[9,32] (1) Τοῖς δὲ ἐν Κρεύσιδι, ἐπινείῳ τῷ Θεσπιέων, οἰκοῦσιν ἐν κοινῷ μέν ἐστιν
οὐδέν, ἐν ἰδιώτου δὲ ἀνδρὸς ἄγαλμα ἦν Διονύσου γύψου πεποιημένον καὶ
ἐπικεκοσμημένον γραφῇ. πλοῦς δὲ ἐς Κρεῦσίν ἐστιν ἐκ Πελοποννήσου σκολιός τε καὶ
ἄλλως οὐκ εὔδιος· ἄκραι τε γὰρ ἀνέχουσιν ὡς μὴ κατ´ εὐθὺ τῆς θαλάσσης
περαιοῦσθαι καὶ ἅμα ἐκ τῶν ὀρῶν καταπνέουσιν ἄνεμοι βίαιοι. (2) πλέοντι δὲ ἐκ
Κρεύσιδος οὐκ ἄνω, παρὰ δὲ αὐτὴν Βοιωτίαν, πόλις ἐστὶν ἐν δεξιᾷ Θίσβη. πρῶτα μὲν
ὄρος ἐστὶ πρὸς θαλάσσῃ, τοῦτο δὲ ὑπερβαλόντα πεδίον σε ἐκδέξεται καὶ μετὰ τοῦτο
ἄλλο ὄρος· ἐν δὲ ταῖς ὑπωρείαις ἐστὶν ἡ πόλις. Ἡρακλέους δὲ ἱερὸν καὶ ἄγαλμα ὀρθὸν
ἐνταῦθά ἐστι λίθου, καὶ Ἡράκλεια ἑορτὴν ἄγουσι. (3) τὸ δὲ πεδίον τὸ μεταξὺ τῶν
ὀρῶν ἐκώλυεν οὐδὲν ἂν λίμνην ὑπὸ πλήθους εἶναι τοῦ ὕδατος, εἰ μὴ διὰ μέσου χῶμά
σφισιν ἐπεποίητο ἰσχυρόν· καὶ οὕτω παρὰ ἔτος ἐς μὲν τὰ ἐπέκεινα τοῦ χώματος
ἐκτρέπουσι τὸ ὕδωρ, τὸ δὲ ἐπὶ τὰ ἕτερα αὐτοῦ γεωργοῦσι. Θίσβην δὲ λέγουσιν
ἐπιχώριον εἶναι νύμφην, ἀφ´ ἧς ἡ πόλις τὸ ὄνομα ἔσχηκεν. (4) παραπλέοντι δὲ
αὐτόθεν πόλισμά ἐστιν οὐ μέγα ἐπὶ θαλάσσῃ Τίφα· Ἡρακλεῖόν τε Τιφαιεῦσίν ἐστι καὶ
ἑορτὴν ἄγουσιν ἐπέτειον. οὗτοι Βοιωτῶν μάλιστα ἐκ παλαιοῦ τὰ θαλάσσια ἐθέλουσιν
εἶναι σοφοί, Τῖφυν ἄνδρα μνημονεύοντες ἐπιχώριον ὡς προκριθείη γενέσθαι τῆς Ἀργοῦς
κυβερνήτης· ἀποφαίνουσι δὲ καὶ πρὸ τῆς πόλεως ἔνθα ἐκ Κόλχων ὀπίσω κομιζομένην
ὁρμίσασθαι τὴν Ἀργὼ λέγουσιν. (5) ἀπὸ δὲ Θεσπίας ἰόντι ἄνω πρὸς ἤπειρον ἔστιν
Ἁλίαρτος. ὅστις δὲ Ἁλιάρτου γέγονε καὶ Κορωνείας οἰκιστής, οὔ με ἀπὸ τῶν ἐς
Ὀρχομενίους ἐχόντων εἰκὸς ἦν χωρίζειν· κατὰ δὲ τὴν ἐπιστρατείαν τοῦ Μήδου
φρονήσασιν Ἁλιαρτίοις τὰ Ἑλλήνων μοῖρα τῆς Ξέρξου στρατιᾶς γῆν τέ σφισιν ὁμοῦ καὶ
τὴν πόλιν ἐπεξῆλθε καίουσα. ἐν Ἁλιάρτῳ δέ ἐστι Λυσάνδρου τοῦ Λακεδαιμονίου μνῆμα·
προσβαλὼν γὰρ τῷ Ἁλιάρτῳ πρὸς τὸ τεῖχος στρατιᾶς ἔκ τε Θηβῶν ἐνούσης ἔνδον καὶ ἐξ
Ἀθηνῶν καὶ ἐπεξελθόντων τῶν πολεμίων ἔπεσεν ἐν τῇ μάχῃ. (6) Λύσανδρον δὲ τὰ μὲν ἐς
τὰ μάλιστα ἐπαινέσαι, τὰ δὲ καὶ πικρῶς ἔστι μέμψασθαι. σοφίαν μέν γε τοιαύτην
