[536] ὁ δὲ μέσος σὺ ὁ (536a) ῥαψῳδὸς καὶ ὑποκριτής,
ὁ δὲ πρῶτος αὐτὸς ὁ ποιητής, ὁ δὲ θεὸς διὰ πάντων
τούτων ἕλκει τὴν ψυχὴν ὅποι ἂν βούληται τῶν ἀνθρώπων,
ἀνακρεμαννὺς ἐξ ἀλλήλων τὴν δύναμιν. καὶ ὥσπερ ἐκ τῆς
λίθου ἐκείνης ὁρμαθὸς πάμπολυς ἐξήρτηται χορευτῶν τε καὶ
διδασκάλων καὶ ὑποδιδασκάλων, ἐκ πλαγίου ἐξηρτημένων τῶν
τῆς Μούσης ἐκκρεμαμένων δακτυλίων. καὶ ὁ μὲν τῶν ποιητῶν
ἐξ ἄλλης Μούσης, ὁ δὲ ἐξ ἄλλης ἐξήρτηται - ὀνομάζομεν δὲ
αὐτὸ κατέχεται, τὸ δέ (536b) ἐστι παραπλήσιον, ἔχεται γάρ - ἐκ
δὲ τούτων τῶν πρώτων δακτυλίων, τῶν ποιητῶν, ἄλλοι ἐξ
ἄλλου αὖ ἠρτημένοι εἰσὶ καὶ ἐνθουσιάζουσιν, οἱ μὲν ἐξ Ὀρφέως,
οἱ δὲ ἐκ Μουσαίου, οἱ δὲ πολλοὶ ἐξ Ὁμήρου κατέχονταί τε καὶ
ἔχονται. ὧν σύ, ὦ Ἴων, εἷς εἶ καὶ κατέχῃ ἐξ Ὁμήρου, καὶ ἐπειδὰν
μέν τις ἄλλου του ποιητοῦ ᾄδῃ, καθεύδεις τε καὶ ἀπορεῖς ὅτι
λέγῃς, ἐπειδὰν δὲ τούτου τοῦ ποιητοῦ φθέγξηταί τις μέλος,
εὐθὺς ἐγρήγορας καὶ ὀρχεῖταί σου ἡ ψυχὴ καὶ εὐπορεῖς ὅτι
(536c) λέγῃς, οὐ γὰρ τέχνῃ οὐδ' ἐπιστήμῃ περὶ Ὁμήρου λέγεις ἃ
λέγεις, ἀλλὰ θείᾳ μοίρᾳ καὶ κατοκωχῇ, ὥσπερ οἱ
κορυβαντιῶντες ἐκείνου μόνου αἰσθάνονται τοῦ μέλους ὀξέως
ὃ ἂν ᾖ τοῦ θεοῦ ἐξ ὅτου ἂν κατέχωνται, καὶ εἰς ἐκεῖνο τὸ μέλος
καὶ σχημάτων καὶ ῥημάτων εὐποροῦσι, τῶν δὲ ἄλλων οὐ
φροντίζουσιν, οὕτω καὶ σύ, ὦ Ἴων, περὶ μὲν Ὁμήρου ὅταν τις
μνησθῇ, εὐπορεῖς, περὶ δὲ τῶν ἄλλων ἀπορεῖς, (536d) τούτου δ'
ἐστὶ τὸ αἴτιον, ὅ μ' ἐρωτᾷς, δι' ὅτι σὺ περὶ μὲν Ὁμήρου εὐπορεῖς,
περὶ δὲ τῶν ἄλλων οὔ, ὅτι οὐ τέχνῃ ἀλλὰ θείᾳ μοίρᾳ Ὁμήρου
δεινὸς εἶ ἐπαινέτης.
