[5,5] Τί δὲ τῶν κατὰ τὴν εἱμαρμένην; ἢ κἀνταῦθα ἡ
εὐχὴ γελοιότατον· θᾶττον γὰρ ἄν τις βασιλέα ἔπεισεν,
ἢ τύραννον· τυραννικὸν δὲ ἡ εἱμαρμένη, καὶ ἀδέσποτον,
καὶ ἀμετάστρεπτον· ἣ, καθάπερ ψάλιον ἐμβάλλουσα
ταῖς τῶν ἀνθρώπων ἀγέλαις, βίᾳ σπᾷ καὶ προσαναγκάζει
συναπονεύειν ταῖς αὐτῆς ἀγωγαῖς· ὡς Συρακοσίους
Διονύσιος, ὡς Πεισίστρατος Ἀθηναίους, καὶ
Περίανδρος Κορινθίους, καὶ Θρασύβουλος Μιλησίους.
Ἐν μὲν γὰρ δημοκρατίᾳ δύναταί τι καὶ πειθώ, καὶ
εὐχή, καὶ θεραπεία, καὶ λιταί· ἐν δὲ τυραννίδι ἡ βία
κρατεῖ· ὡς ἐν πολέμῳ Ὅμηρος,
ζώγρει Ἀτρέος ὑιέ, σὺ δ´ ἄξια δέξαι ἄποινα.
Τίνα τοίνυν ἄποινα δόντες τῇ εἱμαρμένῃ ἐκλυσόμεθα
ἑαυτοὺς τῆς ἀνάγκης καὶ τοῦ δεσμοῦ; τίνα χρυσόν;
τίνα θεραπείαν; τίνα θυσίαν; τίνα εὐχήν; Ἀλλ´ οὐδὲ
ὁ Ζεὺς αὐτὸς εὕρατο παρ´ ἐκείνης ἀποτροπήν, ἀλλ´ ὀδύρεται·
ὤμοι ἐγών, ὅτε μοι Σαρπηδόνα φίλτατον ἀνδρῶν
μοῖρ´ ὑπὸ Πατρόκλοιο Μενοιτιάδαο δαμῆναι.
Τίνι θεῶν εὔχεται ὁ Ζεὺς ὑπὲρ τοῦ παιδός; Καὶ ἡ
Θέτις βοᾷ,
ὤμοι ἐγὼ δειλή· ὤμοι δυσαριστοτόκεια.
Τοιοῦτο χρῆμα ἡ εἱμαρμένη Ἄτροπος, καὶ ἡ Κλωθώ,
καὶ ἡ Λάχεσις, ἄτρεπτον, καὶ ἐπικεκλωσμένον, καὶ
διειληχὸς τοὺς ἀνθρωπίνους βίους. Πῶς ἂν οὖν τις
εὔξαιτο ἀπαραιτήτῳ εἱμαρμένῃ;
| [5,5] V. Que dirons-nous des choses qui dépendent du sort ? Faire des vœux à cet
égard, serait la chose du monde la plus ridicule. On obtiendrait plutôt ce qu'on
demanderait à un roi, ou à un tyran. Le sort est une puissance tyrannique, qui n'est
subordonnée à aucune autre, et dont les décrets sont immuables. C'est comme s'il
attachait la bride et le frein à l'espèce humaine, s'il l'entraînait avec violence, s'il la
forçait de suivre, de toute nécessité, le chemin qu'il voudrait lui faire prendre. C'est
Denis qui commande, à Syracuse. C'est Pisistrate qui commande à Athènes. C'est
Périandre qui commande à. Corinthe. C'est Trasibule qui commande à Milet. Car chez
les peuples où le gouvernement est démocratique, les discours éloquents, les prières,
l'intrigue, les supplications, peuvent quelque chose. Mais chez les tyrans, c'est
comme à la guerre, le pouvoir n'appartient qu'à la force. « Prenez-moi vivant, fils
d'Atride, et recevez le juste prix de ma rançon». Mais, quelle rançon donnerons-nous
au sort pour nous soustraire au joug de la nécessité, pour échapper à ses
chaînes ? Quelle somme en or lui offrirons-nous ? Par quels bons offices nous
concilierons-nous sa bienveillance ? Quelles oblations lui présenterons-nous ? Quels
vœux lui adresserons-nous ? Mais Jupiter lui-même est sans moyens pour faire
révoquer ses décrets. Il pousse des cris de douleur : « Malheureux que je suis »,
s'écrie-t-il, « que le Destin ait réglé que Sarpédon, celui des mortels qui m'est le plus
cher, périrait de la main de Patrocle fils de Menétidès ! » Lequel des Dieux Jupiter
implore-t-il pour son fils ? Thétis aussi s'écrie, « Que je suis malheureuse, d'avoir mis
un héros au monde, et de le voir périr ainsi ! » Tel est le sort. Telles sont Atropos,
Clotho, Lachésis, à qui l'empire de la vie des hommes est échu. Elles sont inflexibles,
inexorables. Qui donc leur adressera des vœux ?
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