ἐπεδείξατο· ἡγούμενος Πελοποννησίων ταῖς τριήρεσιν Ἀντίοχον κυβερνήτην ὄντα
Ἀλκιβιάδου, φυλάξας Ἀλκιβιάδην ἀπόντα τοῦ ναυτικοῦ, τηνικαῦτα τὸν Ἀντίοχον
ἐπηγάγετο ἐς ἐλπίδα ὡς ὄντα ἀξιόμαχον ναυμαχῆσαι Λακεδαιμονίοις, καὶ ἀναγαγόμενον
ὑπὸ θράσους τε καὶ ἀλαζονίας ἐνίκησεν αὐτὸν οὐ πόρρω τοῦ Κολοφωνίων ἄστεως. (7) ὡς
δὲ καὶ δεύτερα ὁ Λύσανδρος ἐπὶ τὰς τριήρεις ἀφίκετο ἐκ Σπάρτης, ἡμερώσατο μὲν οὕτω
Κῦρον ὡς χρήματα, ὁπότε ἐς τὸ ναυτικὸν αἰτοίη, παρεῖναί οἱ κατὰ καιρόν τε καὶ
ἄφθονα· ὁρμούντων δὲ ναυσὶν ἑκατὸν ἐν Αἰγὸς ποταμοῖς Ἀθηναίων, εἷλεν αὐτῶν τὰ πλοῖα,
ἐσκεδασμένους ἐπί τε ὕδωρ τοὺς ναύτας καὶ ἐπὶ ἀγορὰν φυλάξας. παρέσχετο δὲ καὶ ἔργον
τοιόνδε ἐς δικαιοσύνην. (8) Αὐτολύκῳ τῷ παγκρατιάσαντι, οὗ δὴ καὶ εἰκόνα ἰδὼν οἶδα
ἐν πρυτανείῳ τῷ Ἀθηναίων, τούτῳ τῷ ἀνδρὶ ἐς ἀμφισβήτησιν ὅτου δὴ κτήματος
Ἐτεόνικος ἦλθεν ὁ Σπαρτιάτης· ὡς δὲ ἄρα λέγων ἡλίσκετο οὐ δίκαια - ἦν γὰρ δὴ
τηνικαῦτα Ἀθηναίοις τῶν τριάκοντα ἡ ἀρχὴ καὶ παρῆν ἔτι ὁ Λύσανδρος - τούτων ἕνεκα
Ἐτεόνικος πληγῶν τε ἄρχειν ἐπήρθη καὶ ἀμυνάμενον τὸν Αὐτόλυκον ἦγεν ἐπὶ Λύσανδρον,
παντάπασιν ἐκεῖνον ἐς χάριν τὴν ἑαυτοῦ δικάσειν ἐλπίζων· Λύσανδρος δὲ ἀδικεῖν
Ἐτεόνικον κατέγνω καὶ ἀπέπεμψεν ἀτιμάσας τῷ λόγῳ. (9) τάδε μὲν Λυσάνδρῳ τὰ ἐς
δόξαν ὑπάρχοντα ἦν, ἄλλα δὲ τοσάδε ὀνείδη. Φιλοκλέα γὰρ Ἀθηναῖον ἐν Αἰγὸς ποταμοῖς
καὶ αὐτὸν στρατηγοῦντα καὶ Ἀθηναίων τῶν ἄλλων ὅσον τετρακισχιλίους αἰχμαλώτους
ὄντας ἀπέκτεινεν ὁ Λύσανδρος καί σφισιν οὐδὲ ἀποθανοῦσιν ἐπήνεγκε γῆν, ὃ καὶ Μήδων
τοῖς ἀποβᾶσιν ἐς Μαραθῶνα ὑπῆρξε παρὰ Ἀθηναίων καὶ αὐτῶν Λακεδαιμονίων τοῖς
πεσοῦσιν ἐν Θερμοπύλαις ἐκ βασιλέως Ξέρξου. μείζονα δὲ ἔτι Λακεδαιμονίοις ὀνείδη
γενέσθαι παρεσκεύασεν ὁ Λύσανδρος ἐπί τε δεκαδαρχίαις ἃς κατέστησε ταῖς πόλεσι καὶ
ἐπὶ τοῖς Λάκωσιν ἁρμοσταῖς. (10) Λακεδαιμονίων δὲ χρήματα οὐ νομιζόντων κτᾶσθαι
κατὰ δή τι μάντευμα, ὡς ἡ φιλοχρηματία μόνη γένοιτο ἂν ἀπώλεια τῇ Σπάρτῃ, ὁ δὲ καὶ
χρημάτων πόθον σφίσιν ἐνεποίησεν ἰσχυρόν. ἐγὼ μὲν δὴ Πέρσαις τε ἑπόμενος καὶ
