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[10] ἐκείνων παιδεύματα εἶναι. ἐγὼ δὲ—παρὰ τίνος
γὰρ ἂν ἄλλου τἀληθὲς ἢ παρὰ σοῦ μάθοιμι; —
ἡδέως δ´ ἂν καὶ τοῦτο ἐροίμην σε, τίς ἡ Πρόνοια
ὑμῖν αὕτη ἐστί, Μοῖρά τις ἢ καὶ ὑπὲρ ταύτας θεὸς
ὥσπερ, ἄρχουσα καὶ αὐτῶν ἐκείνων;
(ΖΕΥΣ)
Ἤδη σοι καὶ πρότερον ἔφην οὐ θεμιτὸν εἶναι
πάντα σε εἰδέναι. σὺ δ´ ἕν τι ἐν ἀρχῇ ἐρωτήσειν
φήσας οὐ παύῃ τοσαῦτα πρός με λεπτολογούμενος·
καὶ ὁρῶ ὅτι σοι τὸ κεφάλαιόν ἐστι τοῦ
λόγου ἐπιδεῖξαι οὐδενὸς ἡμᾶς προνοοῦντας τῶν
ἀνθρωπίνων.
(ΚΥΝΙΣΚΟΣ)
Οὐκ ἐμὸν τοῦτο, ἀλλὰ σὺ μικρὸν ἔμπροσθεν
ἔφησθα τὰς Μοίρας εἶναι τὰς ἅπαντα ἐπιτελούσας·
εἰ μὴ μεταμέλει σοι ἐκείνων καὶ ἀνατίθεσαι
αὖθις τὰ εἰρημένα καὶ ἀμφισβητεῖτε τῆς
ἐπιμελείας παρωσάμενοι τὴν Εἱμαρμένην;
| [10] Pour ma part (car de quel autre que de toi-même puis-je apprendre
la vérité ?) je te ferai volontiers encore cette question : qu'est-ce que
votre Providence ? Est-ce une Parque, ou bien une divinité supérieure,
qui ait sur elles quelque autorité ?
JUPITER. Je t’ai déjà dit, Cyniscus, qu'il ne t'est pas permis de tout
savoir. Dans le principe, tu prétendais n'avoir qu'une chose à me
demander, et tu ne cesses de me poursuivre d'une foule d'arguties. Je
vois que le but principal de ton entretien est de prouver que notre
providence ne règle pas les affaires humaines.
CYNlSCUS. Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est toi qui as avoué tout à
l'heure que les Parques sont les souverains arbitres de l'univers, à moins
que tu ne te repentes de cet aveu, et que tu ne veuilles te rétracter ; ou
peut-être vous disputez-vous ce soin, et cherchez-vous à en écarter la Destinée.
| [11] (ΖΕΥΣ)
Οὐδαμῶς, ἀλλ´ ἡ Μοῖρα δι´ ἡμῶν ἕκαστα ἐπιτελεῖ.
(ΚΥΝΙΣΚΟΣ)
Μανθάνω· ὑπηρέται καὶ διάκονοί τινες τῶν
Μοιρῶν εἶναί φατε. πλὴν ἀλλὰ καὶ οὕτως ἐκεῖναι
ἂν εἶεν αἱ προνοοῦσαι, ὑμεῖς δὲ ὥσπερ σκεύη τινὰ
καὶ ἐργαλεῖά ἐστε αὐτῶν.
(ΖΕΥΣ) Πῶς λέγεις;
(ΚΥΝΙΣΚΟΣ)
Ὥσπερ, οἶμαι, καὶ τὸ σκέπαρνον τῷ τέκτονι
καὶ τὸ τρύπανον συνεργεῖ μέν τι πρὸς τὴν τέχνην,
οὐδεὶς δ´ ἂν εἴποι ὡς ταῦτα ὁ τεχνίτης ἐστίν, οὐδ´
ἡ ναῦς ἔργον τοῦ σκεπάρνου ἢ τοῦ τρυπάνου,
ἀλλὰ τοῦ ναυπηγοῦ· ἀνάλογον τοίνυν ἡ μὲν
ναυπηγουμένη ἕκαστα ἡ Εἱμαρμένη ἐστίν, ὑμεῖς
δέ, εἴπερ ἄρα, τρύπανα καὶ σκέπαρνά ἐστε τῶν
Μοιρῶν· καί, ὡς ἔοικεν, οἱ ἄνθρωποι δέον τῇ
Εἱμαρμένῃ θύειν καὶ παρ´ ἐκείνης αἰτεῖν τἀγαθά,
οἱ δ´ ἐφ´ ὑμᾶς ἴασι προσόδοις καὶ θυσίαις γεραίροντες·
ἢ οὐδὲ τὴν Εἱμαρμένην τιμῶντες εἰς δέον
ἂν αὐτὸ ἔπραττον· οὐ γὰρ οἶμαι δυνατὸν εἶναι
οὐδὲ αὐταῖς ἔτι ταῖς Μοίραις ἀλλάξαι τι καὶ
μετατρέψαι τῶν ἐξ ἀρχῆς δοξάντων περὶ ἑκάστου·
ἡ γοῦν Ἄτροπος οὐκ ἀνάσχοιτ´ ἄν, εἴ τις εἰς τὸ
ἐναντίον στρέψειε τὸν ἄτρακτον ἀναλύων τῆς
Κλωθοῦς τὸ ἔργον.
