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[40] ὁ δὲ Ἀμιζώκης
ἀγόμενος—ἑαλώκει γάρ—ἐβόα τὸν φίλον ὀνομαστί,
κακῶς δεδεμένος, καὶ ὑπεμίμνησκεν τῆς κύλικος
καὶ τοῦ αἵματος. ὧν ἀκούσας ὁ Δάνδαμις οὐδὲν
ἔτι μελλήσας ἁπάντων ὁρώντων διανήχεται εἰς
τοὺς πολεμίους· καὶ οἱ μὲν Σαυρομάται διηρμένοι
τοὺς ἄκοντας ὥρμησαν ἐπ´ αὐτὸν ὡς κατακεντήσοντες,
ὁ δὲ ἐβόα τὸ "Ζίριν." τοῦτο δὲ ἤν
τις εἴπῃ, οὐκέτι φονεύεται ὑπ´ αὐτῶν, ἀλλὰ
δέχονται αὐτὸν ὡς ἐπὶ λύτροις ἥκοντα.
Καὶ δὴ ἀναχθεὶς πρὸς τὸν ἄρχοντα αὐτῶν
ἀπῄτει τὸν φίλον, ὁ δὲ λύτρα ᾔτει· μὴ γὰρ προήσεσθαι,
εἰ μὴ μεγάλα ὑπὲρ αὐτοῦ λάβοι. ὁ
Δάνδαμις δέ, "Ἃ μὲν εἶχον," φησίν, "ἅπαντα
διήρπασται ὑφ´ ὑμῶν, εἰ δέ τι δύναμαι γυμνὸς
ὑποτελέσαι, ἕτοιμος ὑποστῆναι ὑμῖν, καὶ πρόσταττε
ὅ τι ἂν θέλῃς. εἰ βούλει δέ, ἐμὲ ἀντὶ
τούτου λαβὼν κατάχρησαι πρὸς ὅ τι σοι φίλον."
ὁ δὲ Σαυρομάτης, "Οὐδέν," ἔφη, "δεῖ ὅλον
κατέχεσθαί σε, καὶ ταῦτα Ζίριν ἥκοντα, σὺ δὲ
ὧν ἔχεις μέρος καταβαλὼν ἄγου τὸν φίλον."
ἤρετο ὁ Δάνδαμις ὅ τι καὶ βούλεται λαβεῖν·
ὁ δὲ τοὺς ὀφθαλμοὺς ᾔτησεν. ὁ δὲ αὐτίκα παρέσχεν
ἐκκόπτειν αὐτούς· κἀπειδὴ ἐξεκέκοπτο καὶ
ἤδη τὰ λύτρα εἶχον οἱ Σαυρομάται, παραλαβὼν
τὸν Ἀμιζώκην ἐπανῄει ἐπερειδόμενος αὐτῷ, καὶ
ἅμα διανηξάμενοι ἀπεσώθησαν πρὸς ἡμᾶς.
| [40] Amizoque, entraîné captif par des ennemis qui le maltraitent, appelle son
ami par son nom et lui rappelle le souvenir du sang. Dandamis, en
l'entendant, ne perd pas une minute ; sous les yeux de tous, il gagne à la
nage le bord où sont les ennemis : les Sauromates, levant leurs armes,
fondent sur lui pour le percer. Il s'écrie alors : "Ziris" !" Celui qui prononce ce
mot a la vie sauve, on le reçoit comme venant traiter d'une rançon.
Dandamis, amené devant le chef des Sauromates, lui demande la liberté de
son ami. L'autre réclame une rançon, et dit qu'il ne rendra pas Amizoque, s'il
ne reçoit une somme considérable. Alors Dandamis : "Vous avez pillé, dit-il,
tout ce que je possédais ; mais si, tout dépouillé que je suis, je puis encore
vous payer quelque chose, je suis prêt à vous obéir. Commande ce qu'il te
plaira ; si tu veux, prends-moi à la place de celui-ci, et traite-moi comme bon
te semblera. - Non, lui dit le Sauromate, je ne te veux pas garder tout entier,
puisque tu es venu en criant : "Ziris !" Laisse-nous donc une partie de ce que
tu as, et emmène ton ami. - Que veux-tu ? reprit Dandamis." L'autre lui
demande les yeux ; il les donne aussitôt à crever : on les lui crève. Les
Sauromates, maîtres de la rançon, lui rendent Amizoque, sur lequel il
s'appuie pour revenir ; ils traversent ensemble le fleuve, et nous arrivent
tous deux sains et saufs.
