[20,5] Ἔστω δὴ ὁ ἔρως ὄρεξίς τις ψυχῆς, ἀλλὰ τῇ ὀρέξει
ταύτῃ χαλινοῦ δεῖ, καθάπερ ἵππου θυμῷ· ἐὰν δὲ
ἐπιτρέψῃς τῇ ψυχῇ φέρεσθαι, αὐτὸ ἐκεῖνο, κατὰ τὴν
Ὁμηρικὴν εἰκόνα, ἵππον ἀνῆκας ἀδηφάγον διὰ
πεδίου κροαίνειν καὶ ὑβρίζειν, οὐκ ἐπὶ λουτρὰ νόμιμα,
οὐδὲ ἐπὶ δρόμους τεχνικοὺς θέοντα, ἀχάλινον, ἀδέσποτον.
Ἀλλὰ αἰσχρὸν μὲν θέαμα ἵππος ἄφετος,
αἰσχρὸν δὲ ἄκουσμα ὑβριστὴς ἔρως. Οὗτός ἐστιν ὁ
ἔρως ὁ τοὺς κρημνοὺς πηδῶν, οὗτος ὁ ποταμοὺς περῶν,
ὁ ξίφος λαμβάνων, ὁ ἅπτων βρόχον, ὁ μητρυιᾷ
ἐπιτιθέμενος, ὁ προγόνοις ἐπιβουλεύων, ὁ παράνομος,
ὁ ἔμπληκτος, ὁ χλωρός· οὗτος ὁ ἐν σκηναῖς τραγῳδούμενος,
ὁ ἐν μύθοις μισούμενος, μεστὸς ἐρινυῶν,
μεστὸς δακρύων, οἴμοι βοῶν καὶ στένων, ὀλίγα μὲν
εὐτυχῶν, ἐπαιρόμενος δὲ παρὰ τὴν ἀξίαν, καὶ τρεπόμενος
παντοδαπὰς τροπὰς καὶ αἰφνιδίους· ἐπὶ σαρκῶν
ἡδονὰς συντεταγμένος, καὶ φλεγμαίνων σῶμα σώματι
ἀναμιγνύει, καὶ προσφυόμενος οὔτέ τινα εὐσχήμονα
οὔτε νόμιμον οὔτε ἐρωτικὴν τῷ ὄντι ξυνυφήν. Ἐπισπᾶται
δὲ αὐτὸν κάλλους φήμη οἰστρούμενον, ὑπὸ δὲ
τῆς ἀγνοίας πλανώμενον.
| [20,5] V. L'amour est donc un appétit de l'âme. Mais, semblable à un cheval
fougueux, cet appétit a besoin d'un frein. Car, si vous abandonnez l'âme à
elle-même, vous réalisez la comparaison d'Homère ; vous lâchez la
bride à votre jeune cheval, vous le laissez, sans mors et sans maître,
gambader à son aise, et tout dégrader dans la campagne, aller boire les
eaux qui ne sont pas pour lui, et violer, en courant, les règles de
l'équitation. Or, autant il est honteux de voir un cheval ainsi abandonné,
autant il est honteux d'entendre parler d'un amour livré à l'impureté. Tel
est l'amour qui franchit les précipices, qui passe les fleuves, qui saisit
le glaive, qui prépare le lacet, qui touche à sa marâtre, qui tend des
pièges à ses parents, qui viole les lois qui est toujours en frénésie, et
qui n'engendre que des malheurs : tel est l’amour des tragédies sur
la scène. Tel est celui qu'on peint sous des traits odieux dans la
mythologie, en proie aux furies, noyé dans les larmes, abandonné aux
gémissements, aux sanglots, rarement heureux, parce qu'il est sans cesse
hors des convenances, prompt à toutes sortes de vicissitudes, esclave du
plaisir des sens, brûlant de mêler son corps à un autre corps, et ne se
bornant jamais à une jouissance honnête, légitime, et vraiment digne de
l'amour. La beauté l'excite ; le mot l'entraîne ; mais il se trompe sur la
chose, faute de lumières.
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