[5,736] μὴ ἔχοντες ἑτοίμους αὑτοὺς ἐνδείκνυνται παρεσκευακότες (736a) ἕπεσθαι,
τούτοις ὡς νοσήματι πόλεως ἐμπεφυκότι, δι' εὐφημίας ἀπαλλαγήν, ὄνομα ἀποικίαν
τιθέμενος, εὐμενῶς ὅτι μάλιστα ἐξεπέμψατο. παντὶ μὲν οὖν νομοθετοῦντι
τοῦτο ἁμῶς γέ πως κατ' ἀρχὰς δραστέον, ἡμῖν μὴν ἔτι τούτων ἀκοπώτερα
τὰ περὶ ταῦτ' ἐστὶ συμβεβηκότα νῦν· οὔτε γὰρ ἀποικίαν οὔτ' ἐκλογήν τινα
καθάρσεως δεῖ μηχανᾶσθαι πρὸς τὸ παρόν, οἷον δέ τινων συρρεόντων ἐκ
πολλῶν τὰ μὲν πηγῶν (736b) τὰ δὲ χειμάρρων εἰς μίαν λίμνην, ἀναγκαῖον
προσέχοντας τὸν νοῦν φυλάττειν ὅπως ὅτι καθαρώτατον ἔσται τὸ
συρρέον ὕδωρ, τὰ μὲν ἐξαντλοῦντας, τὰ δ' ἀποχετεύοντας καὶ
παρατρέποντας. πόνος δ', ὡς ἔοικεν, καὶ κίνδυνός ἐστιν ἐν πάσῃ
κατασκευῇ πολιτικῇ. τὰ δ' ἐπείπερ λόγῳ γ' ἐστὶν τὰ νῦν ἀλλ' οὐκ ἔργῳ
πραττόμενα, πεπεράνθω τε ἡμῖν ἡ συλλογὴ καὶ κατὰ νοῦν ἡ καθαρότης
αὐτῆς ἔστω συμβεβηκυῖα· τοὺς γὰρ κακοὺς (736c) τῶν ἐπιχειρούντων εἰς
τὴν νῦν πόλιν ὡς πολιτευσομένους συνιέναι πειθοῖ πάσῃ καὶ ἱκανῷ χρόνῳ
διαβασανίσαντες, διακωλύσωμεν ἀφικνεῖσθαι, τοὺς δ' ἀγαθοὺς εἰς
δύναμιν εὐμενεῖς ἵλεῴ τε προσαγώμεθα.
τόδε δὲ μὴ λανθανέτω γιγνόμενον ἡμᾶς εὐτύχημα, ὅτι καθάπερ εἴπομεν
τὴν τῶν Ἡρακλειδῶν ἀποικίαν εὐτυχεῖν, ὡς γῆς καὶ χρεῶν ἀποκοπῆς καὶ
νομῆς πέρι δεινὴν καὶ ἐπικίνδυνον ἔριν ἐξέφυγεν, ἣν νομοθετεῖσθαι
ἀναγκασθείσῃ (736d) πόλει τῶν ἀρχαίων οὔτε ἐᾶν οἷόν τε ἀκίνητον οὔτ'
αὖ κινεῖν δυνατόν ἐστί τινα τρόπον, εὐχὴ δὲ μόνον ὡς ἔπος εἰπεῖν
λείπεται, καὶ σμικρὰ μετάβασις εὐλαβὴς ἐν πολλῷ χρόνῳ σμικρὸν
μεταβιβάζουσιν, ἥδε· τῶν κινούντων ἀεὶ κεκτημένων μὲν αὐτῶν γῆν
ἄφθονον ὑπάρχειν, κεκτημένων δὲ καὶ ὀφειλέτας αὑτοῖς πολλοὺς
ἐθελόντων τε τούτων πῃ τοῖς ἀπορουμένοις (736e) δι' ἐπιείκειαν
κοινωνεῖν, τὰ μὲν ἀφιέντας, τὰ δὲ νεμομένους, ἁμῇ γέ πῃ τῆς μετριότητος
ἐχομένους καὶ πενίαν ἡγουμένους εἶναι μὴ τὸ τὴν οὐσίαν ἐλάττω ποιεῖν
ἀλλὰ τὸ τὴν ἀπληστίαν πλείω. σωτηρίας τε γὰρ ἀρχὴ μεγίστη πόλεως
αὕτη γίγνεται, καὶ ἐπὶ ταύτης οἷον κρηπῖδος μονίμου ἐποικοδομεῖν
δυνατὸν ὅντινα ἂν ὕστερον ἐποικοδομῇ τις κόσμον πολιτικὸν προσήκοντα
τῇ τοιαύτῃ καταστάσει·
| [5,736] ne possédant rien et manquant du nécessaire,
se montrent disposés à (736a) suivre des chefs pour attaquer
ceux là qui possèdent ; on s'en défait comme d'une maladie
invétérée dans l'État et l'on désigne ce renvoi sous
le nom euphémique de colonie. Voilà ce que tout
législateur doit faire d'une manière ou d'une autre
dès le début. Mais le cas où nous nous trouvons,
nous, est encore plus insolite ; car ce n'est pas
pour le moment une colonie que nous avons à
envoyer ni un moyen d'épuration à imaginer ; nous
avons affaire à une foule pareille à une masse
d'eaux qui affluent des divers côtés, les unes de
sources, les autres de torrents, dans un lac
unique, et nous avons besoin de mettre tous nos
soins à rendre l'eau ainsi amassée aussi pure que
possible, soit en en pompant une partie, soit en
dérivant et détournant une autre dans des canaux.
Il y a, vous le voyez, des travaux et des risques
attachés à tout établissement politique. Mais
comme nous n'y travaillons aujourd'hui qu'en
paroles et non en action, mettons que nos gens
sont rassemblés et que nous en avons achevé
l'épuration à notre gré, en empêchant d'entrer
dans notre État les méchants qui tenteraient de s'y
rassembler pour prendre part au gouvernement,
après avoir tout mis en œuvre pour les persuader
et les avoir mis à l'épreuve un temps suffisant, et
en y attirant au contraire, autant que nous
pourrons, les gens de bien, à qui nous
témoignerons de la bienveillance et de l'affection.
Mais voici une chose qu'il ne faut pas oublier, c'est
que nous avons la même chance que les
Héraclides, qui, comme nous l'avons dit,
échappèrent en fondant leur colonisation aux
querelles violentes et dangereuses que suscitent
la distribution des terres et le retranchement des
dettes. Quand un État est réduit à se donner des
lois, il est dans l'impossibilité de laisser intacts les
anciens règlements et en même temps d'y toucher
en quelque manière. Il ne lui reste, pour ainsi dire,
qu'un souhait à faire, et il doit se borner à de
légers changements introduits avec prudence et à
force de temps. Ces changements ne sont
possibles que lorsque ceux qui possèdent des
biens immenses et qui ont de nombreux débiteurs
sont assez généreux pour partager avec les
déshérités, soit en leur remettant leurs dettes, soit
en leur distribuant des terres, et qu'ils se
persuadent que ce n'est pas en diminuant sa
fortune, mais en devenant plus insatiable qu'on
s'appauvrit. C'est là le meilleur moyen d'assurer le
salut des États ; sur ce fondement, comme sur
une base solide, on peut élever ensuite tel édifice
politique qu'on jugera convenable en pareille
circonstance.
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