[35] (35a) (Σωκράτης)
Πώματος, ἢ πληρώσεως πώματος;
(Πρώταρχος)
Οἶμαι μὲν πληρώσεως.
(Σωκράτης)
Ὁ κενούμενος ἡμῶν ἄρα, ὡς ἔοικεν, ἐπιθυμεῖ τῶν ἐναντίων ἢ πάσχει·
κενούμενος γὰρ ἐρᾷ πληροῦσθαι.
(Πρώταρχος)
Σαφέστατά γε.
(Σωκράτης)
Τί οὖν; Ὁ τὸ πρῶτον κενούμενος ἔστιν ὁπόθεν εἴτ' αἰσθήσει πληρώσεως
ἐφάπτοιτ' ἂν εἴτε μνήμῃ, τούτου ὃ μήτ' ἐν τῷ νῦν χρόνῳ πάσχει μήτ' ἐν τῷ
πρόσθεν πώποτε ἔπαθεν;
(Πρώταρχος)
Καὶ πῶς;
(35b) (Σωκράτης)
Ἀλλὰ μὴν ὅ γε ἐπιθυμῶν τινὸς ἐπιθυμεῖ, φαμέν.
(Πρώταρχος)
Πῶς γὰρ οὔ;
(Σωκράτης)
Οὐκ ἄρα ὅ γε πάσχει, τούτου ἐπιθυμεῖ. Διψῇ γάρ, τοῦτο δὲ κένωσις· ὁ δ' ἐπιθυμεῖ
πληρώσεως.
(Πρώταρχος)
Ναί.
(Σωκράτης)
Πληρώσεώς γ' ἄρα πῄ τι τῶν τοῦ διψῶντος ἂν ἐφάπτοιτο.
(Πρώταρχος)
Ἀναγκαῖον.
(Σωκράτης)
Τὸ μὲν δὴ σῶμα ἀδύνατον· κενοῦται γάρ που.
(Πρώταρχος)
Ναί.
(Σωκράτης)
Τὴν ψυχὴν ἄρα τῆς πληρώσεως ἐφάπτεσθαι λοιπόν, (35c) τῇ μνήμῃ δῆλον ὅτι· τῷ
γὰρ ἂν ἔτ' ἄλλῳ ἐφάψαιτο;
(Πρώταρχος)
Σχεδὸν οὐδενί.
(Σωκράτης)
Μανθάνομεν οὖν ὃ συμβέβηχ' ἡμῖν ἐκ τούτων τῶν λόγων;
(Πρώταρχος)
Τὸ ποῖον;
(Σωκράτης)
Σώματος ἐπιθυμίαν οὔ φησιν ἡμῖν οὗτος ὁ λόγος γίγνεσθαι.
(Πρώταρχος)
Πῶς;
(Σωκράτης)
Ὅτι τοῖς ἐκείνου παθήμασιν ἐναντίαν ἀεὶ παντὸς ζῴου μηνύει τὴν ἐπιχείρησιν.
(Πρώταρχος)
Καὶ μάλα.
(Σωκράτης)
Ἡ δ' ὁρμή γε ἐπὶ τοὐναντίον ἄγουσα ἢ τὰ παθήματα δηλοῖ που μνήμην οὖσαν
τῶν τοῖς παθήμασιν ἐναντίων.
(Πρώταρχος)
Πάνυ γε.
(35d) (Σωκράτης)
Τὴν ἄρα ἐπάγουσαν ἐπὶ τὰ ἐπιθυμούμενα ἀποδείξας μνήμην ὁ λόγος ψυχῆς
σύμπασαν τήν τε ὁρμὴν καὶ ἐπιθυμίαν καὶ τὴν ἀρχὴν τοῦ ζῴου παντὸς
ἀπέφηνεν.
(Πρώταρχος)
Ὀρθότατα.
(Σωκράτης)
Διψῆν ἄρα ἡμῶν τὸ σῶμα ἢ πεινῆν ἤ τι τῶν τοιούτων πάσχειν οὐδαμῇ ὁ λόγος
αἱρεῖ.
(Πρώταρχος)
Ἀληθέστατα.
(Σωκράτης)
Ἔτι δὴ καὶ τόδε περὶ ταὐτὰ ταῦτα κατανοήσωμεν. Βίου γὰρ εἶδός τί μοι φαίνεται
βούλεσθαι δηλοῦν ὁ λόγος ἡμῖν ἐν τούτοις αὐτοῖς.
