[142] (142a) ὅσοι στρατηγίας ἐπιθυμήσαντες ἤδη καὶ τυχόντες αὐτῆς οἱ
μὲν ἔτι καὶ νῦν φυγάδες τῆσδε τῆς πόλεώς εἰσιν, οἱ δὲ
τὸν βίον ἐτελεύτησαν· οἱ δὲ ἄριστα δοκοῦντες αὐτῶν πράττειν
διὰ πολλῶν κινδύνων ἐλθόντες καὶ φόβων οὐ μόνον
ἐν ταύτῃ τῇ στρατηγίᾳ, ἀλλ´ ἐπεὶ εἰς τὴν ἑαυτῶν κατῆλθον,
ὑπὸ τῶν συκοφαντῶν πολιορκούμενοι πολιορκίαν οὐδὲν
ἐλάττω τῆς ὑπὸ τῶν πολεμίων διετέλεσαν, ὥστε ἐνίους
αὐτῶν εὔχεσθαι ἀστρατηγήτους εἶναι μᾶλλον ἢ ἐστρατηγηκέναι.
(142b) εἰ μὲν οὖν ἦσαν οἱ κίνδυνοί τε καὶ πόνοι φέροντες
εἰς ὠφέλειαν, εἶχεν ἄν τινα λόγον· νῦν δὲ καὶ πολὺ τοὐναντίον.
εὑρήσεις δὲ καὶ περὶ τέκνων τὸν αὐτὸν τρόπον,
εὐξαμένους τινὰς ἤδη γενέσθαι καὶ γενομένων εἰς συμφοράς
τε καὶ λύπας τὰς μεγίστας καταστάντας. οἱ μὲν γὰρ
μοχθηρῶν διὰ τέλους ὄντων τῶν τέκνων ὅλον τὸν βίον
λυπούμενοι διήγαγον· τοὺς δὲ χρηστῶν μὲν γενομένων,
(142c) συμφοραῖς δὲ χρησαμένων ὥστε στερηθῆναι, καὶ τούτους
οὐδὲν εἰς ἐλάττονας δυστυχίας καθεστηκότας ἤπερ ἐκείνους
καὶ βουλομένους ἂν ἀγένητα μᾶλλον εἶναι ἢ γενέσθαι.
ἀλλ´ ὅμως τούτων τε καὶ ἑτέρων πολλῶν ὁμοιοτρόπων τούτοις
οὕτω σφόδρα καταδήλων ὄντων, σπάνιον εὑρεῖν ὅστις
ἂν ἢ διδομένων ἀπόσχοιτο ἢ μέλλων δι´ εὐχῆς τεύξεσθαι
παύσαιτο ἂν εὐχόμενος· οἱ δὲ πολλοὶ οὔτε ἂν τυραννίδος
διδομένης ἀπόσχοιντο ἂν οὔτε στρατηγίας οὐδ´ ἑτέρων
(142d) πολλῶν, ἃ παρόντα βλάπτει μᾶλλον ἢ ὠφελεῖ, ἀλλὰ κἂν
εὔξαιντο ἂν γενέσθαι, εἴ τῳ μὴ παρόντα τυγχάνει· ὀλίγον
δὲ ἐπισχόντες ἐνίοτε παλινῳδοῦσιν, ἀνευχόμενοι ἅττ´ ἂν
τὸ πρῶτον εὔξωνται. ἐγὼ μὲν οὖν ἀπορῶ μὴ ὡς ἀληθῶς
μάτην θεοὺς ἄνθρωποι αἰτιῶνται, ἐξ ἐκείνων φάμενοι
κακά σφισιν εἶναι· οἱ δὲ καὶ αὐτοὶ σφῇσιν εἴτε ἀτασθαλίαισιν
εἴτε ἀφροσύναις χρὴ εἰπεῖν, ὑπὲρ μόρον
(142e) ἄλγε´ ἔχουσι. κινδυνεύει γοῦν, ὦ Ἀλκιβιάδη, φρόνιμός
τις εἶναι ἐκεῖνος ὁ ποιητής, ὃς δοκεῖ μοι φίλοις ἀνοήτοις
τισὶ χρησάμενος, ὁρῶν αὐτοὺς καὶ πράττοντας καὶ εὐχομένους
ἅπερ οὐ βέλτιον ἦν, ἐκείνοις δὲ ἐδόκει, κοινῇ ὑπὲρ
ἁπάντων αὐτῶν εὐχὴν ποιήσασθαι· λέγει δέ πως ὡδί -
| [142] tous ceux qui jusqu’à ce jour ont brigué la charge de stratège et l’ont obtenue
sont encore à présent exilés de cette ville ou bien ont perdu la vie. Ceux d’entre eux
qu’on croit avoir le mieux réussi, ont passé par une foule de dangers et de frayeurs,
non seulement pendant leur commandement, mais encore après leur retour dans leur
patrie, où ils n’ont cessé d’être assiégés par les sycophantes aussi violemment que par
les ennemis, au point que certains d’entre eux voudraient n’avoir pas commandé
plutôt que d’avoir été généraux. Si encore les dangers et les travaux amenaient
quelque avantage, il y aurait quelque raison à s’y exposer ; mais c’est tout le
contraire. Tu trouveras qu’il en est de même à l’égard des enfants. Bien des
gens ont souhaité d’en avoir et, après en avoir obtenu, sont tombés dans les
plus grands malheurs et les plus grands chagrins ; car les uns, ayant eu des
enfants qui ont toujours été méchants, ont passé toute leur vie dans les
chagrins, et les autres, en ayant eu de bons, mais ayant eu le malheur de les
perdre, sont devenus aussi misérables que les premiers et préféreraient n’avoir
pas eu d’enfants plutôt que d’en avoir eu. Cependant, malgré la parfaite clarté
de ces exemples et de beaucoup d’autres du même genre, il est rare de trouver un
homme capable de refuser ce qu’on lui donne ou qui, pouvant l’obtenir par
prière, se retienne de prier. La plupart ne refuseraient point la tyrannie, si
on la leur offrait, ni le commandement des armées, ni beaucoup d’autres choses
dont la possession est plus nuisible qu’utile ; ils prieraient même pour les
obtenir, s’ils ne les possédaient pas. Mais peu de temps après, il arrive
souvent qu’ils changent de ton et rétractent les prières qu’ils ont faites
d’abord. Aussi moi, je me demande si ce n’est pas véritablement à tort que « les
hommes accusent les dieux en disant qu’ils sont les auteurs de leurs maux. C’est
eux-mêmes qui par leur présomption » et, si l’on peut dire, par leurs folies
« s’attirent des souffrances que leur destin ne comportait pas». En tout cas,
Alcibiade, il semble bien que le bon sens ne manquait pas à ce poète, qui,
ayant, comme je pense, des amis insensés et les voyant faire et demander aux
dieux des choses qu’ils auraient mieux fait de négliger, mais qui leur paraissaient
bonnes, composa pour eux tous une prière commune à peu près ainsi conçue :
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