[10,902] (902a) (Ἀθηναῖος)
οὐκοῦν τὸ λοιπόν, εἴπερ ἀμελοῦσι τῶν σμικρῶν καὶ ὀλίγων τῶν
περὶ τὸ πᾶν, ἢ γιγνώσκοντες ὡς τὸ παράπαν οὐδενὸς τῶν
τοιούτων ἐπιμελεῖσθαι δεῖ, δρῷεν ἂν τοῦτο, ἢ τί τὸ λοιπὸν πλὴν
τῷ γιγνώσκειν τοὐναντίον;
(Κλεινίας) οὐδέν.
(Ἀθηναῖος)
πότερον οὖν, ὦ ἄριστε καὶ βέλτιστε, θῶμέν σε λέγοντα ὡς
ἀγνοοῦντάς τε καὶ δέον ἐπιμελεῖσθαι δι' ἄγνοιαν ἀμελοῦντας,
ἢ γιγνώσκοντας ὅτι δεῖ, καθάπερ οἱ φαυλότατοι τῶν ἀνθρώπων
λέγονται ποιεῖν, εἰδότες ἄλλα εἶναι βελτίω (902b) πράττειν ὧν
δὴ πράττουσιν, διά τινας ἥττας ἡδονῶν ἢ λυπῶν οὐ ποιεῖν;
(Κλεινίας) πῶς γὰρ ἄν;
(Ἀθηναῖος)
οὐκοῦν δὴ τά γε ἀνθρώπινα πράγματα τῆς τε ἐμψύχου μετέχει
φύσεως ἅμα, καὶ θεοσεβέστατον αὐτό ἐστι πάντων ζῴων
ἄνθρωπος;
(Κλεινίας) ἔοικε γοῦν.
(Ἀθηναῖος)
θεῶν γε μὴν κτήματά φαμεν εἶναι πάντα ὁπόσα θνητὰ ζῷα,
ὧνπερ καὶ τὸν οὐρανὸν ὅλον.
(Κλεινίας) πῶς γὰρ οὔ;
(Ἀθηναῖος)
ἤδη τοίνυν σμικρὰ ἢ μεγάλα τις φάτω ταῦτα εἶναι (902c) τοῖς
θεοῖς· οὐδετέρως γὰρ τοῖς κεκτημένοις ἡμᾶς ἀμελεῖν ἂν εἴη
προσῆκον, ἐπιμελεστάτοις γε οὖσι καὶ ἀρίστοις. σκοπῶμεν γὰρ
δὴ καὶ τόδε ἔτι πρὸς τούτοις.
(Κλεινίας) τὸ ποῖον;
(Ἀθηναῖος)
τὸ περί τε αἰσθήσεως καὶ δυνάμεως, ἆρ' οὐκ ἐναντίως ἀλλήλοιν
πρὸς ῥᾳστώνην καὶ χαλεπότητά ἐστον πεφυκότε;
(Κλεινίας) πῶς λέγεις;
(Ἀθηναῖος)
ὁρᾶν μέν που καὶ ἀκούειν τὰ σμικρὰ χαλεπώτερον ἢ τὰ
μεγάλα, φέρειν δὲ αὖ καὶ κρατεῖν καὶ ἐπιμελεῖσθαι τῶν
σμικρῶν καὶ ὀλίγων παντὶ ῥᾷον ἢ τῶν ἐναντίων.
(902d) (Κλεινίας) καὶ πολύ γε.
(Ἀθηναῖος)
ἰατρῷ δὲ προστεταγμένον ὅλον τι θεραπεύειν, βουλομένῳ καὶ
δυναμένῳ τῶν μὲν μεγάλων ἐπιμελεῖσθαι, τῶν μορίων δὲ καὶ
σμικρῶν ἀμελοῦντι, ἕξει ποτὲ καλῶς αὐτῷ τὸ πᾶν;
(Κλεινίας) οὐδαμῶς.
(Ἀθηναῖος)
οὐ μὴν οὐδὲ κυβερνήταις οὐδὲ στρατηγοῖς οὐδ' οἰκονόμοις, οὐδ'
αὖ τισὶν πολιτικοῖς οὐδ' ἄλλῳ τῶν τοιούτων οὐδενί, χωρὶς τῶν
ὀλίγων καὶ σμικρῶν πολλὰ ἢ μεγάλα· οὐδὲ (902e) γὰρ ἄνευ
σμικρῶν τοὺς μεγάλους φασὶν λιθολόγοι λίθους εὖ κεῖσθαι.
