[35,4] Ἦλθεν ἐπὶ τὴν Ἀσίαν Ἑλληνικὸς στόλος νεῶν χιλίων,
πλῆθος ἀνδρῶν τὸ καλλιστεῦον τῆς Ἑλλάδος,
ὁμόσκηνον καὶ ὁμοδίαιτον, δεκαετεῖ χρόνῳ ἀντικαθημένων
αὐτοῖς ἐχθρῶν βαρβάρων. Ἡ δὲ φήμη τῶν
ἔργων τούτων ἐμπεσοῦσα εἰς τὴν Ὁμήρου ᾠδήν, οὐκ
ἔσχεν ἡμῖν ἑταιρείαν εἰπεῖν ἀκριβῆ ἐν τοσούτῳ
στόλῳ καὶ χρόνῳ, πλὴν μιᾶς, Θετταλικοῦ μειρακίου
πρὸς Λοκρὸν ἄνδρα· ἧς οὐδὲν Ὅμηρος διηγήσατο οὔτε
πρὸς ἡδονὴν τερπνότερον, οὔτε πρὸς ἀρετὴν ἀγωγότερον,
οὔτε πρὸς μνήμην ἐπικυδέστερον. Τὰ δὲ ἄλλα
τοῦ Ὁμήρου εἰ σκοποίης, πόλεμοι πάντα, καὶ θυμοί,
καὶ ἀπειλαί, καὶ μῆνις· καὶ τὰ τούτων τέλη οἰμωγαί,
καὶ στόνοι, καὶ θάνατοι καὶ φθοραί, καὶ ὄλεθροι. Ἄιδεταί
που καὶ διήγημα Ἀττικὸν ὑπὸ φιλίας σεμνυνόμενον
ἐν πολλοῖς τοῖς Ἀθηναίων λόγοις· ἓν τοῦτο
ἄξιον τῆς Ἀθηνᾶς, ἄξιον τοῦ Θησέως, φιλία καλὴ καὶ
δικαία ἀγαθῶν ἀνδρῶν, ἣ παρέδωκεν ἀμφοτέροις ἐπὶ
τυράννῳ κοινὸν ξίφος, καὶ σύνθημα κοινόν, καὶ κοινὸν
θάνατον· μεθ´ ἣν οὐκέτι ὄ〈ναρ μετέχει〉 φιλίας
Ἀττικήν, ἀλλὰ πάντα ὕπουλα, καὶ σαθρά, καὶ ἄπιστα,
καὶ διαβεβρωμένα, μεστὰ φθόνου, καὶ ὀργῆς, καὶ ἀπειροκαλίας,
καὶ φιλοχρηματίας, καὶ φιλοδοξίας.
| [35,4] IV. Une flotte Grecque, composée d'un nombre infini de vaisseaux, vient en Asie,
amenant ce que la Grèce avait de plus illustres personnages. Pendant dix ans, ils
habitent sous les mêmes tentes, ils se nourrissent des mêmes aliments, ils ont à
combattre les mêmes ennemis, les mêmes Barbares. La renommée de tous leurs
hauts faits présente à Homère le sujet d'un poème ; et au milieu d'une si nombreuse
armée, durant le cours d'un si long intervalle, il n'a à nous offrir de la véritable
philanthropie qu'un exemple unique, et c'est celui d'un jeune Thessalien et d'un
Locrien homme fait. De tous les récits d'Homère, il n'en est point de plus délicieux
sous le rapport de l'agrément, de plus attrayant sous le rapport de la vertu, de plus
recommandable sous le rapport de la renommée. Tous les autres détails d'Homère, si
l'on y fait attention, ne présentent que guerres, ressentiments, menaces, fureurs, et ce
qui en est le résultat, lamentations, gémissements, meurtres, saccagements et
carnages. D'un autre côté, dans les fastes de la République d'Athènes, on cite aussi
un exemple bien mémorable d'amitié. Mais il est unique dans la volumineuse histoire
des Athéniens. D'ailleurs, il est digne de Minerve, digne de Thésée ; c'est celui de
deux hommes de bien, unis par l'amour du beau et du juste, sentiment qui les
arma l'un et l'autre du même glaive contre un tyran, qui leur fit prendre le même
dessein, et braver le même trépas. Hors cet exemple, les annales d'Athènes n'en
offrent point d'autre. Tout le reste est ulcéré, gangrené. Ce n'est que perfidie et que
corruption. On n'y voit qu'envie, que colère, que crasse ignorance de ce qui est
honnête, que cupidité, qu'ambition.
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