[10,5] Εἰ μὲν οὖν τοιοῦτόν ἐστιν ἡ ψυχή, οἷον καὶ τὸ
σῶμα, θνητὸν καὶ φθειρόμενον, καὶ λυόμενον, καὶ σηπόμενον,
οὐδὲν ἔχω περὶ αὐτῆς σεμνὸν εἰπεῖν· οὐδὲ
γὰρ περὶ σώματος σεμνὸν οὐδὲν εἰπεῖν ἔχω· ἐφήμερον
γὰρ τὸ θρέμμα καὶ ἀκροσφαλές, φερόμενον, ἄπιστον,
ἀσαφές, καὶ ἔμπληκτον. Εἰ τοιοῦτον ἡ ψυχή, οὔτέ
τι οἶδεν, οὐδὲ ἀναμιμνήσκεται, οὔτε μανθάνει· θᾶττον
γὰρ ἂν φυλάξαι σφραγῖδος τύπους κηρὸς ὑπὸ ἡλίου
τηκόμενος, ἢ ψυχὴ μάθημα, εἴπέρ ἐστιν σῶμα· πᾶν
γὰρ σῶμα ῥεῖ, καὶ φέρεται ὀξέως, Εὐρίπου δίκην,
ἄνω καὶ κάτω, νῦν μὲν ἐκ νηπιότητος εἰς ἥβην οἰδαῖνον·
νῦν δὲ ἐξ ἥβης εἰς γῆρας ὑπονοστοῦν καὶ
ὑποφερόμενον. Ἀλλ´ οὐ τοιοῦτον χρῆμα εἶναι τὴν
ψυχὴν μαντεύεται οὔτε Πυθαγόρας, οὔτε Πλάτων·
ἀλλ´ οὐδὲ ὁ πρὸ τούτων Ὅμηρος, ᾧ καὶ ἐν Ἅιδου
διαλέγονται αἱ ψυχαί, καὶ εἰσὶν μαντικαὶ τότε. Λέγει
δέ που αὐτῷ καὶ ἀοιδὸς ἀνήρ,
αὐτοδίδακτος δ´ εἰμί, θεοὶ δέ μοι ὤπασαν ὀμφήν.
Καὶ ἀληθῆ λέγει· αὐτοδίδακτον γάρ τι χρῆμα ἀτεχνῶς
ἡ ψυχή, καὶ τὸ εἰδέναι παρὰ θεῶν τῇ φύσει εὖ ἔχον.
Ἢ τὰ μὲν ἄλλα ζῷα αὐτοδίδακτα πρὸς τὰ αὐτῶν ἔργα,
καὶ οὐδεὶς εἰπεῖν ἔχει διδασκάλους, οὐ λεόντων πρὸς
ἀλκήν, οὐκ ἐλάφων πρὸς φυγήν, οὐχ ἵππων πρὸς
δρόμον· ἀλλὰ καὶ ὀρνίθων γένος αὐτοδίδακτον ἐπ´
ἄκρων φυτῶν ἐμηχανήσαντο καλειάδας αὐτουργῷ τέχνῃ,
καὶ ἀράχναι αὐτοφυεῖ μίτῳ θήρατρα ἐν ἀέρι, καὶ ἑρπετὰ
φωλεούς, καὶ ἰχθύες χειραμούς, καὶ ὅσαι ἄλλων
ζῴων τέχναι πρὸς σωτηρίαν ἑκάστῳ γένει ξύμφυτοι·
ἀνθρώπῳ δὲ ἆρα τῷ νοερωτάτῳ τῶν ὄντων ἐπίκτητον
ἥξει τὸ εἰδέναι; οὐκοῦν ἥξει ποτέ· ἀνάγκη γὰρ ἢ
εὑρόντα εἰδέναι, ἢ μαθόντα· ὧν ἑκάτερον ἀσθενές,
οὐχ ὑπούσης ἐπιστήμης φύσει· ὅ, τε γὰρ εὑρὼν πῶς
ἂν χρήσαιτο τῷ εὑρεθέντι, μὴ γνωρίσας τὴν χρείαν αὐτοῦ;
κἂν γὰρ ἠπειρώτης ἀνὴρ καθ´ Ὅμηρον οἴακι ἐντύχῃ,
φήσει ἀθηρηλοιγὸν ἔχειν ἀνὰ φαιδίμῳ ὤμῳ
ὅ, τε μαθών, ἄλλοθεν μαθών, παρὰ μὲν τοῦ οὐκ
εἰδότος οὐκ ἂν μάθοι, παρὰ δὲ τοῦ εἰδότος κἂν μάθοι,
ἐρεῖ μοι τὸν διδάξαντα, πῶς καὶ οὗτος ἔγνω. Οὐκοῦν
καὶ οὗτος ἢ εὗρεν ἢ ἔμαθεν; καὶ εἰ μὲν εὗρεν, τὰ
αὐτὰ ἐρήσομαι, πῶς ἐχρήσατο τῷ εὑρεθέντι, μὴ γνωρίσας;
εἰ δὲ ἔμαθεν παρ´ ἄλλου, πάλιν ἡδὺ ἐκεῖνον
διέρεσθαι. Καὶ ποῖ στησόμεθα, ἄλλον ἄλλου διδάσκαλον
ἀνερωτῶντες; ἀφίξεται γάρ ποτε λογισμὸς προϊὼν
ἐπὶ τὸν οὐ μαθόντα, ἀλλ´ εὑρόντα· πρὸς ὃν τὰ
αὐτὰ ἐκεῖνα ῥητέον.
