[1,5] Τί δήποτ´ οὖν τὸ τούτου αἴτιον; Ὅτι τὰς μὲν τῶν
σωμάτων τέχνας καὶ τὰς ἐπὶ ταύταις ταλαιπωρίας οὐ
πᾶσα ἀνέχεται σαρκῶν φύσις, οὐδέ ἐστιν τὸ χρῆμα κομιδῇ
ἑκούσιον, ἀλλὰ αὐτοφυὲς καὶ αὐτόματον καὶ εἰς
ὀλίγους ἐκ πολλῶν ἧκον· ἢ γὰρ κατὰ μέγεθος φῦναι δεῖ
Τιτόλμῳ ὅμοιον, ἢ κατὰ καρτερίαν Μίλωνι, ἢ κατὰ
ῥώμην Πουλυδάμαντι, ἢ κατὰ τάχος Λασθένει. Εἰ δέ
τις ἀσθενέστερος μὲν ὢν τοῦ Ἐπειοῦ, αἰσχίων δὲ τοῦ
Θερσίτου, μικρότερος δὲ τοῦ Τυδέως, βραδύτερος δὲ
τοῦ Αἴαντος καὶ πάσας τὰς τοῦ σώματος ἐλαττώσεις
ἠθροισμένας ἔχων ζηλώσαι τὴν ἀγωνίαν, ἦ ἔρωτα
ἠράσθη κενὸν καὶ ἀτελεύτητον. Τὰ δὲ τῆς ψυχῆς
ἀγωνίσματα ἔμπαλιν ἔχειν τοῖς ἐκεῖ· ὀλίγον γὰρ καὶ
σπάνιον ἐν τῷ τῶν ἀνθρώπων γένει τὸ μὴ πεφυκός·
οὐ γὰρ αὐτοφυεῖς αἱ τῆς ψυχῆς ἀρεταὶ, οὐ γὰρ αὐτόματοι·
ἀλλὰ προεξεργάζεται μέν τι καὶ ἡ φύσις, ὅσον
ὑποβάλλειν κρηπῖδα ὀλίγην μεγάλῳ τειχίῳ, ἢ τρόπιν
μικρὰν ὑψηλῇ ὁλκάδι· συγκατῴκισεν δὲ ὁ θεὸς τοῖς
λογισμοῖς ἔρωτα καὶ ἐλπίδα, τὸν μὲν ὡσπερεὶ πτέρωμά
τι κοῦφον καὶ μετάρσιον, ἐπαῖρον τὲ καὶ ἀνακουφίζον
τὴν ψυχὴν καὶ παρέχον αὐτῇ δρόμον ἐπὶ τὰς
αὐτῆς ὀρέξεις· καλοῦσιν δὲ οἱ φιλόσοφοι τὸ πτέρωμα
τοῦτο ὁρμὴν ἀνθρωπίνην· αἱ δὲ ἐλπίδες συγκατῳκισμέναι
τῇ ψυχῇ παραμύθιον ταῖς ἑκάστου ὁρμαῖς, οὐ
κατὰ τὸν Ἀττικὸν ποιητὴν τυφλαί, ἀλλὰ ὀξυωπεῖς πάνυ,
οὐκ ἐῶσιν αὐτὴν ἀπαγορεῦσαι πονοῦσαν ὡς τευξομένην
πάντως ὧν ἐρᾷ. Πάλαι γὰρ ἂν οὐκ οὔσης ἐλπίδος
καὶ ὁ χρηματιστὴς ἐπαύσατο χρηματιζόμενος,
καὶ ὁ μισθοφόρος στρατευόμενος, καὶ ὁ ἔμπορος πλέων,
καὶ ὁ λῃστὴς ληϊζόμενος, καὶ ὁ ἀκόλαστος μοιχεύων·
ἀλλ´ οὐκ ἐῶσιν αἱ ἐλπίδες προστάττουσαι τούτους
ἀνήνυτα πονεῖν καὶ ἀτελεύτητα, τὸν μὲν χρηματιστὴν
ὡς πλουτήσοντα, τὸν δὲ πολεμοῦντα ὡς νικήσοντα, τὸν
δὲ πλέοντα ὡς σωθησόμενον, τὸν δὲ ληϊζόμενον ὡς
κερδανοῦντα, τὸν δὲ μοιχεύοντα ὡς λησόμενον· κᾆτα
τὶς ἕκαστον ὑπολαβοῦσα αἰφνίδιος συμφορὰ ἐσύλησεν
μὲν τὸν χρηματιστήν, ἀπέκτεινεν δὲ τὸν μισθοφόρον,
κατέδυσεν δὲ τὸν ἔμπορον, ἔλαβεν δὲ τὸν λῃστήν,
ἐφώρασεν δὲ καὶ τὸν μοιχόν· καὶ ἀπολώλασιν αὐτοῖς αἱ
ὀρέξεις αὐταῖς ἐλπίσιν. Οὐδὲν γὰρ τούτων περιέλαβεν
μέτρῳ οὐδὲ ὥρισεν ὁ θεὸς, οὔτε πλοῦτον, οὔτε ἡδονάς,
οὔτε ἄλλό τι τῶν ἀνθρωπίνων δὴ ἐπιθυμημάτων, ἀλλ´
ἔστιν αὐτῶν ἄπειρος ἡ οὐσία· ἔνθέν που καὶ οἱ διώκοντες
ταῦτα ἐμπλησθέντες αὐτῶν διψῶσιν μᾶλλον·
ἔλαττον γὰρ τὸ ληφθὲν τοῦ προσδοκωμένου. Ὁπόταν
δὲ ἄξῃ ψυχὴ ἐπὶ πρᾶγμα ἑστὸς καὶ ὡμολογημένον καὶ
πεπερασμένον καὶ ὡρισμένον, καὶ καλὸν μὲν τῇ φύσει,
ἀνυστὸν δὲ τῷ πόνῳ, ληπτὸν δὲ τῷ λογισμῷ, διωκτὸν
δὲ τῷ ἔρωτι, καταληπτὸν δὲ τῇ ἐλπίδι, τότε γίγνεται
ἡ τῆς ψυχῆς ἀγωνία ἐπιτυχὴς καὶ τελεσιουργὸς
καὶ νικηφόρος· ἔστιν δὲ τοῦτο οὐκ ἄλλό τι, ἢ οὗπερ
εἵνεκα ταυτὶ τὰ θέατρα οἱ φιλοσοφοῦντες ἀθροίζουσιν.
