[10,887] φεύγουσι περὶ τῆς νομοθεσίας λέγουσιν
(887a) ὡς δεινὰ ἐργαζόμεθα νομοθετοῦντες ὡς ὄντων θεῶν; ἢ
χαίρειν ἐάσαντες ἐπὶ τοὺς νόμους τρεπώμεθα πάλιν, μὴ καὶ τὸ
προοίμιον ἡμῖν μακρότερον γίγνηται τῶν νόμων; οὐ γάρ τι
βραχὺς ὁ λόγος ἐκταθεὶς ἂν γίγνοιτο, εἰ τοῖσιν ἐπιθυμοῦσιν
ἀσεβεῖν τὰ μὲν ἀποδείξαιμεν μετρίως τοῖς λόγοις ὧν ἔφραζον
δεῖν πέρι λέγειν, τὸν δὲ εἰς φόβον τρέψαιμεν, τὰ δὲ δυσχεραίνειν
ποιήσαντες, ὅσα πρέπει μετὰ ταῦτα ἤδη νομοθετοῖμεν.
(887b) (Κλεινίας)
ἀλλ', ὦ ξένε, πολλάκις μὲν ὥς γε ἐν ὀλίγῳ χρόνῳ τοῦτ' αὐτὸ
εἰρήκαμεν, ὡς οὐδὲν ἐν τῷ παρόντι δεῖ προτιμᾶν βραχυλογίαν
μᾶλλον ἢ μῆκος - οὐδεὶς γὰρ ἡμᾶς, τὸ λεγόμενον, ἐπείγων
διώκει - γελοῖον δὴ καὶ φαῦλον τὸ πρὸ τῶν βελτίστων τὰ
βραχύτερα αἱρουμένους φαίνεσθαι. διαφέρει δ' οὐ σμικρὸν
ἁμῶς γέ πως πιθανότητά τινα τοὺς λόγους ἡμῶν ἔχειν, ὡς θεοί
τ' εἰσὶν καὶ ἀγαθοί, δίκην τιμῶντες διαφερόντως ἀνθρώπων·
σχεδὸν γὰρ τοῦτο ἡμῖν ὑπὲρ ἁπάντων (887c) τῶν νόμων
κάλλιστόν τε καὶ ἄριστον προοίμιον ἂν εἴη. μηδὲν οὖν
δυσχεράναντες μηδὲ ἐπειχθέντες, ἥντινά ποτε ἔχομεν δύναμιν
εἰς πειθὼ τῶν τοιούτων λόγων, μηδὲν ἀποθέμενοι διεξέλθωμεν
εἰς τὸ δυνατὸν ἱκανῶς.
(Ἀθηναῖος)
εὐχήν μοι δοκεῖ παρακαλεῖν ὁ λεγόμενος ὑπὸ σοῦ νῦν λόγος,
ἐπειδὴ προθύμως συντείνεις· μέλλειν δὲ οὐκέτι ἐγχωρεῖ λέγειν.
φέρε δή, πῶς ἄν τις μὴ θυμῷ λέγοι περὶ θεῶν ὡς εἰσίν; ἀνάγκη
γὰρ δὴ χαλεπῶς φέρειν καὶ μισεῖν (887d) ἐκείνους οἳ τούτων
ἡμῖν αἴτιοι τῶν λόγων γεγένηνται καὶ γίγνονται νῦν, οὐ
πειθόμενοι τοῖς μύθοις οὓς ἐκ νέων παίδων ἔτι ἐν γάλαξι
τρεφόμενοι τροφῶν τε ἤκουον καὶ μητέρων, οἷον ἐν ἐπῳδαῖς
μετά τε παιδιᾶς καὶ μετὰ σπουδῆς λεγομένων καὶ μετὰ θυσιῶν
ἐν εὐχαῖς αὐτοὺς ἀκούοντές τε, καὶ ὄψεις ὁρῶντες ἑπομένας
αὐτοῖς ἃς ἥδιστα ὅ γε νέος ὁρᾷ τε καὶ ἀκούει πραττομένας
θυόντων, ἐν σπουδῇ τῇ μεγίστῃ τοὺς αὑτῶν γονέας ὑπὲρ αὑτῶν
τε καὶ ἐκείνων ἐσπουδακότας, ὡς (887e) ὅτι μάλιστα οὖσιν θεοῖς
εὐχαῖς προσδιαλεγομένους καὶ ἱκετείαις, ἀνατέλλοντός τε
ἡλίου καὶ σελήνης καὶ πρὸς δυσμὰς ἰόντων προκυλίσεις ἅμα
καὶ προσκυνήσεις ἀκούοντές τε καὶ ὁρῶντες Ἑλλήνων τε καὶ
βαρβάρων πάντων ἐν συμφοραῖς παντοίαις ἐχομένων καὶ ἐν
εὐπραγίαις, οὐχ ὡς οὐκ ὄντων ἀλλ' ὡς ὅτι μάλιστα ὄντων καὶ
οὐδαμῇ ὑποψίαν ἐνδιδόντων ὡς οὐκ εἰσὶν θεοί - τούτων δὴ
πάντων ὅσοι καταφρονήσαντες οὐδὲ ἐξ ἑνὸς ἱκανοῦ λόγου, ὡς
φαῖεν ἂν ὅσοι καὶ σμικρὸν νοῦ κέκτηνται, νῦν ἀναγκάζουσιν
ἡμᾶς λέγειν ἃ λέγομεν,
| [10,887] nous accusait de tenter une entreprise inouïe, en basant notre
législation sur l'existence des dieux, ou bien les envoyant promener,
retournerons-nous à nos lois, de peur que le préambule ne devienne trop
étendu. La discussion prendrait de grandes proportions, si nous voulions
démontrer aux sectateurs de l'impiété la vérité des points sur lesquels
ils nous demandent des explications, et si nous ne portions nos lois
