[4,18] Μεσσήνιοι δὲ ὡς ἐς τὴν Εἶραν ἀνῳκίσθησαν,
τῆς δὲ ἄλλης ἐξείργοντο πλὴν ὅσον σφίσιν οἱ Πύλιοι
τὰ ἐπὶ θαλάσσῃ καὶ οἱ Μοθωναῖοι διέσωζον,
{ἢ} ἐλῄστευον τήν τε Λακωνικὴν καὶ τὴν σφετέραν,
πολεμίαν ἤδη καὶ ταύτην νομίζοντες· ἄλλοι τε δὴ
συνίσταντο ἐς τὰς καταδρομάς, ὡς ἕκαστοι τύχοιεν,
καὶ Ἀριστομένης δὲ τοὺς περὶ αὑτὸν λογάδας ἐς τριακοσίων
ἀριθμὸν προήγαγεν. ἦγον μὲν δὴ τὰ Λακεδαιμονίων
καὶ ἔφερον ὅ τι καὶ δύναιτο αὐτῶν ἕκαστος,
ἑλόντες δὲ σῖτον καὶ βοσκήματα καὶ οἶνον ἀνήλισκον,
ἔπιπλα δὲ καὶ ἀνθρώπους ἀπεδίδοσαν χρημάτων· ὥστε
καὶ ἐποιήσαντο οἱ Λακεδαιμόνιοι δόγμα, ἅτε τοῖς ἐν
τῇ Εἴρᾳ μᾶλλον ἢ σφίσιν αὐτοῖς γεωργοῦντες, τὴν
Μεσσηνίαν καὶ τῆς Λακωνικῆς τὴν προσεχῆ, ἕως ἂν
πολεμῶσιν, ἐᾶν ἄσπορον. καὶ ἀπὸ τούτου σιτοδεία
ἐγένετο ἐν Σπάρτῃ καὶ ὁμοῦ τῇ σιτοδείᾳ στάσις· οὐ
γὰρ ἠνείχοντο οἱ ταύτῃ τὰ κτήματα ἔχοντες τὰ σφέτερα
ἀργὰ εἶναι. καὶ τούτοις μὲν τὰ διάφορα διέλυε Τυρταῖος·
Ἀριστομένης δὲ ἔχων τοὺς λογάδας τὴν μὲν
ἔξοδον περὶ βαθεῖαν ἐποιήσατο ἑσπέραν, ἔφθη δὲ ὑπὸ
τάχους τὴν ἐς Ἀμύκλας ἀνύσας πρὸ ἀνίσχοντος ἡλίου,
καὶ Ἀμύκλας τὸ πόλισμα εἷλέ τε καὶ διήρπασε καὶ τὴν
ἀποχώρησιν ἐποιήσατο πρὶν ἢ τοὺς ἐκ τῆς Σπάρτης
προσβοηθῆσαι. κατέτρεχε δὲ καὶ ὕστερον τὴν χώραν,
ἐς ὃ Λακεδαιμονίων λόχοις πλέον ἢ τοῖς ἡμίσεσι καὶ
τοῖς βασιλεῦσιν ἀμφοτέροις συμβαλὼν ἄλλα τε ἔσχεν
ἀμυνόμενος τραύματα καὶ πληγέντι ὑπὸ λίθου τὴν
κεφαλὴν αὐτῷ σκοτοδινιῶσιν οἱ ὀφθαλμοί. καὶ πεσόντα
ἀθρόοι τῶν Λακεδαιμονίων ἐπιδραμόντες ζῶντα
αἱροῦσιν· ἥλωσαν δὲ καὶ τῶν περὶ αὐτὸν ἐς πεντήκοντα.