| [41] Τοῦτο γενόμενον παρεμυθήσατο ἅπαντας Σκύθας
καὶ οὐκέτι ἡττᾶσθαι ἐνόμιζον, ὁρῶντες ὅτι τὸ
μέγιστον ἡμῖν τῶν ἀγαθῶν οὐκ ἀπήγαγον οἱ
πολέμιοι, ἀλλ´ ἔτι ἦν παρ´ ἡμῖν ἡ ἀγαθὴ γνώμη
καὶ ἡ πρὸς τοὺς φίλους πίστις. καὶ τοὺς Σαυρομάτας
δὲ τὸ αὐτὸ οὐ μετρίως ἐφόβησε, λογιζομένους
πρὸς οἵους ἄνδρας ἐκ παρασκευῆς μαχοῦνται,
εἰ καὶ ἐν τῷ ἀπροσδοκήτῳ τότε ὑπερέσχον·
ὥστε νυκτὸς ἐπιγενομένης ἀπολιπόντες τὰ πλεῖστα
τῶν βοσκημάτων καὶ τὰς ἁμάξας ἐμπρήσαντες
ᾤχοντο φεύγοντες. ὁ μέντοι Ἀμιζώκης οὐκέτι
ἠνέσχετο βλέπειν αὐτὸς ἐπὶ τυφλῷ τῷ Δανδάμιδι,
ἀλλὰ τυφλώσας καὶ αὐτὸς ἑαυτὸν ἀμφότεροι
κάθηνται ὑπὸ τοῦ κοινοῦ τῶν Σκυθῶν δημοσίᾳ
μετὰ πάσης τιμῆς τρεφόμενοι.
| [41] Ce trait ranime les Scythes : ils ne se croient pas tout à fait vaincus, en
voyant que les ennemis n'ont pas enlevé le plus grand des biens, puisqu'il
nous reste de si nobles sentiments, une fidélité constante dans l'amitié. Les
Sauromates, au contraire, sont frappés de terreur ; ils songent à quels
hommes ils auront affaire quand ils seront prêts au combat, puisqu'ils se
montrent si courageux dans une surprise : aussi, à la nuit tombante, ils
laissent une bonne partie du bétail, mettent le feu aux chariots et prennent
la fuite. Cependant Amizoque ne peut supporter de voir clair, lorsque
Dandamis est aveugle : il s'aveugle volontairement, et tous les deux restent
assis, nourris avec honneur aux dépens de la république des Scythes.
| [42] Τί τοιοῦτον, ὦ Μνήσιππε, ὑμεῖς ἔχοιτε ἂν
εἰπεῖν, εἰ καὶ ἄλλους σοι δέκα δοίη τις ἐπὶ τοῖς
πέντε καταριθμήσασθαι, ἀνωμότους, εἰ βούλει,
ὡς καὶ πολλὰ ἐπιψεύδοιο αὐτοῖς; καίτοι ἐγὼ
μέν σοι γυμνὸν τὸ ἔργον διηγησάμην· εἰ δὲ σύ
τινα τοιοῦτον ἔλεγες, εὖ οἶδα, ὁπόσα ἂν κομψὰ
ἐγκατέμιξας τῷ λόγῳ, οἷα ἱκέτευεν ὁ Δάνδαμις
καὶ ὡς ἐτυφλοῦτο καὶ ἃ εἶπεν καὶ ὡς ἐπανῆκεν
καὶ ὡς ὑπεδέξαντο αὐτὸν ἐπευφημοῦντες οἱ
Σκύθαι καὶ ἄλλα ὁποῖα ὑμεῖς μηχανᾶσθαι εἰώθατε
πρὸς τὴν ἀκρόασιν.
| [42] Quel exemple comparable à celui-là, Mnésippe, auriez-vous à me citer,
quand, au lieu de cinq histoires, on vous en donnerait quinze, et que, dégagé
de ton serment, tu pourrais, à ton gré, y ajouter des détails romanesques ?
Moi, je t'ai rapporté le fait tout nu ; toi, si tu m'en avais raconté un pareil,
combien n'aurais-tu pas, j'en suis sûr, ajouté d'ornements à ta narration !
Quelles supplications touchantes eût employées Dandamis ! que de détails
sur la manière dont il s'est aveuglé, sur ses paroles en cette circonstance,
sur son retour, sur les applaudissements qui l'accueillent chez les Scythes,
et toutes ces machines inventées par vous pour charmer votre auditoire !
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