qu'après leur avoir inspiré de la crainte et donné de l'aversion pour tout
ce qui en mérite.
(CLINIAS) Étranger, nous avons dit souvent en peu de temps qu'il faut bien
se garder dans le sujet que nous traitons de préférer la brièveté à la
longueur ; car, comme on dit, personne ne nous presse et ne nous poursuit.
Nous serions ridicules et méprisables, si nous préférions le plus court au
meilleur. Il importe au plus haut point de mettre en quelque sorte dans
nos discours une force de persuasion qui fasse croire qu'il y a des dieux,
qu'ils sont bons et qu'ils honorent la justice infiniment plus que les
hommes. Ce serait là pour toutes nos lois le plus beau et le plus
excellent des préludes. Ainsi donc, sans nous impatienter ni nous presser,
déployons dans cette discussion toute notre force de persuasion, sans rien
omettre, et développons jusqu'au bout nos arguments aussi bien que nous le
pourrons.
CHAPITRE III.
(L'ATHÉNIEN) J'interprète comme une prière le discours que tu viens de
tenir, tant tu y as mis d'empressement et d'ardeur; il ne me permet plus
d'hésiter à parler. Parlons donc ; mais comment garder son sang froid,
quand on se voit réduit à prouver que les dieux existent ? On ne peut
s'empêcher de voir de mauvais oeil et de haïr ceux qui ont été et sont
encore aujourd'hui cause de la discussion où nous allons entrer ; qui
n'ont pas foi aux contes que, dès leur plus jeune âge, alors qu'ils
étaient encore à la mamelle, ils ont entendu de la bouche de leur nourrice
et de leur mère, lesquelles enchantaient leurs oreilles sur un ton tantôt
badin, tantôt sérieux ; qui ont entendu leurs parents prier dans les
sacrifices et ou les cérémonies dont ils sont accompagnées, toujours si
agréables à voir et à entendre pratiquer, lorsqu'on est jeune ; qui ont vu
leurs parents appliqués avec le plus grand zèle à offrir des sacrifices
pour eux-mêmes et pour leurs enfants et s'adressant aux dieux dans leurs
prières et leurs supplications, dans la persuasion la plus assurée qu'ils
existent ; qui savent et voient de leurs yeux que tous les Grecs et tous
les barbares se prosternent et adorent les dieux au lever et au coucher du
soleil et de la lune, dans toutes les situations malheureuses ou heureuses
de leur vie, parce que, loin de penser que les dieux n'existent pas, ils
sont convaincus que leur existence est aussi réelle que possible et qu'il
n'y a jamais lieu de soupçonner qu'il n'y a pas de dieux. Et maintenant,
au mépris de toutes ces leçons, et sans aucune raison valable, comme le
pensent tous ceux qui ont tant soit peu de sens, ils nous forcent à leur
tenir le langage que nous leur tenons.
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