τούτους ἔγνωσαν οἱ Λακεδαιμόνιοι ῥῖψαι πάντας
ἐς τὸν Κεάδαν· ἐμβάλλουσι δὲ ἐνταῦθα οὓς ἂν
ἐπὶ μεγίστοις τιμωρῶνται. οἱ μὲν δὴ ἄλλοι Μεσσηνίων
ἐσπίπτοντες ἀπώλλυντο αὐτίκα, Ἀριστομένην δὲ
ἔς τε τὰ ἄλλα θεῶν τις καὶ δὴ καὶ τότε ἐφύλασσεν·
οἱ δὲ ἀποσεμνύνοντες τὰ κατ´ αὐτὸν Ἀριστομένει φασὶν
ἐμβληθέντι ἐς τὸν Κεάδαν ὄρνιθα τὸν ἀετὸν ὑποπέτεσθαι
καὶ ἀνέχειν ταῖς πτέρυξιν, ἐς ὃ κατήνεγκεν αὐτὸν
ἐς τὸ πέρας οὔτε πηρωθέντα οὐδὲν τοῦ σώματος
οὔτε τραῦμά τι λαβόντα. ἔμελλε δὲ ἄρα καὶ αὐτόθεν
ὁ δαίμων ἔξοδον ἀποφαίνειν αὐτῷ. καὶ ὁ μὲν ὡς ἐς
τὸ τέρμα ἦλθε τοῦ βαράθρου, κατεκλίθη τε καὶ ἐφελκυσάμενος
τὴν χλαμύδα ἀνέμενεν ὡς πάντως οἱ ἀποθανεῖν
πεπρωμένον· τρίτῃ δὲ ὕστερον ἡμέρᾳ ψόφου
τε αἰσθάνεται καὶ ἐκκαλυψάμενος—ἐδύνατο δὲ ἤδη
διὰ τοῦ σκότους διορᾶν—ἀλώπεκα εἶδεν ἁπτομένην
τῶν νεκρῶν. ὑπονοήσας δὲ ἔσοδον εἶναι τῷ θηρίῳ
ποθέν, ἀνέμενεν ἐγγύς οἱ τὴν ἀλώπεκα γενέσθαι, γενομένης
δὲ λαμβάνεται· τῇ δὲ ἑτέρᾳ χειρί, ὁπότε ἐς αὐτὸν
ἐπιστρέφοιτο, τὴν χλαμύδα προὔβαλλέν οἱ καὶ
δάκνειν παρεῖχε. τὰ μὲν δὴ πλείω θεούσῃ συνέθει,
τὰ δὲ ἄγαν δυσέξοδα καὶ ἐφείλκετο ὑπ´ αὐτῆς· ὀψὲ
δέ ποτε ὀπήν τε εἶδεν ἀλώπεκι ἐς διάδυσιν ἱκανὴν
καὶ φέγγος δι´ αὐτῆς. καὶ τὴν μέν, ὡς ἀπὸ τοῦ Ἀριστομένους
ἠλευθερώθη, τὸ φωλίον ἔμελλεν ὑποδέξεσθαι·
Ἀριστομένης δὲ—οὐ γάρ τι ἡ ὀπὴ καὶ τούτῳ
παρέχειν ἐδύνατο ἔξοδον—εὐρυτέραν τε ταῖς χερσὶν
ἐποίησε καὶ οἴκαδε ἐς τὴν Εἶραν ἀποσώζεται, παραδόξῳ
μὲν τῇ τύχῃ καὶ ἐς τὴν ἅλωσιν χρησάμενος, τὸ
γάρ οἱ φρόνημα ἦν καὶ τὰ τολμήματα μείζονα ἢ ὡς
ἐλπίσαι τινὰ Ἀριστομένην αἰχμάλωτον ἂν γενέσθαι,
παραδοξοτέρα δέ ἐστι καὶ πάντων προδηλότατα οὐκ
ἄνευ θεοῦ ἡ ἐκ τοῦ Κεάδα σωτηρία.
| [4,18] CHAPITRE XVIII.
