[372] (Ἱππίας) καὶ πῶς ἄν, ὦ Σώκρατες, οἱ ἑκόντες ἀδικοῦντες καὶ
(372a) ἑκόντες ἐπιβουλεύσαντες καὶ κακὰ ἐργασάμενοι βελτίους ἂν
εἶεν τῶν ἀκόντων, οἷς πολλὴ δοκεῖ συγγνώμη εἶναι, ἐὰν μὴ εἰδώς τις
ἀδικήσῃ ἢ ψεύσηται ἢ ἄλλο τι κακὸν ποιήσῃ; καὶ οἱ νόμοι δήπου πολὺ
χαλεπώτεροί εἰσι τοῖς ἑκοῦσι κακὰ ἐργαζομένοις καὶ ψευδομένοις ἢ
τοῖς ἄκουσιν.
(Σωκράτης) ὁρᾷς, ὦ Ἱππία, ὅτι ἐγὼ ἀληθῆ λέγω, λέγων ὡς
(372b) λιπαρής εἰμι πρὸς τὰς ἐρωτήσεις τῶν σοφῶν; καὶ κινδυνεύω ἓν
μόνον ἔχειν τοῦτο ἀγαθόν, τἆλλα ἔχων πάνυ φαῦλα, τῶν μὲν γὰρ
πραγμάτων ᾗ ἔχει ἔσφαλμαι, καὶ οὐκ οἶδ' ὅπῃ ἐστί. τεκμήριον δέ μοι
τούτου ἱκανόν, ὅτι ἐπειδὰν συγγένωμαί τῳ ὑμῶν τῶν εὐδοκιμούντων
ἐπὶ σοφίᾳ καὶ οἷς οἱ Ἕλληνες πάντες μάρτυρές εἰσι τῆς σοφίας,
φαίνομαι οὐδὲν εἰδώς, οὐδὲν γάρ μοι δοκεῖ τῶν αὐτῶν καὶ ὑμῖν, ὡς
ἔπος (372c) εἰπεῖν. καίτοι τί μεῖζον ἀμαθίας τεκμήριον ἢ ἐπειδάν τις σοφοῖς
ἀνδράσι διαφέρηται; ἓν δὲ τοῦτο θαυμάσιον ἔχω ἀγαθόν, ὅ με σῴζει,
οὐ γὰρ αἰσχύνομαι μανθάνων, ἀλλὰ πυνθάνομαι καὶ ἐρωτῶ καὶ
χάριν πολλὴν ἔχω τῷ ἀποκρινομένῳ, καὶ οὐδένα πώποτε
ἀπεστέρησα χάριτος. οὐ γὰρ πώποτε ἔξαρνος ἐγενόμην μαθών τι,
ἐμαυτοῦ ποιούμενος τὸ μάθημα εἶναι ὡς εὕρημα, ἀλλ' ἐγκωμιάζω
τὸν διδάξαντά με ὡς σοφὸν ὄντα, ἀποφαίνων ἃ ἔμαθον παρ' αὐτοῦ.
