[11,7] Τῇ τοῦ ἀνθρώπου ψυχῇ δύο ὀργάνων ὄντων πρὸς
σύνεσιν, τοῦ μὲν ἁπλοῦ, ὃν καλοῦμεν νοῦν, τοῦ δὲ
ποικίλου καὶ πολυμεροῦς καὶ πολυτρόπου, ἃς αἰσθήσεις
καλοῦμεν, συνῆπται μὲν αὐτῶν ἡ ἐργασία, κεχώρισται
δὲ ἡ οὐσία· ὡς δὲ ταῦτα πρὸς ἄλληλα ἔχει,
οὕτω κἀκεῖνα ὧν ἐστι ταῦτα ὄργανα· καὶ διαφέρει
νοητὸν καὶ αἰσθητόν, ὅσον νοῦς αἰσθήσεως. Ἔστιν δὲ
τούτων κατὰ μὲν τὴν ὁμιλίαν θἄτερον γνωριμώτερον,
τὸ αἰσθητόν· τὰ δὲ νοητὰ ἄγνωστα μὲν ταῖς ὁμιλίαις,
γνωριμώτερα δὲ τῇ φύσει· ζῷα γάρ που, καὶ φυτά,
καὶ λίθοι, καὶ φωναί, καὶ θυμοί, καὶ ὁρμαί, καὶ σχήματα,
καὶ χροιαί, ὑπὸ τοῦ ἔθους ξυναγειρόμενα, καὶ
τῇ καθ´ ἡμέραν διαίτῃ ἀνακιρναμένῃ παρεσκεύακεν
τὴν ψυχὴν καὶ ἀναπέπεικεν, μηδὲν ἄλλο ἡγεῖσθαι
εἶναι, ὅτι μὴ ταῦτα· τὸ δὲ νοητόν, ἀπηλλαγμένον τῆς
τούτων ἐπαφῆς καὶ ἐπερείσεως αὐτὸ καθ´ ἑαυτὸ ὁρᾶσθαι
πέφυκεν ὑπὸ τούτου· ὁ δὲ τῇ πάσῃ ψυχῇ ἐμπεφυτευμένος
διασπᾶται ὑπὸ τῶν αἰσθήσεων, καὶ ταράττεται,
καὶ ἀσχολίαν ἄγει, ὥστε μὴ διορᾶν τὰ αὑτοῦ
θεάματα, ἤδη δὲ καὶ δημαγωγηθεὶς ἀναπείθεται, ὥστε
συμφθέγγεσθαι ταῖς τῶν αἰσθήσεων φωναῖς, καὶ μηδὲν
ἡγεῖσθαι ἄλλο εἶναι παρὰ τὰ ὁρατὰ καὶ ἀκουστὰ
καὶ ὀσφραντὰ καὶ γευστὰ καὶ ἁπτά. Ὥσπερ οὖν ἐν
συμποσίῳ μεστῷ κνίσσης πολλῆς, καὶ οἴνου χεομένου,
καὶ αὐλῶν ἤχου, καὶ συρίγγων, καὶ ψαλμάτων, καὶ
θυμιαμάτων, ἀνδρὸς ἂν εἴη καρτεροῦ συναγείραντος
καὶ συστείλαντος καὶ τὰς αἰσθήσεις ἀποστρέφοντος,
νηφάλιον καὶ κόσμιον· οὕτως ἀμέλει καὶ ἐν τῇ τῶν
αἰσθήσεων πολυφωνίᾳ χαλεπὸν εὑρεῖν νήφοντα νοῦν,
καὶ δυνάμενον προσβλέπειν τοῖς αὑτοῦ θεάμασιν. Καὶ
μὲν δὴ καὶ ἡ τῶν αἰσθητῶν φύσις, πολυειδής τε οὖσα,
καὶ συμπεφορημένη, καὶ ῥέουσα, ἐν μεταβολῇ παντοίᾳ
συνδιατίθησιν αὐτῇ τὴν ψυχήν, ὥστε καὶ μεταβιβάζουσαν
αὐτὴν ἐπὶ τὴν τοῦ νοητοῦ φύσιν, στάσιμόν τε
οὖσαν καὶ ἑδραίαν, μὴ δύνασθαι διορᾶν ἀσφαλῶς ὑπὸ
τοῦ σάλου καὶ τοῦ ταράχου κραδαινομένην· οἷόν που
ξυμβαίνειν φιλεῖ καὶ τοῖς ἐκ νεὼς εἰς ἤπειρον ἀποβᾶσιν·
μόγις γάρ που καὶ τούτοις ἵσταται τὸ σῶμα ὑπὸ
τοῦ ἐν τῷ κλύδωνι ἔθους κινούμενόν τε, καὶ περιφερόμενον,
καὶ σειόμενον.
| [11,7] VII. L'âme de l'homme est intelligente. Elle exerce cette faculté par le moyen de
deux organes, l'un simple appelé l'entendement, l'autre complexe, composé de
diverses parties destinées à diverses fonctions, qu'on appelle les sens. Différents par
leur essence, ces deux organes sont de moitié dans toutes leurs opérations ; et le
rapport qui existe entr'eux existe aussi entre les choses dont ils sont les instruments.
Car ce qui est intelligible diffère de ce qui est sensible, autant que l'entendement
diffère des sens. L'un, le sensible, est plus aisé à connaître par le contact immédiat où
l'on est sans cesse avec lui. L'autre, l'intelligible, avec lequel un semblable rapport
n'existe pas, n'en est que plus facile à saisir par sa nature même. Car les animaux, les
plantes, les pierres, les sons, les saveurs, les odeurs, les formes, les couleurs, objets
dont nous sommes habituellement environnés, et dont les sensations se confondent
dans tous les moments de notre existence, font impression sur l'âme, et lui persuadent
de penser qu'il n'y a rien au-delà. Les choses intelligibles, au contraire, étrangères à
un tel contact, à de pareilles impressions, sont destinées à se contempler elles-mêmes
par le moyen de l'entendement. Mais ce dernier, implanté dans l'âme, est tourmenté,
agité, troublé par les sens, qui ne lui laissent pas un instant de relâche; de manière qu'il
ne voit point les objets qui lui sont appropriés; et dans ce désordre, il se persuade qu'il
doit être de l'avis des sens, et dire comme eux, que, hors ce qu'on voit, ce qu'on
entend, ce qu'on flaire, ce qu'on goûte, et, ce qu'on touche, il n'y a plus rien. De même
qu'il est difficile, dans un festin splendide, au milieu de la bonne chère, de la
délicatesse des vins, des sons harmonieux de la flûte, du haut-bois, de la lyre,
accompagnés de chants agréables, de parfums exquis, de voir un des convives ayant
assez d'empire sur lui-même, pour mettre un frein à ses appétits, et les renfermer.
dans les bornes, d'une sobriété décente; de même au milieu de ce tumulte, de cette
polyphonie des sens, il est difficile de trouver un entendement calme et posé,
et capable de se livrer aux contemplations de son ressort. D'un autre côté, les
sens étant de différente nature, composés d'éléments divers, et dans une versatilité
continuelle, ils entraînent l'âme, et la bouleversent avec eux dans ce tourbillon, de
manière que lorsqu'elle veut porter ses regards sur les objets de l'entendement,
stables et immobiles de leur nature, elle n'en peut rien faire, à cause de l'agitation et
du trouble où elle se trouve plongée. C'est, à peu près, ce qui arrive à ceux qui sortent
d'un vaisseau, et qui mettent pied à terre. Pendant que leur corps se ressent de
l'impression du roulis et de la tourmente, ils ont de la peine à se tenir debout et en
équilibre.
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