| [10,5] V. Si donc l'âme était, comme le corps, une substance mortelle, périssable,
sujette à la dissolution, à la pourriture, je n'aurais rien de recommandable à dire d'elle.
Car je n'ai rien de pareil à dire du corps. Il n'a qu'une existence éphémère. Il est
exposé à périr par une infinité d'accidents. On ne peut compter sur rien en ce qui le
concerne. Il n'offre qu'incertitude et désordre. Si telle était la nature de l'âme, elle ne
saurait rien, elle ne se ressouviendrait de rien, elle n'apprendrait rien. Si l'âme était
corporelle, la cire amollie par le soleil retiendrait plus facilement l'empreinte d'un
cachet qui lui serait appliqué, que l'âme ne retiendrait ce qu'elle apprendrait. Tous les
corps s'écoulent et disparaissent avec la rapidité des torrents. On dirait du flux et du
reflux de l'Euripe. Ils vont en croissant, en grossissant, depuis l'enfance jusqu'à la
puberté. Ils baissent et décroissent depuis la puberté jusqu'à la vieillesse. Mais, ni
Pythagore, ni Platon, ne disent, dans leurs oracles, que l'âme soit rien de semblable.
Ni Homère non plus, leur prédécesseur, qui fait dialoguer aux Enfers les âmes
entr'elles, et qui leur conserve encore le don de prédire l'avenir. C'est ainsi que
s'exprime quelque part, dans ses poèmes, un chanteur: « Je ne dois qu'à moi-même
ce que je sais : quant à la voix, ce sont les Dieux qui me l'ont donnée»; et il dit
vrai. L'âme est, en effet, une chose, qui apprend d'elle-même, et qui doit aux Dieux
cette faculté, qui lui est naturelle. Certes, les autres animaux s'enseignent bien, à
eux-mêmes, les choses qui leur sont propres; et personne ne dira qu'il y ait des maîtres
pour enseigner au lion à avoir de la force, au cerf à prendre la fuite, au cheval à
galoper. Les oiseaux s'enseignent aussi, à eux-mêmes, à construire leurs nids à la
cime des arbres; les araignées s'enseignent aussi, à tendre en l'air avec un fil qui leur
est propre, la toile où doit se prendre leur proie. Les reptiles n'ont pas besoin de leçons
pour faire les trous, ni les poissons pour faire les creux, où ils se retirent. Les animaux,
chacun selon son espèce, apprennent d'eux-mêmes tout ce qu'ils ont à faire pour se
conserver. Et l'homme, le plus intelligent de tous les êtres, ne saurait, qu'autant qu'il
acquerrait du savoir! Il n'en acquerra donc jamais; car pour en acquérir, il faudrait, de
toute nécessité, de deux choses l'une, ou trouver du savoir, ou apprendre; choses
également impossibles, lorsqu'il n'existe point de savoir inné. En effet, celui qui
trouverait du savoir, comment s'en servirait-il, puisqu'il en ignorerait l'usage? Que chez
Homère, un homme, qui n'a nulle idée de navigation, en rencontre un autre chargé
d'un timon de vaisseau, il dira « Quel énorme van vous portez sur vos larges épaules».
De qui apprendrait-il? Ce ne saurait être de celui qui n'a point de savoir. Et s'il
apprenait de quelqu'un qui eût quelque savoir, je demanderais à celui qui lui aurait
servi de maître, d'où il a appris lui-même? Or, ce dernier doit, ou avoir trouvé le savoir,
ou avoir appris. S'il a trouvé le savoir, je demanderai : Comment s'en servira-t-il, n'en
connaissant pas l'usage ? S'il a appris d'un autre, je répéterai ma question vis-à-vis de
cet autre-là. Et où nous arrêterons-nous dans cette série de maîtres auxquels
nous remonterons de l'un à l'autre en les interrogeant? À force de remonter, nous
arriverons à quelqu'un qui n'aura rien appris, mais qui aura trouvé le savoir, et auquel
nous tiendrons le même langage.
|