Tant que Ies Messéniens occupèrent le mont
Ira, comme ils étaient exclus de tout autre lieu,
à la réserve de ee que les Pyliens et les Mothonéens
leur avaient conservé sur les côtes de la
mer, ils faisaient souvent des courses sur les terres
des Lacédémoniens, et sur les leurs propres, ne
mettant plus de différence entre les unes et les
autres. Partagés donc en plusieurs bandes, ils se
jetaient de côté et d'autres, et ravageaient tout le
plat pays. Aristomène avait formé un corps de trois
cents hommes bien choisis ; avec cette troupe il se
rendait formidable, et faisait tous les jours quelque
prise, enlevant bled, vin, bétail, meubles et
esclaves ; mais les meubles et les esclaves il les
rendait à leurs maîtres, pour une somme d'argent,
suivant l'estimation. Ce pillage continuel obligea
les Lacédémoniens à faire une ordonnance, par
laquelle il était dit que les terres limitrophes de
la Laconie et de la Messénie étant trop exposées
aux courses des ennemis, on eût à ne les plus
ensemencer tant que-la guerre durerait; mais le
remède fut pire que le mal ; cette ordonnance
causa une disette de grains, et la disette causa
une sédition, les gens qui étaient riches en
terres ne pouvant souffrir qu'elles ne leur rapportassent
rien. Tyrtée appaisa cette émeute, et
calma les séditieux par ses vers. Sur ces entrefaites,
Aristomène, accompagné de sa troupe favorite,
partit le soir du mont Ira, marcha toute la nuit
avec une diligence incroyable, et se trouvant aux
portes d'Amyclès à la pointe du jour, prit la
ville, la pilla, et eut plutôt rejoint les siens que
Sparte n'eût eu nouvelles de ce qui s'était passé.
Revenu au camp, il recommença ses courses ordinaires ;
jusqu'à ce qu'ayant été surpris par un
détachement des ennemis, de moitié plus nombreux
que le sien, et commandé par les deux
rois, après s'être défendu comme un lion, il reçut
plusieurs blessures, et frappé d'un coup de pierre
à la tête, il perdit connoissance, et tomba comme
s'il eût été mort. Aussitôt les Lacédémoniens,
accourant en foule, le prirent, et avec lui cinquante
hommes de sa troupe ; tous furent jetés
dans un gouffre qu'ils nomment Céada ; c'est un
lieu où ils ont coutume de précipiter les criminels
qui sont condamnés à perdre la vie. Ainsi
périrent les cinquante Messéniens de la troupe
d'Aristoméne; pour lui, le même dieu qui l'avait
sauvé tant de fois, le sauva encore celle-ci.
Ceux qui veulent donner un air de merveilleux
à ses aventures, disent qu'au moment qu'il fut
jeté dans ce précipice, un aigle vola à son secours,
et avec ses ailes éployées, le soutint ; de sorte,
qu'en tombant, ou pour mieux dire en descendant,
car cet aigle le portait, il ne fut ni estropié,
ni même blessé ; ce qu'il y a de certain, c'est
qu'il ne pouvait se tirer de cet abîme sans une
espèce de miracle. Il y passa deux jours étendu
par terre, le visage couvert de son habit, comme
un homme qui se tenait sûr de mourir, et qui
attendait sa fin. Au troisième jour il entendit du
bruit ; et découvrant son visage, il entrevit un
renard qui mangeait un cadavre, car aux épaisses
ténèbres du lieu, se mêlait tant soit peu de
jour. Il comprit donc qu'il y avait quelque soupirail,
quelque trou par où ce renard était entré;
la difficulté était de le trouver. Il résolut
d'attendre que l'animal fut plus prés de lui ; dès
qu'il le vit à sa portée, il le prit d'une main, et
de l'autre, toutes les fois que le renard se tournait
de son côté, il lui présentait son habit, que
cet animal ne manquait pas de prendre et de
tirer avec ses dents. Alors suivant l'animal, et
se laissant conduire à lui, il faisait quelques pas
à travers les pierres et les immondices, jusqu'à
ce qu'enfin, il apperçut une ouverture qui donnait
un peu de lumière, et par où l'animal avait
passé ; pour lors il lâcha le renard, qu'il vit
aussitôt grimper et se sauver par le trou. Aristomène
profitant de l'exemple, élargit ce trou
avec les mains, non sans peine, mais enfin il
l'élargit, se sauva, et alla rejoindre les siens. Il
faut avouer que la fortune, en le faisant tomber
entre les mains de ses ennemis, le traita bien
indignement; car, du courage et de la résolution
dont il était, il n'y avait personne au monde qui
pût espérer de le prendre vif; mais il faut avouer
aussi que le bonheur avec lequel il se tira du précipice
où on l'avait jeté, fut une aventure très
singulière, et très propre à prouver que quelque
divinité veillait à sa conservation.
|