| [95] (Σωκράτης)
ὦ Μένων, Ἄνυτος μέν μοι δοκεῖ χαλεπαίνειν, καὶ οὐδὲν θαυμάζω: οἴεται γάρ με 
πρῶτον μὲν κακηγορεῖν τούτους τοὺς ἄνδρας, ἔπειτα ἡγεῖται καὶ αὐτὸς εἶναι εἷς 
τούτων. ἀλλ' οὗτος μὲν ἐάν ποτε γνῷ οἷόν ἐστιν τὸ κακῶς λέγειν, παύσεται 
χαλεπαίνων, νῦν δὲ ἀγνοεῖ: σὺ δέ μοι εἰπέ, οὐ καὶ παρ' ὑμῖν εἰσιν καλοὶ κἀγαθοὶ 
ἄνδρες;
(Μένων) πάνυ γε.
(95b) (Σωκράτης)
τί οὖν; ἐθέλουσιν οὗτοι παρέχειν αὑτοὺς διδασκάλους τοῖς νέοις, καὶ ὁμολογεῖν 
διδάσκαλοί τε εἶναι καὶ διδακτὸν ἀρετήν;
(Μένων)
οὐ μὰ τὸν Δία, ὦ Σώκρατες, ἀλλὰ τοτὲ μὲν ἂν αὐτῶν ἀκούσαις ὡς διδακτόν, τοτὲ 
δὲ ὡς οὔ.
(Σωκράτης)
φῶμεν οὖν τούτους διδασκάλους εἶναι τούτου τοῦ πράγματος, οἷς μηδὲ αὐτὸ 
τοῦτο ὁμολογεῖται;
(Μένων) οὔ μοι δοκεῖ, ὦ Σώκρατες.
(Σωκράτης)
τί δὲ δή; οἱ σοφισταί σοι οὗτοι, οἵπερ μόνοι ἐπαγγέλλονται, δοκοῦσι διδάσκαλοι 
εἶναι ἀρετῆς;
(95c) (Μένων)
καὶ Γοργίου μάλιστα, ὦ Σώκρατες, ταῦτα ἄγαμαι, ὅτι οὐκ ἄν ποτε αὐτοῦ τοῦτο 
ἀκούσαις ὑπισχνουμένου, ἀλλὰ καὶ τῶν ἄλλων καταγελᾷ, ὅταν ἀκούσῃ 
ὑπισχνουΜένων: ἀλλὰ λέγειν οἴεται δεῖν ποιεῖν δεινούς.
(Σωκράτης) οὐδ' ἄρα σοὶ δοκοῦσιν οἱ σοφισταὶ διδάσκαλοι εἶναι;
(Μένων)
οὐκ ἔχω λέγειν, ὦ Σώκρατες. καὶ γὰρ αὐτὸς ὅπερ οἱ πολλοὶ πέπονθα: τοτὲ μέν 
μοι δοκοῦσιν, τοτὲ δὲ οὔ.
(Σωκράτης)
οἶσθα δὲ ὅτι οὐ μόνον σοί τε καὶ τοῖς ἄλλοις τοῖς πολιτικοῖς τοῦτο δοκεῖ τοτὲ μὲν 
εἶναι διδακτόν, τοτὲ δ' οὔ, (95d) ἀλλὰ καὶ Θέογνιν τὸν ποιητὴν οἶσθ' ὅτι ταὐτὰ 
ταῦτα λέγει;
(Μένων) ἐν ποίοις ἔπεσιν;
(Σωκράτης) ἐν τοῖς ἐλεγείοις, οὗ λέγει - 
καὶ παρὰ τοῖσιν πῖνε καὶ ἔσθιε, καὶ μετὰ τοῖσιν 
ἵζε, καὶ ἅνδανε τοῖς, ὧν μεγάλη δύναμις. 
ἐσθλῶν μὲν γὰρ ἄπ' ἐσθλὰ διδάξεαι: ἢν δὲ κακοῖσιν2  
(95e) συμμίσγῃς, ἀπολεῖς καὶ τὸν ἐόντα νόον. 
οἶσθ' ὅτι ἐν τούτοις μὲν ὡς διδακτοῦ οὔσης τῆς ἀρετῆς λέγει; 
(Μένων)
φαίνεταί γε.