καὶ δὴ καὶ (372d) νῦν ἃ σὺ λέγεις οὐχ ὁμολογῶ σοι, ἀλλὰ διαφέρομαι πάνυ
σφόδρα, καὶ τοῦτ' εὖ οἶδα ὅτι δι' ἐμὲ γίγνεται, ὅτι τοιοῦτός εἰμι
οἷόσπερ εἰμί, ἵνα μηδὲν ἐμαυτὸν μεῖζον εἴπω. ἐμοὶ γὰρ φαίνεται, ὦ
Ἱππία, πᾶν τοὐναντίον ἢ ὃ σὺ λέγεις, οἱ βλάπτοντες τοὺς ἀνθρώπους
καὶ ἀδικοῦντες καὶ ψευδόμενοι καὶ ἐξαπατῶντες καὶ ἁμαρτάνοντες
ἑκόντες ἀλλὰ μὴ ἄκοντες, βελτίους εἶναι ἢ οἱ ἄκοντες. ἐνίοτε μέντοι
καὶ τοὐναντίον δοκεῖ μοι τούτων καὶ πλανῶμαι περὶ ταῦτα, δῆλον ὅτι
διὰ (372e) τὸ μὴ εἰδέναι, νυνὶ δὲ ἐν τῷ παρόντι μοι ὥσπερ κατηβολὴ
περιελήλυθεν, καὶ δοκοῦσί μοι οἱ ἑκόντες ἐξαμαρτάνοντες περί τι
βελτίους εἶναι τῶν ἀκόντων. αἰτιῶμαι δὲ τοῦ νῦν παρόντος
παθήματος τοὺς ἔμπροσθεν λόγους αἰτίους εἶναι, ὥστε φαίνεσθαι
νῦν ἐν τῷ παρόντι τοὺς ἄκοντας τούτων ἕκαστα ποιοῦντας
πονηροτέρους ἢ τοὺς ἑκόντας. σὺ οὖν χάρισαι καὶ μὴ φθονήσῃς
ἰάσασθαι τὴν ψυχήν μου,
| [372] (HIPPIAS)
Et comment admettre, Socrate, que ceux qui sont volontairement injustes,
volontairement malintentionnés et qui font le mal soient meilleurs que ceux qui
le font sans le vouloir ? On montre au contraire beaucoup d’indulgence pour ceux
qui ont été injustes, ont menti ou fait quelque autre mauvaise action sans le
vouloir, et les lois sont assurément beaucoup plus sévères pour ceux qui font le
mal volontairement que pour ceux qui le font involontairement.
(SOCRATE)
XV. — Tu vois, Hippias, que je dis la vérité quand je parle de ma ténacité à
questionner les savants, et il se peut que, fort médiocre en tout le reste, je
n’aie que cette unique qualité ; car je me trompe sur la réalité des choses et
je ne sais pas ce qu’elle est. J’en ai une preuve convaincante, c’est que, quand
je me trouve avec quelqu’un de vous qui êtes réputés pour votre science et dont
tous les Grecs attestent l’habileté, il apparaît que je ne sais rien ; car il
n’y a pour ainsi dire rien sur quoi j’aie la même opinion que vous. Or quelle
meilleure preuve d’ignorance que de différer d’opinion avec ceux qui savent ?
Mais j’ai une qualité merveilleuse, qui me sauve, c’est que je ne rougis pas
d’apprendre, je m’informe, je questionne et je sais beaucoup de gré à ceux qui
me répondent, et jamais ma reconnaissance n’a fait faute à aucun d’eux. Jamais
je n’ai nié que je m’étais instruit auprès de quelqu’un et je ne me suis jamais
attribué ce que j’avais appris comme ma propre découverte. Au contraire, je loue
celui qui m’a instruit comme un homme qui sait, et je publie ce que j’ai appris
de lui. Aujourd’hui encore je n’acquiesce point à ce que tu dis et je suis fort
loin de partager ton opinion. Je sais bien que c’est ma faute, parce que je suis
ce que je suis, pour ne pas forcer l’expression en parlant de moi. Il me paraît
en effet, Hippias, que la vérité est tout le contraire de ce que tu dis et que
ceux qui nuisent aux autres, qui sont injustes, qui mentent, qui trompent et
font le mal volontairement et non malgré eux sont meilleurs que ceux qui le font
sans le vouloir. Parfois cependant il me paraît que c’est tout le contraire et
je flotte entre deux opinions, évidemment faute de savoir. Pour le moment, je
suis en proie à une sorte de transport qui me fait croire que ceux qui
commettent une faute volontairement sont meilleurs que ceux qui la commettent
involontairement. J’attribue la cause de ce que j’éprouve actuellement à nos
raisonnements précédents, d’après lesquels il me paraît en ce moment que ceux
qui commettent ces fautes sans le vouloir sont plus méchants que ceux qui les
commettent volontairement. Montre-toi donc complaisant et ne refuse pas de
guérir mon âme ;
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