[200] αὐτὸς ὁ πανδαμάτωρ βουληφόρος ἐστὶ βροτοῖσιν.
201 αὐτὸς καὶ ποθέοντι τότε χραίσμησε Λεάνδρῳ.
202 ὀψὲ δ´ ἀλαστήσας πολυμήχανον ἔννεπε μῦθον·
203 «Παρθένε, σὸν δι´ ἔρωτα καὶ ἄγριον οἶδμα περήσω,
204 εἰ πυρὶ παφλάζοιτο καὶ ἄπλοον ἔσσεται ὕδωρ.
205 οὐ τρομέω βαρὺ χεῖμα τεὴν μετανεύμενος εὐνήν,
206 οὐ βρόμον ἠχήεντα περιπτώσσοιμι θαλάσσης.
207 ἀλλ´ αἰεὶ κατὰ νύκτα φορεύμενος ὑγρὸς ἀκοίτης
208 νήξομαι Ἑλλήσποντον ἀγάρροον. οὐχ ἕκαθεν γὰρ
209 ἀντία σεῖο πόληος ἔχω πτολίεθρον Ἀβύδου.
210 μοῦνον ἐμοὶ ἕνα λύχνον ἀπ´ ἠλιβάτου σέο πύργου
211 ἐκ περάτης ἀνάφαινε κατὰ κνέφας, ὄφρα νοήσας
212 ἔσσομαι ὁλκὰς Ἔρωτος ἔχων σέθεν ἀστέρα λύχνον.
213 καί μιν ὀπιπεύων, οὐκ ὀψὲ δύοντα Βοώτην,
214 οὐ θρασὺν Ὠρίωνα καὶ ἄβροχον ὁλκὸν Ἁμάξης,
215 Κύπριδος ἀντιπόροιο ποτὶ γλυκὺν ὅρμον ἱκοίμην.
216 ἀλλά, φίλη, πεφύλαξο βαρυπνείοντας ἀήτας,
217 μή μιν ἀποσβέσσωσι—καὶ αὐτίκα θυμὸν ὀλέσσω—
218 λύχνον ἐμοῦ βιότοιο φαεσφόρον ἡγεμονῆα.
219 εἰ ἐτεὸν δ´ ἐθέλεις ἐμὸν οὔνομα καὶ σὺ δαῆναι,
220 οὔνομά μοι Λείανδρος, ἐυστεφάνου πόσις Ἡροῦς.»
221 Ὣς οἱ μὲν κρυφίοισι γάμοις συνέθεντο μιγῆναι
222 καὶ νυχίην φιλότητα καὶ ἀγγελίην ὑμεναίων
223 λύχνου μαρτυρίῃσιν ἐπιστώσαντο φυλάσσειν,
224 ἡ μὲν φῶς τανύειν, ὁ δὲ κύματα μακρὰ περῆσαι.
225 παννυχίδας δ´ ὁρίσαντες ἀκοιμήτων ὑμεναίων
226 ἀλλήλων ἀέκοντες ἐνοσφίσθησαν ἀνάγκῃ.
227 ἡ μὲν ἔβη ποτὶ πύργον, ὁ δ´, ὀρφναίην ἀνὰ νύκτα
228 μή τι παραπλάζοιτο, λαβὼν σημήια πύργου
229 πλῶε βαθυκρήπιδος ἐπ´ εὐρέα δῆμον Ἀβύδου.
230 παννυχίων δ´ ὀράων κρυφίους ποθέοντες ἀέθλους
231 πολλάκις ἠρήσαντο μολεῖν θαλαμηπόλον ὄρφνην.
232 Ἤδη κυανόπεπλος ἀνέδραμε νυκτὸς ὀμίχλη
233 ἀνδράσιν ὕπνον ἄγουσα καὶ οὐ ποθέοντι Λεάνδρῳ.
234 ἀλλὰ πολυφλοίσβοιο παρ´ ἠιόνεσσι θαλάσσης
235 ἀγγελίην ἀνέμιμνε φαεινομένων ὑμεναίων
236 μαρτυρίην λύχνοιο πολυκλαύτοιο δοκεύων,
237 εὐνῆς δὲ κρυφίης τηλεσκόπον ἀγγελιώτην.
238 ὡς δ´ ἴδε κυανέης λιποφεγγέα νυκτὸς ὀμίχλην
239 Ἡρώ, λύχνον ἔφαινεν. ἀναπτομένοιο δὲ λύχνου
240 θυμὸν Ἔρως ἔφλεξεν ἐπειγομένοιο Λεάνδρου.
