[15] (15a) (Σωκράτης)
Ὁπόταν, ὦ παῖ, τὸ ἓν μὴ τῶν γιγνομένων τε καὶ ἀπολλυμένων τις τιθῆται,
καθάπερ ἀρτίως ἡμεῖς εἴπομεν. Ἐνταυθοῖ μὲν γὰρ καὶ τὸ τοιοῦτον ἕν, ὅπερ
εἴπομεν νυνδή, συγκεχώρηται τὸ μὴ δεῖν ἐλέγχειν· ὅταν δέ τις ἕνα ἄνθρωπον
ἐπιχειρῇ τίθεσθαι καὶ βοῦν ἕνα καὶ τὸ καλὸν ἓν καὶ τὸ ἀγαθὸν ἕν, περὶ τούτων
τῶν ἑνάδων καὶ τῶν τοιούτων ἡ πολλὴ σπουδὴ μετὰ διαιρέσεως ἀμφισβήτησις
γίγνεται.
(Πρώταρχος)
Πῶς ;
(15b) (Σωκράτης)
Πρῶτον μὲν εἴ τινας δεῖ τοιαύτας εἶναι μονάδας ὑπολαμβάνειν ἀληθῶς οὔσας·
εἶτα πῶς αὖ ταύτας, μίαν ἑκάστην οὖσαν ἀεὶ τὴν αὐτὴν καὶ μήτε γένεσιν μήτε
ὄλεθρον προσδεχομένην, ὅμως εἶναι βεβαιότατα μίαν ταύτην ; Μετὰ δὲ τοῦτ’ ἐν
τοῖς γιγνομένοις αὖ καὶ ἀπείροις εἴτε διεσπασμένην καὶ πολλὰ γεγονυῖαν
θετέον, εἴθ’ ὅλην αὐτὴν αὑτῆς χωρίς, ὃ δὴ πάντων ἀδυνατώτατον φαίνοιτ’ ἄν,
ταὐτὸν καὶ ἓν ἅμα ἐν ἑνί τε καὶ πολλοῖς γίγνεσθαι. Ταῦτ’ ἔστι τὰ (15c) περὶ τὰ
τοιαῦτα ἓν καὶ πολλά, ἀλλ’ οὐκ ἐκεῖνα, ὦ Πρώταρχε, ἁπάσης ἀπορίας αἴτια μὴ
καλῶς ὁμολογηθέντα καὶ εὐπορίας ἂν αὖ καλῶς.
(Πρώταρχος)
Οὐκοῦν χρὴ τοῦθ’ ἡμᾶς, ὦ Σώκρατες, ἐν τῷ νῦν πρῶτον διαπονήσασθαι ;
(Σωκράτης)
Ὡς γοῦν ἐγὼ φαίην ἄν.
(Πρώταρχος)
Καὶ πάντας τοίνυν ἡμᾶς ὑπόλαβε συγχωρεῖν σοι τούσδε τὰ τοιαῦτα· Φίληβον δ’
ἴσως κράτιστον ἐν τῷ νῦν ἐπερωτῶντα μὴ κινεῖν εὖ κείμενον.