80. (Ἴων)
σὺ μὲν εὖ λέγεις, ὦ Σώκρατες, θαυμάζοιμι μεντἂν εἰ οὕτως εὖ
εἴποις, ὥστε με ἀναπεῖσαι ὡς ἐγὼ κατεχόμενος καὶ μαινόμενος
Ὅμηρον ἐπαινῶ. οἶμαι δὲ οὐδ' ἂν σοὶ δόξαιμι, εἴ μου ἀκούσαις
λέγοντος περὶ Ὁμήρου.
81. (Σωκράτης)
καὶ μὴν ἐθέλω γε ἀκοῦσαι, οὐ μέντοι πρότερον (536e) πρὶν ἄν
μοι ἀποκρίνῃ τόδε, ὧν Ὅμηρος λέγει περὶ τίνος εὖ λέγεις; οὐ
γὰρ δήπου περὶ ἁπάντων γε.
82. (Ἴων)
εὖ ἴσθι, ὦ Σώκρατες, περὶ οὐδενὸς ὅτου οὔ.
83. (Σωκράτης)
οὐ δήπου καὶ περὶ τούτων ὧν σὺ μὲν τυγχάνεις οὐκ εἰδώς,
Ὅμηρος δὲ λέγει.
84. (Ἴων)
καὶ ταῦτα ποῖά ἐστιν ἃ Ὅμηρος μὲν λέγει, ἐγὼ δὲ οὐκ οἶδα;
| [536] L’anneau du milieu c’est toi, le rhapsode et l’acteur, et le premier anneau,
c’est le poète lui-même. La divinité par tous ces intermédiaires tire l’âme des hommes
là où elle le veut en faisant dépendre leur puissance les uns des autres. Comme si elle
était rattachée à cette pierre, se forme une très longue chaîne de choreutes, de maîtres,
de sous-maîtres, attachés obliquement aux anneaux suspendus directement à la Muse.
Et l’un des poètes est attaché à une Muse, l’autre à une autre ; nous disons qu’ils sont
possédés, mais c’est la même chose, car ils sont tenus. Aux premiers anneaux qui sont
les poètes, d’autres à leur tous sont attirés et enthousiasmés les uns par Orphée,
les autres par Musée ; mais la plupart sont possédés et tenus par Homère. Tu es l’un
d’entre eux, Ion, et Homère te possède ; aussi lorsqu’on chante les œuvres d’un autre
poète, tu dors et tu manques d’idées, mais vient-on à faire entendre le nom d’une poésie
de cet auteur, aussitôt tu te réveilles, ton âme s’agite, et tu es plein de ton sujet.
Car ce n’est pas en vertu d’un art ni d’une science que tu parles comme tu le fais sur
Homère, mais d’une possession et d’un don divins. Les corybantes ne perçoivent
finalement que le chant du dieu qui les possède, et pour accompagner ce chant,
ils font une foule de gestes et de paroles, tandis qu’ils ne se soucient pas des autres chants.
Il en est de même pour toi, Ion. Quand on fait mention d’Homère, tu es plein d’idées,
tu en manques pour les autres poètes. Telle est la raison du fait sur lequel tu m’interrogeais,
à savoir que tu parles avec abondance sur Homère et non sur les autres poètes ;
c’est que tu es habile à louer Homère, non par art, mais grâce à un don de la divinité.
(Ion)
Tu as raison, Socrate. Je serais étonné pourtant que tu me parlasses assez bien pour
me persuader que je suis possédé et dans le délire quand je loue Homère. Je crois que
même à toi je ne paraîtrais pas dans cet état, si tu m’entendais parler sur Homère.
(Socrate)
Oui. Je consens à t’entendre, mais non avant que tu n’aies répondu à cette question-ci.
Parmi les sujets dont parle Homère, quel est celui dont tu parles bien ? Car naturellement,
ce n’est pas sur tous.
(Ion)
Apprends Socrate, qu’il n’en est aucun sur lequel je ne parle pas bien.
(Socrate)
Il n’en est pas ainsi cependant même pour les sujets que tu ne connais pas tt dont
parle Homère.
(Ion)
Et quels sont ces sujets dont parle Homère et que je ne connais pas ?
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