δικάζων νόμῳ γε τῷ ἐκείνων βλάβος κρίνω Λακεδαιμονίοις μᾶλλον ἢ ὠφέλειαν γενέσθαι
Λύσανδρον·
| [9,32] (1) À Creusis est l’arsenal des Thespiens, il n’y a aucun monument public
qui mérite qu’on en parle. Je vis seulement dans la maison d’un particulier, un
Bacchus en plâtre, peint de diverses couleurs. Pour venir du Péloponnèse à
Creusis par mer, il faut faire un trajet qui n’est ni fort droit, ni fort sûr;
car on est obligé de se détourner pour éviter des promontoires qui avancent dans
la mer, et l’on est exposé aussi à des vents très violents qui soufflent du côté
des montagnes. (2) Si vous vous embarquez à Creusis, et que vous longiez la côte
de la Boétie, vous arriverez bientôt à Thisbé. C’est une ville située entre deux
montagnes, dont la première est sur le bord de la mer. Quand vous avez passé
celle-ci, vous trouvez une plaine, ensuite une autre montagne au bas de laquelle
est la ville. Tout ce qu’il y a de terres entre deux serait continuellement
inondé et deviendrait comme un lac, si par le moyen d’une bonne digue on n’avait
soin de retenir les eaux d’un côté, afin de pouvoir cultiver les terres qui sont
de l’autre. Dans la ville on voit un temple d’Hercule, où le dieu est debout en
marbre; on y célèbre tous les ans les Héraclées, c’est-à-dire une fête en
l’honneur d’Hercule. (3) Thisbé, au rapport des habitants, était une nymphe du
pays, laquelle donna son nom à la ville. (4) Si vous reprenez votre chemin le
long de la côte, vous verrez sur le bord de la mer une autre petit ville nommée
Tipha. Hercule y a un temple, et sa fête s’y célèbre tous les ans comme à
Thisbé. Les Thiphéens se vantent d’être de tous les peuples de la Béotie, ceux
qui ont toujours le mieux entendu la marine; ils disent que Tiphys, à qui l’on
confia la conduite du navire Argo, était de Tipha, et ils montrent hors de la
ville un endroit où ils prétendent que ce navire aborda en revenant de Colchide.
