[30,4] Ἔοικεν γὰρ ἀμέλει καὶοὗτος οὐ πλοῦν βραχύν,
οὐδὲ ἡμερῶν ὀλίγων ἡμῖνδρόμον διαγωνιουμένοις,
ἀλλὰ τὸν τοῦ ζῆν ξύμπαντα χρόνον νομοθετεῖν
ἡδονὰς οὐδὲν τῶν θαλαττίων ἐκείνων
ἀσφαλεστέρας· μήπω γάρ τις ἡμᾶς πειθέτω λόγος,
ὡς οὐκ ἀγαθὸν ἡδονή, ἀλλὰ ἀγωνιζέσθω, ἐὰν πεῖσαι
δυνηθῇ, ὡς ἀσφαλής. Εἰ δὲ μεταβάλλειν μὴ δυνηθῇ,
ἀνέξομαι, ἡδόμενος τὸν πάντα χρόνον, καὶ ἀμελήσω τῆς
ἀρετῆς, ἐάν μοι δείξῃς ἡδονὴν ἀσφαλῆ καὶ λύπης ἀμιγῆ,
ἡδονὴν ἀμετάγνωστον, ἡδονὴν ἐπαινουμένην. Δείξεις δέ
πως οὐ μᾶλλον, ἢ λύπην· οὐδὲν γὰρ ὑγιὲς οὐδὲ εἰλικρινὲς
τούτων κατεστήσατο τοῖς ἀνθρώποις ἡ φύσις, ἀλλὰ
ἀναμέμικται πανταχοῦ τὰ λυπηρὰ τοῖς ἡδέσιν, ἑκάτερον
ἐν ἑκατέρῳ φυρόμενον· ἀνάγκη δὲ αἱρούμενον θάτερον
καὶ τοῦ ἄλλου μετέχειν εὐθύς· ἅτε γὰρ ἀλλήλοις συμπεφυκότα,
τὸ ἕτερον τῷ ἑτέρῳ ἐπιρρεῖ, καὶ ἀντικαταλλάττεται
τὰς γενέσεις, καὶ ἀμείβει τὰς συνουσίας. Ὑπὸ
δὲ τῆς παλιρροίας ταύτης ψυχὴ κυκωμένη, πῶς ἄν
ποτε ἐπιλάβοιτο ἀλυπίας, συνοῦσα ἀγαθοῖς ἐστερημένοις;
Ἐγὼ καὶ θαλάττῃ διὰ τοῦτο ἀπιστῶ, κἂν νήνεμος
ᾖ, κἂν γαλήνην ἔχῃ· ὑποπτεύω γὰρ αὐτῆς τὴν
ἡσυχίαν· εἰ δέ με βούλει πιστεῦσαι γαλήνῃ, ἄγε λαβὼν
εἰς πέλαγος ἀσφαλές,
ἔνθ´ οὐκ ἔστ´ - - - οὔτ´ ἂρ χειμὼν πολύς,
οὔτέ ποτ´ ὄμβρῳ
δεύεται, - - - ἀλλὰ μάλ´ αἴθρη
πέπταται ἀννέφελος, λευκὴ δ´ ἐπιδέδρομεν αἴγλη.
Συγκεκλήρωται δὲ καὶ ἡ ψυχὴ τοιούτῳ πάθει· καὶ
μέχρις ἂν αὐτῇ ἀπῇ μὲν ὁ κυβερνήτης, ἀπῇ δὲ καὶ ἡ
τέχνη, κἂν γαλήνην ἴδῃ, χειμῶνα δέδιεν· κἂν χειμῶνι
ἐντύχῃ, γαλήνην ποθεῖ. Ἀνδρὸς γὰρ βίος πρὸς ἡδονὴν
νενευκότος, καὶ λύπην ἐπτοημένου, κοῦφος καὶ
ψοφοδεὴς καὶ ἄπιστος καὶ θαλάττης πάσης ἀδηλότερος.
| [30,4] IV. Il y est en effet question, non d'une courte navigation, ni d'un voyage de
quelques jours, dont nous ayons à supporter les fatigues. Mais de toute la durée de la
vie, gouvernée par des voluptés non moins périlleuses que celles dont nous venons
d'offrir le tableau. Qu'on ne se mette pas en frais pour nous persuader que la volupté
est un bien. Mais qu'on s'efforce de nous persuader, si on le peut, qu'elle est un bien
solide, et non sujet aux vicissitudes. Nous consacrerons toute notre vie à la
volupté. Nous dirons adieu à la vertu, si l'on nous démontre que la volupté est stable et
non mêlée de douleur, que la volupté n'est point sujette au repentir, que la volupté est
digne d'éloges. Mais comment démontrera-t-on cela de la volupté ? On ne le
démontrera pas plus que de la douleur. Car la nature n'a point voulu que l'homme
éprouvât ces deux genres de sensations, sans mélange, sans promiscuité réciproque.
Elle a au contraire partout allié les éléments de la douleur aux éléments de la volupté.
Elle en a fait une amalgame. Il est donc de toute nécessité que celui qui éprouve la
sensation de l'une, éprouve la sensation de l'autre. Elles naissent l'une de l'autre ;
elles se suivent réciproquement. Elles se succèdent, elles se remplacent, elles se
correspondent tour à tour. Continuellement flottante entre ce flux et reflux, comment
l'âme serait-elle jamais dans un état exempt de douleur, lorsqu'elle ne jouit que de
biens qui doivent bientôt lui être enlevés. Aussi me défié je de la mer, quoiqu'elle
ne soit point agitée par les vents, quoiqu'elle présente l'aspect de la tranquillité. Je
crains cette trompeuse apparence. Si l'on veut que je me confie à cette sérénité ; que
l'on me conduise dans une mer pacifique, « où la tourmente n'exerce point ses fureurs,
dans une mer inaccessible aux orages, sous un ciel pur et sans tempêtes ».
Telles sont les impressions dont l'âme a reçu la susceptibilité en partage. Tant
qu'elle sera destituée de pilote, tant qu'elle manquera de l'art nécessaire pour se
diriger, elle aura beau voir la tranquillité sur les flots, elle ne sera point rassurée contre
la crainte de la tempête ; et si la tempête l'agite, elle désirera la tranquillité. Car lorsque
l'homme a de la propension à la volupté, et qu'il répugne à la douleur, sa vie est
pleine d'incertitude, de terreurs paniques, de perplexités. La mobilité de la mer n'est
qu'une faible image de la sienne.
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