[6,3] Εἶεν· τοῦτο ἐπιστήμην φῶμεν, ἐθισμὸν ψυχῆς πρὸς
ὁτιοῦν τῶν ἀνθρωπίνων ἔργων καὶ ἐπιτηδευμάτων· ἢ
τοῦτο μὲν διατείνει καὶ ἐπὶ τὰ θηρία; καὶ αἴσθησις
γὰρ καὶ πεῖρα οὐκ ἀνθρώπου ἴδιον· ἀλλὰ καὶ τὰ
θηρία αἰσθάνεται, καὶ ἐκμανθάνει τὶ ὑπὸ τῆς πείρας,
ὥστε καὶ τούτοις ὥρα μεταποιεῖσθαι σοφίας. Αἱ γέρανοι
ἐξ Αἰγύπτου ὥρᾳ θέρους ἀνιστάμεναι, οὐκ ἀνεχόμεναι
τὸ θάλπος, τείνασαι τὰς πτέρυγας ὥσπερ ἱστία,
φέρονται διὰ τοῦ ἀέρος εὐθὺ τῆς Σκυθῶν γῆς· ἅτε
δὲ οὐκ ἐν ῥυθμῷ ὂν τὸ ζῷον, ἀλλὰ ἐμβριθὲς μὲν τὰ
μέσα, μακρὸν δὲ κατὰ τὸν αὐχένα, κοῦφον δὲ κατὰ τὸ
οὐραῖον, ἀραιὸν δὲ κατὰ τὰς πτέρυγας, ἐσχισμένον δὲ
κατὰ τὰ κῶλα, κλυδάζεται τὴν πτῆσιν, ὥσπερ ναῦς
χειμαζομένη. Τοῦτο γνοῦσα ἡ γέρανος, ἢ αἰσθανομένη
ἢ πειραθεῖσα, οὐ πρότερον ἀνίπταται, πρὶν ξυλλάβῃ
λίθον τῷ στόματι ἕρμα εἶναι αὐτῇ πρὸς τὴν πτῆσιν.
Ἔλαφοι ἐκ Σικελίας ἐπὶ Ῥηγίου περαιοῦνται,
νηχόμεναι ὥρα θέρους ἐπιθυμίᾳ καρπῶν· ἅτε δὲ ἐν
μακρῷ πλῷ, ἐξασθενεῖ ἡ ἔλαφος ἀνέχουσα τὴν κορυφὴν
ὑπὲρ τοῦ ὕδατος· κουφίζονται δὴ τὸν κάματον
ὧδέ πως· νήχονται ἐπὶ μιᾶς τεταγμέναι, ἀλλήλαις ἑπόμεναι,
ὥσπερ στρατόπεδον ἐπικέρως βαδίζον· νήχονται
δὲ ἐπιθεῖσα ἑκάστη τὴν κορυφὴν τῇ τῆς ἡγουμένης
ἰξύϊ· ἡ δὲ στρατηγοῦσα τῆς τάξεως, ἐπειδὰν κάμῃ, ἐπὶ
οὐραῖον μεθίσταται, καὶ ἡγεῖται ἄλλη, καὶ οὐραγεῖ ἄλλη·
ὡς ἐν τοῖς στρατοπέδοις Ξενοφῶν μὲν οὐραγεῖ,
ἡγεῖται δὲ Χειρίσοφος· ὥστε καὶ στρατηγίας τακτικῆς
μεταποιεῖται ταυτὶ τὰ θηρία.
| [6,3] III. À la bonne heure, appelons Science l'habitude de l'âme appliquée aux
ouvrages, aux opérations quelconques de l'homme. Mais cette science, s'étend-elle
jusqu'aux brutes? Sans doute, car le sens interne et l'expérience ne sont pas
exclusivement propres à l'homme. Les brutes reçoivent dès sensations, apprennent
certaines choses par l'expérience, de manière qu'il est une sorte de sagesse qu'elles
ont soin d'acquérir. En été, les grues quittent l'Égypte dont elles ne peuvent
supporter les chaleurs. Elles étendent leurs ailes comme des voiles, et les vents les
portent tout droit dans la Scythie. La structure de ces animaux n'est point d'ailleurs
régulière. Ils ont le milieu du corps lourd ; le col long ; le côté de la queue léger ; la
partie, où les ailes sont attachées, grêle; les jambes écarquillées. Dans leur vol, ils
sont ballottés, comme l'est un vaisseau par les vagues. Instruite de cet inconvénient, la
grue ne s'envole point qu'elle n'ait pris dans, son bec une pierre, qui lui sert comme de
lest, au milieu des airs ; soit qu'elle ait imaginé cet expédient d'elle-même, soit qu'elle
le doive à l'expérience. Les biches de la Sicile traversent, en été, la mer, à la nage,
pour aller pâturer dans la campagne de Reggio. Ce long trajet épuise la force des
biches, qui sont forcées de tenir la tête toujours au-dessus de l'eau. Voici le moyen à
l'aide duquel elles s'épargnent cette fatigue. Elles nagent, rangées sur une seule ligne,
l'une à la queue de l'autre, comme une armée qui marche en colonne. Elles nagent,
ayant chacune leur tête appuyée sur le flanc de celle qui la précède. Celle qui fait le
chef de file, lorsqu'elle est fatiguée, se détache pour se placer la dernière ; et c'est
ainsi qu'alternativement elles passent de la tête à la queue. C'est ainsi que, dans son
expédition, Xénophon commandait l'arrière-garde, et Chirisophe l'avant-garde; de
manière que les brutes ont des notions de la tactique militaire.
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