[6,2] Ἆρα πᾶν ὅπερ ἡ αἴσθησις ἀθροίσασα τῇ κατὰ
βραχὺ θεωρίᾳ, ἐμπειρίαν τοῦτο ὀνομάζουσα, προσαγάγῃ
τῇ ψυχῇ, καὶ μετὰ τοῦτο ἐπισφραγίσηται ὁ
λογισμὸς τῇ ἐμπειρίᾳ, τοῦτο φῶμεν ἐπιστήμην εἶναι;
οἷον τὸ τοιόνδε λέγω. Οἱ πρῶτοι ἄνθρωποι οὔπω
ναῦν εἰδότες, ἐρῶντες ἐπιμιξίας, ἀγόμενοι μὲν ὑπὸ τῆς
χρείας, εἰργόμενοι δὲ ὑπὸ τῆς θαλάττης, εἶδον ὄρνιν
ἐξ ἀέρος καταπτάντα νηχόμενον, εἶδον δὲ καὶ φόρτον
φερόμενον κούφως ὑπὲρ τοῦ κύματος, ἤδη δέ που καὶ
δένδρον ἀπενεχθὲν ἐκ ποταμοῦ εἰς κλύδωνα· καὶ τάχα
μέν τις καὶ ἄκων κατενεχθείς, κινῶν τὰ ἄρθρα, ἐξενήξατο,
τάχα δὲ καὶ ἑκὼν ἐν παιδιᾶς μέρει· ἀθροίσασα
δὲ ἡ πεῖρα τὴν ἔννοιαν τοῦ πλοῦ σχεδίαν τινὰ φαύλην
τὸ πρῶτον ἐξειργάσατο, ὕλην κούφην ξυνδεόντων, αὐτοσχέδιον
ναῦν· κατὰ βραχὺ δὲ προϊοῦσα ἡ αἴσθησις
ὁμοῦ τῷ λογισμῷ ἐσοφίσατο καὶ ἐξεῦρεν ὄχημα κοῖλον,
ἐρεσσόμενόν τε, καὶ ἐξ ἱστίων πλέον, καὶ ὑπὸ ἀνέμων
φερόμενον καὶ ὑπὸ οἰάκων εὐθυνόμενον, καὶ ἐπέτρεψεν
αὐτοῦ τὴν σωτηρίαν ἐπιστήμῃ μιᾷ τῇ κυβερνητικῇ.
Φασὶν δὲ καὶ ἰατρικὴν εὑρῆσθαι τὸ ἀρχαῖον ὡδί· κομίζοντες
οἱ οἰκεῖοι τὸν κάμνοντα εἰς τῶν ἀγυιῶν τὴν
ἐντριβῆ, κατετίθεντο· ἐφιστάμενοι δὲ οἱ ἄνθρωποι, καὶ
ἀνερωτῶντες τὸ ἄλγος ὅτῳ τὸ αὐτὸ ξυμπεσόν, ἔπειτα
ὤνατο ἢ ἐδωδῇ τινι, ἢ καύσας, ἢ τεμών, ἢ διψήσας,
παρετίθεντο ἕκαστοι ταῦτα τῷ κάμνοντι οἱ πεπονθότες
πρότερον καὶ ὠφελημένοι· ἡ δὲ ὁμοιότης τοῦ
πάθους συναθροίσασα τὴν τοῦ ὠφελήσαντος μνήμην
τῇ κατ´ ὀλίγον ἐντεύξει ἐπιστήμην ἐποίησεν τὸ πᾶν.
Οὕτω καὶ τεκτονικὴ συνέστη, καὶ χαλκευτική, καὶ ὑφαντική,
καὶ γραφική, ὑπὸ τῆς πείρας ἑκάστη χειραγωγουμένη.
| [6,2] II. Ce que les sens rassemblent dans un cadre étroit de contemplation, (à quoi l'on
donne le nom d'expérience), ce qu'ils soumettent aux yeux de l'âme, et sur quoi la
raison applique son cachet, après l'avoir examiné, appellerons-nous cela Science?
Comme lorsque je dis : les premiers hommes ne savaient point encore ce que c'était
qu'un vaisseau. Ils désiraient communiquer ensemble. Le besoin les y portait, mais la
mer y mettait obstacle. Ils virent un oiseau descendre des airs et nager. Ils virent
quelque chose de pesant, d'ailleurs, flotter légèrement sur les ondes. Peut-être virent-ils
quelque part un arbre porté par un fleuve dans la mer. Peut-être quelqu'un d'entre
eux tomba-t-il dans l'eau sans le vouloir, et en remuant ses membres parvint-il à
surnager et à se sauver; peut-être même s'exerça-t-il à la nage par amusement. Quoi
qu'il en soit, l'expérience recueillit la première pensée de la navigation, et construisit
d'abord une méchante barque des premiers, des plus légers matériaux, qui lui
tombèrent sous la main. Cet aperçu ne tarda pas à être perfectionné par les
combinaisons du raisonnement ; et l'on eut bientôt une espèce de char creux que des
rames firent mouvoir, que des voiles et les vents poussèrent, qu'un gouvernail dirigea,
et auquel on s'abandonna uniquement sur la foi de la science acquise dans cet art-là.
Voici comme on raconte que la médecine a été jadis inventée. Les parents d'un
malade allaient le déposer dans un des passages les plus fréquentés, les passants
s'approchaient, faisaient des questions sur la maladie, et selon qu'ils avaient été
atteints du même mal, et qu'ils avaient été guéris, ou en avalant quelque chose, ou en
se cautérisant, ou en faisant une amputation, ou en se mettant à la diète, chacun de
ceux qui avaient été malades, indiquait le remède qui lui avait rendu la santé. L'identité
des maladies fixa dans la mémoire l'identité des médicaments qui les avaient guéries;
et une courte habitude de l'ensemble de ce résultat fut la mère de la science. C'est
ainsi que les autres arts, celui du charron, celui de l'armurier, celui du tisserand, celui
du peintre, naquirent de l'expérience.
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