[45] (Σωκράτης)
Οὐκοῦν εἰ καὶ τὸ τῆς ἡδονῆς γένος ἰδεῖν ἥντινά ποτ' ἔχει φύσιν βουληθεῖμεν, οὐκ
εἰς τὰς πολλοστὰς ἡδονὰς (45a) ἀποβλεπτέον, ἀλλ' εἰς τὰς ἀκροτάτας καὶ
σφοδροτάτας λεγομένας.
(Πρώταρχος)
Πᾶς ἄν σοι ταύτῃ συγχωροίη τὰ νῦν.
(Σωκράτης)
Ἆρ' οὖν, αἱ πρόχειροί γε αἵπερ καὶ μέγισται τῶν ἡδονῶν, ὃ λέγομεν πολλάκις, αἱ
περὶ τὸ σῶμά εἰσιν αὗται;
(Πρώταρχος)
Πῶς γὰρ οὔ;
(Σωκράτης)
Πότερον οὖν καὶ μείζους εἰσὶ καὶ γίγνονται περὶ τοὺς κάμνοντας ἐν ταῖς νόσοις ἢ
περὶ ὑγιαίνοντας; Εὐλαβηθῶμεν δὲ μὴ προπετῶς ἀποκρινόμενοι πταίσωμέν πῃ.
Τάχα γὰρ (45b) ἴσως φαῖμεν ἂν περὶ ὑγιαίνοντας.
(Πρώταρχος)
Εἰκός γε.
(Σωκράτης)
Τί δ'; Οὐχ αὗται τῶν ἡδονῶν ὑπερβάλλουσιν, ὧν ἂν καὶ ἐπιθυμίαι μέγισται
προγίγνωνται;
(Πρώταρχος)
Τοῦτο μὲν ἀληθές.
(Σωκράτης)
Ἀλλ' οὐχ οἱ πυρέττοντες καὶ ἐν τοιούτοις νοσήμασιν ἐχόμενοι μᾶλλον διψῶσι καὶ
ῥιγοῦσι καὶ πάντα ὁπόσα διὰ τοῦ σώματος εἰώθασι πάσχειν, μᾶλλόν τ' ἐνδείᾳ
συγγίγνονται καὶ ἀποπληρουμένων μείζους ἡδονὰς ἴσχουσιν; Ἢ τοῦτο οὐ
φήσομεν ἀληθὲς εἶναι;
(Πρώταρχος)
Πάνυ μὲν οὖν νῦν ῥηθὲν φαίνεται.
(45c) (Σωκράτης)
Τί οὖν; Ὀρθῶς ἂν φαινοίμεθα λέγοντες ὡς εἴ τις τὰς μεγίστας ἡδονὰς ἰδεῖν
βούλοιτο, οὐκ εἰς ὑγίειαν ἀλλ' εἰς νόσον ἰόντας δεῖ σκοπεῖν; Ὅρα δὲ μή με ἡγῇ
διανοούμενον ἐρωτᾶν σε εἰ πλείω χαίρουσιν οἱ σφόδρα νοσοῦντες τῶν
ὑγιαινόντων, ἀλλ' οἴου μέγεθός με ζητεῖν ἡδονῆς, καὶ τὸ σφόδρα περὶ τοῦ
τοιούτου ποῦ ποτε γίγνεται ἑκάστοτε. Νοῆσαι γὰρ δεῖ φαμεν ἥντινα φύσιν ἔχει
καὶ τίνα λέγουσιν οἱ φάσκοντες μηδ' εἶναι τὸ παράπαν αὐτήν.
(45d) (Πρώταρχος)
Ἀλλὰ σχεδὸν ἕπομαι τῷ λόγῳ σου.
(Σωκράτης)
Τάχα, ὦ Πρώταρχε, οὐχ ἧττον δείξεις. Ἀπόκριναι γάρ· ἐν ὕβρει μείζους ἡδονάσοὐ
πλείους λέγω, τῷ σφόδρα δὲ καὶ τῷ μᾶλλον ὑπερεχούσας ὁρᾷς ἢ ἐν τῷ σώφρονι
βίῳ; Λέγε δὲ προσέχων τὸν νοῦν.
(Πρώταρχος)
Ἀλλ' ἔμαθον ὃ λέγεις, καὶ πολὺ τὸ διαφέρον ὁρῶ. Τοὺς μὲν γὰρ σώφρονάς που
καὶ ὁ παροιμιαζόμενος (45e) ἐπίσχει λόγος ἑκάστοτε, ὁ τὸ μηδὲν ἄγαν
παρακελευόμενος, ᾧ πείθονται· τὸ δὲ τῶν ἀφρόνων τε καὶ ὑβριστῶν μέχρι
μανίας ἡ σφοδρὰ ἡδονὴ κατέχουσα Περιβοήτους ἀπεργάζεται.
