[40] (Σωκράτης)
Τί δέ; Ἄδικός τε καὶ παντάπασι κακὸς ἆρ' οὐ (40a) τοὐναντίον ἐκείνῳ;
(Πρώταρχος)
Πῶς δ' οὔ;
(Σωκράτης)
Πολλῶν μὴν ἐλπίδων, ὡς ἐλέγομεν ἄρτι, πᾶς ἄνθρωπος γέμει;
(Πρώταρχος)
Τί δ' οὔ;
(Σωκράτης)
Λόγοι μήν εἰσιν ἐν ἑκάστοις ἡμῶν, ἃς ἐλπίδας ὀνομάζομεν;
(Πρώταρχος)
Ναί.
(Σωκράτης)
Καὶ δὴ καὶ τὰ φαντάσματα ἐζωγραφημένα· καί τις ὁρᾷ πολλάκις ἑαυτῷ χρυσὸν
γιγνόμενον ἄφθονον καὶ ἐπ' αὐτῷ πολλὰς ἡδονάς· καὶ δὴ καὶ ἐνεζωγραφημένον
αὐτὸν ἐφ' αὑτῷ χαίροντα σφόδρα καθορᾷ.
(40b) (Πρώταρχος)
Τί δ' οὔ;
(Σωκράτης)
Τούτων οὖν πότερα φῶμεν τοῖς μὲν ἀγαθοῖς ὡς τὸ πολὺ τὰ γεγραμμένα
παρατίθεσθαι ἀληθῆ διὰ τὸ θεοφιλεῖς εἶναι, τοῖς δὲ κακοῖς ὡς αὖ πολὺ
τοὐναντίον, ἢ μὴ φῶμεν;
(Πρώταρχος)
Καὶ μάλα φατέον.
(Σωκράτης)
Οὐκοῦν καὶ τοῖς κακοῖς ἡδοναί γε οὐδὲν ἧττον πάρεισιν ἐζωγραφημέναι, ψευδεῖς
δὲ αὗταί που.
(Πρώταρχος)
Τί μήν;
(40c) (Σωκράτης)
Ψευδέσιν ἄρα ἡδοναῖς τὰ πολλὰ οἱ πονηροὶ χαίρουσιν, οἱ δ' ἀγαθοὶ τῶν
ἀνθρώπων ἀληθέσιν.
(Πρώταρχος)
Ἀναγκαιότατα λέγεις.
(Σωκράτης)
Εἰσὶν δὴ κατὰ τοὺς νῦν λόγους ψευδεῖς ἐν ταῖς τῶν ἀνθρώπων ψυχαῖς ἡδοναί,
μεμιμημέναι μέντοι τὰς ἀληθεῖς ἐπὶ τὰ γελοιότερα, καὶ λῦπαι δὲ ὡσαύτως.
(Πρώταρχος)
Εἰσίν.
(Σωκράτης)
Οὐκοῦν ἦν δοξάζειν μὲν ὄντως ἀεὶ τῷ τὸ παράπαν δοξάζοντι, μὴ ἐπ' οὖσι δὲ μηδ'
ἐπὶ γεγονόσι μηδὲ ἐπ' ἐσομένοις ἐνίοτε.
(Πρώταρχος)
Πάνυ γε.
(40d) (Σωκράτης)
Καὶ ταῦτά γε ἦν οἶμαι τὰ ἀπεργαζόμενα δόξαν ψευδῆ τότε καὶ τὸ ψευδῶς
δοξάζειν. Ἦ γάρ;
(Πρώταρχος)
Ναί.
(Σωκράτης)
Τί οὖν; Οὐκ ἀνταποδοτέον ταῖς λύπαις τε καὶ ἡδοναῖς τὴν τούτων ἀντίστροφον
ἕξιν ἐν ἐκείνοις;
(Πρώταρχος)
Πῶς;
(Σωκράτης)
Ὡς ἦν μὲν χαίρειν ὄντως ἀεὶ τῷ τὸ παράπαν ὁπωσοῦν καὶ εἰκῇ χαίροντι, μὴ
μέντοι ἐπὶ τοῖς οὖσι μηδ' ἐπὶ τοῖς γεγονόσιν ἐνίοτε, πολλάκις δὲ καὶ ἴσως
πλειστάκις ἐπὶ τοῖς μηδὲ μέλλουσί ποτε γενήσεσθαι.