| [1,5] V. Quelle en est donc la cause ? C'est que toutes les complexions physiques ne
sont point susceptibles des dons du corps, ni des violentes épreuves auxquelles ils
donnent lieu. Ce n'est pas d'ailleurs quelque chose d'absolument volontaire. Cela vient
de soi-même. C'est ta nature qui le dispense, et même elle n'en favorise qu'un petit
nombre d'individus. Car il faut être né ou avec l'énorme taille de Titorme, ou avec la
vigueur de Milon, ou avec la force de Polydamas, ou avec la vélocité de Lasthène.
Or, si quelqu'un plus faible qu'Épée, plus hideux que Thersite, plus petit que Tydée,
plus lourd qu'Ajax, et réunissant toutes les autres défectuosités corporelles, avait envie
de se mettre sur les rangs, certes ce serait être animé d'un désir vain et impossible à
satisfaire. C'est tout le contraire des combats de l'âme. Ils sont rares ceux qui
n'apportent point en naissant les qualités nécessaires pour y figurer. Il est petit le
nombre de ceux qui ne peuvent point se rendre vertueux. Car les vertus ne viennent
pas d'elles-mêmes : elles ne sont point innées dans l'âme. A la vérité, la nature y fait
bien quelque chose, mais il en est comme d'un mince fondement sous un large mur,
ou d'une petite quille sous un grand vaisseau. Les Dieux ont associé à nos facultés
intellectuelles l'amour et l'espérance, le premier, semblable à des ailes légères,
propres à s'élancer dans les plus sublimes régions, pour enlever l'âme, pour lui faire
prendre un facile et rapide essor, et lui frayer une route vers l'objet de ses désirs; (les
philosophes appellent cet élan, cet essor chez l'homme, impulsion de l'appétit) : la
seconde, l'espérance, qui n'est point aveugle, suivant la pensée du poète d'Athènes,
mais qui a au contraire des yeux très perçants, les Dieux l'ont attachée à l'âme
pour soutenir son courage, dans la poursuite de ses désirs, pour lui défendre de se
relâcher au milieu de ses efforts, dans la certitude d'obtenir complètement ce qu'elle
désire. Sans l'espérance il y a longtemps que le commerçant aurait cessé le
commerce, que le stipendiaire aurait cessé de porter les armes, que le navigateur
aurait cessé de naviguer, que le brigand aurait cessé de courir après le butin, que
l'impudique aurait cessé de corrompre la femme d'autrui. Mais ils sont dupes de
l'espérance ceux qui n'entreprennent les choses impossibles qu'elle leur commande,
que parce qu'ils comptent, le commerçant qu'il s'enrichira, celui qui porte les armes
qu'il remportera des victoires, celui qui navigue qu'il ne fera point naufrage, le
déprédateur qu'il fera une grande fortune, l'adultère qu'il ne sera point découvert. Un
accident imprévu, un malheur inopiné, surviennent à chacun d'eux et voilà le
commerçant ruiné, le guerrier mort, le navigateur submergé, le déprédateur chargé de
chaînes, l'adultère publiquement signalé, et les désirs de tous anéantis avec leurs
espérances. Car les Dieux n'ont déterminé la mesure, n'ont posé la limite, ni des
richesses, ni de la volupté, ni de nul autre des objets des désirs de l'espèce humaine.
Ces objets ne connaissent point de bornes. D'où il arrive que ceux qui les
poursuivent en sont d'autant plus affamés qu'ils en regorgent davantage. Car ce
qu'ils ont déjà est toujours au-dessous de ce qu'ils attendaient. Au lieu que, lorsque
l'âme tend à un objet qui a de la consistance, dont le mérite n'est point équivoque, qui
est bien défini, bien déterminé, beau de sa nature, dont on peut venir à bout
par le travail, que l'entendement peut saisir, auquel l'amour peut s'attacher, et qui peut
être embrassé par l'espérance ; alors l'âme triomphe dans le combat où elle s'engage ;
elle atteint son but ; elle remporte la victoire. Tel est l'unique motif pour lequel les
philosophes rassemblent des spectateurs autour d'eux.
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