[35,5] Κἂν τὴν λοιπὴν Ἑλλάδα ἐπίῃς, ἀφθονίαν ὄψει
σκυθρωπῶν διηγημάτων, ἄνδρα ἀνδρὶ συμπεπτωκότα,
καὶ πόλιν πόλει, καὶ γένος γένει· οὐ τὸ Δωρικὸν τῷ
Ἰωνικῷ μόνον, οὐδὲ τὸ Βοιώτιον τῷ Ἀττικῷ, ἀλλὰ
καὶ Ἴωνας Ἴωσιν, καὶ Δωριέας Δωριεῦσιν, καὶ Βοιωτοὺς
Βοιωτοῖς συμπίπτοντας, καὶ Ἀθηναίους Ἀθηναίοις,
καὶ Θηβαίους Θηβαίοις, καὶ Κορινθίους Κορινθίοις,
συγγενεῖς καὶ συνεστίους πολεμίους, πάντας πᾶσιν
ἐπιτιθεμένους, τοὺς ὑπὸ τὸν αὐτὸν ἥλιον καὶ τὸν αὐτὸν
αἰθέρα καὶ τὸν αὐτὸν νόμον, καὶ τὴν αὐτὴν φωνὴν
ἱέντας, καὶ τὴν αὐτὴν γῆν νεμομένους, καὶ καρποὺς
τοὺς αὐτοὺς σιτουμένους, καὶ μυστήρια τὰ αὐτὰ τελουμένους·
οὓς περιβάλλει τεῖχος ἓν καὶ πόλις μία, πολεμοῦντας
σπενδομένους, ὀμνύντας ἐπιορκοῦντας, συντιθεμένους
μετατιθεμένους, καὶ προφάσεις μικρὰς μεγίστων
κακῶν. Οἷς γὰρ ἂν τὸ φιλεῖν τῆς γνώμης
ἐκπέσῃ, πάντα ἤδη ἀξιόχρεα κινεῖν ὀργὴν καὶ ταράττειν·
καθάπερ κοίλην ναῦν ἀφαιρεθεῖσαν τοῦ ἕρματος
βραχεῖαι ῥοπαὶ σαλεύουσίν τε καὶ περιτρέπουσιν.
| [35,5] V. Si nous parcourons le reste de la Grèce, nous ne trouverons que tableaux
hideux, les citoyens en guerre contre les citoyens, les cités aux prises avec les cités,
les peuples en hostilité avec les peuples. Non seulement les Doriens contre les
Ioniens, non seulement les Béotiens contré les Athéniens, mais encore les Ioniens
contre les Ioniens, les Doriens contre les Doriens, les Béotiens contre les Béotiens, les
Athéniens contre les Athéniens, les Thébains contre les Thébains, les Corinthiens
contre les Corinthiens. On voit se combattre et se déchirer les uns les autres des
peuples qui avaient une tige commune, que la même patrie avait enfantés, qui étaient
nés sous la même température, sous le même climat, qui vivaient sous les mêmes
lois, qui parlaient la même langue, qui cultivaient la même contrée, qui se nourrissaient
des mêmes aliments, qui célébraient les mêmes mystères. Ceux qui étaient renfermés
dans l'enceinte des mêmes murailles, ceux qui habitaient la même cité, on les voit
courir aux armes, après s'être réciproquement promis d'étouffer toute dissension ;
violer la solennité des serments par lesquels ils s'étaient liés, rentrer en guerre après
être convenus de vivre en paix ; et se faire les plus grands maux sur les plus légers
prétextes. Car les sentiments affectueux ne sont pas plutôt éteints entre les hommes,
que tout devient entre eux sujet suffisant d'animosité et de trouble. C'est un vaisseau
profond qui a perdu son lest. Les moindres écueils le touchent et le font chavirer.
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