241 λύχνῳ καιομένῳ συνεκαίετο. πὰρ δὲ θαλάσσῃ
242 μαινομένων ῥοθίων πολυηχέα βόμβον ἀκούων
243 ἔτρεμε μὲν τὸ πρῶτον, ἔπειτα δὲ θάρσος ἀείρας
244 τοίοις οἱ προσέλεκτο παρηγορέων φρένα μύθοις·
245 «Δεινὸς Ἔρως καὶ πόντος ἀμείλιχος· ἀλλὰ θαλάσσης
246 ἔστιν ὕδωρ, τὸ δ´ Ἔρωτος ἐμὲ φλέγει ἐνδόμυχον πῦρ.
247 ἅζεο πῦρ, κραδίη, μὴ δείδιθι νήχυτον ὕδωρ.
248 δεῦρό μοι εἰς φιλότητα. τί δὴ ῥοθίων ἀλεγίζεις;
249 ἀγνώσσεις, ὅτι Κύπρις ἀπόσπορός ἐστι θαλάσσης;
| [200] S'il triomphe de tous les cœurs, il sait aussi conseiller ceux qu'il a vaincus. Il secourut alors, dans sa passion, Léandre, qui, rompant le silence avec un soupir, tint à Héro ce langage artificieux :
"Jeune vierge, pour toi je traverserai les flots courroucés, la mer fût-elle bouillonnante de feux et inabordable. Pour être admis dans ta couche, je ne redoute ni les vagues agitées ni le bruit retentissant de l'onde mugissante. Chaque nuit, porté sur les eaux, ton époux saura passer à la nage le détroit du rapide Hellespont, car je demeure dans Abydos, en vue et non loin de ta ville.
(210) Seulement, du haut de ta tour voisine des nues, montre-moi dans les ténèbres, un flambeau, afin qu'en le voyant, je sois le navire de l'Amour, ayant ton fanal pour étoile. Les yeux fixés sur cet astre, je ne verrai ni le coucher du Bootès, ni l'affreux Orion, ni la trace toujours sèche de l'Ourse. Alors, j'aborderai aux rives fortunées de ta patrie. Mais toi, chère amante, prends bien garde que le souffle impétueux des vents n'éteigne ce brillant flambeau, arbitre de mes jours, et que je ne perde aussitôt la vie. Si tu veux savoir mon nom, je m'appelle Léandre, l'époux de la belle Héro."
(221) C'est ainsi que ces deux jeunes amants forment le projet de s'unir par un hymen clandestin, et se promettent mutuellement de goûter pendant la nuit, à l'aide d'un flambeau allumé, les plaisirs de l'amour. Celle-ci allumera le fanal, celui-ci traversera les vastes flots. Puis, après s'être promis de veiller pour un hymen ennemi du sommeil, ils furent contraints, quoique à regret, de se séparer. (227) Héro se retire dans sa tour, et Léandre, pour ne pas s'égarer à travers la nuit obscure, porte ses regards sur le fanal de la tour, et gagne à la nage les rives de la populeuse Abydos. Que de fois, dans le désir de se livrer une nuit entière aux luttes secrètes des époux, ne souhaitèrent-ils pas le retour de l'obscurité si favorable aux doux mystères !
(232) Déjà la nuit déployait son voile azuré et apportait le sommeil aux humains, mais non pas à l'amoureux Léandre. Sur les bords de la mer mugissante, il attendait le signal de son brillant hyménée, et tâchait de découvrir ce funeste flambeau qui doit annoncer de loin ses plaisirs secrets. Héro, voyant les obscures et épaisses ténèbres de la nuit répandues sur la terre, arbore le fanal. Il verse à peine une faible lumière que l'amour embrase déjà le cœur de l'impatient Léandre. Tandis que le fanal brille, lui aussi brûle et se consume.
Lorsque Léandre entend les mugissements horribles des vagues mutinées, il est d'abord saisi de crainte, mais, ranimant son audace, il s'adresse à lui-même ces paroles, pour rassurer ses esprits effrayés. (245) "L'amour est impérieux, la mer est implacable, mais, après tout, la mer n'est que de l'eau, tandis que les feux de l'amour me brûlent intérieurement. Rassemble donc tes feux, ô mon cœur, ne crains pas le vaste amas d'eau. Seconde ma passion. Pourquoi redouter ces vagues impétueuses ? Ignores-tu que Cypris est née au sein des ondes,
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