[250] καὶ κρατέει πόντοιο καὶ ἡμετέρων ὀδυνάων.»
251 Ὣς εἰπὼν μελέων ἐρατῶν ἀπεδύσατο πέπλα
252 ἀμφοτέραις παλάμῃσιν, ἑῷ δ´ ἔσφιγξε καρήνῳ,
253 ἠιόνος δ´ ἐξῶρτο, δέμας δ´ ἔρριψε θαλάσσῃ.
254 λαμπομένου δ´ ἔσπευδεν ἀεὶ κατεναντία λύχνου
255 αὐτὸς ἐὼν ἐρέτης, αὐτόστολος, αὐτόματος νηῦς.
256 Ἡρὼ δ´ ἠλιβάτοιο φαεσφόρος ὑψόθι πύργου,
257 λεπταλέαις αὔρῃσιν ὅθεν πνεύσειεν ἀήτης,
258 φάρεϊ πολλάκι λύχνον ἐπέσκεπεν, εἰσόκε Σηστοῦ
259 πολλὰ καμὼν Λείανδρος ἔβη ποτὶ ναύλοχον ἀκτήν.
260 καί μιν ἑὸν ποτὶ πύργον ἀνήγαγεν. ἐκ δὲ θυράων
261 νυμφίον ἀσθμαίνοντα περιπτύξασα σιωπῇ
262 ἀφροκόμους ῥαθάμιγγας ἔτι στάζοντα θαλάσσης
263 ἤγαγε νυμφοκόμοιο μυχοὺς ἔπι παρθενεῶνος
264 καὶ χρόα πάντα κάθηρε. δέμας δ´ ἔχρισεν ἐλαίῳ
265 εὐόδμῳ ῥοδέῳ καὶ ἁλίπνοον ἔσβεσεν ὀδμήν.
266 εἰσέτι δ´ ἀσθμαίνοντα βαθυστρώτοις ἐνὶ λέκτροις
267 νυμφίον ἀμφιχυθεῖσα φιλήτορας ἴαχε μύθους·
268 «Νυμφίε, πολλὰ μόγησας, ἃ μὴ πάθε νυμφίος ἄλλος,
269 νυμφίε, πολλὰ μόγησας· ἅλις νύ τοι ἁλμυρὸν ὕδωρ
270 ὀδμή τ´ ἰχθυόεσσα βαρυγδούποιο θαλάσσης.
271 δεῦρο τεοὺς ἱδρῶτας ἐμοῖς ἐνικάτθεο κόλποις.»
272 Ὣς ἡ μὲν παρέπεισεν. ὁ δ´ αὐτίκα λύσατο μίτρην
273 καὶ θεσμῶν ἐπέβησαν ἀριστονόου Κυθερείης.
274 ἦν γάμος, ἀλλ´ ἀχόρευτος· ἔην λέχος, ἀλλ´ ἄτερ ὕμνων.
275 οὐ ζυγίην Ἥρην τις ἐπευφήμησεν ἀείδων,
276 οὐ δαΐδων ἤστραπτε σέλας θαλαμηπόλον εὐνὴν
277 οὐδὲ πολυσκάρθμῳ τις ἐπεσκίρτησε χορείῃ,
278 οὐχ ὑμέναιον ἄειδε πατὴρ καὶ πότνια μήτηρ.
279 ἀλλὰ λέχος στορέσασα τελεσσιγάμοισιν ἐν ὥραις
280 σιγὴ παστὸν ἔπηξεν, ἐνυμφοκόμησε δ´ ὀμίχλη
281 καὶ γάμος ἦν ἀπάνευθεν ἀειδομένων ὑμεναίων.
282 νὺξ μὲν ἔην κείνοισι γαμοστόλος οὐδέ ποτ´ ἠὼς
283 νυμφίον εἶδε Λέανδρον ἀριγνώτοις ἐνὶ λέκτροις.
284 νήχετο δ´ ἀντιπόροιο πάλιν ποτὶ δῆμον Ἀβύδου
285 ἐννυχίων ἀκόρητος ἔτι πνείων ὑμεναίων.
286 Ἡρὼ δ´ ἑλκεσίπεπλος ἑοὺς λήθουσα τοκῆας
287 παρθένος ἠματίη, νυχίη γυνή. ἀμφότεροι δὲ
288 πολλάκις ἠρήσαντο κατελθέμεν εἰς δύσιν ἠῶ.
