[58] (58a) (Σωκράτης)
Δῆλον ὁτιὴ πᾶς ἂν τήν γε νῦν λεγομένην γνοίη· τὴν γὰρ περὶ τὸ ὂν καὶ τὸ ὄντως
καὶ τὸ κατὰ ταὐτὸν ἀεὶ πεφυκὸς πάντως ἔγωγε οἶμαι ἡγεῖσθαι σύμπαντας ὅσοις
νοῦ καὶ σμικρὸν προσήρτηται μακρῷ ἀληθεστάτην εἶναι γνῶσιν. Σὺ δὲ τί; Πῶς
τοῦτο, ὦ Πρώταρχε, διακρίνοις ἄν;
(Πρώταρχος)
Ἤκουον μὲν ἔγωγε, ὦ Σώκρατες, ἑκάστοτε Γοργίου πολλάκις ὡς ἡ τοῦ πείθειν
πολὺ διαφέροι πασῶν τεχνῶν (58b) πάντα γὰρ ὑφ' αὑτῇ δοῦλα δι' ἑκόντων ἀλλ'
οὐ διὰ βίας ποιοῖτο, καὶ μακρῷ ἀρίστη πασῶν εἴη τῶν τεχνῶννῦν δ' οὔτε σοὶ οὔτε
δὴ ἐκείνῳ βουλοίμην ἂν ἐναντία τίθεσθαι.
(Σωκράτης)
Τὰ ὅπλα μοι δοκεῖς βουληθεὶς εἰπεῖν αἰσχυνθεὶς ἀπολιπεῖν.
(Πρώταρχος)
Ἔστω νῦν ταῦτα ταύτῃ ὅπῃ σοι δοκεῖ.
(Σωκράτης)
Ἆρ' οὖν αἴτιος ἐγὼ τοῦ μὴ καλῶς ὑπολαβεῖν σε;
(Πρώταρχος)
Τὸ ποῖον;
(Σωκράτης)
Οὐκ, ὦ φίλε Πρώταρχε, τοῦτο ἔγωγε ἐζήτουν πω, (58c) τίς τέχνη ἢ τίς ἐπιστήμη
πασῶν διαφέρει τῷ μεγίστη καὶ ἀρίστη καὶ πλεῖστα ὠφελοῦσα ἡμᾶς, ἀλλὰ τίς
ποτε τὸ σαφὲς καὶ τἀκριβὲς καὶ τὸ ἀληθέστατον ἐπισκοπεῖ, κἂν εἰ σμικρὰ καὶ
σμικρὰ ὀνινᾶσα, τοῦτ' ἔστιν ὃ νῦν δὴ ζητοῦμεν. Ἀλλ' ὅρα οὐδὲ γὰρ ἀπεχθήσῃ
Γοργίᾳ, τῇ μὲν ἐκείνου ὑπάρχειν τέχνῃ διδοὺς πρὸς χρείαν τοῖς ἀνθρώποις
κρατεῖν, ᾗ δ' εἶπον ἐγὼ νῦν πραγματείᾳ, καθάπερ τοῦ λευκοῦ πέρι τότε ἔλεγον,
κἂν εἰ σμικρόν, καθαρὸν δ' εἴη, τοῦ πολλοῦ (58d) καὶ μὴ τοιούτου διαφέρειν,
τούτῳ γ' αὐτῷ τῷ ἀληθεστάτῳ, καὶ νῦν δὴ σφόδρα διανοηθέντες καὶ ἱκανῶς
διαλογισάμενοι, μήτ' εἴς τινας ὠφελίας ἐπιστημῶν βλέψαντες μήτε τινὰς
εὐδοκιμίας, ἀλλ' εἴ τις πέφυκε τῆς ψυχῆς ἡμῶν δύναμις ἐρᾶν τε τοῦ ἀληθοῦς καὶ
πάντα ἕνεκα τούτου πράττειν, ταύτην εἴπωμεν διεξερευνησάμενοι ὸ καθαρὸν
νοῦ τε καὶ φρονήσεως εἰ ταύτην μάλιστα ἐκ τῶν εἰκότων ἐκτῆσθαι φαῖμεν ἂν ἤ
τινα ἑτέραν ταύτης κυριωτέραν ἡμῖν ζητητέον.
(58e) (Πρώταρχος)
Ἀλλὰ σκοπῶ, καὶ χαλεπὸν οἶμαι συγχωρῆσαί τινα ἄλλην ἐπιστήμην ἢ τέχνην
τῆς ἀληθείας ἀντέχεσθαι μᾶλλον ἢ ταύτην.
| [58] (58a) SOCRATE.
Il est clair que c’est la science qui connaît toutes les sciences dont nous parlons. Je
pense en effet que tous ceux qui ont quelque peu d’intelligence, conviendront que la
connaissance la plus vraie, sans comparaison, est celle qui a pour objet ce qui
existe, ce qui existe réellement, et dont la nature est toujours la même. Et toi,
Protarque, quel jugement en porterais-tu ?
PROTARQUE.
Socrate, j’ai souvent entendu répéter à Gorgias que l’art de persuader l’emporte sur
tous les autres, (58b) parce qu’il se soumet tout, non par la force, mais de plein gré ;
en un mot, que c’est le plus excellent de tous les arts. Je ne voudrais combattre ici ni
son sentiment, ni le tien.
SOCRATE.
Tu allais parler contre moi ; mais il me paraît que par honte tu as quitté tes armes.
PROTARQUE.
Eh bien ! qu’il en soit à cet égard comme il te plaira.
SOCRATE.
Est-ce ma faute si tu as mal pris ma pensée ?
PROTARQUE.
Comment donc ?
SOCRATE.
Je ne t’ai pas demandé, mon cher Protarque, (58c) quel est l’art ou la science qui
l’emporte sur les autres à raison de son importance, de son excellence, et des
avantages qu’on en retire ; mais quelle est la science dont l’obiet est le plus net, le
plus exact, le plus vrai, qu’elle soit d’une grande utilité, ou non. Voilà ce que nous
cherchons pour le présent. Ainsi, vois ; tu ne t’exposeras point à l’indignation de
Gorgias, si tu accordes à l’art qu’il professe l’avantage sur tous les autres pour
l’utilité qui en revient aux hommes ; tandis que pour l’affaire dont je parle, comme je
disais tout-à-l’heure au sujet du blanc, qu’un peu de blanc, pourvu qu’il soit pur,
l’emporte (58d) sur une grande quantité qui ne le serait pas, en ce que c’est le blanc le
plus véritable, de même ici, après une sérieuse attention et une discussion suffisante,
sans avoir égard à l’utilité des sciences ni à la célébrité qu’elles donnent, mais
considérant uniquement s’il y a dans notre âme une faculté faite pour aimer le vrai et
disposée à tout entreprendre pour parvenir à le connaître, disons que cette faculté est
vraisemblablement le domaine de ce- qu’il y a de pur dans l’intelligence et la sagesse,
ou qu’il en faut chercher quelque autre plus excellente.
(58e) PROTARQUE.
J’examine ; et il me paraît difficile d’accorder qu’aucune autre science ou aucun autre
art participe plus de la vérité que la dialectique.
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