(35e) (Πρώταρχος)
Ἐν τίσι καὶ ποίου πέρι βίου φράζεις;
(Σωκράτης)
Ἐν τῷ πληροῦσθαι καὶ κενοῦσθαι καὶ πᾶσιν ὅσα περὶ σωτηρίαν τέ ἐστι τῶν ζῴων
καὶ τὴν φθοράν, καὶ εἴ τις τούτων ἐν ἑκατέρῳ γιγνόμενος ἡμῶν ἀλγεῖ, τοτὲ δὲ
χαίρει κατὰ τὰς μεταβολάς.
(Πρώταρχος)
Ἔστι ταῦτα.
(Σωκράτης)
Τί δ' ὅταν ἐν μέσῳ τούτων γίγνηται;
(Πρώταρχος)
Πῶς ἐν μέσῳ;
| [35] (35a) SOCRATE.
De la boisson, ou bien d’être rempli de la boisson ?
PROTARQUE.
Oui, d’en être rempli, ce me semble.
SOCRATE.
Ainsi celui d’entre nous qui est vide, desire, à ce qu’il paraît, le contraire de ce qu’il
éprouve : étant vide, il desire d’être rempli.
PROTARQUE.
Evident.
SOCRATE.
Mais quoi ! se peut-il qu’un homme qui se trouve vide pour la première fois,
parvienne, soit par la sensation, soit par la mémoire, à remplir le vide d’une chose
qu’il n’éprouve pas dans le moment, et qu’il n’a jamais éprouvée par le passé ?
PROTARQUE.
Comment le pourrait-il ?
(35b) SOCRATE.
Cependant, tout homme qui désire, desire quelque chose, disons-nous.
PROTARQUE.
Sans contredit.
SOCRATE.
Il ne desire donc point ce qu’il éprouve : car il a soif : or la soif est un vide ; et il desire
d’être rempli.
PROTARQUE.
Oui.
SOCRATE.
Et celui qui a soif ne parviendra à remplir le vide qu’il éprouve que par quelque
partie de lui-même.
PROTARQUE.
Sans doute.
SOCRATE.
Il est impassible que ce soit par le corps, puisqu’il est vide.
PROTARQUE.
Oui.
SOCRATE.
Reste donc que ce soit l’âme qui parvienne à remplir le vide, (35d) et par la mémoire
évidemment ; car par quelle autre voie y parviendrait-elle ?
PROTARQUE.
Par aucune autre.
SOCRATE.
Comprenons - nous ce qui résulte de tout ceci ?
PROTARQUE.
Quoi ?
SOCRATE.
Ce discours nous fait connaître qu’il n’y a point de desir du corps.
PROTARQUE.
Comment ?
SOCRATE.
En ce qu’il nous montre que l’effort de tout être animé se porte toujours vers le
contraire de ce que le corps éprouve.
PROTARQUE.
Cela est vrai.
SOCRATE.
Or cet appétit qui Je pousse vers le contraire de ce qu’il éprouve, marque qu’il y a en
lui une mémoire des choses opposées aux affections de son corps.
PROTARQUE.
Assurément.
SOCRATE.
Ce discours, en nous faisant voir que la mémoire est ce qui porte l’animal vers ce
qu’il desire, nous apprend en même temps que toute espèce d’appétit, tout desir, a
son principe dans l’âme, et que c’est elle qui commande dans tout être animé.
PROTARQUE.
Très bien.
SOCRATE.
La raison ne souffre donc en aucune manière qu’on dise que notre corps a soif, qu’il a
faim, ni qu’il éprouve rien de semblable.
PROTARQUE.
Rien de plus vrai.
SOCRATE.
Faisons encore sur le même sujet la remarque suivante. Il me paraît que le
discours présent nous découvre ici un genre particulier de vie.
(35e) PROTARQUE.
Où ? et de quelle vie parles-tu ?
SOCRATE.
Quand l’âme éprouve un vide et quand ce vide est rempli, dans tout ce qui se
rapporte à la conservation et à l’altération de l’animal, et lorsqu’un de nous, se
trouvant dans l’un ou dans l’autre état, éprouve tantôt de la douleur, tantôt du
plaisir, selon qu’il passe de l’un à l’autre.
PROTARQUE.
En effet, ces deux états sont réels.
SOCRATE.
Mais qu’arrive-t-il lorsqu’on est dans une espèce de milieu entre ces deux états ?
PROTARQUE.
Dans quel milieu ?
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