(Κλεινίας) πῶς γὰρ ἄν;
(Ἀθηναῖος)
μὴ τοίνυν τόν γε θεὸν ἀξιώσωμέν ποτε θνητῶν δημιουργῶν
φαυλότερον, οἳ τὰ προσήκοντα αὑτοῖς ἔργα, ὅσῳπερ ἂν
ἀμείνους ὦσιν, τόσῳ ἀκριβέστερα καὶ τελεώτερα μιᾷ τέχνῃ
σμικρὰ καὶ μεγάλα ἀπεργάζονται· τὸν δὲ θεὸν ὄντα τε
σοφώτατον βουλόμενόν τ' ἐπιμελεῖσθαι καὶ δυνάμενον,
| [10,902] (L'ATHÉNIEN) Il reste donc deux hypothèses, s'il est vrai qu'ils négligent
les petites et menues choses dans le gouvernement de l'univers, l'une est
qu'ils en agissent ainsi parce qu'ils savent qu'ils n'ont pas du tout à
s'occuper d'aucune de ces choses, l'autre, la seule qui reste, qu'ils sont
persuadés du contraire.
(CLINIAS) La seule en effet.
(L'ATHÉNIEN) Eh bien, mon bon, mon excellent ami, quel est ton sentiment ?
Préfères-tu soutenir que les dieux ignorent que c'est à eux d'en prendre
soin et que c'est par ignorance qu'ils les négligent, ou bien que,
connaissant leur devoir, ils se comportent comme les plus méprisables des
hommes, qui, sachant qu'il y a quelque chose à faire de mieux que ce
qu'ils font, ne le font pas, parce qu'ils se laissent vaincre par le
plaisir ou la douleur ?
(CLINIAS) Comment cela pourrait-il être ?
(L'ATHÉNIEN) Les affaires humaines sont-elles en dehors de la nature animée,
et l'homme n'est-il pas celui de tous les animaux celui qui révère le plus
la divinité ?
(CLINIAS) Il le semble bien en tout cas.
(L'ATHÉNIEN) Or nous soutenons que tous les êtres mortels sont une
possession des dieux, comme le ciel tout entier.
(CLINIAS) Sans contredit.
(L'ATHÉNIEN) Et maintenant qu'on dise, si l'on veut, que nos affaires sont
petites ou grandes aux yeux des dieux. Ni dans l'un ni dans l'autre cas,
il ne convient que ceux à qui nous appartenons nous négligent, alors
qu'ils sont très soigneux et très bons. Examinons donc encore ce point.
(CLINIAS) Lequel ?
(L'ATHÉNIEN) Il se rapporte à nos sens et à nos facultés. N'y a-t-il pas
entre eux une opposition naturelle en ce qui concerne la facilité et la difficulté ?
(CLINIAS) Comment cela ?
(L'ATHÉNIEN) C'est qu'il est plus difficile d'entendre et de voir les
petites choses que les grandes, et qu'au contraire il est plus aisé pour
tout homme de se charger, de se rendre maître, de prendre soin de petites
choses et en petit nombre que de grandes choses et en grand nombre.
(CLINIAS) De beaucoup plus facile.
(L'ATHÉNIEN) Si un médecin qui veut et qui peut soigner le corps entier
d'une personne, s'occupe des parties importantes de ce corps et. néglige
les petites, verra-t-il jamais son client tout entier en bon état ?
(CLINIAS) Jamais.
(L'ATHÉNIEN) Il en est de même des pilotes, des généraux, des économes, des
hommes d'État et de tous ceux qui exercent des professions semblables,
s'ils ne s'intéressent qu'au grand nombre des affaires et aux plus
importantes et laissent de côté le petit nombre et les affaires de mince
importance ; car, comme disent les maçons, les grosses pierres ne
s'arrangent pas bien sans les petites.
(CLINIAS) En effet.
(L'ATHÉNIEN) Ne ravalons donc pas Dieu au-dessous des artisans mortels, qui
exécutent avec le même art les ouvrages de leur métier, soit petits, soit
grands, avec d'autant plus de précision et de perfection qu'ils sont plus
excellents. Ne disons pas que Dieu, qui est très sage et qui veut et peut
prendre soin de tout,
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