[247] πᾶσά τε ἐπιστήμη χωριζομένη (247a)
δικαιοσύνης καὶ τῆς ἄλλης ἀρετῆς πανουργία, οὐ σοφία φαίνεται. Ὧν ἕνεκα
καὶ πρῶτον καὶ ὕστατον καὶ διὰ παντὸς πᾶσαν πάντως προθυμίαν πειρᾶσθε
ἔχειν ὅπως μάλιστα μὲν ὑπερβαλεῖσθε καὶ ἡμᾶς καὶ τοὺς πρόσθεν εὐκλείᾳ· εἰ
δὲ μή, ἴστε ὡς ἡμῖν, ἂν μὲν νικῶμεν ὑμᾶς ἀρετῇ, ἡ νίκη αἰσχύνην φέρει, ἡ
δὲ ἧττα, ἐὰν ἡττώμεθα, εὐδαιμονίαν. Μάλιστα δ' ἂν νικῴμεθα καὶ ὑμεῖς
νικῴητε, εἰ παρασκευάσαισθε τῇ τῶν (247b) προγόνων δόξῃ μὴ καταχρησόμενοι
μηδ' ἀναλώσοντες αὐτήν, γνόντες ὅτι ἀνδρὶ οἰομένῳ τὶ εἶναι οὐκ ἔστιν
αἴσχιον οὐδὲν ἢ παρέχειν ἑαυτὸν τιμώμενον μὴ δι' ἑαυτὸν ἀλλὰ διὰ δόξαν
προγόνων. Εἶναι μὲν γὰρ τιμὰς γονέων ἐκγόνοις καλὸς θησαυρὸς καὶ
μεγαλοπρεπής· χρῆσθαι δὲ καὶ χρημάτων καὶ τιμῶν θησαυρῷ, καὶ μὴ τοῖς
ἐκγόνοις παραδιδόναι, αἰσχρὸν καὶ ἄνανδρον, ἀπορίᾳ ἰδίων αὑτοῦ κτημάτων τε
καὶ εὐδοξιῶν. (247c) Καὶ ἐὰν μὲν ταῦτα ἐπιτηδεύσητε, φίλοι παρὰ φίλους
ἡμᾶς ἀφίξεσθε, ὅταν ὑμᾶς ἡ προσήκουσα μοῖρα κομίσῃ· ἀμελήσαντας δὲ ὑμᾶς
καὶ κακισθέντας οὐδεὶς εὐμενῶς ὑποδέξεται. Τοῖς μὲν οὖν παισὶ ταῦτ'
εἰρήσθω.
Πατέρας δὲ ἡμῶν, οἷς εἰσί, καὶ μητέρας ἀεὶ χρὴ παραμυθεῖσθαι ὡς ῥᾷστα
φέρειν τὴν συμφοράν, ἐὰν ἄρα συμβῇ γενέσθαι, καὶ μὴ συνοδύρεσθαι - οὐ γὰρ
τοῦ λυπήσοντος (247d) προσδεήσονται· ἱκανὴ γὰρ ἔσται καὶ ἡ γενομένη τύχη
τοῦτο πορίζειν - ἀλλ' ἰωμένους καὶ πραύ̈νοντας ἀναμιμνῄσκειν αὐτοὺς ὅτι ὧν
ηὔχοντο τὰ μέγιστα αὐτοῖς οἱ θεοὶ ἐπήκοοι γεγόνασιν. Οὐ γὰρ ἀθανάτους
σφίσι παῖδας ηὔχοντο γενέσθαι ἀλλ' ἀγαθοὺς καὶ εὐκλεεῖς, ὧν ἔτυχον,
μεγίστων ἀγαθῶν ὄντων· πάντα δὲ οὐ ῥᾴδιον θνητῷ ἀνδρὶ κατὰ νοῦν ἐν τῷ
ἑαυτοῦ βίῳ ἐκβαίνειν. Καὶ φέροντες μὲν ἀνδρείως τὰς συμφορὰς δόξουσι τῷ
ὄντι ἀνδρείων παίδων πατέρες εἶναι (247e) καὶ αὐτοὶ τοιοῦτοι, ὑπείκοντες
δὲ ὑποψίαν παρέξουσιν ἢ μὴ ἡμέτεροι εἶναι ἢ ἡμῶν τοὺς ἐπαινοῦντας
καταψεύδεσθαι· χρὴ δὲ οὐδέτερα τούτων, ἀλλ' ἐκείνους μάλιστα ἡμῶν
ἐπαινέτας εἶναι ἔργῳ, παρέχοντας αὑτοὺς φαινομένους τῷ ὄντι πατέρας ὄντας
ἄνδρας ἀνδρῶν. Πάλαι γὰρ δὴ τὸ μηδὲν ἄγαν λεγόμενον καλῶς δοκεῖ λέγεσθαι·
τῷ γὰρ ὄντι εὖ λέγεται.
| [247] Le talent même, séparé (247a) de la justice et de la vertu,
n'est qu'une habileté méprisable, et non la sagesse.
Mettez donc vos premiers et vos derniers soins, et songez
sans cesse à accroître l'héritage d'honneur que nous vous laissons, nous
et nos aïeux; sinon, apprenez que, si nous vous surpassons en vertu, cette
victoire fera notre honte, tandis que la défaite eût fait notre bonheur.
Or, voici comment vous pourrez nous surpasser et nous vaincre : n'abusez
pas de la gloire de (247b) vos pères, ne la dissipez pas, et sachez que
rien n'est plus honteux pour un homme qui a quelque idée de lui-même, que
de présenter comme un titre à l'estime, non ses propres mérites, mais la
renommée de ses aïeux. La gloire des pères est sans doute pour leurs
descendants le plus beau et le plus précieux trésor ; mais en jouir sans
pouvoir le transmettre à ses enfants, et sans y avoir rien ajouté
soi-même, c'est le comble de la lâcheté. (247c) Si vous suivez ces
conseils, quand la destinée aura marqué votre fin, vous viendrez nous
rejoindre, et nous vous recevrons comme des amis
reçoivent des amis; mais si vous les négligez, si vous dégénérez,
n'attendez pas de nous un accueil favorable. Voilà ce que nous avons à
dire à nos enfants.
Quant à nos pères et à nos mères, il faut les exhorter incessamment à
supporter avec patience ce qui pourra nous arriver, et ne point s'unir à
leurs lamentations; ils n'auront pas besoin (247d) qu'on excite leur
douleur, leur malheur y suffira. Pour guérir et calmer leurs regrets, il
faut plutôt leur rappeler que de tous les vœux qu'ils adressaient aux
dieux, le plus cher a été exaucé ; car ils n'avaient pas demandé des fils
immortels, mais braves et célèbres : ce sont là les biens les plus
précieux, et ils leur sont assurés. Qu'on leur rappelle aussi qu'il est
bien difficile que tout succède à l'homme, pendant la vie, au gré de ses
souhaits. S'ils supportent courageusement leur malheur, on reconnaîtra
qu'ils étaient en effet les pères d'enfants courageux (247e) et qu'ils les
égalent en courage ; s'ils en sont accablés, ils feront douter qu'ils
fussent véritablement nos pères ou que les louanges qu'on nous donne
soient méritées. Loin de là, c'est à eux qu'il appartient de se charger de
notre éloge, en montrant par leur conduite que braves ils ont engendré des
braves. Il a toujours passé pour sage, ce vieux précepte,
"rien de trop", et en vérité c'est un mot plein de sens.
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