| [11] JUPITER. Pas du tout. Seulement, c'est par nous que la Parque
accomplit ses décrets.
CYNlSCUS. J'entends. Vous êtes les serviteurs et les ministres des
Parques, vous l'avouez. Mais alors ce seraient elles qui exerceraient la
providence : vous ne seriez que leurs instruments et leurs outils.
JUPITER. Que dis-tu ?
CYNlSCUS. Le voici : de même que la hache et la tarière servent au
charpentier, mais ne doivent pas être confondues avec cet artisan, et
qu'un navire n'est pas l'œuvre de la hache et de la tarière, mais celle du
charpentier, ainsi le grand charpentier de l'univers c'est la Destinée, et
vous, vous n'êtes que les tarières et les haches des Parques. Il me
semble, d'après cela, que les hommes doivent offrir leurs sacrifices à la
Destinée et lui demander les biens, tandis qu'ils s'adressent à vous et
vous honorent par des processions et des victimes. Et cependant ils
honoreraient la Destinée, qu'ils ne seraient pas encore tenus de le faire,
puisqu'il est impossible, je crois, aux Parques mêmes de changer ou de
modifier en rien ce qu'elles ont ordonné de chacun, dès l'origine. Par
exemple, Atropos ne souffrirait pas que l'on voulût tourner son fuseau en
sens inverse, et détruire l'ouvrage de Clotho.
| [12] (ΖΕΥΣ)
Σὺ δ´ ἤδη, ὦ Κυνίσκε, οὐδὲ τὰς Μοίρας τιμᾶσθαι
πρὸς τῶν ἀνθρώπων ἀξιοῖς; ἀλλ´ ἔοικας
ἅπαντα συγχεῖν προαιρεῖσθαι. ἡμεῖς δὲ εἰ καὶ
μηδενὸς ἄλλου ἕνεκα, τοῦ γε μαντεύεσθαι καὶ
προμηνύειν ἕκαστα τῶν ὑπὸ τῆς Μοίρας κεκυρωμένων
δικαίως τιμῴμεθ´ ἄν.
(ΚΥΝΙΣΚΟΣ)
Τὸ μὲν ὅλον, ἄχρηστον, ὦ Ζεῦ, προειδέναι τὰ
μέλλοντα οἷς γε τὸ φυλάξασθαι αὐτὰ παντελῶς
ἀδύνατον· εἰ μὴ ἄρα τοῦτο φής, ὡς ὁ προμαθὼν
ὅτι ὑπ´ αἰχμῆς σιδηρᾶς τεθνήξεται δύναιτ´ ἂν
ἐκφυγεῖν τὸν θάνατον καθείρξας ἑαυτόν; ἀλλ´
ἀδύνατον· ἐξάξει γὰρ αὐτὸν ἡ Μοῖρα κυνηγετήσοντα
καὶ παραδώσει τῇ αἰχμῇ· καὶ ὁ Ἄδραστος
ἐπὶ τὸν σῦν ἀφεὶς τὴν λόγχην ἐκείνου μὲν ἁμαρτήσεται,
φονεύσει δὲ τὸν Κροίσου παῖδα, ὡς ἂν ἀπ´
ἰσχυρᾶς ἐμβολῆς τῶν Μοιρῶν φερομένου τοῦ
| [12] JUPITER. Tu prétends donc, Cyniscus, que les Parques n'ont aucun
droit aux honneurs des hommes, et tu as l'air de brouiller tout dans une
confusion générale. Mais nous n'aurions pas d'autres titres à ces
honneurs, qu'il nous resterait encore celui de prédire l'avenir et de
révéler tout ce qui a été décidé par les Parques.
