[24,4] Μέγιστον ἀνθρώπῳ κακὸν ἐπιθυμία. Πότερον ἐπιθυμίας ἐργαστικώτερον, πόλεμος, ἢ γεωργία; Καὶ μὴν
τὸ μὲν ἀκόρεστον, τὸ δὲ φειδωλόν· ἀκόρεστον μὲν ὁ
πόλεμος, φείδωλον δὲ ἡ γεωργία. Καὶ τὸ μὲν παντοδαπὸν
ὁ πόλεμος, ἁπλοῦν ἡ γεωργία· καὶ τὸ μὲν ἄδηλον,
τὸ δὲ ὡμολογημένον. Τί γὰρ ἂν εἴη ἀδηλότερον
τῆς ἐν πολέμῳ τύχης; βέβαιος δὲ ὁ ἐν γῇ πόνος. Πόλεμος
ὑπ´ εὐτυχίας μάλιστα θρασύνεται, ἡ δὲ γεωργία
ὑπ´ εὐκαρπίας σωφρονίζεται. Εἰ δὲ καὶ ὁ θυμὸς ἀνθρώπῳ
σύνοικος, χαλεπὸς καὶ δεόμενος πολλῆς παιδαγωγίας,
τί, ἂν ᾖ, θυμοῦ παρασκευαστικώτερον πολέμου
καὶ ὅπλων; τί δὲ γεωργίας ἠπιώτερον; Πρός γε μὴν
τὰς ἀρετὰς αὐτὰς οὕτως ἔχει ἑκάτερον. Καὶ πρῶτόν
γε πρὸς σωφροσύνην· ὅπλα ἔχων ἀνήρ, ὁ μὲν ἰσχυρὸς
ἰταμώτερος, ὁ δὲ δειλὸς σφαλερώτερος· καὶ ὁ μὲν θρασὺς
ἰταμώτερος, ὁ δὲ ἀσθενὴς θρασύτερος, ὁ δὲ φιλήδονος
ἀκολαστότερος. Γεωργῶν ἀνήρ, ὁ μὲν ἰσχυρὸς
εὐκαρπότερος, ὁ δὲ ἀσθενέστερος ὑγιεινότερος, ὁ δὲ
δειλὸς ἀσφαλέστερος, ὁ δὲ φιλήδονος σωφρονέστερος.
Εἰ δὲ καὶ πρὸς δικαιοσύνην ἐξετάζοις, πόλεμος μὲν
διδάσκαλος ἀδικίας, γεωργία δὲ δικαιοσύνης. Ὁ μὲν
γὰρ πλεονέκτης τέ ἐστιν καὶ ἐπὶ τὰ ἀλλότρια ἄγει,
καὶ αὐτὸς αὑτοῦ κράτιστα ἔχει, ἐπειδὰν τὰ μέγιστα
ἀδικῇ καὶ ἀδικῶν εὐστοχῇ. Παρὰ δὲ γεωργίας ἴση
μὲν ἡ ἀντίδοσις, δικαία δὲ ἡ ὁμιλία. Θεραπεύεις φυτόν,
τὸ δὲ ἀντιδίδωσιν καρπούς· θεραπεύεις λήϊον, τὸ
δὲ εὐτροφεῖ· τημελεῖς ἄμπελον, ἡ δὲ εὐοινεῖ· τημελεῖς
ἐλαίαν, ἡ δὲ εὐανθεῖ. Φοβερὸς γεωργὸς οὐδενί,
πολέμιος οὐδενί, φίλος πᾶσιν, ἄπειρος αἵματος, ἄπειρος
σφαγῆς, ἱερὸς καὶ παναγὴς θεῶν ἐπικαρπίων καὶ
ἐπιληναίων καὶ ἁλώων καὶ προηροσίων· ἴσος μὲν ἐν
δημοκρατίᾳ, ὀλιγαρχίαν δὲ καὶ τυραννίδα πάντων μάλιστα
μισεῖ γεωργία. Οὐ γὰρ ταύτης θρέμματα ὁ Διονύσιος,
οὐδὲ ὁ Φάλαρις, ἀλλ´ ἑκάτερος ἀπὸ τῶν ὅπλων.
