[40,5] Παύομαι τοῦ δυνατοῦ, καὶ ἐπὶ τὸ ἀληθὲς μέτειμι.
Τὸν γὰρ τοῦ ἀνθρώπου βίον ἆρα ἄλλο τι ἡγητέον ἢ
διαγωγὴν ζωῆς συγκεκραμένην ἐκ ψυχῆς καὶ σώματος
καὶ τύχης; Ἐκ δὲ τῆς τούτων ἁρμονίας κραθέντων
καλῶς, ἑκάστου εἰς τὸ ἀκρότατον τῆς ἑαυτοῦ ῥώμης
ἀφιγμένου, τὸ ἄθροισμα τοῦτο εὐδαιμονίαν κλητέον·
ἀρχούσης μὲν τῆς ψυχῆς, στρατηγοῦ δίκην, ὑπηρετοῦντος
δὲ τοῦ σώματος, στρατιώτου δίκην, συνεργούσης
δὲ τῆς τύχης, ὅπλων δίκην· ἐξ ὧν ἁπάντων τὸ
νικᾶν ἔρχεται. Ἐὰν δὲ ἀφέλῃς τὴν τύχην, τὸν στρατιώτην
ἐξοπλίζεις· κἂν τὸν στρατιώτην ἀφέλῃς, ἀποχειροτον
εῖς τὸν στρατηγόν· τιμιώτερον δὲ καὶ στρατιώτης
ὅπλων, καὶ στρατιώτου στρατηγός. Ἐὰν δὲ
δυοῖν θάτερον, ἢ τὸν στρατηγὸν τιμῶν τὰ λοιπὰ ἀτιμάσῃς,
τί χρήσεται ὁ στρατηγὸς τῇ τέχνῃ; ἢ καὶ ταῦτα
εἰσάγων ἰσοτιμίαν νέμῃς, τί χρήσεται τέχνη τῷ στρατηγῷ;
Ἀρχέτω ψυχή, στρατευέτω τὸ σῶμα, συναγωνιζέσθω
ἡ τύχη· πάντα ἐπαινῶ, πάντα δέχομαι· ἀλλὰ
τὴν ἰσοτιμίαν αὐτῶν ἀφαιρῶ. Οὐχ ὁρᾷς καὶ τὸν ἐν
θαλάττῃ πλοῦν, ἔνθα ὁ μὲν κυβερνήτης ἄρχει, ὡς ψυχὴ
σώματος· ἡ δὲ ναῦς ἄρχεται, ὡς ὑπὸ ψυχῆς σῶμα·
τὰ δὲ πνεύματα ἐπιρρεῖ, ὡς ταῖς ἀρεταῖς ἡ τύχη; Ἐὰν
δὲ χειμὼν ἐπιγένηται, καὶ μένῃ μὲν ἡ ναῦς, μένῃ δὲ
ὁ κυβερνήτης, ἐλπὶς σωτηρίας, κἂν οἴχηται ἡ ναῦς
ὀρθά, ἢ κατακλύζεται, διὰ τῆς τέχνης· ἐὰν δὲ ἀπὸ τοῦ
κυβερνήτου ἄρξῃ, καὶ ἐκεῖνον ἀφέλῃς, ἀχρεῖος μὲν ἡ
ναῦς κειμένη· ἀχρεῖος δὲ ἡ ἐπιρροὴ τῶν πνευμάτων,
κἂν φέρῃ. Καὶ διὰ τοῦτο ἐν μὲν θαλάττῃ καὶ νηῒ
καὶ πλῷ τιμιώτατον ὁ κυβερνήτης, καὶ μετὰ τοῦτον ἡ
ναῦς, καὶ μετὰ ταύτην ἡ ἔξωθεν ἐπικουρία· ἐν δὲ τῷ
τοῦ βίου τούτῳ δρόμῳ τιμιώτατον μὲν ἡ ψυχή, μετὰ
δὲ ταύτην τὸ σῶμα, καὶ τρίτον ἡ τύχη· τὰ δὲ τοῦ
τιμιωτέρου ἀγαθὰ τῶν ἧττον τιμίων τιμιώτερα.
| [40,5] Du rapport de la possibilité je passe à celui de la vérité intrinsèque.
Penserons-nous que la vie de l’homme soit autre chose qu'un cours
d’existence partagé, entre les fonctions de l'âme, les fonctions du corps
et les accidents de la fortune ? Lorsque l’harmonie règne entre ces trois
éléments, et leurs attributions respectives, lorsque chacun d'eux arrive
au plus haut point de son intensité, l'ensemble qui résulte de cette
combinaison, s'appelle bonheur. Lorsque l'âme commande, à l'instar d'un
Général ; lorsque le corps obéit, à l'instar d'un soldat; lorsque la
fortune agit et coopère, à l'instar des armes, la victoire résulte de ce
triple concours. Si vous ôtez la fortune, vous désarmez le soldat. Si vous
retranchez le soldat, autant vaudrait destituer le Général. Or, le soldat
vaut mieux que les armes, et le Général vaut mieux que le soldat. De deux
choses l'une : si, faisant cas du Général, vous méprisez le reste, quel
parti le Général tirera-t-il de la fortune ? Et si vous faites un cas égal
de chacune de ces trois choses, quel parti la fortune tirera-t-elle du
Général ? Que l'âme fasse-les fonctions de Général, que le corps fasse les
fonctions de soldat, que la fortune soit l'auxiliaire de l’un et de
l'autre; c'est fort bien; c'est à merveille ; mais point d'identité
d'estime et de considération entre ces trois choses. Voyez-vous, dans la
navigation, comme le pilote commande au vaisseau, ainsi que l'âme commande
au corps ; voyez-vous comme le vaisseau obéit au pilote, ainsi que le
corps à l'âme; comme les vents poussent le vaisseau, ainsi que la fortune
pousse les talents. Qu'il survienne une tempête; si le vaisseau n'éprouve
aucun mal, et que le pilote reste à son poste, il faut espérer qu'il n'y
aura point de naufrage. Le vaisseau aura beau aller à la dérive, l'art du
pilote l'empêchera d'être submergé. Mais si vous commencez par le
pilote, et que vous le retranchiez, le vaisseau devient inutile, quand
bien même il demeurerait intact. Les vents sont également inutiles, quand
bien même ils seraient favorables. D'où il suit que, sur mer, quand on
navigue, le premier rôle appartient au pilote, le second au vaisseau, et
le troisième à l'auxiliaire extérieur qui donne l'impulsion. C'est ainsi
que, dans la carrière de la vie, le premier rang appartient à l'âme, le
second au corps, et le troisième à la fortune. Or, les biens propres à
celle de ces choses qui est la plus considérable, sont au-dessus des biens
propres à celles de ces choses qui le sont le moins.
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