CYNlSCUS. En somme, Jupiter, il est inutile de prévoir ce qui doit être,
quand il est impossible de l'éviter, à moins que tu ne veuilles dire par là
que celui qui sait d'avance qu'il mourra par le fer d'une lance peut se
soustraire à la mort, en s'enfermant dans une prison. Mais cela même est
impossible. La Destinée l'en fera sortir pour aller à la chasse et le livrera
au fer meurtrier. Adraste, en lançant son javelot contre un sanglier,
manquera l'animal, et tuera le fils de Crésus; car l'arrêt inévitable des
Parques dirige le fer contre le jeune homme.
| [13] ἀκοντίου ἐπὶ τὸν νεανίσκον. τὸ μὲν γὰρ τοῦ
Λαΐου καὶ γελοῖον, τό·
μὴ σπεῖρε τέκνων ἄλοκα δαιμόνων βίᾳ·
εἰ γὰρ τεκνώσεις (φησὶ) παῖδ´, ἀποκτενεῖ ς´ ὁ φύς.
περιττὴ γάρ, οἶμαι, ἡ παραίνεσις πρὸς τὰ πάντως
οὕτω γενησόμενα. τοιγάρτοι μετὰ τὸν χρησμὸν
καὶ ἔσπειρεν καὶ ὁ φὺς ἀπέκτεινεν αὐτόν. ὥστε
οὐχ ὁρῶ ἀνθ´ ὅτου ἀπαιτεῖτε τὸν μισθὸν ἐπὶ τῇ
μαντικῇ.
| [13] Et cet oracle donné à Laius n'est-il pas bien risible :
"Garde-toi d'engendrer, malgré l'ordre des dieux ;
Tes jours seraient tranchés par un fils odieux".
Ce n'était pas la peine, je pense, de donner cet avis, puisque l'événement
devait, de toute nécessité, s'accomplir, En effet, malgré cet oracle, il
engendra, et son fils le tua. Je ne vois donc pas à quel titre vous
réclamez le salaire de vos prédictions.
| [14] ἐῶ γὰρ λέγειν ὡς λοξὰ καὶ ἐπαμφοτερίζοντα
τοῖς πολλοῖς χρᾶν εἰώθατε, οὐ πάνυ ἀποσαφοῦντες
εἰ ὁ τὸν Ἅλυν διαβὰς τὴν αὑτοῦ ἀρχὴν
καταλύσει ἢ τὴν τοῦ Κύρου· ἄμφω γὰρ δύναται
ὁ χρησμός.
(ΖΕΥΣ)
Ἦν τις, ὦ Κυνίσκε, τῷ Ἀπόλλωνι ὀργῆς αἰτία
κατὰ τοῦ Κροίσου, διότι ἐπειρᾶτο ἐκεῖνος αὐτοῦ
ἄρνεια κρέα καὶ χελώνην ἐς τὸ αὐτὸ ἕψων.
(ΚΥΝΙΣΚΟΣ)
Ἐχρῆν μὲν μηδὲ ὀργίζεσθαι θεὸν ὄντα· πλὴν
ἀλλὰ καὶ τὸ ἐξαπατηθῆναι τῷ Λυδῷ ἐπέπρωτο,
οἶμαι, καὶ ὅλως τὸ μὴ σαφῶς ἀκοῦσαι τὰ μέλλοντα
ἡ Εἱμαρμένη ἐπέκλωσεν· ὥστε καὶ ἡ
μαντικὴ ὑμῶν ἐκείνης μέρος ἐστίν.
| [14] Je pourrais ajouter que vous avez l'habitude de faire au vulgaire des
réponses ambiguës, qu'ainsi vous n'expliquez pas nettement si celui qui
passera l'Halys détruira son propre empire ou celui de Cyrus.
L'oracle a ces deux sens.
JUPITER. Apollon, Cyniscus, avait un motif d'être en colère contre le roi
de Lydie, qui l'avait éprouvé en faisant cuire dans un même vase de la
chair de mouton et de tortue.
CYNlSCUS. Un dieu ne devait pas se fâcher. Je crois plutôt qu'il était écrit
que le Lydien serait trompé par un oracle, et qu'en outre la Destinée lui
avait filé la chance de n'en pas comprendre le sens : d'où je conclus que
votre divination appartient encore à la Destinée.
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