| [24,4] IV. Le plus grand des maux pour l’homme, c'est d'avoir des désirs déréglés. Quelle est
celle des deux, de la guerre, ou de l'agriculture, qui est la plus propre à exciter ce genre de
désirs? Or, l'une est, de sa nature, d'une prodigalité de consommation qui n'a point de
bornes; l'autre est naturellement frugale. La première est la guerre, la seconde l'agriculture :
l'une, la guerre, est susceptible de beaucoup de modifications : l'autre, l'agriculture, a pour
apanage la simplicité. L'une est toujours accompagnée d'incertitude et de chances obscures ;
au lieu, que chacun sait à quoi s'en tenir sur le compte de l'autre. Car, qu'y a-t-il de moins
facile à prévoir que les événements de la guerre? Le travail agricole, au contraire, a des
résultats d'une solide probabilité. La guerre ne fait que devenir plus audacieuse et plus
téméraire par ses succès. L'agriculture s'améliore et se perfectionne par les siens. D'ailleurs,
si la fougue, l'emportement, naturels à l'homme, sont pour lui un mal qui a un grand besoin
du frein de l'éducation, est-il rien qui soit plus propre à les exciter que la guerre et le métier
des armes? Qu'y a-t-il, au contraire, qui donne plus de sang-froid et moins d'irascibilité que
l'agriculture? Le même contraste existe entre l'une et l'autre, à l'égard des autres qualités
morales. Et d'abord, pour ce qui concerne la tempérance : si le militaire est vigoureusement
constitué, il en est plus impétueux pour les voluptés s'il est lâche, il se laissera vaincre par
elles plus facilement ; s'il est de faible complexion, il s'y abandonnera avec plus de gaîté de
cœur : et s'il a du goût pour les jouissances, il ne saura point s'en rassasier. L'agriculteur, au
contraire, s'il est robuste, s'occupera, plus du produit de ses terres, qu'il ne s'occupera de ses
voluptés ; s'il est faible de tempérament, il se ménagera davantage, pour l'intérêt de sa santé;
s'il est pusillanime, les amorces de la volupté auront moins de facilité à le séduire ; et s'il se
sent du penchant pour elle, il se tiendra d'autant plus sévèrement sur ses gardes.
Considérons-les sous le rapport de la justice. La guerre enseigne à braver toutes les lois :
l'agriculture à les respecter toutes. Dans le métier de la guerre, on est avide; on ne désire que
de s'emparer du bien d'autrui ; et l'on n'a jamais plus haute opinion de soi-même, que
lorsqu'on a fait le plus de mal, et qu'on est le mieux parvenu à son but. Dans l'agriculture, au
contraire, on reçoit en proportion de ce que l'on donne : tout s'y passe sous les auspices de
l'équité. Vous soignez une plante ; vos soins vous sont payés par ses fruits. Vous soignez
vos champs; la moisson en est abondante. Vous soignez vos vignes ; vous faites beaucoup
de vin. Vous soignez vos oliviers, vous récoltez beaucoup d'huile. L'agriculteur n'inspire de
la terreur à personne. Il n'est l'ennemi de personne; il est l'ami de tout le monde. Etranger au
sang et au meurtre, il est plein de respect et de religion pour Jupiter, pour Bacchus,
et pour la Déesse à laquelle on offre des sacrifices avant les semailles, et avant de battre le
froment dans l'aire. Elle aime l'égalité démocratique. Elle a en horreur l'oligarchie et
surtout la tyrannie. Ni Denis de Syracuse, ni Phalaris ne sont ses enfants. Ce sont les armes
qui en ont fait des tyrans.
|