(Σωκράτης)
Καλῶς· καὶ εἴ γε τοῦθ' οὕτως ἔχει, δῆλον ὡς ἔν τινι πονηρίᾳ ψυχῆς καὶ τοῦ
σώματος, ἀλλ' οὐκ ἐν ἀρετῇ μέγισται μὲν ἡδοναί, μέγισται δὲ καὶ λῦπαι
γίγνονται.
(Πρώταρχος)
Πάνυ μὲν οὖν.
(Σωκράτης)
Οὐκοῦν τούτων τινὰς προελόμενον δεῖ σκοπεῖσθαι τίνα ποτὲ τρόπον ἐχούσας
ἐλέγομεν αὐτὰς εἶναι μεγίστας.
| [45] SOCRATE.
Par conséquent, si nous voulions connaître le plaisir et sa nature, ce n’est pas sur les
plaisirs (45a) d’un degré inférieur qu’il faudrait jeter les yeux, mais sur ceux qui
passent pour les plus grands et les plus vifs.
PROTARQUE.
Il n’est personne qui ne t’accorde ce point.
SOCRATE.
Les plaisirs qui se présentent les premiers, et qui sont en même temps les plus
grands, comme nous disions, ne sont-ce pas ceux qui ont le corps pour objet ?
PROTARQUE.
Sans contredit.
SOCRATE.
Sont-ils et deviennent-ils plus grands pour les malades dans leurs maladies, que pour
les personnes en santé ? Prenons garde (45b) de faire un faux pas en répondant sans
réflexion.
PROTARQUE.
Comment ?
SOCRATE.
Nous allons dire peut-être qu’ils sont plus grands pour ceux qui se portent bien.
PROTARQUE.
Il y a toute apparence.
SOCRATE.
Mais quoi ! les plaisirs les plus vifs ne sont-ce pas ceux dont les desirs sont les plus
violents ?
PROTARQUE.
Cela est vrai.
SOCRATE.
Ceux qui sont tourmentés de la fièvre et d’autres maladies semblables, n’ont-ils
pas plus soif, plus froid ? n’éprouvent-ils pas à un plus haut degré les autres
affections qu’ils ont coutume d’éprouver par l’entremise du corps ? n’ont-ils pas plus
de besoins ? et ces besoins satisfaits, ne goûtent-ils pas un plus grand plaisir ?
N’avouerons-nous point que la chose est ainsi ?
PROTARQUE.
A merveille.
(45c) SOCRATE.
Mais quoi ! trouvons-nous que ce soit bien parler de dire que, si on veut connaître
quels sont les plaisirs les plus vifs, ce n’est pas sur l’état de santé qu’il faut porter les
regards, mais sur l’état de maladie ? Et garde-toi de penser que je te demande si des
malades ont plus de plaisir que ceux qui sont en santé ; mais figure-toi que je cherche
la grandeur du plaisir, et où il se trouve d’ordinaire avec plus de véhémence. Car
notre but est d’en découvrir la nature, et de savoir ce qu’en pensent ceux qui
soutiennent que le plaisir n’a pas d’existence par lui-même.
(45d) PROTARQUE.
Je comprends à-peu-près ce que tu veux dire.
SOCRATE.
Tu le montreras encore mieux tout-à-l’heure, lorsque tu répondras, Protarque.
Aperçois-tu dans l’intempérance, des plaisirs, je ne dis pas en plus grand
nombre, mais plus grands, plus considérables pour la véhémence et l’intensité, que
dans la vie tempérante ? Fais attention à ce que tu vas répondre.
PROTARQUE.
Je conçois ta pensée ; et j’aperçois en effet une grande différence. Les tempérants sont
retenus par la maxime (45e) qui leur répète à chaque instant, Rien de trop ; maxime à
laquelle ils se conforment ; au lieu que les hommes déréglés se livrent à l’excès du
plaisir jusqu’à en perdre la raison, et pousser des cris extravagants.
SOCRATE.
Fort bien ; et si la chose est ainsi, il est évident que ce n’est pas à la vertu, mais à une
mauvaise disposition de l’âme et du corps que les plus grands plaisirs, comme les
plus grandes douleurs, sont attachés.
PROTARQUE.
Je l’avoue.
SOCRATE.
Il nous faut en choisir quelques-uns, et. examiner ce qui nous les fait appeler très
grands.
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