(Σωκράτης)
ἐν ἄλλοις δέ γε ὀλίγον μεταβάς, - 
εἰ δ' ἦν ποιητόν, φησί, καὶ ἔνθετον ἀνδρὶ νόημα, - λέγει πως ὅτι -  
πολλοὺς ἂν μισθοὺς καὶ μεγάλους ἔφερον 
οἱ δυνάμενοι τοῦτο ποιεῖν, καὶ -  
οὔ ποτ' ἂν ἐξ ἀγαθοῦ πατρὸς ἔγεντο κακός, 
 | [95] (95a) (SOCRATE): Il me semble, Ménon, qu'Anytos est fâché, 
et je ne m'en étonne pas! C'est que, en premier lieu, il croit que
je médis de ces grands personnages et puis, qu'il estime être 
personnellement l'un d'entre eux! Eh bien! pourtant, 
le jour où il connaîtra ce que c'est que 
de mal parler de quelqu'un, ce jour-là il cessera de se 
fâcher; mais à présent il n'en a point connaissance. Mais 
toi, dis-moi, des hommes comme il faut, n'y en a-t-il pas 
chez vous aussi? — (MÉNON) : Hé! absolument. (b)
(SOCRATE): Mais quoi? Ces hommes s'offrent-ils eux-mêmes 
à en donner l'enseignement à la jeunesse ? conviennent-ils 
qu'ils sont des maîtres capables d'enseigner cela et que 
la vertu est une chose qui s'enseigne? (MÉNON): Non, 
par Zeus! mais tu les entendrais, tantôt dire que c'est 
une chose qui s'enseigne, et tantôt dire le contraire! —
(SOCRATE): Nous faut-il donc affirmer que, pour donner 
l'enseignement de cette matière, ceux-là sont des maîtres, 
qui sur ce point essentiel ne s'accordent même pas? —
(MÉNON): Ce n'est point mon avis, Socrate! — (SOCRATE) : Mais 
qu'est-ce donc à dire? Alors, ces Sophistes, eux qui, 
seuls, en font ouvertement profession, sont-ils à ton avis 
des maîtres qui enseignent la vertu? (c) — (MÉNON) : En 
tout cas, Socrate, ce que j'admire le plus de Gorgias, 
c'est que jamais tu ne l'entendrais justement, promettre, 
cela, mais bien plus, il se gausse de ses confrères quand 
il leur entend faire cette promesse: tout ce qu'on doit 
promettre, selon lui, c'est de former des hommes habiles 
à parler. — (SOCRATE): Alors, c'est qu'à ton avis non plus 
les Sophistes ne sont pas des maîtres qui enseignent la 
vertu? — (MÉNON): Je ne sais que dire, Socrate! Je suis en 
effet dans le même cas exactement que la plupart des 
gens : tantôt, à mon avis, c'est oui, et tantôt non! (d) — 
(SOCRATE): Or, sais-tu bien que ce n'est pas seulement à ton 
avis et, par ailleurs, à celui des hommes politiques, que 
tantôt la vertu est une chose qui s'enseigne et tantôt non? 
mais que Théognis, lui aussi, dit la même chose? le 
sais-tu? — (MÉNON): Dans lesquels de ses vers? — (SOCRATE) : 
Dans ses élégies, à l'endroit où il dit: Chez ceux-ci bois 
et mange, au milieu de ceux-ci assieds-toi, sois aimable avec 
ceux qui ont une grande puissance. Car ce sont les gens de bien 
qui t'enseigneront ce qui est bien; si tu te mêles aux méchants,
tu perdras ce que tu peux avoir de bon jugement. (e) Que, 
dans ces vers, il parle de la vertu comme d'une chose 
qui s'enseigne, le sais-tu? — (MÉNON): Évidemment oui.
(SOCRATE) : Mais voici d'autres vers où, changeant quelque 
peu d'idée, il s'exprime ainsi : S'il était possible de créer 
pour un homme de la réflexion et de la déposer en lui, alors, 
ajoute-t-il à peu près, nombreux et grands seraient les 
salaires qu'en retireraient ceux qui auraient le pouvoir de 
le faire; puis : jamais, issu d'un père homme de bien, on ne 
deviendrait un méchant, 
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