(15d) (Σωκράτης)
Εἶεν· πόθεν οὖν τις ταύτης ἄρξηται πολλῆς οὔσης καὶ παντοίας περὶ τὰ
ἀμφισβητούμενα μάχης ; Ἆρ’ ἐνθένδε ;
(Πρώταρχος)
Πόθεν ;
(Σωκράτης)
Φαμέν που ταὐτὸν ἓν καὶ πολλὰ ὑπὸ λόγων γιγνόμενα περιτρέχειν πάντῃ καθ’
ἕκαστον τῶν λεγομένων ἀεί, καὶ πάλαι καὶ νῦν. Καὶ τοῦτο οὔτε μὴ παύσηταί
ποτε οὔτε ἤρξατο νῦν, ἀλλ’ ἔστι τὸ τοιοῦτον, ὡς ἐμοὶ φαίνεται, τῶν λόγων αὐτῶν
ἀθάνατόν τι καὶ ἀγήρων πάθος ἐν ἡμῖν· ὁ δὲ πρῶτον αὐτοῦ γευσάμενος
ἑκάστοτε τῶν νέων, ἡσθεὶς ὥς (15e) τινα σοφίας ηὑρηκὼς θησαυρόν, ὑφ’ ἡδονῆς
ἐνθουσιᾷ τε καὶ πάντα κινεῖ λόγον ἅσμενος, τοτὲ μὲν ἐπὶ θάτερα κυκλῶν καὶ
συμφύρων εἰς ἕν, τοτὲ δὲ πάλιν ἀνειλίττων καὶ διαμερίζων, εἰς ἀπορίαν αὑτὸν
μὲν πρῶτον καὶ μάλιστα καταβάλλων, δεύτερον δ’ ἀεὶ τὸν ἐχόμενον, ἄντε
νεώτερος ἄντε πρεσβύτερος ἄντε ἧλιξ ὢν τυγχάνῃ,
| [15] (15a) SOCRATE.
C’est, mon enfant, lorsque cette unité n’est point prise parmi les choses sujettes à la
génération et à la corruption, comme celles dont nous venons de faire mention. Car
en ce cas, et quand il est question de cette espèce d’unités, on convient, comme nous
le disions tout-à-1’heure, qu’il ne faut entreprendre de réfuter personne. Mais
lorsqu’on parle de l’idée de l’homme ou du bœuf en général, du beau, du bon, c’est
sur ces unités et les autres de même nature que l’on s’échauffe beaucoup sans
pouvoir s’entendre.
PROTARQUE.
Comment ?
(15b) SOCRATE.
Premièrement, on conteste si l’on doit admettre ces sortes d’unités, comme
réellement existantes. Puis on demande comment chacune d’elles est toujours la
même, et peut, sans admettre en soi ni génération, ni corruption, rester constamment
la même unité ; ensuite, s’il faut dire que cette unité existe dans les êtres soumis à la
génération et infinis en nombre, divisée par parcelles et devenue plusieurs, ou que
dans chacun elle est tout entière, bien que hors d’elle-même : ce qui paraît la chose
du monde la plus impossible, qu’une seule et même unité existe à-la-fois dans une et
plusieurs choses. Ce sont ces questions, (15c) Protarque, qui sont la source des plus
grands embarras, lorsqu’on y répond mal, et aussi des plus grandes clartés, lorsqu’on
y répond bien.
PROTARQUE.
N’est-ce point par là, Socrate, qu’il nous faut d’abord entrer en matière ?
SOCRATE.
Oui, à ce que je pense.
PROTARQUE.
Sois persuadé que tous tant que nous sommes ici, nous pensons comme toi sur
ce point. Pour Philèbe, peut-être est-ce le mieux de ne pas lui demander son avis,
de peur, comme on dit, de déranger ce qui est bien.
(15d) SOCRATE.
A la bonne heure. Par où entamerons-nous cette controverse qui a tant de parties et
de formes diverses ? n’est-ce point par ici ?
PROTARQUE.
Par où ?
SOCRATE.
Je dis que ce rapport d’un et plusieurs se trouve partout et toujours, de tout temps
comme aujourd’hui, dans chacune des choses dont on parle. Jamais il ne cessera
d’être, et il n’a jamais commencé d’exister : mais, autant qu’il me paraît, c’est une
qualité inhérente au discours, immortelle et incapable de vieillir. Le jeune homme qui
se sert pour la première fois de cette formule, charmé comme s’il avait découvert
(15e) un trésor de sagesse, est transporté de joie jusqu’à l’enthousiasme, et il n’est
point de sujet qu’il ne se plaise à remuer, tantôt le roulant et le confondant en un,
tantôt le développant et le coupant par morceaux, s’embarrassant lui-même et
quiconque l’approche, plus jeune et plus vieux ou de même âge que lui ;
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