[38,3] Ἐγένετο καὶ Ἀθήνησιν ἀνὴρ Ἐλευσίνιος, ὄνομα
Μελησαγόρας· οὗτος οὐ τέχνην μαθών, ἀλλ´ ἐκ νυμφῶν
κάτοχος, θείᾳ μοίρᾳ σοφὸς ἦν καὶ μαντικός, ὡς
ὁ Ἀθηναίων λόγος. Ἦλθεν Ἀθήναζε καὶ ἄλλος, Κρὴς
ἀνήρ, ὄνομα Ἐπιμενίδης· οὐδὲ οὗτος ἔσχεν εἰπεῖν αὑτῷ
διδάσκαλον· ἀλλ´ ἦν μὲν δεινὸς τὰ θεῖα, ὥστε τὴν
Ἀθηναίων πόλιν κακουμένην λοιμῷ καὶ στάσει διεσώσατο
ἐκθυσάμενος· δεινὸς δὲ ἦν ταῦτα, οὐ μαθών,
ἀλλ´ ὕπνον αὐτῷ διηγεῖτο μακρὸν καὶ ὄνειρον διδάσκαλον.
Ἐγένετο καὶ ἐν Προκοννήσῳ ἀνὴρ φιλόσοφος,
ὄνομα Ἀριστέας· ἠπιστεῖτο δὲ αὐτῷ οὐχὶ σοφία τὰ
πρῶτα, διότι μηδένα αὐτῆς διδάσκαλον προὔφερεν.
Πρὸς οὖν δὴ τὴν τῶν ἀνθρώπων ἀπιστίαν ἐξεῦρεν
λόγον· ἔφασκεν τὴν ψυχὴν αὐτῷ καταλιποῦσαν τὸ
σῶμα, ἀναπτᾶσαν εὐθὺ τοῦ αἰθέρος, περιπολῆσαι τὴν
γῆν τὴν Ἑλλάδα καὶ τὴν βάρβαρον, καὶ νήσους πάσας,
καὶ ποταμούς, καὶ ὄρη· γενέσθαι δὲ τῆς περιπολήσεως
αὐτῇ τέρμα τὴν Ὑπερβορέων γῆν· ἐποπτεῦσαι δὲ πάντα
ἑξῆς νόμαια καὶ ἤθη πολιτικά, καὶ φύσεις χωρίων,
καὶ ἀέρων μεταβολάς, καὶ ἀναχύσεις θαλάττης, καὶ
ποταμῶν ἐκβολάς· γενέσθαι δὲ αὐτῇ καὶ τὴν τοῦ οὐρανοῦ
θέαν πολὺ τῆς νέρθεν σαφεστέραν. Καὶ ἦν
πιθανώτερος λέγων ταῦτα ὁ Ἀριστέας μᾶλλον μὴ ὤνια
ἐξ ἀγορᾶς, ἢ Ξενοφάνης ἐκεῖνος, ἤ τις ἄλλος τῶν ἐξηγησαμένων
τὰ ὄντα ὡς ἔχει· οὐ γάρ πω σαφῶς ἠπίσταντο
οἱ ἄνθρωποι τὴν ψυχῆς περιπόλησιν, οὐδὲ
οἷστισιν ὀφθαλμοῖς ἕκαστα ὁρᾶν, ἀλλὰ ἀτεχνῶς ἀποδημίας
τινὸς ᾤοντο τῇ ψυχῇ δεῖν, εἰ μέλλει ὑπὲρ
ἑκάστου φράσειν τὰ ἀληθέστατα.
| [38,3] A Athènes parut un homme d'Eleusis, nommé Mélésagoras. Il n'avait
jamais rien appris. Mais il était inspiré par les Nymphes. Les Dieux
avaient réglé par un arrêt du destin, qu'il serait un sage et un devin.
Aussi était-il l'un et l'autre, s'il faut en croire les Athéniens. D'un
autre côté, un Crétois, nommé Epiménide, vint également à Athènes. Il ne
pouvait pas dire non plus qu'il eût eu un maître. Il était néanmoins versé
dans la science des choses divines, puisqu’à l'aide de certains sacrifices
expiatoires, il délivra la ville d'Athènes de la peste, et des séditions
qui préparaient sa ruine. S'il possédait cette science, ce n'était pas
qu'il l'eût apprise. Mais il disait qu'elle était le résultat de son long
sommeil, et de son long rêve. Il y eut aussi, à Proconnèse, un
philosophe nommé Aristéas. D'abord on n'eut aucune confiance en lui,
parce qu'il ne disait point qu'il eût eu personne pour maître. Voici
l'expédient dont il s'avisa, pour convaincre les incrédules. Il débita que
son âme se détachait de son corps ; qu'aussitôt elle s'envolait dans les
airs ; qu'elle parcourait tour-à-tour, toutes les régions de la terre, la
Grèce, les pays des Barbares, toutes les îles, tous les fleuves, toutes
les montagnes, et qu'elle ne s'arrêtait que chez les Hyperboréens ;
qu'elle passait ainsi successivement en revue les lois, les mœurs, les
gouvernements des peuples, les diverses qualités des terroirs, les
variations de la température, les flux et reflux de la mer, et les
embouchures des fleuves ; enfin, qu'elle contemplait le ciel bien plus à
découvert, et avec bien plus de détail que la terre. Et lorsqu'Aristéas
tenait ce langage, il méritait bien plus de foi que les Anaxagoras, que
les Xénophanes, et tous autres, qui, en parlant des choses en disent ce
qu'elles sont. Car les hommes ne voyaient pas clairement ce que c'était
que ces voyages, ces excursions de l'âme, non plus que ces yeux avec
lesquels elle contemplait toutes ces choses en particulier. Mais ils
pensaient, en gros, qu'elle pouvait avoir besoin de se promener ainsi,
pour se mettre à même de dire sur chaque chose ce qu'il y a de plus vrai.
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