(5) Mais si après Thespies, au lieu de longer la côte, vous entrez bien avant
dans les terres, vous trouverez Haliarte. Je n’examinerai point ici par qui
Haliarte et Coronée ont été bâties; c’est un point que je traiterai plus
commodément dans l’histoire des Orchoméniens, et qui n’en doit pas être séparé;
je vais donc rapporter quelques autres particularités. Durant la guerre des
Perses, Haliarte s’étant montrée fort fidèle et fort affectionnée aux Grecs, les
troupes de Xerxès y entrèrent et mirent tout à feu et à sang. On voit en cette
ville le tombeau de Lysandre. Ce général des Lacédémoniens s’étant approché de
la place pour en faire le siège, les Athéniens et les Thébains qui la
défendaient, firent une sortie qui donna occasion à un grand combat où Lysandre
fut tué. (6) On peut dire de lui qu’il mérita beaucoup de louanges et beaucoup
de blâme. Car dans le temps qu’il commandait l’armée navale du Péloponnèse, il
donna des preuves de beaucoup d’habileté, en ce qu’il sut profiter de l’absence
d’Alcibiade, et que par sa manœuvre il fit croire à Antiochus, qui montait la
capitane de la flotte athénienne, qu’il était pour le moins égal en force aux
Lacédémoniens; d’où il arriva que ce présomptueux accepta le combat auprès de
Colophon, et qu’il fut entièrement défait. (7) Lysandre ayant eu une seconde
fois le commandement des galères de Sparte, il sut si bien gagner les bonnes
grâces de Cyrus, que ce prince lui fournissait abondamment, et à point nommé,
tout l’argent dont il avait besoin pour l’entretien de sa flotte. Les Athéniens
prétendaient tenir la mer avec cent vaisseaux de guerre qu’ils avaient à
Aigospotamos; Lysandre épia le temps que leurs matelots étaient allés chercher
de l’eau et des vivres et fondant tout à coup sur cette flotte, il s’en rendit
le maître. Il ne signala pas moins sa justice dans une occasion que je vais
rapporter. (8) Autolycus, fameux athlète dont j’ai vu la statue dans le prytanée
d’Athènes, était en procès avec un Spartiate nommé Étéonique, pour quelque
intérêt. Le Spartiate, désespérant d’obtenir justice, parce que la ville
d’Athènes était alors en la puissance des Trente, et voulant se prévaloir de la
présence de Lysandre, s’emporta contre son adversaire jusqu’à le frapper;
ensuite, bon gré mal gré, il le mena à Lysandre auprès de qui il espérait
trouver toute sorte de faveur. Mais Lysandre condamna Étéonique comme coupable
de violence, le tança rudement, et lui fit toute la honte qu’il méritait. (9)
Ces actions acquirent beaucoup de gloire à ce général; mais en voici d’autres
qui ternirent sa réputation. Il fit mourir Philoclès, un des généraux de la
flotte d’Athènes, avec quatre mille Athéniens, qui auprès d’Aigospotamos,
s’étaient rendus à discrétion, et il eut l’inhumanité de leur refuser la
sépulture, quoique les Athéniens l’eussent accordée aux Perses qui périrent à la
journée de Marathon, et les tués au combat des Thermopyles. Il rendit sa nation
encore plus odieuse, en établissant dans toutes les villes alliées de Sparte des
décurions et intendants lacédémoniens. (10) Avant lui on méprisait les richesses
à Sparte, et l’on y respectait un ancien oracle qui disait qu’il n’y avait que
l’amour de l’argent qui pût faire périr Sparte; Lysandre inspira cette
dangereuse passion à ses concitoyens. Par ses raisons, et à le peser dans la
balance même des Perses, j’estime que Lysandre a fait plus de mal que de bien à
sa patrie.
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