ τινα πλῆθος
ἕκαστον ἔχοντά τι κατανοεῖν, τελευτᾶν τε ἐκ πάντων εἰς ἕν. Πάλιν δὲ ἐν τοῖς
γράμμασι τὸ νῦν λεγόμενον λάβωμεν.
(Πρώταρχος)
Πῶς ;
(Σωκράτης)
Ἐπειδὴ φωνὴν ἄπειρον κατενόησεν εἴτε τις θεὸς εἴτε καὶ θεῖος ἄνθρωπος ὡς
λόγος ἐν Αἰγύπτῳ Θεῦθ τινα τοῦτον γενέσθαι λέγων, ὃς πρῶτος τὰ φωνήεντα ἐν
τῷ ἀπείρῳ κατενόησεν οὐχ ἓν ὄντα ἀλλὰ πλείω, καὶ πάλιν (18c) ἕτερα φωνῆς μὲν
οὔ, φθόγγου δὲ μετέχοντά τινος, ἀριθμὸν δέ τινα καὶ τούτων εἶναι, τρίτον δὲ
εἶδος γραμμάτων διεστήσατο τὰ νῦν λεγόμενα ἄφωνα ἡμῖν· τὸ μετὰ τοῦτο διῄρει
τά τε ἄφθογγα καὶ ἄφωνα μέχρι ἑνὸς ἑκάστου, καὶ τὰ φωνήεντα καὶ τὰ μέσα
κατὰ τὸν αὐτὸν τρόπον, ἕως ἀριθμὸν αὐτῶν λαβὼν ἑνί τε ἑκάστῳ καὶ σύμπασι
στοιχεῖον ἐπωνόμασε· καθορῶν δὲ ὡς οὐδεὶς ἡμῶν οὐδ’ ἂν ἓν αὐτὸ καθ’ αὑτὸ
ἄνευ πάντων αὐτῶν μάθοι, τοῦτον τὸν δεσμὸν αὖ λογισάμενος ὡς (18d) ὄντα ἕνα
καὶ πάντα ταῦτα ἕν πως ποιοῦντα μίαν ἐπ’ αὐτοῖς ὡς οὖσαν γραμματικὴν
τέχνην ἐπεφθέγξατο προσειπών.
(Φίληβος)
Ταῦτ’ ἔτι σαφέστερον ἐκείνων αὐτά γε πρὸς ἄλληλα, ὦ Πρώταρχε, ἔμαθον· τὸ δ’
αὐτό μοι τοῦ λόγου νῦν τε καὶ σμικρὸν ἔμπροσθεν ἐλλείπεται.
(Σωκράτης)
Μῶν, ὦ Φίληβε, τὸ τί πρὸς ἔπος αὖ ταῦτ’ ἐστίν ;
(Φίληβος)
Ναί, τοῦτ’ ἔστιν ὃ πάλαι ζητοῦμεν ἐγώ τε καὶ (Πρώταρχος).
(Σωκράτης)
Ἦ μὴν ἐπ’ αὐτῷ γε ἤδη γεγονότες ζητεῖτε, ὡς φῄς, (18e) πάλαι.
(Φίληβος)
Πῶς ;
(Σωκράτης)
Ἆρ’ οὐ περὶ φρονήσεως ἦν καὶ ἡδονῆς ἡμῖν ἐξ ἀρχῆς ὁ λόγος, ὁπότερον αὐτοῖν
αἱρετέον ;
(Φίληβος)
Πῶς γὰρ οὔ ;
(Σωκράτης)
Καὶ μὴν ἕν γε ἑκάτερον αὐτοῖν εἶναί φαμεν.
(Φίληβος)
Πάνυ μὲν οὖν.
| [18] (18a) PHILÈBE.
Je pense de même : mais que nous fait ce discours, et où en veut-il venir ?
SOCRATE.
Philèbe nous a fait cette question fort à propos, Protarque.
PROTARQUE.
Assurément : réponds-lui donc.
SOCRATE.
Je le ferai, après que j’aurai dit encore un mot sur cette matière. De même que,
lorsqu’on a pris une unité quelconque, il ne faut pas, disons-nous, jeter tout aussitôt
les yeux sur l’infini, mais sur un certain nombre : (18b) ainsi, quand on est forcé de
commencer par l’infini, il ne faut point passer tout de suite à l’unité, mais porter les
regards sur un certain nombre, qui renferme une certaine quantité d’individus, et
aboutir enfin à l’unité. Tâchons de concevoir ceci en prenant de nouveau les lettres
pour exemple.
PROTARQUE.
Comment ?
SOCRATE.
On remarqua d’abord que la voix était infinie, soit que cette découverte vienne d’un
dieu, ou de quelque homme divin, comme on le raconte en Egypte d’un certain
Theuth, qui le premier aperçut dans cet infini les voyelles, comme étant, non pas un,
mais plusieurs ; et puis d’autres lettres qui, (18c) sans être des voyelles, ont pourtant
un certain son ; et il reconnut qu’elles avaient pareillement un nombre déterminé ;
ensuite il distingua une troisième espèce de lettres, que nous appelons
aujourd’hui muettes : après ces observations, il sépara une à une les lettres muettes et
privées de son ; ensuite il en fit autant par rapport aux voyelles et par rapport aux
moyennes ; jusqu’à ce qu’en ayant saisi le nombre, il leur donna à toutes et à chacune
le nom d’élément. De plus, voyant qu’aucun de nous ne pourrait apprendre aucune
de ces lettres toute seule, et sans les apprendre toutes, il en imagina le lien, comme
(18d) une unité ; et se représentant tout cela comme ne faisant qu’un tout, il donna à
ce tout le nom de grammaire, comme n’étant aussi qu’un seul art.
PHILÈBE.
J’ai compris ceci, Protarque, plus clairement que ce qui a été dit précédemment, et
l’un m’a servi à concevoir l’autre. Mais à présent, ainsi qu’un peu plus haut, je trouve
toujours la même chose à redire à ce discours.
SOCRATE.
N’est-ce point, Philèbe, quel rapport a tout cela à notre sujet ?
PHILÈBE.
Oui, c’est ce que nous cherchons depuis longtemps, Protarque et moi.
SOCRATE.
En vérité, vous êtes au milieu de ce que vous cherchez, dites-vous, (18e) depuis
longtemps.
PHILÈBE.
Comment ?
SOCRATE.
Notre entretien n’a-t-il point pour objet dès le commencement la sagesse et le plaisir,
pour savoir laquelle de ces deux choses est préférable à l’autre ?
PHILÈBE.
Sans contredit.
SOCRATE.
Ne disions-nous point que chacune d’elles est une ?
PHILÈBE.
Assurément.
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