(40e) (Πρώταρχος)
Καὶ ταῦθ' οὕτως ἀναγκαῖον, ὦ Σώκρατες, ἔχειν.
(Σωκράτης)
Οὐκοῦν ὁ αὐτὸς λόγος ἂν εἴη περὶ φόβων τε καὶ θυμῶν καὶ πάντων τῶν
τοιούτων, ὡς ἔστι καὶ ψευδῆ πάντα τὰ τοιαῦτα ἐνίοτε;
(Πρώταρχος)
Πάνυ μὲν οὖν.
(Σωκράτης)
Τί δέ; Πονηρὰς δόξας καὶ χρηστὰς ἄλλως ἢ ψευδεῖς γιγνομένας ἔχομεν εἰπεῖν;
(Πρώταρχος)
Οὐκ ἄλλως.
(Σωκράτης)
Οὐδ' ἡδονάς γ' οἶμαι κατανοοῦμεν ὡς ἄλλον τινὰ τρόπον εἰσὶν πονηραὶ πλὴν τῷ
ψευδεῖς εἶναι.
| [40] SOCRATE.
N’est-ce pas tout le contraire (40a) pour l’homme injuste et méchant ?
PROTARQUE.
Assurément.
SOCRATE.
Tout homme, comme nous disions tout-àl’heure, est rempli d’une foule d’espérances.
PROTARQUE.
Pourquoi non ?
SOCRATE.
Et ce que nous appelons espérances, ce sont des discours que chacun se tient à soi-
même.
PROTARQUE.
Oui.
SOCRATE.
Et encore des images qui se peignent dans l’âme : de façon que souvent on s’imagine
avoir une grande quantité d’or, et, par le moyen de cet or, des plaisirs en abondance ;
et l’on se voit peint au-dedans de soi-même, comme étant au comble de la félicité.
(40b) PROTARQUE.
Sans doute.
SOCRATE.
Assurerons-nous qu’entre ces images, celles qui se présentent aux gens de bien sont
vraies, pour la plupart, parce qu’ils sont aimés des dieux, et qu’à l’égard des
méchants, c’est communément le contraire ? N’est-ce pas là notre avis ?
PROTARQUE.
Oui, c’est le nôtre.
SOCRATE.
Et les images des plaisirs n’en sont pas moins peintes pour cela dans l’âme des
méchans ; mais seulement ces plaisirs sont faux ?
PROTARQUE.
Oui.
(40c) SOCRATE.
Les méchants ne goûtent donc, pour l’ordinaire, que de faux plaisirs, et les
hommes vertueux n’en goûtent que de vrais.
PROTARQUE.
C’est une conclusion nécessaire.
SOCRATE.
Ainsi, suivant ce qu’on vient de dire, il y a dans l’âme des hommes de faux plaiâirs,
qui imitent ridiculement les vrais ; et de même pour les peines.
PROTARQUE.
J’en conviens.
SOCRATE.
Ne peut-il pas se faire qu’en même temps qu’on a réellement une opinion, on ait
toujours pour objet de son opinion une chose qui n’existe point, qui n’a point existé,
et n’existera jamais ?
PROTARQUE.
D’accord.
(40d) SOCRATE.
Et c’est là, ce me semble, ce qui fait qu’une opinion est fausse, et qu’on se fait de
fausses opinions. N’est-ce pas ?
PROTARQUE.
Oui.
SOCRATE.
Mais quoi ! ne faut-il point appliquer à la peine et au plaisir des propriétés
correspondantes à celles de l’opinion ?
PROTARQUE.
Comment ?
SOCRATE.
En disant que celui qui se réjouit, n’importe sur quel sujet, fût-il même des plus
vains, trouve néanmoins du plaisir, même à des choses qui ne sont pas, qui n’ont
jamais été, et souvent, peutêtre même toujours, à des choses qui ne doivent jamais
exister.
(40e) PROTARQUE.
C’est encore une nécessité, Socrate, que cela soit ainsi.
SOCRATE.
Ne dirons-nous pas de même au sujet de la crainte, de la colère et des autres passions
semblables, qu’elles sont fausses quelquefois ?
PROTARQUE.
Sans contredit.
SOCRATE.
Mais nous ne.pouvons aussi qualifier de mauvaise une opinion autrement que parce
qu’elle est fausse ?
PROTARQUE.
Je le crois.
SOCRATE.
Nous ne concevons pas non plus, je pense, qu’un plaisir puisse être mauvais
autrement que parce qu’il est faux.
|