289 ὣς οἱ μὲν φιλότητος ὑποκλέπτοντες ἀνάγκην
290 κρυπταδίῃ τέρποντο μετ´ ἀλλήλων Κυθερείῃ.
291 Ἀλλ´ ὀλίγον ζώεσκον ἐπὶ χρόνον οὐδ´ ἐπὶ δηρὸν
292 ἀγρύπνων ἀπόναντο πολυπλάγκτων ὑμεναίων.
293 ἀλλ´ ὅτε παχνήεντος ἐπήλυθε χείματος ὥρη
294 φρικαλέας δονέουσα πολυστροφάλιγγας ἀέλλας,
295 βένθεα δ´ ἀστήρικτα καὶ ὑγρὰ θέμεθλα θαλάσσης
296 χειμέριοι πνείοντες ἀεὶ στυφέλιζον ἀῆται
297 λαίλαπι μαστίζοντες ὅλην ἅλα· τυπτομένην δὲ
298 ἤδη νῆα μέλαιναν ἐφείλκυσε διψάδι χέρσῳ
299 χειμερίην καὶ ἄπιστον ἀλυσκάζων ἅλα ναύτης.
| [250] qu'elle possède un pouvoir absolu sur la mer et sur mon mal ?"
Il dit, et, des deux mains, découvre ses membres délicats, lie ses vêtements autour de son cou, s'élance du rivage, se précipite dans les flots, et nage toujours vers le fanal étincelant. Lui-même est son rameur, sa voile et son navire.
(256) Héro, du sommet de la tour où elle tient la lumière, quel que soit le coté par lequel soufflent les vents ennemis, protège le flambeau avec le pan de sa robe jusqu'à ce que Léandre, épuisé de fatigue, aborde au rivage de Sestos. La jeune prêtresse le conduit vers la tour, puis, sur le seuil de la porte, embrasse en silence son époux hors d'haleine et dont les cheveux sont humides encore des flots de la mer. Elle le mène ensuite dans l'asile secret, vers la couche virginale. Là, elle l'essuie, le parfume d'essence de roses, et dissipe l'odeur désagréable de l'onde salée. Dès qu'ils sont placés sur le duvet moelleux, Héro enlace de ses bras Léandre encore haletant, et lui adresse ces douces paroles :
(268) " Cher époux, tu as essuyé bien des fatigues, plus que n'en essuya aucun autre époux. Cher ami, tu as souffert de rudes peines. Tu as assez lutté contre l'onde amère et senti l'odeur importune des flots agités. Viens, cher époux, viens oublier tes travaux entre mes bras."
(272) Ainsi parle Héro, et Léandre se hâte de délier la ceinture de la prêtresse, et ils se livrent aux plaisirs de l'aimable Vénus. C'étaient des noces, mais on n'y dansa point. C'était un lit nuptial, mais on n'y chanta point d'hymnes. Nul poète n'invoqua la chaste Junon. La couche ne fut point éclairée par des flambeaux. Les jeunes gens ne formèrent aucune danse légère. (278) Des parents vénérables ne chantèrent point à cet hyménée. Le lit nuptial fut préparé dans le silence, à l'heure favorable aux tendres combats. Le voile de la nuit fut le seul ornement de la jeune épouse, et l'on ne fit point retentir des mots : "Io hymen! Io hyménée !" Les ténèbres seules embellirent l'union de ces deux amants, et jamais l'Aurore ne vit Léandre couché dans ce lit confident de son bonheur. Chaque matin cet époux insatiable de plaisirs, et respirant encore ses nocturnes amours, retournait à la nage vers les murs d'Abydos.
(286) Héro, vêtue d'une longue robe, savait tromper ses parents. Le jour, c'était une chaste prêtresse, la nuit, une tendre amante. Souvent les deux époux souhaitèrent que le soleil, en commençant sa carrière, fût sur le point de la finir. C'est ainsi qu'ils savaient déguiser la violence de leur passion, et qu'ils goûtaient sans crainte pendant la nuit toutes les délices de l'amour. Mais ils vécurent peu de temps, et leur doux hymen ne fut pas de longue durée. Lorsque revint le brumeux hiver qui soulève d'horribles tempêtes, les aquilons bouleversaient les gouffres mobiles et les humides fondements de la mer, et déployaient toute leur rage sur les ondes. Déjà dans les deux ports, le nautonier, pour échapper à la mer courroucée et perfide, avait mis son noir esquif.
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